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Les filles dans la Rome antique - pagesperso-orangefr

puissant et vivre dans la haute société romaine L'un des rôle les plus prestigieux pour une femme était de devenir Vestales: des jeunes filles de 6 à 10 ans étaient choisies dans ce but Elles devenaient des personnalités religieuses très importantes et leurs mission les faisaient officier dans un sanctuaire parfois durant 30 ans



Recherches sur la femme romaine à la fin de la République et

de la femme romaine nous est donc offerte d‘une manière biaisée à travers le regard de son contemporain masculin Si nous ne possédons pas énormément de renseignements concrets sur le rôle de la femme tel qu‘il était défini dans la Rome antique, cette dernière occupait toutefois une



Parcours II La femme romaine - Enseignement

La famille traditionnelle romaine est dirigée par le pater familias, qui a tous les droits sur les membres de sa famille Il jouit du sui iuris, tandis que sa femme, ses enfants et ses esclaves sont des alieni iuris personae Aux origines, la parenté est agnatique1 mais la parenté cognatique2 tend à être mieux considérée au fil des siècles



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l'époque romaine (W siècle après l-C ) Notre étude aborde ainsi plusieurs thématiques, notamment l'histoire des femmes dans l'Antiquité, la représentation grecque de l' «autre» (féminin et/ou barbare), l'écriture de l'histoire en Grèce, la construction des genres et des catégories de sexes dans le discours



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brièvement leur rôle dans l’histoire romaine et l’on indiquera qu’ils permettent un raisonnement a fortiori ; le caractère pathétique et ridicule de leur situation devrait facilement apparaître TEXTE 4 Pline le Jeune évoque l’image de Calpurnia, sa troisième et toute jeune femme dans six de ses lettres



Pages : 1/8 - Fait par Manon DENIS, Lara NOEL, Stéphanie RICLOT

A l'époque romaine les femmes étaient soumises aux hommes Pages : 4/8 - Fait par Manon DENIS, Lara NOEL, Stéphanie RICLOT Les occupations de la femme romaine :



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Dès la fin de la République, l’homme et la femme romaine portent une grande attention à leur apparence : le corps né imparfait et inachevé, doit s’éloigner de l’animalité, par l’éducation et l’effort, même si cela revient à souffrir Ce sera un corps lavé, habillé, maîtrisé, raisonnablement nourri, aux

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DROIT ROMAIN - QUESTIONS SPECIALES LA CONDITION JURIDIQUE DE

1 UNIVERSITÉ DE LIÈGE FACULTÉ DE DROIT Année académique 1992 - 1993 Deuxième Candidature en Droit DROIT ROMAIN - QUESTIONS SPECIALES LA CONDITION JURIDIQUE DE LA FEMME DANS L'ANTIQUITÉ ROMAINE Roger VIGNERON (Professeur Ordinaire) Jean-François GERKENS (Assistant) Remarque préliminaire 1. Une description de "La condition juridique de la femme dans l'Antiquité romaine" présente certaines difficultés pour deux raisons essentielles. Il peut d'une part y avoir une grande distorsion entre droit et fait, théorie et pratique en matière de droit des personnes. Cela ne surprendra guère, si on se rappelle que le Code Napoléon, pourtant égalitaire dans ses principes, ne débouchait en réalité aucunement sur une égalité de fait. En sens inverse, une situation juridique inégalitaire peut fort bien être largement compensée dans les faits (Telle était notamment la situation des mineurs de 18 à 21 ans pendant les années '80 en Belgique). D'autre part, certaines distorsions peuvent apparaître en raison de l'idéologie, consciente ou non, du cherche ur qui d écrit la réalité familiale. C 'est ainsi q u'on a pu constater de grandes divergences entre observateurs d'une même réalité1. Le cours privilégiera le point de vue juridique, tout en s'efforçant de le confronter à la réalité sociologique. 1 Voir par exemple sur le sujet : B.M. Commucci Biscardi, Donne di rango e donne di popolo nell'età dei Severi, Firenze 1987, p. 9 ; voir également : I. Savalli - C. Mossé, La condition féminine en Grèce, R.H. 63 (1985), p. 57 ss.

2 Introduction - La préhistoire 2. L'examen de la condition de la femme au cours de la période préhistorique est fort difficile. Beaucoup de théories et de suppositions bien ancrées depuis le siècle dernier sont contredites par l'anthropologie juridique récente. L'anthropologie du XIXème s. considérait les sociétés humaines comme un ensemble cohérent unitaire, soumis à des lois de transformation globales et générales, qui font passer toutes les sociétés par des phases successives et identiques. Plutôt que de parler de sociétés "sauvages", il fallait donc parler de sociétés "primitives", c'est-à-dire se situant à un stade de développement originel par lequel les sociétés dites occidentales sont déjà passées. Ainsi, l'observation des sociétés les plus primitives permettait-elle de connaître la réalité des sociétés évoluées en leur temps préhistorique. Pour la premièr e phase de développement de l'huma nité on parlait de l'homme des cavernes. Ce dernier était décrit comme étant un être belliqueux2 ; la femme était dès lors dans une situation d'infériorité, due à sa faiblesse physique et à ses nombreuses grossesses, qui la rendaient incapable de participer à la guerre. Depuis Bachofen3, on enseigne qu'au stade suivant de l'évolution des sociétés, l'homme étant devenu agriculteur, la femme était souvent revêtue d'un extraordinaire prestige. Ce dernier se serait expliqué par l'importance grandissante de l'enfant dans une société travaill ant la terre. La femme serait alors devenue en quelque sorte le symbole de la fertilité, et la maternité une fonction sacrée. On trouverait des vestiges de ce matriarcat chez Tacite par exemple (Texte 1 - Tac., Germ., 8). De même a -t-on pu voi r un sou venir de cet "â ge d'or d e le femme" dans l'organis ation sociale du peuple Iroquois4. Chez ces amérindiens d'Amérique du Nord vivant en clans matrilinéaires, les femmes possèdent toute l'autorité réelle (sur le pays, les champs et les récoltes). Elles sont arbitres de la paix comme de la guerre, conservent le "Trésor public", et s'occupent des enfants et du mariage de ceux-ci. Les hommes sont isolés, livrés à eux-mêmes, étrangers à leurs enfants. Leur autorité est subordonnée à celle des femmes. Aux conse ils, ils ne font que remplace r les femmes où, par bienséance, elles ne doivent pas aller. Peut-on voir un autre indice de cette période matriarcale dans la mythologie où Hera était mise sur un pied d'égalité avec Zeus? Si Bachofen justifiait le recours fréquent à la mythologie par le fait que celle-ci subit en permanence des modifications presque toujours involontaires, suivant de près les méandres de l'évolut ion du peuple5, il e st quand même préfér able de n'employer qu'avec circonspection les conclusions que l'on pourrait tirer d'une transposition d'éléments religieux vers la réalité sociale. Généralement on a conclu que si cet âge d'or de la femme a réellement existé, lorsque les clans primitifs se sont organisés en cités, le pouvoir politique lui a, en règle, échappé. Cette perception linéaire de notre préhistoire par les anthropologues du XIXème siècle est qualifiée d'évolutionniste6 par l'anthropologie d'aujourd'hui et est largement critiquée. Le fait q ue l'on puisse isoler plus ieurs cas de m atriarcat ne permet p as pour autant de conclure que celui-ci constituait le seul type d'organisation clanique existant au cours de la préhistoire. On peut aussi douter de l'existence d'un processus général et linéaire de "patriarcalisation". Il semble en effet que la réalité soit plus complexe, et on n'y retrouve pas nécessairement une société matriarcale au début ni une société patriarcale à la fin. 2 Voir cependant la remarque que nous ferons sur cette hypothèse au numéro 3.c). 3 J.J.Bachofen, Das Mutterrecht, 2e éd., Bâle 1897. 4 L.H.Morgan, Houses and house life of the american aborigenes, Washington 1881, p. 66. 5 Op. cit., p.VII. 6 N. Rouland, L'anthropologie juridique, Paris, PUF, 1990, p.14 et s.

3 En Afrique par exemple, on peut trouver côte-à-côte deux peuples appartenant à une même ethnie (par ex. les Manding et les Bambera) et pourtant le s premiers suivent un t ype de fi liation matrilinéaire, et les seconds un système patrilinéaire7. Mais quelle que soit l'ampleur que l'on puisse donner à cet âge d'or de la femme, en tout cas, dès la période historique la situation de la femme n'est pas (ou plus) brillante. Prenons pour simple exemple les récits homériques, dans lesquels les hommes donnent des ordres à leur mère, où les femmes deviennent des objets de convoitises sexuelles pour les vainqueurs, et font l'objet de rapts et de captures. 3. La question que l'on peut dès lors se poser est celle-ci : Pourquoi cette infériorité8 du statut de la femme ? On trouve ici plusieurs types de réponses : a) Dire q ue la femme a été considér ée comme un bien susceptib le d'ê tre vendu, et représentant une valeur économique en tant que productrice d'enfants, c'est évidemment se situer en aval de la réponse, ce n'est qu'une autre manière de faire la même constatation, sans répondre au pourquoi du phénomène. b) Certains ont cru pouvoir déceler à l'origine de cette situation un accord entre les sexes pour se répartir les tâches: la maison et les enfants aux femmes, la direction de la cité aux hommes. Mais cela parait un peu idyllique. c) D'autres insistent sur le rôle de la guerre, qui aurait été très fréquente, et à laquelle les femmes n'auraient pu participer, affaiblies qu'elles étaient par leur nombreuses grossesses. Ils parlent dès lors de la suprématie de l'homme-guerrier sur la femme-mère. Mais il y a lieu, ici, de faire état de cette affirmation de Rouland9 selon laquelle "Bien des études archéologiques montrent que guerres et massacres n'interviennent que très tardivement dans l'histoire de l'humanité, au Chalcolithique (2500-1500 av. J.-C.)". Il semble donc qu'avant cette période, même si l'homme n'était pas un être tout de douceur, ses actes de viol ences étaien t limités à de petits affrontemen ts, ou détournés par la ritualisation ou l'évitement. Cette constatatio n nous oblige donc à renoncer à l'hypo thèse de l'hom me-guerrier également, et à revenir à une explication plus modeste, liée à la simple différence physique, qui elle est constante, entre l'homme et la femme, que l'on soit en guerre ou non. De plus, si on voit, comme les biol ogistes e t les médecins, l 'origine du droit dans la conscientisation de pratiques animales de groupe, l'hypothèse de la suprématie mâle fondée sur la force physique simplement transposée dans les relations familiales, semble bien être la plus plausible. 4. Si l'on considère dès lors que la position respective de l'homme et de la femme est fonction d'un rapport de force de départ, on po urrait égalemen t de manière plus générale ca ractéris er l'évolution de l'humanité, ou plutôt son progrès, par la réduction de l'importance prise par la loi du plus fort, encore tant prisée par Calliclès10 et justifiée par lui comme étant inscrite dans la nature des choses. Mais n'est-ce pas le rôle du dr oit lui-même que de ten dre à cette réductio n? Ainsi l'émancipation de la femme pourrait-elle n'être qu'un des aspects des progrès réalisés par le droit. Le plan du cours est doublement chronologique. D'une part, la matière est sous-divisée en : Ancien droit - droit Classique - droit Postclassique. D'autre part, nous envisagerons, pour chaque 7 G. A. Kouassigan, Quelle est ma loi?, Paris 1974, p. 208. 8 Ou dégradation, c'est selon que l'on veut ou non croire à l'existence d'un âge d'or antérieur de la femme. 9 Op. cit., p.93. 10 Personnage du Gorgias de Platon.

4 période, les différents problèmes de la condition de la femme à Rome, en suivant les étapes de sa vie, de la naissance à la mort.

5 Première partie - Ancien droit Préliminaire - La naissance 5. Nous savons que les pouvoirs du paterfamilias su r ses enfant s étaient t rès étendus. Cette patria potestas (puissance paternelle) comprenait notamment le ius vitae necisque (droit de vie et de mort) et le ius exponendi (droit d'exposition). Le ius vitae necisque était initialement un pouvoir discrétionnaire de disposer de ses enfants. Le ius exponendi, à bien y regarder, n'en différait guère. Il donnait le droit d'abandonner purement et simplement le nouveau-né à son propre sort. Si ces po uvoirs para issent absolus, voyons qua nd même ce que nous en dit Denys d'Halicarnasse (Texte 2 - Dion., 2, 15, 1+2). Romulus semble donc avo ir tenté de limiter l e droit d'expo sition aux filles , en excluant toutefois la première de celles-ci. Chapitre premier - L'autorité I. Tableau général de la situation de la femme à Rome 6. On remarque chez Pline (Texte 3 - Plin., nat. hist., 14, 13, 89) comme chez Gellius (Texte.4 - Gell., Noct. att., 10, 23), une grande différence de traitement entre les hommes et les femmes. Elle se manifeste notamment dans trois domaines, que nous évoquerons ici: A) Pourquoi cette interdiction de boire du vin ? Bachofen11 a avancé la thèse de la tradition religieuse, mais cela parait peu plausible. En effet, on ne trouve de traces de ces croyances que dans de petites peuplades insulaires et peu connues de l'Antiquité. Pour que l'explication soit plausible, il eût fallu que cette croyance ait eu une aire d'expansion plus grande. Peut-être le tabou est-il lié à une croyance dans les vertus abortives du vin. Ainsi Plutarque (Texte 5 - Plut., Rom., 22, 3) lie-t-il l'usage de produits abortifs et la substitution de clefs. Ce lien peut s'expliquer si l'on veut bien admettre qu'il s'agissait là des clefs du cellier. De même, Soranos12 écrivit-il : "(...)Pour éviter donc que le foetus ne se forme sous des apparences hideuses, en raison des images étranges qui s'imposent à l'esprit dans l'ivresse, les femmes doivent arriver sobres aux rapports sexuels ; (...)"13. 7. B) Pline et Gellius rapportent que, selon Caton, les parents avaient le droit d'embrasser (ius osculi) leur fille pour vérifier si elle n'avait pas bu de vin. On peut être surpris qu'il soit pour cela question d'osculum, qui contrairement au basium ou au suavium était un baiser à bouche fermée, et donc relativement moins efficace que les autres au but que lui assignait Caton. Mais on peut objecter que ces deux derniers mots paraissent plus récents que le ius osculi lui-même, ce qui rend la discussion fragile. Pour d'autres, il ne s'agirait là que d'une manière de se saluer, un peu comme aujourd'hui, et Caton aurait donc été victime de son "antiféminisme" exacerbé. Mais il semble bien que l'usage du baiser n'ait été introduit qu'avec l'influence hellénistique, laquelle est également postérieure au ius osculi. D'aucuns ont avancé qu'il s'agissait là d'un vestige du droit de cuissage des parents du mari sur l'épouse, mais ce ius osculi est reconnu également aux parents de l'épouse. Gellius parle en effet de cognatis (cognats), pour lesquels l'inceste est prohibé jusqu'au sixième degré chez les Romains. 11 Op.cit., p. 77. 12 Gynécologue grec, né à Ephèse, médecin à Rome, env. 100 ap.J.C. 13 Soranos d'Ephèse, Maladies des femmes, trad. fr.: P. Burguière, D. Gourevitch, Y. Malinas, Paris 1988, T.1, 1, 39.

7 B) Le tutor 11. En cas de décès du paterfamilias, c'est un tuteur qui a l'autorité sur la fille célibataire. 1) Désignation du tuteur Pendant la période de l'ancien droit, les Romains connaissaient deux types de tuteurs, le tuteur légitime et le tuteur testamentaire. 12. Le tuteur légitime qu i était, com me son nom l'indique, désigné par la loi, était le plus proche des agnats mâles. Seuls les agnats jusqu'au sixième degré entraient en ligne de compte19 . Ces agnats, qui font partie des successibles de la femme, ont donc un intérêt direct à la bonne administration des biens de la femme et à leur conservation jusqu'au décès de celle-ci. 13. La possibilité de désigner un tuteur testamentaire, autre que le tuteur légitime, remonte à la loi des XII Tables20 et peut-être même à l'époque royale, comme le veut la légende rapportée par Tite-Live21. Cette faculté est somme toute un corollaire de l'omnipotence du paterfamilias et de son droit de disposer de ses biens par testament. Il y a là une première brèche dans l'édifice patriarcal, car sera tuteur quelqu'un qui n'aura pas en principe intérêt à une bonne gestion du patrimoine, vu qu'il n'est pas nécessairement un futur héritier de la femme mise sous tutelle. Le choix, comme tuteur, d'un ami laissant une large liberté de gestion à la femme, ouvre à celle-ci une possibilité d'émancipation. Il n'est même pas indispensable que le tuteur soit un ami complaisant, car s'il doit être sui iuris et mâle, rien n'empêche qu'il soit impubère ou sourd-muet ! 2) Pouvoirs du tuteur 14. Il doit d onner son acco rd (auctoritas) po ur valider une série d'actes faits par la femme, comme par exemple : faire son testament, se marier, alié ner par mancipatio, inte nter une action en justice (ou procéder à son simulacre par un abandon devant le magistrat - in iure cessio), accepter une succession, affranchir un esclave, contracter une dette. Gaius (Textes 7 - Gai., 2, 80 et Texte 8 - Gai., 2, 47), en traitant des choses non-susceptibles d'usucapion, telles les choses volées ou ravies avec violence, nous livre un exemple (Texte 8) tiré de l'ancien droit, concernant les biens de la femme sous tutelle agnatique22. Cette disposition de la loi des XII Tables é tait draconienne, puisque l'acqué reur d'un bien apparten ant à la femme sous tutelle agnatique, même s'il est de bonn e foi, de même qu'un voleur, ne pouvait j amais bén éficier de l'usucapion d'un ou deux ans, ni revendre valablement le bien acquis, même après ce délai. Ce n'était pas à la femme qu'il est interdit d'aliéner, mais c'était aux acquéreurs successifs que l'on refusait le bénéfice de l'usucapion. Le point le plus obscur est probablement celui concernant les biens sur lesquels porte cette interdiction. Si les deux fragments de Gaius ne parlent que de res mancipi, deux extraits de Cicéron23 disent, au contraire, q ue rien n e peut être usucapé de la tutell e légitime. Mais, on peut peut-être concilier les deux avis en estimant que la tutelle elle-même ne portait que sur les res mancipi24. 19 A défaut d'agnat en degré utile, on avait alors recours aux gentiles, qui étaient des descendants d'un ancêtre commun. 20 V. XII T., 5, 3 : "UTI LEGASSIT SUPER PECUNIA TUTELAVE SUAE REI, ITA JUS ESTO". 21 Tite-Live (1,34 in fine). 22 Notons qu'il écrit cela à un moment où la tutelle légitime (des agnats) à déjà été abrogée par la Lex Claudia, v. infra n° 35. 23 Cicéron, pro Flacco , 84 et ad. Att., 1, 5, 6. 24 Cette dernière précision relativise évidemment considérablement ce que nous avons dit plus haut, concernant l'interdiction faite à la femme de contracter des dettes.

8 Chapitre II - Le patrimoine 15. Si la femme pouvait acquérir des biens de diverses manières (donation, travail ou commerce de l'esclave...), elle ne travaillait cependant pas fréquemment elle-même. Son patrimoine se constituait donc essentiellement par voie de suc cessions. C' est d'ailleurs la seule institution pour laquelle il s'avère utile, au stade de l'ancien droit, de distinguer la situation de la femme de celle de l'homme. I. La succession du père 16. Paul (Texte 9 - Paul., Sent., 4, 8, 20) nous rapporte que la Loi des XII Tables admettait, aux successions légales, les agnats san s distinction de sexe. Cec i était tell ement contraire à l' image de société patriarcale que l'on se faisait généralement de la société romaine, qu'on n'y a pas cru pendant des siècles25. Notons encore qu'il s'agit ici de la deuxième faille d'importance que nous rencontrons dans le système patriarcal romain26. II. La succession du mari 17. La femme mariée cum manu, nous dit notamment Denys d'Halicarnasse (Texte 10 - Dion., 2, 25, 4 s.), peut hériter de son mari. Cela n'est au fond qu'une conséquence logique du fait que la femme mariée est dite loco filiae27. Elle hérite donc comme une fille. III. La succession testamentaire 18. A Rome, il était possible d'instituer des héritiers par testament. Etait-il possible d'instituer son épouse héritière ? Non, en tout cas depuis la Lex Voconia (169 av. J.C.), qui l'interdit formellement. Pour la période précédant cette loi, on peut répondre affirmativement, si on l'interprète a contrario. La femme pouvait évidemment bénéficier d'un legs particulier. Remarquons à propos de cette diversification des modes de succession, que celle-ci marque une étape im portante dans l'h istoire de notre civilisation. S ans verser dans l'évolutionnisme, les anthropologues nous enseignent que de manièr e générale, les success ions étaient légales dans les sociétés traditionnelles ( on parle de propriété collective du clan), cont rairement a ux sociétés plus modernes28. On voit donc bien que le droit romain se trouve à la croisée des chemins en introduisant une troisième brèche dans le système patriarcal29. Chapitre III - Les fiançailles I. Origines de l'institution 19. A l'origine, les fiançailles ressemblaient à un pacte interclanique, entre deux chefs de famille, qui se promettaient mutuellement l'un de donner sa fille30, l'autre de la faire prendre en mariage, chacun invoquant ses propres divinités à l'appui de sa promesse (Texte 11 - Gell., Noct. att., 4, 4). On explique cette bilatéralité et le caractère religieux, pour la promesse comme pour le traité, par le fait qu'on ne reconnaissait pas les divinités du partenaire. Cette ressemblance entre fiançailles et traités est également liée au fait que les Romains étaient de stricte exogamie (Le mariage étant prohibé jusqu'au sixième degré de parenté) et qu'il leur était donc souvent nécessaire de sortir de leur clan pour se fiancer. 25 De plus, on croyait la loi des XII Tables d'origine grecque, ce qui rendait ce texte encore un peu plus incroyable ; v. à ce propos: E. Cuq, Les institutions juridiques des Romains, Paris 1891, p. 131 ss. 26 V. n° 13. 27 Ce qui veut dire qu'elle occupe, par rapport à son mari, la même place que les filles de celui-ci. 28 V. N. Rouland, op. cit., p. 110. 29 V. supra note 20. 30 Ultérieurement, on a probablement pu se contenter de la seule promesse du père de la fiancée ; V. M. Kaser, op. cit., p. 75 et s. et infra, n° 21 in fine.

9 II. Formes des fiançailles 20. Pour les fi ançailles, on utilisait le contrat de sponsio, qui par ailleur s servait au ssi aux cautionnements et aux traités de paix (Texte 12 - Varro, de ling. Lat., 6, 70 s.). Par la suite , lorsqu e les aspects sacrés se sont estompés au pro fit des asp ects civi ls31, la sponsio a pris la forme de la stipulatio. III. Parties 21. Le père promet de donner sa fille en mariage (celle-ci n'intervient pas personnellement) et réciproquement, le futur mari (ou son paterfamilias, s'il est encore alieni iuris) promet de la prendre en mariage. La sponsio remplit ici la fonction de caution, vu qu'il y a un débiteur et un obligé. Ultérieurement on a probablement pu se conte nter de la seu le promesse du père de la fiancée (Texte 13 - Ulp., D., 23, 1, 2). IV. Effets de la violation de la promesse 22. A) Les effets religieux d'une telle violation étaient de rendre son auteur sacer32 . B) Le censeur, protecteur du regimen morum (conduite morale), pouvait sanctionner cette violation par une nota censoria, note du censeur (Textes 11 - Gell., Noct. att., 4, 4 et Texte 12 - Varro, de ling. Lat., 6, 70 s.). C) D'un point de vue juridique, était initialement ouvert un droit de vengeance. Plus tard le droit de vengeance a été remplacé par une rançon fixée à l'avance dans une clause pénale, ce qui permettait de rencontrer le problème de l'estimation de la rançon. On comprend ainsi pourquoi on appelait sponsa à la fois la fille et la rançon, vu qu'à défaut de donner la première en mariage, on était redevable de la seconde. En pratique, il y avait deux clauses pénales réciproques. Un autre avantage de cette clause, était d'ouvrir d'o ffice, e n cas de non-exécution de l'obligation principale, le droit d'intenter une legis actio per manus iniectionem (action de la loi par la "mainmise"). L'étape suivante est franchie avec l'apparition de la notion de bonne foi. On n'applique plus, désormais, la clause pénale de manière mécanique, mais on s'interroge sur l'existence ou non d'une juste cause au non respect de l'obligation principale. Il est possible (Texte 14 - Pomp., D. 38, 10, 8) que l'on ait déjà dégagé en ancien droit une idée d'affinitas (affinité) ayant des effets juri diques, constitu ant par exemple un empêchement à mariage. En effet, l'appellation paraît déjà courante à Servius. C'est un indice, mais on ne sait pas avec certitude s'il s'agissait d'u ne règle morale ou juridique. A l'époque classi que, la règle ser a controversée. Chapitre IV - Le mariage I. Généralités 23. Si l'on connaît assez bien le déroulement des cérémonies de mariage33, la réalité juridique du mariage en ancien droit est assez mystérieuse. On ne sait même pas à partir de quel moment on peut 31 Probablement au moment de l'apparition de la Legis actio per manus iniectionem, laquelle servait aussi bien pour les actions sacrées que pour les actions civiles. 32 Ce qui voulait dire: "sacré", dans le sens de "hors-la-loi".

10 réellement parler de mariage au sens juridique du terme, et cela est dû au fait que la réalité juridique nous est masquée par nombre d'évènements connexes, religieux, sociaux, ou moraux (v. Texte 10 - Dion., 2, 25, 4 s. et Texte 15 - Gell., Noct. att. 4, 3). D'un point de vue juridique, on peut retenir d'une part la signature des tables nuptiales, qui cependant semble ne pas constituer une formalité essentielle à la réalisation du mariage34 ; d'autre part, la conclusion de la conventio in manum35, qui, par le fait qu'elle devait coïncider initialement avec le mariage lui-même, ne permettait pas non plus d'isoler nettement le phénomène juridique. Ce qu'on peut affirmer, c'est que la mariage est un fait social, consistant dans la cohabitation d'un homme et d'une femme, et ayant des conséquences juridiques. Cependant, comme nous nous situons dans des temps assez reculés, il nous est impossible de savoir avec précision à quel acte et à quel moment sont liées les conséquences juridiques. Ce mariag e est basé sur l'affectio maritalis (a ffection conjugale36) et a pour obj ectif la procréation. II. Conditions du mariage 24. A) Il faut être pubère37, c'est-à-dire porter la toga virilis (toge virile) pour le garçon, celle-ci lui étant do nnée en remplacem ent de sa toga praetextus (t oge prétexte) au c ours d'une cérémonie annuelle, après qu'il ait atteint la puberté ; ou avoir atteint l'âge de 12 ans, pour la fille. B) Il faut l'accord de volonté : - Du père de la fille ou de son tuteur ; - De fille elle-même (Il s'agit ici d'un consentement passif, car "qui ne dit mot consent") ; - Du père du garçon, ou du garçon lui-même, s'il était déjà sui iuris. C) Il faut se situer en-dehors de la zone de l'inceste: Il ne faut pas qu'il existe entre les époux un lien agnatique jusqu'au sixième degré. D) Il faut ne pas être déjà marié. Les Romains ont toujours étés monogames38. E) Il faut avoir le conubium, c'est-à-dire avoir la capacité de se prendre pour mari et femme. Ainsi, les Romains excluaient par exemple le mariage entre un homme libre et une esclave (de même entre une femme libre et un esclave) ; entre un ingénu et une affranchie39 ; entre Romains et Latins ou pérégrins (excepté ceux à qui on avait conféré le conubium) ; et même, pendant quelque temps, entre patriciens et plébéiens40. III. Les prétendues catégories de mariage 25. Une doctrine répandue au siècle dernier distinguait le mariage cum manu et le mariage sine manu à Rome. Dans le premier, la femme perdait ses liens avec son ancienne famille pour entrer sous la manus (puissance) de son mari, alors que dans le second, elle restait juridiquement sous la potestas 33 V. par exemple: J. Marquardt, "La vie privée des Romains", in Manuel des Antiquités Romaines, trad. V. Henry, 2e éd., Paris 1892, T.XIV, p. 48 ss. 34 J. Marquardt, op. cit., p. 58, note 1. 35 V. infra, n° 25. 36 Pour une définition de l'affectio maritalis: v. infra n° 64. 37 Condition qui n'était pas requise pour les fiançailles. 38 V. cependant infra n° 72. 39 M. Kaser, op. cit., T. I, p. 75 ; V. cependant : E. Volterra, Istituzioni di diritto privato romano, Roma 1971, p. 660. 40 Conformément à la Loi des XII Tables et jusqu'à la lex Canuleia (445 av. J.C.).

11 de son paterfamilias. Cette distinction n'est plus retenue aujourd'hui, car elle repose sur une erreur de perspective41. En réalité, il n'y a qu'un seul type de mariage. Il est fondé sur le consentement d'un homme et d'une femme à être unis dans un lien conjugal. Ensuite, le mariage peut être, ou non, accompagné d'une conventio in manum42. La confusion en ce domaine est liée au fait qu'au début, le mariage était probablement toujours lié à une telle convention. IV. Formes de la conventio in manum A) La confarreatio. 26. Il s'agit là probablement de la forme la plus antique, sans doute réservée à une certaine classe dominante43 puisqu'il fallait le concours du flamen dialis (Flamine, grand prêtre de Jupiter) ou peut-être même du pontifex maximus (Grand pontife). Selon le grammairien Servius44, les deux fiancés sont assis sur deux sièges liés ensemble, et recouverts de la peau d'un mouton préalablement sacrifié pour obtenir la faveur des dieux. Ils font offrande du panis farreus (P ain de froment) e t en mang ent. On ne connaît plus le s paroles sacramentelles prononcées à ce moment. Curieusement, le paterfamilias se mble être absent du rituel , le symbolisme ne donn e pas d'indice du passage de la femme sous la manus du mari ; de plus, c'est une cérémonie religieuse, ce qui surprend pour un acte juridique. Traditionnellement, on en concluait que la confarreatio avait dû, à un certain moment de la période archaïque, réaliser en même temps le mariage45. Volterra46 oppose cependant au moins trois arguments de poids à une telle interprétation: A) C' est commettre un anachronisme, que de vouloir voir dans la confarreatio, tell e que décrite par le Servius, la réalisation d'un mariage. En effet, si aujourd'hui la formation du mariage dépend d'un acte initial, tel n'était pas le cas chez les Romains. Pour ces derniers le mariage, au sens juridique, dépendait exclusivement, du moins pour la période précédant le droit postclassique, de leur consentement continu à être marié. Cela n'a donc pas de sens de dire que le mariage pouvait être constitué par la confarreatio, puisque le mariage romain ne connaissait pas d'investiture comme c'est le cas aujourd'hui. B) Les auteurs qui nous parlent de la confarreatio47 nous en parlent exclusivement en tant qu'elle réalise la conventio in manum sans que rien ne puisse jamais laisser entendre qu'il s'agisse, ou se soit agit un jour, d'un mariage. C) Le seul auteur à nous parler de la confarreatio comme d'un rite nuptial, est précisément Servius. Or ce dernier écrit ce texte48 au Vème siècle ap. J.C., à une époque où la conventio in manum a complètement disparu. Il est dès lors fort probable que ce soit Servius lui-même qui commette la confusion entre la confarreatio et les rites nuptiaux ancestraux. 41 Ce tte erreur est du e à Quintillien (Inst . Or., 5, 1 0, 62). Ce d ernier faisait de l'art oratoire, en manquant parfois un peu de rigueur au fond. C'est ainsi qu'il a commis une erreur de lecture d'un texte de Cicéron (Top., 3, 14). Les sources juridiques (v. Texte 16 - Gaius, 1, 111), de même que les sources littéraires (Gellius, 18, 6, 9) d'ailleurs, écartent la distinction. 42 Convention conférant la puissance maritale ; E. Volterra, Istituzioni..., p. 645 et ss.; M. Kaser, op. cit., Tome 1, p.72. 43 Peut-être les patriciens ; voir par exemple: O. Robleda, El matrimonio en derecho romano, Roma 1970, p. 7 ss. 44 Servius, In. Aen. 4, 374. 45 v. par exemple: A. Guarino, op. cit. p. 505, note 49.2.1. 46 E. Volterra, R.I.S.G. 12 (1968), p. 218 ss. 47 Notamment: Gaius, 1, 108 ss.; Ulpiani Epitomê, 9: De his qui in manu sunt ; v. E. Volterra, Ibid., p. 221 ss. 48 Serv. In. Aen., 4, 374.

12 B) La coemptio 27. C'est un acte dérivé de la mancipatio (v. Texte 16 - Gai., 1, 108 s.). Traditionnellement, il était analysé comme une vente de la femme à marier conclue entre le père de cette dernière et le futur mari. Le prix d'abord effectif serait devenu symbolique ensuite. On a dès lors cru pouvoir trouver là le vestige d'un mariage-vente qui aurait été pratiqué en des temps anciens, système différent de celui que connut Rome par la suite. En effet dans le système dotal, c'est le lignage de la femme qui paie un prix, une dos (dot). Cette interprétat ion est cependant fort controversée. On peut par exemple s'étonner du préfixe: co-emptio. Les sources app ellent le mari coemptionator et sa femme coemptionatrix. De p lus Gaius49 nous dit:"...mulier potest facere coemptio cum marito..." (avec son mari, et non à son profit!). De même dans la "laudatio Turiae"50, récit d'une vie conjugale, le mari rappelle qu'il avait fait coemptionem cum uxore (avec sa femme) et non uxoris (de sa femme). Cela ne ressemble donc en réalité pas tellement à un mariage-vente. Certains en concluent dès lors qu'au contraire, la femme était elle-même partie à cette coemptio par laquelle elle se plaçait, après son mariage proprement dit, volontairement sous la manus de son mari. La femme avait donc une certaine influence sur son sort juridique, et cela n'a rien d'impossible, vu qu'il en est de même pour la troisième forme de conventio in manum, l'usus (usage). C) L'usus 28. L'usus est la règle permettant a u mari d' acquérir la manus su r sa femme, par la si mple cohabitation des époux pendant un an. Pour certains51 l'usus était une application du principe général: usus auctoritas fundi biennium, ceterarum rerum annus esto, et n'avait donc initialement qu'un rôle de preuve de la manus conférée par confarreatio ou coemptio. Après une année de cohabitation, le mari n'avait plus besoin de recourir à d'autre preuve de la manus que cette cohabitation, pour s'opposer à une demande de restitution de l'épouse par son père. D'autres52, au contraire, estiment que l'usus permit dès le début d'acquérir la manus sur la femme, suite à une cohabitation d'un an avec elle. Pour eux, la coemptio n'aurait été introduite que plus tard pour palli er la désuétud e de l'usus, la confarreatio n' y suffisant pas, vu le nombre limité de personnes qu'elle concernait. Mais quels que soient les motifs de la règle, il est remarquable qu'elle soit assortie d'une exception, le ius trinocti i. Le trinoctium pe rmettait de ne pas tomber sous l a manus du mari, en découchant trois nuits par an. La femme pouvait ainsi rester dans sa famille. Cette quatrième brèche53 dans le système patriarcal, déjà inscrite dans la loi des XII tables, a probablement été introduite sous l'influence des agnats, tuteurs légitimes de la femme sui iuris, lesquels perdaient leur héritage en cas de conventio in manum. Il en résulte un nouveau régime matrimonial, d'essence séparatiste. Plus tard, en effet, des clauses (legibus privatae) vont dispenser la femme des contraintes du trinoctium, il ne lui faudra plus s'absenter pour échapper à la manus de son mari54. Chapitre V - Le divorce 29. Les sources de l'ancien droit nous donnent des exemples assez différents de la manière dont pouvait se terminer le mariage, mais ils ne sont pas toutes aussi crédibles les unes que les autres. 49 Gaius, 1, 114. 50 Inscription sur une table de marbre du 1er siècle de notre ère, où un mari fait l'éloge de sa femme défunte (4 pages de texte racontant leur vie commune). 51 Par exemple: M. Kaser, op. cit., T. I, p. 78. 52 V. H. Lévy-Bruhl, Nouvelles études sur le très ancien droit romain, Paris 1947, p. 63 ss. 53 V. n° 13 in fine, n° 16 et n° 18. 54 Gaius, 1, 111.

13 Denys d'Halicarnasse, par exemple, nous raconte que la femme adultère, ou celle qui avait bu du vin, était punie de mort, mais cela tient peut-être de la légende (v. Texte 10 - Dion., 2, 25, 4 s.). Plutarque, de manière plus vraisemblable, parle de répudiation de la femme pour adultère ou empoisonnement d'enfant et substitution de clefs. Cette répudiation s'accompagnait de sacrifices pour apaiser les divinités (v. Texte 5 - Plut., Rom., 22, 3). Denys d'Halicarnasse encore, mais cette fois-ci cela est confirmé par Gellius, nous apprend qu'il était possible de répudier sa femme pour cause de stérilité (v. Texte 10 - Dion., 2, 25, 4 s. et Texte 15 - Gell., Noct. att., 4, 3)55. La garde des enfants, en cas de divorce, allait très probablement au père. Bilan pour l'ancien droit 30. Si pour le très ancien droit, on peut être assez certain que la situation des conjoints n'a pas dû être égale, notamment quant à la possibilité de divorcer, cette situation devient beaucoup plus complexe dès l'époque de Plaute (250-184 av. J.C.). On y voit à la fois des femmes soumises à la dura lex (dure loi) du mariage56, et d'autres susceptibles d'expulser leur mari du domicile conjugal, tout au moins lorsque celui-ci est situé dans un immeuble lui appartenant57. La situation des femmes est donc relativement contrastée, et cela s'explique en droit, par le fait que certaines femmes sont sous la manus de leur mari et d'autres non, certaines sont alieni iuris et d'autres sui iuris. Or pour les femmes mariées sans conventio in manu, et sui iuris, le pouvoir du tuteur est sur le point de s'effondrer, comme nous allons le voir dans la deuxième partie du cours. 55 A propos de ces textes: M. Humbert, Le remariage à Rome, Milano 1972, p. 96. "La date tardive à laquelle la tradition place la répudiation par Sp. Carvilius Ruga, de son épouse stérile, laisse penser que la répudiation de l'épouse inféconde fut exceptionnelle dans les temps anciens. On devait lui préférer le procédé de l'ad option. Mais il est certain qu' à partir des derniers siècles de la République la répudiation de l'épouse stérile suivie d'un remariage afin d'assurer la continuité de la famille est entrée largement dans les moeurs". 56 Plaute, Mercator, 700 ss., et 817 ss. 57 Plaute, Miles Gloriosus, 1160 ss., 1274 ss.

1 Deuxième partie - Droits préclassique et classique Préliminaire - La naissance 31. Si le ius vitae necisque (droit de vie et de mort), ainsi que son corollaire, le ius exponendi (droit d'exposition), subsistent en principe, ils ne sont plus guère exercés en fait. Il n'y a apparemment pas non plus de différence de traitement entre les deux sexes. Chapitre premier - L'autorité I. Tableau général de la situation de la femme à Rome 32. Dans son Pro Caecina (Texte 17 - Cic., pro Caec., IV, 10 s.), Cicéron dépeint la vie d'une femme de la bonne société romaine au 1er siècle avant J.-C.. Cette plaidoirie nous montre une femme très largement émancipée, passant des contrats (permutatio dotis58, mandat d'acheter un fond, contrat de bail...), recevant un héritage, rédigeant un testament... sans qu'il soit jamais question de son tuteur. On pourrait objecter que Cicéron a peut-être passé le tuteur sous silence, pour ne parler que des faits in téressant directe ment la cause. Mais il existe égale ment d'autres vestiges, tirés immédiatement de la vie quotidienne, qui témoignent de faits similaires. Ainsi par exemple, a-t-on trouvé à Pompéi une tablette (Texte 18 - Tab. Pomp. 28) concernant un séquestre59 (ou peut-être un abandon noxal60) opposant un homme et une femme, or il apparaît que la femme a agi seule, sans l'aide d'un tuteur ou de son paterfamilias. Il semble donc qu'à la fin de la période préclassique, l'émancipation de la femme romaine soit largement réalisée dans les faits. Qu'en est-il en droit ? II. Qui exerce l'autorité et dans quelle mesure ? A) Le paterfamilias. 33. De manière générale, la patria potestas (puissance paternelle) est en régression. C'est ainsi que les fils et filles pourront désormais : -Contraindre le paterfamilias à consentir à leur mariage en vertu de la Lex Iulia de maritandis ordinibus, qui obligeait au mariage (voir infra n° 89 ss.) ; -Bénéficier d'un pécule (Notons qu'il semble qu'en pratique, d'après le nombre de témoignages dont nous disposons, les garçons en aient profité plus souvent que les filles) ; -Contracter des obligations naturelles... Apparemment, cette évolution s'est faite de manière égalitaire. On ne constate en tout cas pas de discrimination à l'encontre des filles, si ce n'est le cas de la fille surprise en flagrant délit d'adultère par son père (ce qui lui donnait le droit de la tuer - v. infra n° 75), mais ce cas reste marginal et probablement de peu d'application concrète. D'un point de v ue juridique, la relation entre le paterfamilias et sa fille évolue peu. En pratique cependant, la fille mariée sans conventio in manum, et donc toujours juridiquement sous la potestas (puissance) de son père, y échappe largement. Cela est le cas surtout dans la mesure où le domicile conjugal est distinct de celui de son paterfamilias. 58 Acte permettant de modifier la consistance d'une dot. Ainsi, la dot de Césennia, qui était en argent, a pu être transformée en une dot portant sur un fonds, ce qui lui assurait une meilleure protection contre l'inflation monétaire. 59 V. M. Marrone, TAB. POMP. 28: Un interessante documento in tema di sequestro, in Studi in onore di Cesare Sanfilippo, Milano 1983, vol. 3, p. 415 ss. 60 V. L. Bove, Documenti processuali delle Tabulae Pompeianae di Murecine, Napoli 1979, p. 135.

2 B) Le tutor 1) Tableau général 34. Dans les principes, la tutelle n'a pas changé, et ses règles sont toujours enseignées (Texte 19 - Gai. 1, 144) de la même façon. De même Cicéron (Texte 20 - Cic., pro Caec., XXV, 72 s.), dans une de ses digressions sur la beauté et l'importance du droit civil, s'adressant à des juges, invoque les mêmes principes à titre d'exemple : il fa ut toujours l'aut orisation du tuteur pour qu'u ne fem me puisse prendre un engagement ou promettre une dot. Et pourtant, il est bien connu que la propre femme de Cicéron (Terentia) administrait ses biens tout à fait indépendamment, avec l'aide de ses affranchis. Elle n'était pas soumise à la manus de son mari, et pourtant il n'est jamais fait mention de son tuteur61. Paradoxalement, l'infirmitas consilii62 (d ébilité de la raison), consid érée comm e étant la justification de la tutela mulieris (tutelle de la femme), ne s'est développée qu'alors que cette institution était déjà sur le déclin. C'est en effet au moment où cette tutelle était démantelée, que ses défenseurs lui ont cher ché un fond ement. C'est ainsi qu'i ls ont ré cupéré l'argument de l'infirmitas consilii, justification de la tutela impuberum63 (tutelle des impubères), mais celui-ci ne fait certainement pas l'unanimité. Ainsi, pour Cicéron déjà, il s'agissait d'une idée des anciens64. De même, Gaius (Texte 21 - Ga i., 1, 190) dira ( deux siè cles plus tard) de cette ratio legis qu 'elle est spécieuse. Ce la ne fera d'ailleurs plus de doute dès lors que les lois d'Auguste introduiront le ius liberorum (v. infra, n° 41). 2) Désignation du tuteur a) Tutelle légitime 35. La Lex Claudia (44-49 après J.C.) supprime la tutelle sur les ingénues65. Ne restent donc en vigueur que la tutelle légitime du patron sur son affranchi et du parent ayant émancipé sa fille, sur cette fille. b) Tutelle testamentaire 36. L'application de cette f orme de tutelle aux filles et aux épouses in manu s' est fortement répandue à la fin de la période de l'ancien droit et au cours de la période du droit préclassique. Il s'agit là d'une étape importante dans l'histoire de l'émancipation féminine, car comme le dit Gide: "Donner à la femme des tuteurs étrangers, qui n'avaient aucun intérêt à contrôler les actes, c'était, au fond, lui donner la pleine liberté"66. On est allé plus loin, en permettant au testateur de laisser le choix du tuteur à la femme elle-même (tutor optivus - tuteur choisi). Ce choix peut être accordé de façon plus ou moins large: soit pour un seul acte, soit pour plusieurs actes, soit encore pour autant d'actes qu'elle veut (Texte 22 - Gai., 1, 150 s.). c) Tutelle atilienne 37. La Lex Atilia (vers 210 avant J.C.) n'a probablement fait que consacrer une pratique rendue fréquente à cause des guerres puniques (les impubères se retrouvant plus fréquemment sans tuteur): La désignation d'un tuteur par le préteur. C'est vraisemblablement la plèbe, à qui le testament semble avoir été moins familier, qui a fait pression pour que l'on admette la possibilité d'une telle désignation, non plus par le seul préteur, mais aussi par la majorité des tribuns de la plèbe (v. Texte 23 - UE, 11, 18). 61 V. F. Schulz, Classical Roman Law, Oxford 1951, p. 184. 62 On parle à ce propos également de l'imbecilitas sexus, l'imbécillité du sexe. 63 V. P. Neve, Het zwakke geslacht, in Mélanges A.J. de Groot: Sine invidia communico, Nijmegen 1985, p.173 ss. 64 Pro Mur. 12, 27; Voir J. Gaudemet, Le statut de la femme dans l'empire romain, in Recueils de la Société J. Bodin, XI (La femme), Bruxelles 1959, T. 1, p. 192. 65 V. Gaius, 1, 157. 66 P. Gide, Etude de la condition privée de la femme, 2e éd., Paris 1885, p. 138.

3 Si les femmes ont bénéficié de la même mesure que les impubères, on note cependant qu'à l'époque classique, c'est uniquement sur leur demande que la tutelle atilienne leur était conférée. d) Tutelle prétorienne (Tutor praetorius) 38. En cas de procès ent re une fe mme et son tuteur, o u lorsque la femme a besoin d 'une autorisation de promesse de dot et que son tuteur est impubère, elle peut demander au préteur de lui désigner un tuteur "ad hoc". 3) Pouvoirs du tuteur 39. En principe, l'auctoritas du tuteur est toujours requise pour tous les actes importants. Mais en pratique, il ne s'agit plus que d'une formalité vide de contenu, car désormais, en cas de conflit entre le tuteur et la femme, celle-ci a un r ecours auprès du préteur, lequel peut contraindre le tuteu r à s'incliner (Texte 21 - Gai., 1, 190). Une interprétation a contrario de "Gai. 1, 192" nous permet de croire qu'il ne devait pas être trop difficile d'obtenir du préteur qu'il contraigne le tuteur à donner son auctoritas. En effet, la femme ne devra invoquer de motif grave que pour certains cas en matière de tutelle légitime, dont on sait qu'elle est déjà partiellement abrogée (voir supra n° 35). C'est donc que dans les autres cas, un te l motif grave n'est m ême pas requis . En cont repartie de cette perte de pouvoir, le tuteur perd également toute responsabilité67. 4) Dislocation de la tutelle Trois phénomènes ont achevé de vider la tutela mulieris de sa substance : a) Coemptio fiduciae 40. Il s'agit d'un procédé ingénieux permettant de changer de tuteur (Texte 24 - Gai., 1, 114 s.). Une femme voulant remplacer son tuteur A par un tuteur B fait coemptio avec un homme de confiance, servant d'intermédiaire. Par cette coemptio, la femme se met sous la manus de cet intermédiaire et n'a donc plus de tuteur. L'intermédiaire mancipe alors la femme à B, qui l'affranchit. B devient ainsi le patron, et donc le tuteu r légiti me de la femme. Notons au surplus, que le tu teur A pouvait être contraint de donner son auctoritas à la coemptio (cfr supra, n° 39). b) Ius liberorum 41. Les lois d'Auguste sur le mariage68 prévoient, dans le cadre de leur politique nataliste, que les ingénues ayant trois enfants, et les affranchies en ayant quatre, sont définitivement dispensées de la tutelle69. c) Tutor absens 42. Le coup de grâce a été asséné à la tutela mulieris par un sénatus-consulte interprété largement par la juris prudence, en vertu duquel l'absence, même momentanée , du tute ur peut entraîner sa déchéance (Texte 25 - Ga i., 1, 17 3). Une interprét ation aussi judaïquement large de la part des jurisprudents ne peut se comprendre que parce qu'ils avaient bien conscience que la tutelle était une institution complètement dépassée ; traditionalistes, les Romains ne la s uppriment cependant pas, mais préfèrent la vider de son contenu et la réduire à une pure formalité. 67 Gai. 1, 191. 68 V. infra, nos 73 ss. 69 Il s'agit là d'un privilège accordé pour encourager les femmes à avoir des enfants. Mais cette loi d'Auguste implique bien que l e recours à l' imbecilitas sexus po ur justifier l a tutela mulieris es t spécieux ; v. n° 34.

4 Chapitre II - Le patrimoine I. Sources du patrimoine de la femme A) Testament - La Lex Voconia 1) Antécédents - Les lois dites somptuaires a) Lex Oppia (214 avant J.C.) 43. C'est une loi d' austérité pr ise pendant la deuxième guerre pun ique, et interdisa nt aux femmes de porter de l'or ainsi que des robes multicolores. Cette loi peut également être qualifiée d'"antiféministe", vu l'importance attachée par les Roma ines aux vêtements70. La Lex Oppia a été abrogée en 195 avant J.-C. (soit 6 ans après la fin de la guerre) suite à des manifestations des femmes romaines et contrairement à l'avis de Caton, exprimé dans un de ses fameux discours (v. Texte 26 - Gell., 17, 6). Caton s'est vengé lorsqu'il a accédé à la censure (184 avant J.C.), en décuplant les taxes sur les signes extérieurs de richesse. b) Lex Cincia de donis et numeribus (204 avant J.C.) 44. Il s'agit d'un plébiscite interdisant d'accepter des donations au-delà d'un certain montant (inconnu aujourd'hui), sauf lorsque la donation est faite entre parents71, entre fiancés et entre époux. Si la Le x Cincia es t également souvent rangée parmi les lois somptuaires, c'est que le s libéralité s peuvent être considérées comme des dépenses de luxe, et tout particulièrement dans les hypothèses visées par la Lex Cincia, de libéralités à des étrangers à la famille. c) Lex Furia Testamentaria (début du 2° siècle avant J.C.) 45. Celle-ci interdisait de faire un legs de plus de 1000 as, sauf aux cognats jusqu'au sixième degré. L'acceptation d'un legs interdit entraînait la condamnation à une peine du quadruple de la somme dépassant l es 1000 as. Cette loi se situ e dans la mê me lignée que l a précédent e. Elle est défavorable aux femmes, dans la mesure où elle interdisait aussi les dépenses de luxe en faveur des femmes étrangères à la famille du testateur. 2) Contenu et mobiles de la Lex Voconia (169 avant J.C.) 46. C'est Caton qui fait voter la Lex Voconia, en réalité un plébiscite (donc, voté par la plèbe) qui n'est pourtant applicable qu'à la première classe du cens, qui était composée d'une part importante de patriciens. Ce plébiscite dispose q ue les citoyens de la première classe du cens ne p euvent pl us instituer de femmes comme héritières72 ; de même prévoit-il que désormais personne ne peut plus recueillir à titre de legs ou à cause de mort, plus que ne recueilleraient les héritiers73. Bref, si on combine les deux dispos itions, on v oit qu'une fem me romaine ne peut plus succéder, à titre de légataire d'un citoyen romain de la première classe, qu'à la moitié de son patrimoine au maximum. 47. Quant aux raisons de la Lex Voconia, de nombreux mobiles ont étés avancés, mais il convient de ne retenir que ceux qui ont principalement déterminé la volonté de ses rédacteurs74. La véritable raison d'être de la Lex Voconia nous est probablement donnée par un extrait du discours de Caton, défendant la loi (Texte 26 - Gell., 17, 6). Dans cet extrait, Caton nous donne l'exemple d'un des excès auxquels la Lex Voconia devrait remédier. On voit bien que ce qui dérange Caton, c'est moins le luxe que l'insole nce de la femme indépendante économ iquement, disposa nt librement de biens paraphernaux. C'est ainsi que Caton s'attaque à la source majeure de son indépendance: l'institution testamentaire. La raison d'être de la loi semble donc être l'"antiféminisme"75. 70 V. C. Herrmann, Le rôle judiciaire et politique des femmes sous la République romaine, Bruxelles 1964, p. 54 ss. 71 Il s'agit en principe des cognats jusqu'au 5e degré ; V. M. Kaser, op. cit.,T. I, p. 602 et s. 72 Gaius, 2, 274. 73 Gaius, 2, 226. 74 V. R. Vigneron, L'antiféministe Loi Voconia et les 'Schleichwege des Lebens', in Labeo, 29 (1983), p. 142 ss. 75 Pour une explication plus complète, v. R. Vigneron, op. cit., p. 145 ss.

5 3) Moyens imaginés pour tourner la Lex Voconia. L'"antiféminisme" de la Lex Voconia a bien vite déplu à la population romaine, et celle-ci s'est empressée de la mettre en échec par une série de procédés issus de la jurisprudence et de la pratique: a) La jurisprudence 48. 1°. D'une part, la jurisprudence tourne la loi par une interprétation restrictive de celle-ci. Ainsi, lorsque la loi précise qu'elle s'applique aux citoyens de la première classe du cens, c'est-à-dire à ceux qui ont un patrimoine de 100.000 as, la jurisprudence76 ne se contente pas de l'existence en fait d'un patrimoine de 100.000 as, mais exige de plus, pour l'application de la loi, le recensement effectif dans la première classe du cens. 2°. De même pour le legs partiaire, par lequel le testateur charge l'héritier de partager la succession pour une fraction déterminée avec un légataire, la jurisprudence fait une interprétation restrictive de la loi et dit que l'interdiction d'instituer une femme héritière n'emporte pas comme corollaire l'interdiction d'en faire une légataire partiaire. Il semble pourtant que cette institution ait été inventée précisément dans le but de tourner la loi. Nous trouvons un exemple de legs partiaire chez Cicéron (Pro Caec., IV, 12 - Texte 17). 3°. D'autre part, dans l'interprétation des testaments, la jurisprudence fera prévaloir la favor uxoris (interprétation favorable à la femme) sur la favor heredis (interprétation favorable à l'héritier). En voici quelques exemples : -(Texte 27 - D. 33, 4, 6, pr.+1) Labéon et Servius sont d'accord pour que le legs pro dote (en restitution à la place de la dot) s oit ex écuté co nformément à la vo lonté du testateu r, même si le montant de la dot est inférieur à celui du legs (D, 33, 4, 6, pr.). Il en est de même en cas de simulation de l'intégralité de la dot, pour autant que la chose léguée soit spécifiée. Ce cas est comparé à un legs alternatif d'un esclave ou d'une somme de cent à la place, dans l'hypothèse précisément où l'esclave est mort. En effet, pour récupérer sa dot, la femme peut recourir à l'actio rei uxoriae. En cas de legs pro dote, elle dispos e en plus de l' actio ex testamen to et a donc l e cho ix entre les de ux action s. Si, tel l'esclave, son actio rei uxoriae est "morte", vu qu'il n'y a jamais eu de dot, elle aura quand même la possibilité d'intenter l'actio ex testamento. -(Texte 28 - C. 6, 44, 3) La même favor uxoris se manifeste pendant toute la période classique, avec la réserve du libellé du legs : Il faut spécifier que l'on fait un legs pro dote, à la place de la dot (et non dotis ou dotis nomine, de la dot), et le montant légué. -(Texte 29 - Scaev., D. 32, 93, 1) Favor uxoris également lorsque le testateur lègue à sa femme une somme qu'il lui aurait préalablement empruntée : sa demande de remboursement du prêt ayant échoué, elle peut néanmoins réclamer la somme à titre de fidéicommis77. -(Texte 30 - Modest., D. 31, 34, 3) Enfin, une déclaration manifestement contraire à la vérité pourra être validée à titre de legs préciputaire, pour autant que la femme puisse prouver la volonté du testateur de lui léguer les biens par préciput. b) La pratique 49. 1°. Au p remier si ècle, la pratique du recensement de vient irrégulière, ce q ui sape l'application de la Lex Voconia à la base. De plus en plus de citoyens échappent au recensement, et donc à la loi. 2°. Une autre manière d'éluder la loi, lorsque la femme à gratifier est une héritière, est de ne pas faire de testament. Il semble cependant qu'il répugnait aux Romains de la première classe du cens de mourir intestat. 76 Telle qu'elle ressort d'une interprétation a contrario de l'édit de Verres; v. Cic., in Verr., 2, 1, 104 et 106. 77 Comp. Iav., D. 35, 1, 40, 3 où le conflit entre les intérêts de l'héritier et ceux de l'esclave affranchi par le testateur est résolu en faveur du premier, du moins selon l'école servienne.

6 3°. Le s tratagème le plus usité semble avoir été le recou rs au fidéicommis, c'es t-à-dire instituer un homme comme héritier, mais en le priant instamment de transférer la succession à une femme déterminée. Ce procédé n'est initialement pas sans risques, comme a dû le constater à ses dépends Fadia, la fille de Quintus Fadius Gallus (Texte 31 - Cic., de fin., 2, 55). Auguste a cependant rendu les fidéicommis obligatoires78. 4°. Le legs de l'usufruit de tous les biens à la veuve semble avoir été un autre moyen d'éluder la Lex Voconia79. En effet, la valeur de l'usufruit de tous les biens d'un patrimoine semble souvent pouvoir être supérieure à la moitié de la valeur de ce patrimoine. Pourtant il paraît bien (Textes 17 - Cic., pro Caec., 4, 10 s.; et Texte 32 - Cic. top., 3, 17) que l'on ne se soit pas posé la question de sa régularité par rapport à la Lex Voconia. Il semble plutôt que la question de la valeur de l'usufruit se soit posé pour la première fois bien plus tard (Texte 33 - Fragm. Vat., 68), à propos de la Lex Falcidia80 (40 après J.C.). En bref, ajoutons encore que la voie détournée du legs d'usufruit de tous les biens à la veuve a été un jalon capital dans l'émancipation de la femme à Rome, car il a permis de concilier simultanément trois aspirations : une certaine indépendance économique de la veuve par un maintien de son train de vie ; une neutralisation de la Lex Voconia ; un maintien des biens dans leur famille d'origine81. B) Succession 50. La limitation des droits de la femme en matière de succession ab intestat (Texte 9 - Paul, Sent., 4, 8, 20) a été introduite soit par la Lex Voconia elle-même82, soit par la jurisprudence, dans la foulée de cette même loi83. On ne va cependant pas aussi loin pour la succession ab intestat que pour la succession testamentai re, vu que toutes les femmes n'en sont pas e xclues. A insi, les p arentes consanguines pourront toujours succéder ab intestat. L'uxor in manu est évidemment comprise parmi les consanguines, vu qu'elle est loco filiae (à la place d'une fille). C) Dot 51. A la d issolutio n du mariage, la femme récupère sa dot, ce qui lui assure une certain e indépendance économique. Les jurisconsultes ont combiné cet avantage avec les dispositions de la Lex Falcidia, pour le plus grand profit de la femme84. Le but de la Lex Falcidia est d'inciter les héritiers à accepter la succession, de manière à ce que les volontés du défunt soient respectées85, en garantissant que leur soit réservé un quart des biens de la succession (Quarte falcidienne). Ainsi, les legs ou fidéicommis dépassant la quotité disponible (trois quarts) pourront être réduits proportionnellement. C'est ici qu'il faut se poser la question de la dot et de sa restitution. Il y a plusieurs hypothèses dans lesquelles la dot est mise en danger : 1) Décès du mari Hypothèse : Le mari défunt a fait un testament par lequel il lègue plus que ce qu'il ne resterait dans son patrimoine, si on le diminuait de la dot et de la quarte falcidienne. a) Actions disponibles pour récupérer la dot 52. Si l'uxor, ou toute personne autre que son père, a payé la dot au mari (dos adventicia86), c'est l'uxor qui dispose elle-même de l'actio rei uxoriae. 78 Cette décision lui a été inspirée par d'autres mobiles que la protection des femmes; V. Inst., 2 ,23, 1; 25, pr. 79 V. R. Vigneron, op. cit., p. 151 ss. 80 V. infra n° 51. 81 Notons que l'usufruit atteint beaucoup mieux ce dernier objectif que n'ont pu le faire la tutelle agnatique ou la Lex Voconia. 82 F. Schulz, Classical Roman Law, Oxford 1951, p. 223. 83 V. par exemple: P. Voci, Diritto ereditario romano, Milano 1967, p. 409. 84 À ce sujet, v. H. Ankum, La femme mariée et la loi Falcidia, LABEO 30 (1984) 1, Napoli, pp. 28 à 70. 85 V. Gaius 2, 224 ss. 86 La dos adventicia est la dot constituée par tout autre personne que le père de la fille.

7 Si c'est son père qui a payé la dot (dos profecticia), c'est lui qui a le droit d'exercer l'actio rei uxoriae, mais il ne peut le faire qu e adiuncta filiae persona (c onjointement avec sa fille) et ne peut accepter la restitution qu'avec ratification de sa fille, sans quoi le mari n'est pas valablement libéré envers elle87. Si en plus d'avoir payé la dot, le père s'est fait promettre par stipulatio la restitution de la dot en cas de dissolution du mariage, il dispose en plus de l'actio ex stipulatu. Dans tous ces cas, la dot étant une dette de la succession, elle doit être déduite de celle-ci avant le calcul de la quarte falcidienne. b) Legatum dotis 53. Le mari peut, dans son testament, léguer la dot à sa veuve. Cela a l'avantage, pour cette dernière, de lui permettre de récupérer la totalité de la dot immédiatement par l'actio ex testamento et non pas annua bima trima die (en trois termes annuels) comme cela est le cas suite à l'actio rei uxoriae. Même en cas de Legatum dotis, la dot reste une dette de la succession (Texte 34 - Gai. D.,35, 2, 81, 1). c) Le fidéicommis 54. Le testateur peut aussi léguer la dot à sa femme par fidéicommis. Outre l'avantage d'éluder la Lex Voconia (v. supra n° 49, 3°), le fidéicommis a continué à être pratiqué, même après le déclin de la Lex Voconia, car il permet d'éviter les frictions que peut occasionner le contact entre les enfants d'un premier lit et la seconde épouse, venant à la succession. La question qui se pose ici, est de savoir si ce legs doit être considéré comme un legs ou comme une dot, eu égard au calcul de la quarte falcidienne. Pour Julien88, c'est un legs. Il peut donc y avoir lieu de le réduire, cette réduction étant alors compensée, dans le ch ef de la veuve , par l'u tilisation de l 'actio rei uxoriae co ntre l'héritier. Ulpi en ajoute que dans ce cas, l'uxor peut réclamer tout, tout de suite. Pour Marcellus au contraire (Texte 35 - Marcel., D., 35, 2, 57), il faut toujours faire comme s'il s'agissait d'une dette de la suc cession, car la p ersonne à prendre en consid ération est la persona capientis89 et non la persona interposita90. La v euve a do nc la possibilité de ré cupérer sa dot sans réduction par l'actio ex testamento. d) Les res uxoris causa parata 55. C'est en vertu de la Lex Falcidia elle-même que les choses achetées pour la femme, et léguées à celle-ci par son mari, ne peuvent pas faire l'objet d'une réduction falcidienne (Texte 37 - Gai., D., 35, 2, 81, 2). Il s'agit d'objets que la femme avait déjà à sa disposition, et qu'elle peut donc garder. Les sources nous parlent, à ce propos, essentiellement de la vaisselle, de vêtements et de bijoux. e) Legatum pro dote 56. Il arrive que le mari lègue des biens pro dote (à la place de la dot - voir supra n° 48, Texte 27 - Lab., D., 33, 4, 6 pr.+1). Ce legs a les mêmes avantages que le legatum dotis, mais permet en plus de léguer une dot de valeur supérieure à la dot originelle, voire de léguer une dot alors qu'il n'y en avait pas initialement. Scaevola nous livre une espèce relativement compliquée (Texte 36 - Scaev., D. 33, 4, 10), où la veuve est colégataire (avec Maevius) d'un fonds dont la moitié de la valeur est cependant inférieure à la valeur de la dot. Dans ce cas, Scaevola nous dit que seul le legs de Maevius doit être réduit, et qu'en plus, par le jeu de l'adcrescio, c'est à la femme que doit profiter la réduction, et non à l'héritier. Quant 87 Si la femme lui réclamait à nouveau la dot, il serait donc obligé de payer une seconde fois, mais disposerait d'une condictio contre son beau-père (D. 46, 3, 34, 6). 88 V. Ulp., D. 33, 4, 1, 12. 89 Destinataire effectif du bien successoral. 90 Personne interposée; Il en est ainsi dans d'autres cas également: par exemple en cas de fidéicommis d'usufruit, l'usufruit prend fin à la mort du bénéficiaire et non à celle du légataire (Gai. D. 33, 2, 29).

8 au reste, c'est-à-dire ce qu'il m anquerai t encore à la femm e pour reconstituer sa dot, elle peut le réclamer par l'actio rei uxoriae à l'héritier. 2) Décès du père de la mariée Hypothèse: Une dos profecticia91 a été constituée et le mariage vient à être dissous. Que devient la dot? a) Principe : Le père de la mariée a réclamé et obtenu la dot 57. Dans ce cas, la dot se confond à nouveau avec le reste du patrimoine paternel. N'oublions pas cependant qu'il fallait au père le consentement de sa fille pour réclamer la dot (cfr. supra n° 52). b) Exception : Le père de la mariquotesdbs_dbs30.pdfusesText_36