[PDF] De léducation traditionnelle à lenseignement moderne au Rwanda

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COMPOSITION DU JURY

M. Lucien

BRAUN, Président, Vice-Président de l"Université de Strasbourg II,

M. Louis

BOURGEY, Rapporteur, Chargé de cours à l"U. E. R. de Philosophie, M. D. ZAHAN, Professeur à l"Université de Paris 1 V)

M.

M. TARD Y, Professeur à Strasbourg,

M. 0.

REBOUL, Professeur à Strasbourg, M. René VOELTZEL, Professeur à Strasbourg, Retrouver ce titre sur Numilog.com

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PIERRE J. P. ERNY

DE L"EDUCATION

TRADITIONNELLE

A

L"ENSEIGNEMENT MODERNE

AU RWANDA

( 1900 - 1975 ) UN

PAYS D"AFRIQUE NOIRE EN RECHERCHE PEDAGOGIQUE

TOME 1

THESE PRESENTEE

DEVANT L"UNIVERSITE DE STRASBOURG Il

- LE

3 OCTOBRE 1978 -

SERVICE DE REPRODUCTION

DES THESES

UNIVERSITE DE LILLE

III 1981
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SOMMAIRE

AVANT-PROPOS

PROLEGOMENES

: Regard général, sur l"école en Afrique Noire

EVOLUTION ET

P R 0 B L E M AT ICJU E . D E. L"ENSEIGNEMENT AU RWANDA

Introduction

Chapitre

I : La colline, premier milieu éducatif

Chapitre

II : La colonisation allemande et le projet

scolaire des missions chrétiennes

Chapitre

III : La politique scolaire du colonisateur

belge

Chapitre

IV : La politique scolaire de la République

du

Rwanda

Chapitre

V : Biogrammes d"étudiants (extraits)

Chapitre

VI : Problématique actuelle et perspectives

d"avenir de l"enseignement rwandais

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

INDEX

TABLE DES MATIERES

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INTRODUCTION (1)

Avec ses centaines d"ethnies, de langues et de cul- tures particulières, regroupées en des Etats de formation ré- cente pour la plupart, aux niveaux de développement et aux ré- gimes politiques les plus variés, l"Afrique Noire apparaît comme une terre de contrastes. A côté de centres d"un moder- nisme parfois criard, ou de régions agricoles et minières dont la production a pu s"insérer dans le circuit de la vie

économique mondiale,

s"étendent d"immenses contrées dont le mode de vie et de subsistance est demeuré très largement con- forme aux modèles coutumiers. Le continent souffre profondé- ment de cette discordance. En lui coexistent non seulement des économies, mais aussi des manières de penser, de s"affir- mer et de vivre foncièrement différentes. Un fossé de plus en plus profond se creuse entre la minorité qui a réussi à opérer le saut dans la modernité, et la majorité que tout retient encore en arrière, mais qui ne détient plus ni pouvoir, ni moyens de s"exprimer. "Le désarroi d"un continent ! écrit M. Croce-Spinelli. L"Afrique à cet égard ne déçoit pas. Elle offre à chaque instant le spectacle d"une prodigieuse inadap- tation" (2). (11 Nous nous inspirerons pour cette vue d"ensemble sur les problèmes de l"école en Afrique de nos études précédentes : "Un siècle de pédagogie en Afrique Noire", "Eléments pour une sociologie de l"école d"Afrique

Noire", L"enseignement dans

les pays pauvres, "Adolescents d"Afrique Noire", (2] Les enfants de Poto-Poto, Grasset, 1967, p.34. Retrouver ce titre sur Numilog.com

Tradition et civilisation moderne cohabitent

géographiquement, donnant naissance à de nombreuses formes intermédiaires plus ou moins bien intégrées. Mais elles coha- bitent aussi en l"homme lui-même, car rares sont les Africains d"aujourd"hui qui n"ont pas subi leur double influence. A sa naissance, l"enfant est virtuellement apte à devenir porteur de n"importe quelle culture. C"est à mesure qu"au cours de sa croissance il se laisse imprégner par un milieu donné que ses potentialités passent à l"acte. Parler de culture, c"est né- cessairement se référer à un type d"éducation, d"apprentissa- ge de la vie, de socialisation et finalement de personnalité.

Là où

le champ culturel s"organise en fonction de deux pôles différents, il y a inévitablement dualité d"influences éduca- tives. En Afrique Noire, cette opposition est évidente. Selon les milieux et les circonstances qui ont mar- qué chaque vie, selon les combinaisons du hasard et de la vo- lonté des individus, tradition et modernité se mêlent et s"amalgament en des proportions extrêmement variables. Si l"immense majorité des hommes d"Afrique Noire continue à vivre aujourd"hui dans un contexte où les structures coutu- mières ont gardé le dessus, il en est d"autres en qui deux univers mentaux sont parvenus à s"organiser et à prendre réel- lement consistance, ce qui les amène à jouer avec une égale aisance - ou une égale inhibition - sur deux claviers cultu- rels à la fois. D"autres vont encore plus loin et basculent plus ou moins complètement du côté de la culture d"origine européenne : nés en ville, de parents qui se sont eux-mêmes déjà insérés dans la vie moderne, ils n"ont plus guère d"atta- ches avec le "village" et ce qu"il représente. Ils ignorent parfois tout, ou presque tout, de la vie coutumière, même s"ils croient la connaître.

Sur le

plan éducatif, on peut qualifier très grossiè- rement la situation de dualiste. Sur le plan culturel, cette bipolarité des influences dégénère en une hétérogénéité beau- coup

plus profonde. Au delà d"un certain degré de dégradation, Retrouver ce titre sur Numilog.com

ce qui reste du milieu coutumier n"a plus grand chose de com- mun avec ce qu"était ce milieu autrefois. En deçà d"un cer- tain degré d"implantation, la civilisation moderne n"est pas encore la civilisation moderne. Nous sommes alors dans le domaine des mixtes, des hybrides, de l"hétéroclite parfois et du baroque, et ces diverses situations ont leur dynamique propre ( 1

La confrontation

de ce que la culture traditionnelle apportait à l"homme noir avec l"état dans lequel il se trouve aujourd"hui, est un des thèmes majeurs de la nouvelle litté- rature africaine. Dans son récit d"une "aventure ambiguë", par exemple, Cheikh Hamidou Kane donne libre cours à toutes les inquiétudes qui hantent l"Africain moderne. "Jadis, le monde m"était comme la demeure de mon père : toute chose me portait au plus essentiel d"elle-même, comme si rien ne pou- vait être que par moi. Le monde n"était pas silencieux et neutre. Il vivait. Il était agressif. Il diluait autour de lui. Aucun savant n"a jamais eu de rien la connaissance que j"avais alors de l"être". Les hommes des générations précé- dentes "avaient des richesses que nous perdons chaque jour un peu plus. Ils avaient Dieu. Ils avaient la famille qui n"était qu"un seul être. Ils possédaient intimement le monde.

Tout cela, nous

le perdons petit à petit, dans le désespoir."

Et ceux

des générations présentes ? "Apprenant, ils oublie- ront aussi.

Ce qu"ils apprendront vaut-il ce qu"ils oublie-

ront ? Je voulais vous demander : peut-on apprendre ceci sans oublier cela, et ce qu"on apprend vaut-il ce qu"on oublie ?"

Il appartient évidemment

aux responsables africains, et à eux seuls, de prendre en main les destinées de leur con- tinent et de les infléchir en fonction de leurs options pro- pres. Mais on peut se demander si leurs décisions ne se si- tuent pas finalement à l"intérieur de limites assez étroites, car un même tourbillon n"entraine-t-il pas toutes les civi- lisations de la terre dans une direction identique ? " C h a - (1J Cf.P. ERNY, Sur les sentiers de l"Université. Autobiographies d"étu- diants zaïrois. Retrouver ce titre sur Numilog.com que heure qui passe, écrit encore Cheikh Hamidou K a n e , appor- te un supplément d"ignition au creuset où fusionne le monde.

Nous n"avons pas eu

le même passé, vous et nous, mais nous aurons le même avenir, rigoureusement. L"ère des destinées sin- gulières est révolue. Dans ce sens, la fin du monde est bien arrivée pour chacun de nous, car nul ne peut plus vivre de la seule persévération de soi. Mais de nos longs mûrissements multiples, il va naître un fils au monde. Le premier fils de la terre. L"unique aussi" (1).

En attendant

que prenne forme cette "civilisation de l"universel" vers laquelle semble s"acheminer l"humanité, nous vivons, et nous vivrons longtemps encore, dans l"incer- titude et l"hésitation, un état des choses où l"ancien et le nouveau ne cesseront de se mélanger sans arriver à former une synthèse harmonieuse. En Afrique Noire, la discordance appa- raît plus criante qu"en Occident du fait que la culture tradi- tionnelle y reste bien vivante ; mais partout où des sociétés vivent dans un état de changement accéléré, la situation est analogue dans son essence même. Parmi les influences qui agissent sur l"enfant d"Afrique, il en est que l"on peut décrire d"une manière pré- cise, parce qu"elles s"exercent dans le cadre d"une institu- tion bien définie et strictement réglementée : l"école. De cette dernière, on peut retracer l"histoire et décrire les méthodes. Mais l"école n"est elle-même qu"un élément dans un complexe global d"influences qu"il est infiniment plus malaisé de saisir dans tous ses aspects. Et cependant, on ne peut en comprendre la portée qu"en la resituant dans le courant qui l"a suscitée et qui la porte. Sur l"autre versant, on trouve les influences issues du monde coutumier. Mais si l"on dresse l"inventaire des constantes de l"éducation traditionnelle (2), celui-ci devrait être complété par un autre, infiniment plus (1) CHEIKH HAMIDOU KANE, L"aventure ambiguë, Paris, Julliard, 1961, pp.48,

174, 180, 99.

(2) Cf. P. ERNY, L"enfant et son milieu en Afrique Noire. Essais sur l"é- ducation traditionnelle. Retrouver ce titre sur Numilog.com difficile, plus décevant aussi, afin de répondre aux ques- tions suivantes : Comment se présente dans le concret la per- manence de l"éducation coutumière ? Par quels côtés se dégrade- t-elle plus vite, par quels autres résiste-t-elle plus long- temps ? Mais on ne trouve plus alors, bien souvent, que ruines,

éléments

sortis de leur contexte, épars, dépouillés de leurs fonctions originelles. Et cependant, pour qui veut fonder avec réalisme une vision du futur, la première démarche à entrepren- dre, le seul point de départ possible, est de discerner de quelle manière le présent réunit le passé au futur, donc de reconnaître la réalité humaine telle qu"elle est, pour dégager ensuite les moyens propres à l"épanouir et éventuellement à la transformer. On pourrait rêver d"une science de l"éducation qui

évoluerait

dans un champ clos et n"obéirait qu"à ses propres lois et aux leçons de ses propres expériences. Or il n"en est rien, il ne peut en être ainsi. La pédagogie est faite pour permettre à des êtres humains de vivre mieux dans le présent et le futur d"une société donnée ; elle est immédiatement tri- butaire des coordonnées qui régissent telle situation socio- culturelle particulière. C"est

à la place qu"occupe l"école

dans la manière dont concrètement s"est opérée la rencontre des cultures qu"en tout premier lieu il convient de s"attacher.

La situation scolaire

actuelle au sud du Sahara apparait essentiellement multiforme. Partout les systèmes d"instruction demeurent marqués de l"empreinte léguée par les différents colonisateurs. Les uns avaient transposé la pédago- gie en usage dans les métropoles, les autres cherché à élabo- rer des structures originales afin de pouvoir mieux tenir compte des valeurs culturelles anciennes et des besoins pro- pres à chaque pays. Depuis la constitution de nations indépen- dantes, les responsables africains ont senti l"urgence d"une réorientation profonde en ce domaine, impliquant de nouvelles et parfois douloureuses options, si l"on voulait parvenir à l"émergence de personnalités nationales authentiques. Mais les Retrouver ce titre sur Numilog.com choix à opérer ne sont pas aisés. On constate d"abord une volonté générale de maintenir, voire de resserrer les liens avec des cultures possédant une audience mondiale incontestée, anglaise, française, arabe. Mais une autre vague de fond remet à l"ordre du jour le patrimoine culturel proprement afri- cain, montrant sa richesse, sa valeur humaine et son insertion possible dans un plan d"éducation scolaire. Enfin, la recher- che d"un développement rapide comporte des exigences impérieu- ses dans le domaine de la formation technique.

Théoriquement, il

est certes possible de concevoir une pédagogie qui tienne compte de toutes ces tendances. On peut remettre en honneur les idiomes africains par leur utili- sation dans l"enseignement sans sacrifier l"apprentissage d"une langue d"extension mondiale, et allier harmonieusement une formation générale et technique. Mais dans l"état actuel des choses, il ne peut s"agir là que d"une vision à long terme si l"on envisage une éducation de masse, et non seulement celle d"une petite élite. Un tel projet, immédiatement réalisable au niveau universitaire, dépasse le plus souvent les possibilités présentes quand il s"agit de le traduire dans les faits à l"échelon primaire et même secondaire. Tiraillés entre des exigences et des attirances contraires, les responsables s"en tiennent souvent à un statu quo qui a le mérite d"offrir un cadre et des structures solides, reposant sur une certaine tradition et des habitudes bien ancrées. Mais les problèmes pédagogiques dépassent très large- ment le domaine proprement scolaire. Normalement l"école ne fait que prolonger les influences éducatives du milieu de vie, elle n"en est qu"une émanation, chargée par lui de soumettre l enfant à un entraînement intensif, de le rendre apte à répon- dre aux exigences de la société et de faire accéder au niveau de la conscience des valeurs promues implicitement par la collectivité. Là où s"établit ainsi entre les deux une conti- nuité réelle, l"école peut raisonnablement présupposer tout un Retrouver ce titre sur Numilog.com acquis préalable, la familiarité avec une langue, un mode de penser, des concepts, des règles sociales et morales, des modè- les de conduite, la manipulation d"objets parfois compliqués et délicats, des techniques du corps qui supposent souvent un montage neuronique tellement complexe que tout déconditionne- ment ultérieur en devient difficile. Autrement dit, là où la première éducation et l"école se situent à l"intérieur d"une même culture homogène, la transition de l"une à l"autre équi- vautquotesdbs_dbs6.pdfusesText_12

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