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permet d'aborder un problème médical avec une approche mieux adaptée que celle L'ontologie est donc pour l'ingénierie des connaissances

Experts sciences et sociétés u vu de la place dominante qu'occupent les experts dans notre société, le citoyen peut être amené à se demander ce qu'est un

expert et sur quel socle repose son autorité. Comment peut-il évaluer sa crédibilité, et à qui se vouer dans les cas (fréquents) où plusieurs experts

divergent d'opinion Fruit du travail de dix-neuf chercheurs, cet ouvrage collectif présente le personnage social de l'expert, les usages sociopolitiques de son travail ainsi que les manières d'arbitrer ses prétentions dans notre société. Une des grandes forces de ce livre tient à son caractère multidisciplinaire,

qui accorde une place importante à la philosophie, à la science politique, à l'histoire, à la sociologie et aux sciences de la communication. Chaque

texte offre un état de la question sur un volet précis et donne des clés d'explication à des problèmes actuels : contestation de la statistique publique, place des valeurs et des citoyens dans les décisions publiques, rôle social de la science, régulation des groupes professionnels ou

rapports de pouvoir dans les espaces numériques. Les auteurs rendent ainsi compte des acquis de la recherche et des débats en cours, et offrent

un outil de référence qui s'adresse au grand public comme aux spécia- listes et aux étudiants en sciences humaines et sociales. François Claveau est professeur adjoint au Département de philosophie et éthique appliquée de l'Université de Sherbrooke, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en épistémologie pratique et membre régulier du Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST) et du Centre de recherche en éthique (CRÉ).

Julien Prud'homme

, historien, est professeur au Département des sciences humaines à l'Université du Québec à Trois-Rivières, chercheur associé au Centre interuniversitaire

de recherche sur la science et la technologie (CIRST) et membre régulier du Centre interuniversitaire d'études québécoises (CIEQ).

27,95 $ 25

Illustration: Myriam Van Neste

Disponible en version numérique

Les Presses de l'Université de Montréal

LIBRE ACCÈSPDF et ePub gratuits en ligne

www.pum.umontreal.ca

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Experts, sciences et sociétés

Sous la direction de

François Claveau et Julien Prud"homme

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Mise en pages : Yolande Martel

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Prud"homme, Julien, -, auteur

Experts, sciences et sociétés / Julien Prud"homme, François Claveau.

Comprend des références bibliographiques.

Publié en formats imprimé(s) et électronique(s).

ISBN ----

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ISBN ---- (EPUB)

. Spécialistes. . Expertises - Aspect social. . Expertises - Aspect politique. I.

Claveau, François, -, auteur. II. Titre.

HM.P ." C-- C--

Dépôt légal

er trimestre Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l"Université de Montréal, Les Presses de l"Université de Montréal remercient de leur soutien nancier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).

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Introduction

et al . Pour d'autres historiens adoptant une interprétation semblable, voir la note dans Farley et al

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10 experts, sciences et sociétés la variole sera bel et bien éradiquée grâce à une campagne de l"Organisation mondiale de la Santé conjuguant surveillance, connement et vaccination. En , cependant, tout n"était pas si simple, et c"est peut-être le compte rendu de White qui pêche par simplisme. L"épisode, au contraire, illustre trois aspects cruciaux du débat actuel sur la place des experts dans nos sociétés. En premier lieu, les tensions entourant l"épidémie de sont multidimensionnelles et débordent le seul débat sur la vaccina- tion. La population s"opposait davantage à l"autoritarisme des res- ponsables (placardage des maisons touchées, transport forcé des malades vers un hôpital mobilisé pour la cause) qu"au principe de la vaccination lui-même. De plus, on pouvait légitimement mettre en doute la compétence des autorités : l"épidémie était attribuable à la négligence d"un hôpital, les doses de vaccin étaient souvent d"une qualité si discutable que plusieurs médecins refusaient de les administrer, et les mesures d"isolement forcé donnèrent lieu à diverses bavures. Enn, l"épidémie survient dans un contexte de fortes tensions politiques entre franco-catholiques et anglo- protestants, suivant de près le procès et la condamnation à mort du leader métis Louis Riel, qui indignent les Canadiens français. Aussi, lorsque des industriels anglophones obligent leurs ouvriers francophones à se faire vacciner, les plus méants voient dans la campagne sanitaire un nouveau front dans la " guerre contre les

Canadiens français

En outre, les lignes de clivage entre les acteurs n"ont en fait rien de simple et ne conrment pas le mythe d"une opposition claire entre, d"un côté, une populace mal instruite victime d"une élite clé- ricale obscurantiste et, de l"autre, une élite laïque et bourgeoise au fait des avancées scientiques. En réalité, et contrairement à ce que White insinuait, les autorités cléricales catholiques appuient alors ouvertement, et depuis des décennies, les politiques de vaccination.

À l"inverse, la communauté "

experte » en santé publique est loin

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11 introduction de faire bloc derrière les autorités. Au Québec comme ailleurs, la communauté médicale du XIX e siècle est divisée. Des médecins anti-vaccin, tant francophones qu"anglophones, soutiennent que la vaccination n"est pas une technologie appropriée, ou à tout le moins qu"elle n"est pas au point. Plusieurs de ces médecins ne sont pas des conservateurs, mais des progressistes - voire des socialistes - qui estiment que la cause principale des épidémies est plutôt l"insalubrité qu"entraînent la pauvreté et le mauvais aménagement des villes : ces médecins s"appuient sur diverses données de santé publique et estiment que la science est de leur côté. Ce dernier point montre, en troisième lieu, que le recours à la science ne sut pas toujours à régler ce genre de question. Au XIX e siècle, même les médecins qui approuvent la vaccination ne s"appuient pas sur un réel consensus scientique : il existe entre ces experts d"importantes divergences d"opinions, portant sur la nature réelle de l"eet vaccinal ou sur les conditions d"une vaccination ecace (nombre de doses, etc.). Dans ces conditions, plusieurs médecins provaccin de l"époque s"appuient, en partie, sur des conclusions que nous savons aujourd"hui être fausses. Bref, même si l"histoire a validé la pratique de la vaccination, celle-ci suscitait, dans ces temps pionniers, plusieurs incertitudes légitimes qui opposaient les " experts » entre eux. Ces trois aspects, à savoir la multidimensionnalité des enjeux sociopolitiques liés à l"expertise, les lignes de clivage souvent plus oues qu"on ne le voudrait entre les groupes sociaux, et l"insu- sance du seul recours au consensus scientique pour résoudre un bon nombre de questions, caractérisent les débats d"aujourd"hui dans un éventail de domaines. Les pouvoirs et les opinions se fient à des experts pour façonner l"avenir et, en contrepartie, il arrive fréquemment que ces sources d"expertise se trouvent contestées, utilisées, interprétées, brandies, idéalisées ou diabo- lisées de manières multiples, et qui laissent perplexe. Que penser des interventions d"experts sur les politiques économiques ou de

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12 experts, sciences et sociétés santé publique, sur les risques écologiques ou les changements climatiques, dans les causes judiciaires ou la tenue des recense- ments ? Les experts prennent-ils " trop » de place dans la discus- sion publique, ou " pas assez » ? Quel poids devrait avoir un avis d"expert face à des situations nécessairement complexes et, on l"a vu, multidimensionnelles ? Comment, de manière générale, évaluer la crédibilité d"un expert, et à qui se vouer dans les cas (fré- quents) où des experts divergent d"opinion ? Quel type de savoir détient un expert, et de quoi la " montée des experts » est-elle le symptôme ? Qui donc est, ou devrait être, un expert, et expert de quoi

Le terme "

expert » est d"un emploi courant. Il revêt, par consé- quent, plusieurs significations. Nous souhaitons ici délimiter l"interprétation que nous en faisons. Une raison d"être circonspect est que tout travail de dénition du terme " expert » suppose un travail d"exclusion aux implica- tions politiques évidentes : décider qui est ou n"est pas un expert a un eet sur la distribution des avantages et du pouvoir en société. Divers acteurs ont un intérêt direct soit à in uencer les interpré- tations communes du terme (pour attribuer ou ôter le chapeau d"expert à certains individus), soit à adapter leur comportement pour se conformer à ces interprétations. Il demeure qu"une discussion sérieuse se doit de dénir ses termes principaux. Dans un ouvrage de synthèse comme le nôtre, cette exigence devient d"autant plus impérieuse : une dénition préalable est nécessaire pour orir un tour d"horizon cohérent, mais aussi pour baliser une discussion qui permettra d"explorer, de préciser, voire de nuancer les idées de départ. Ne serait-ce que de façon provisoire, nous proposons donc de circonscrire le per- sonnage de l"" expert » selon trois caractéristiques.

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13 introduction Premièrement, l"expert est un individu qui possède une supé- riorité épistémique (c"est-à-dire une supériorité de connaissance) dans un domaine donné. Cela appelle quelques commentaires.

Première remarque

: la mention d"un " domaine » est cruciale, car l"expertise implique la spécialisation. L"expert n"est pas expert de tout, ce qui signie qu"un individu, même expert dans un domaine particulier, reste un non-expert dans la grande majorité des autres domaines. De là la dénition en forme de boutade oerte par Paul

Feyerabend ( [], -)

: un expert, dit-il, est un individu qui a décidé d"atteindre l"excellence, l"excellence suprême dans un domaine étroit aux dépens d"un développement équilibré Comme les enjeux sociopolitiques sont multidimensionnels, cette spécialisation implique qu"un expert ne pourra en éclairer qu"une partie. Seconde remarque : l"idée de " supériorité » est, par dé- nition, relative : elle suppose une comparaison avec autrui. Cet aspect comparatif est double. D"une part, être supérieur à autrui ne signie pas être infaillible : il faut distinguer supériorité et perfection. D"autre part, la forte maîtrise d"un domaine ne sut pas à faire un expert : il faut encore que cette maîtrise soit signi- cativement plus élevée que la moyenne. Par exemple, marcher sans tomber ne fait pas de vous un expert en marche, puisque ce savoir- faire est largement répandu. Finalement, notons que l"idée de supériorité épistémique indique déjà la dimension politiquement sensible de la gure de l"expert : désigner quelqu"un comme expert, c"est le situer, du point de vue épistémique et dans un domaine circonscrit, au-dessus de ses concitoyens. Deuxièmement, le propre de l"expert est de se réclamer de cette supériorité pour orienter l"action publique. Ce lien à l"action publique peut prendre la forme d"un avis que donne l"expert à un décideur quelconque, qu"il s"agisse d"un élu voulant implanter une politique, d"un fonctionnaire ou d"un juge qui doit rendre un verdict. Le conseil au décideur peut aussi emprunter des voies plus indirectes, par exemple, quand l"expert se prononce dans les

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14 experts, sciences et sociétés médias ou par d"autres canaux de la société civile an d"in uen- cer, au bout du compte, la décision publique. À l"inverse, l"expert peut s"impliquer dans l"action plus directement que par le conseil on peut le mandater pour agir au nom d"autrui, comme le médecin qui met en place des programmes de santé publique ou le spécia- liste de la politique monétaire qui devient banquier central. Dans tous les cas, ce lien à l"action rend le phénomène de l"expertise politiquement sensible, puisque le décideur, en reconnaissant son ignorance, délègue à l"expert au moins une partie du processus de décision publique. Notons que ce rapport à la décision et au poli- tique, de même que la variété des formes possibles d"intervention de l"expert contribuent à brouiller les lignes de partage entre les actions de l"expert et la décision publique elle-même, ou encore entre l"expert et d"autres acteurs impliqués dans la décision (voir les chapitres de Landry, de Prud"homme ou de Wallut et Prévost). Troisièmement, la supériorité épistémique de l"expert est reconnue socialement. Cette reconnaissance est typiquement liée à la formation, et donc à un processus institutionnalisé, rela- tivement uniforme, censé procurer et attester cette supériorité - le plus souvent une formation universitaire. Dans nos sociétés, cette institutionnalisation de la formation des spécialistes participe d"un idéal ambitieux de régulation des savoirs : on s"attend à ce que les experts d"un domaine donné partagent des savoirs com- muns au point d"en devenir pratiquement interchangeables. Leurs avis, dans leur domaine propre d"expertise, devraient converger, attestant de ce fait le caractère éprouvé et normalisé de leurs connaissances. Or dans la réalité, cette interchangeabilité est souvent illusoire (voir, entre autres, les chapitres de Bernheim et de Montpetit) ou à tout le moins relative, ce qui peut alimenter la méance des profanes envers les communautés d"experts. Il faut aussi noter qu"une formation institutionnalisée n"est pas une condition absolument nécessaire d"une reconnaissance sociale et qu"il existe d"autres façons d"obtenir cette reconnaissance, comme

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15 introduction en témoignent les revendications d"" expertise citoyenne » (voir le chapitre de Bérard) ou la persistance d"une compétition entre le personnage de l"expert et d"autres dépositaires d"un savoir spécial (voir le chapitre de Giry et Landry). Ces trois caractéristiques permettent de circonscrire le person- nage de l"expert de façon substantive (supériorité épistémique), fonctionnelle (service pour l"action publique) et relationnelle (reconnaissance sociale de la supériorité). Elles permettent de distinguer entre l"expert et d"autres personnages qui rassemblent seulement une partie de ses caractéristiques. De surcroît, elles signalent utilement les cas où les frontières se brouillent. En réa- lité, ces personnages frontière sont nombreux. Un premier personnage frontière est le chercheur scientique, ou autre spécialiste réputé, qui est détenteur de la première caracté- ristique et de la dernière : il en sait plus sur son domaine que le pro- fane et il est reconnu comme tel. Mais tout spécialiste réputé n"est pas nécessairement un expert selon notre dénition : il faudrait encore qu"il utilise son savoir pour orienter l"action publique. Un spécialiste du Big Bang, par exemple, pourra nous fasciner en nous relatant les dernières découvertes sur l"origine de l"univers, sans pour autant orienter l"action. Il est pertinent de noter que l"exclusion du champ de l"expertise pour un type de connaissance n"est pas un invariant historique : les spécialistes des lunes de Jupiter deviennent experts lorsqu"on décide de coloniser ces dernières. Il demeure cependant utile de distinguer l"" expert » du " scientifique », de manière à envisager séparément les dynamiques bien diérentes qui prévalent dans la sphère de la décision publique et dans la sphère universitaire (même s"il est parfois utile de ré

échir à partir

de situations communes aux deux personnages ; voir les chapitres de Millerand, Heaton et Myles ou de Bouchard et Montminy).

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16 experts, sciences et sociétés Notre dénition aide aussi à exclure de l"analyse le personnage du " charlatan ». Dans ce cas, c"est la première caractéristique qui fait défaut : la prétention à la supériorité épistémique est factice. Le charlatan a une action particulièrement dommageable lorsqu"il prote d"une forte reconnaissance sociale pour in uencer la déci- sion publique ; bref, il est nocif quand il n"est pas reconnu pour ce qu"il est vraiment. Il s"ensuit qu"il est primordial que nos méca- nismes sociaux de reconnaissance de l"expertise ne soient pas arbi- traires : idéalement, il faudrait que la supériorité épistémique ne soit socialement reconnue que si et seulement si elle est réelle. Bien sûr, nos mécanismes d"évaluation et de reconnaissance sont imparfaits, et les critères à employer ne font pas toujours l"unanimité (voir les chapitres de Guillin, de Beauchamp et Dubé ou de Claveau et Voisard). Le plus souvent, ces mécanismes imparfaits produisent des résultats ambigus et il arrive qu"une part de la population perçoive une crédibilité là où les autres détectent le charlatanisme.

Un troisième personnage, celui du "

connaisseur méconnu », est l"envers du charlatan. Dans ce cas, les mécanismes sociaux de reconnaissance sont trop restrictifs : quelqu"un ayant des connaissances spécialisées qui pourraient éclairer la décision publique ne reçoit pas la reconnaissance nécessaire pour exercer une in uence. Plusieurs individus ou groupes organisés formulent ainsi des " revendications d"expertise », c"est-à-dire qu"ils veulent faire reconnaître leur expertise dans ce qu"ils perçoivent comme des tentatives de s"extraire du statut de connaisseur méconnu (voir le chapitre de Bérard). Il y a un avantage clair pour une société à diminuer le nombre de connaisseurs méconnus. Assouplir nos mécanismes de reconnaissance face à leurs revendications risque toutefois d"ouvrir la porte aux charlatans, qui peuvent adapter leurs comportements pour acher ce qui est socialement perçu comme des marqueurs d"expertise. Chacun à sa façon, ces personnages frontière ont le mérite de nous forcer à préciser, ne serait- ce que par la négative, ce que nous

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17 introduction entendons par les mots " expert » ou " expertise » - en ré

échis-

sant à la fois sur les traits propres à l"expert lui-même et sur les mécanismes sociaux par lesquels nous produisons, reconnaissons et sollicitons les experts. Une vaste ré exion, qui requiert de mul- tiples points de vue. La place des experts (ou de ceux qui se font reconnaître comme tels) dans nos sociétés est un sujet chaud. L"exemple de la crise des vaccins de nous montre que la tension entre notre méance et notre dépendance à l"endroit des experts n"est pas qu"un phéno- mène passager. Il existe à cela diverses raisons, propres à la vie moderne. L"une est la perception que la vie sociale, en changement continu, jette à nos pieds des problèmes sans cesse inédits, nous inspirant un besoin toujours renouvelé de repères. Une autre raison est la division du travail, qui nous force à admettre que nos champs de compétences sont limités et que les repères que nous cherchons ne peuvent venir uniquement, ou même principalement, de nous- mêmes (sur la reconnaissance de l"ignorance et la montée de l"expert de manière générale, voir le chapitre de Düppe). À ces conditions s"ajoutent toutefois des raisons de douter des experts.

Nous en avons déjà évoqué une

: évaluer la supériorité épistémique d"un prétendant au titre d"expert n"est pas facile, et les circons- tances laissent souvent place à un doute raisonnable. À cette rai- son épistémique s"ajoute une raison plus politique, et résolument moderne : notre soif d"autonomie, individuelle mais aussi collec- tive, qui s"exprime autant dans le projet des Lumières de " penser par soi-même » que dans l"idéal du régime démocratique. Vue sous cet angle, la reconnaissance de la supériorité d"un grand nombre d"expertises peut être interprétée (ou vécue) comme une abdica- tion de notre droit individuel et collectif à nous autodéterminer.

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18 experts, sciences et sociétés Bref, la tension entre méfiance et dépendance envers les experts est plus qu"un sujet chaud : plus profondément, elle unit diérentes facettes de notre vie moderne. C"est pourquoi les cher- cheurs de diverses disciplines visent à mieux la comprendre. Leurs questions, nous semble-t-il, se complètent : l"historien cherche les origines du phénomène et ses trajectoires au long cours, le politologue étudie l"insertion des experts dans la prise de décision et les institutions publiques, le sociologue caractérise des formes novatrices de revendications d"expertise ainsi que leurs fortunes sociales, le chercheur en communication inspecte les véhicules techniques qui modient le partage et le dialogue sur le savoir, le philosophe se questionne sur ce qui peut guider ou rendre raison- nables les opinions expertes sur le plan épistémique. La littérature sur l"expertise est donc vaste et riche, avec des recherches qui se font encore souvent dans un cadre disciplinaire. Notons, par exemple, des introductions du point de vue de la socio- logie (Trépos, ; Delmas, ), et des ouvrages collectifs avec des ancrages en sciences politiques (Dumoulin ., ), en phi- losophie (Selinger et Crease, ), en histoire (Rabier, ) et en communication (Maxim et Arnold, ). La ré exion sur l"exper- tise a toutefois tout à gagner à de plus grands échanges entre les disciplines. Pour le chercheur ou l"observateur individuel, qui plus est, il paraît nécessaire de s"abreuver aux divers points de vue pour se bâtir un regard équilibré. Le champ STS (pour " science, tech- nologie et société

» ou, en anglais, )

constitue sans doute le meilleur lieu pour une telle rencontre. Les chercheurs en STS participent depuis longtemps à la ré exion sur le sujet (p. ex. : Jasano, ), avec des contributions innovantes jusqu"à ce jour (p. ex. : Collins et Evans, ). En brossant un tableau de l"état de la question, une première en langue française, ce livre entend montrer que le croisement des perspectives disciplinaires autour d"une dénition commune permet d"éclairer le phénomène contemporain de l"expertise, d"en

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19 introduction orir une compréhension ne et d"ouvrir à des échanges et des pistes de recherche inattendus. C"est pourquoi chaque chapitre, tout en se concentrant sur un aspect spécique du phénomène de l"expertise, fait référence aux autres chapitres pertinents de l"ouvrage. Le livre est ainsi organisé à la fois pour se lire d"un trait, comme un manuel ou un ouvrage de synthèse, ou pour être consulté selon les besoins du moment en suivant les renvois d"un texte à l"autre, à la manière d"un ouvrage de référence. Chaque cha- pitre se termine par une courte bibliographie qui indique certains titres incontournables. Les collaborateurs à cet ouvrage ont aussi participé à la constitution d"une liste plus exhaustive de références que l"on peut consulter sur le site web du Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie, à l"adresse www.cirst. L"ouvrage est divisé en trois parties. La première campe le personnage de l"expert lui-même, en explorant ses origines his-quotesdbs_dbs31.pdfusesText_37
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