[PDF] LE PROCESSUS DE TRANSMISSION DES VALEURS CHEZ LES





Previous PDF Next PDF



chapitre 6 v4 14-2

le texte illustrent l'idée de « caprices de la mode ». Je trouve les caprices de la mode



I. ANALYSE LITTÉRAIRE

05-Dec-2020 Texte analysé : Lettre 99 Les caprices de la mode ... Montesquieu



Maurice Debesse

compréhensif il n'acceptait pourtant pas les caprices de la mode des mondiale quand



Les jeunes couples lamour et le téléphone portable : le mode d

Janvier 2019. LES JEUNES COUPLES L'AMOUR ET LE TÉLÉPHONE. PORTABLE : LE MODE D'EMPLOI. Caprice des Dieux. Etienne Mercier (etienne.mercier@ipsos.com).



Les 1000 premiers jours

B) Un mode de vie et un environnement sains posent les fondements périnatales et les troubles psychiques plus sévères des jeunes parents .



LE PROCESSUS DE TRANSMISSION DES VALEURS CHEZ LES

19-Dec-2007 LES AMIS ET LEUR RESPONSABILITE DANS LA DEVIANCE DES JEUNES. ... accélérée le caprice subjectif



Les NOUVEAUX MODÈLES MODE ÉCONOMIQUES

25-Jun-2020 plat du système de la mode est déjà bien ancrée dans les esprits



dossier pédago tenues de soirée

par « des sosies » (jeunes filles choisies en fonction de la morphologie Les caprices et l'extravagance de la mode parisienne sous l'œil critique de ...



Accueillir la petite enfance : programme éducatif pour les services

la qualité des pratiques éducatives auprès des jeunes enfants qui fréquentent nos calme et positive et éviter de parler des caprices ou aversions du.



Alfred de Musset - Les caprices de Marianne

Marianne sortant de chez elle un livre les jeunes gens de la ville



LES CAPRICES DE LA MODE - Collège Jacques Prévert de Bourg

Dans ce texte à travers la critique de la mode c’est l’inconstance de ceux qui la suivent qui est stigmatisée : les Parisiens changent de style sans réfléchir au simple prétexte que c’est la mode Chacun y est soumis comme le citoyen est soumis à son roi Montesquieu critique l’attitude des Parisiens à travers la voix de ses



RICA À RHÉDI À Venise Je trouve les caprices de la mode

Il en est des manières et de la façon de vivre comme des modes : les Français changent de mœurs3 selon l’âge de leur roi Le monarque pourrait même parvenir à rendre la nation grave s’il l’avait entrepris Le prince imprime le caractère de son esprit à la cour la cour à la ville la ville aux provinces L’âme du souverain

Quels sont les caprices de la mode chez les adolescents français ?

Je trouve les caprices de la mode chez les adolescents français étonnants. Les adolescents de nos jours portent les cheveux dressés sur la tête comme une brosse. Ils portent leur pantalons très bas on dirait qu’ils ont oublié de mettre leur ceintures. De plus il gardent un engin électronique : ils jouent et même se parlent !

Quels sont les caprices de la mode chez les Français ?

Je trouve les caprices de la mode chez les français étonnants. Ils portent tous des pantalons qu’ils appellent >, les garçons plus bas que les filles. Peut-être que leurs parents les achètent plus grands de peur qu’ils grandissent trop vite. Et ils portent des chaussures qu’ils appellent baskets.

Pourquoi les jeunes ont-ils besoin d’apparence physique ?

L’apparence physique est un élément très important dans la vie des jeunes. Ils se doivent faire bonne impression pour arriver à se faire accepter par des groupes d’amis branchés. Ce désir constant de vouloir s’intégrer et de vouloir se faire remarquer par tous, dérive de la superficialité.

Pourquoi les adolescents français passent-ils leur temps à taper sur un boîtier noir ?

Ils passent leur temps à taper sur un boîtier noir qu’ils appellent ‘portable’. Ils doivent être sourd car ils ont des fils noirs qui parte dans leurs oreilles. Il est des manières et de la façon de vivre comme des modes : les adolescents français changent de mode comme les américains.

391

UNIVERSITÉ RENNES-2 HAUTE-BRETAGNE

FACULTÉ DE SCIENCES DE L"ÉDUCATION

N° attribué par la bibliothèque ..............................

THÈSE

pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L"UNIVERSITÉ RENNES-2 HAUTE-BRETAGNE

Discipline : Sciences de l"Education

présentée et soutenue publiquement par

ERNESTO LONDONO OROZCO

le 13 Novembre 2006 Titre

LE PROCESSUS DE TRANSMISSION DES VALEURS

CHEZ LES JEUNES

Etude comparative de trois configurations colombiennes 392

Directeur de thèse :

Monsieur le Professeur Jean-Manuel de QUEIROZ

Jury M. le Professeur Jean-Manuel de QUEIROZ (de l"Université Rennes-2) M. le Professeur Patrick TAPERNOUX (de l"Institut Catholique de Paris) M. le Professeur Paul TAYLOR de l"Université Rennes-2) M. le Professeur Laurent CORNAZ (de l"Institut Catholique de Paris) 393

A mon père, Jaime, et à ma soeur aînée, Luz María, qui sont partis pour l"éternité pendant que je faisais cette recherche.

A ma mère, à mes frères et soeurs qui m"ont toujours encouragé dans ce travail,

AVEC MON AMOUR FILIAL ET FRATERNEL.

A mes frères franciscains de la Province de la Santa Fe en Colombie,

Avec ma profonde gratitude.

394

REMERCIEMENTS

Si j"ai pu entreprendre ce travail de recherche, c"est grâce au soutien inconditionnel des Supérieurs Provinciaux franciscains colombiens,

les frères Adolfo Galeano et Francisco Leonardo Gómez. Qu"ils trouvent ici l"expression de ma reconnaissance.

Les résultats de cette recherche doivent beaucoup aux orientations et précieux conseils des professeurs Patrick Tapernoux et Jean-Manuel

de Queiroz. A eux vont mes sincères remerciements pour leur accompagnement dans cette aventure intellectuelle.

Je tiens à remercier soeur Danièle Souillard et les Soeurs Servantes du Sacré Coeur de Jésus de m"avoir offert leur généreuse hospitalité au

long de ces années d"étude.

Merci aux Frères du Couvent Saint François et de la Province Franciscaine de Paris, qui m"ont réservé un accueil profondément

fraternel. 395

Ma reconnaissance à Madeleine, Jacqueline et Anne, pour leur patience dans la correction des textes. Merci pour leurs remarques et

suggestions, merci d"avoir rendu cet écrit plus accessible au lecteur français.

Enfin merci à M. Philippe Potdevin pour le délicat et patient travail de mise en page, pour sa disponibilité toujours simple et chaleureuse.

SOMMAIRE

INTRODUCTION ...................................................................................................................................................9

PREMIÈRE PARTIE CONTEXTUALISATION DE NOTRE OBJET DE RECHERCHE.......................17 396

CHAPITRE 1 LE PROBLÈME DES VALEURS AUJOURD'HUI...................................................................19

1.1 LES VALEURS FACE AUX EFFETS DE LA MONDIALISATION.................................................................... 19

1.2 L"INDIVIDUALISME.............................................................................................................................. 25

1.3 L"UNIVERSALISME ET LE RELATIVISME DES VALEURS......................................................................... 30

1.4 QU"EST-CE QUE LA VALEUR ?.............................................................................................................. 37

1.5 VALEURS ET CROYANCE...................................................................................................................... 42

1.6 CONTEXTE GEOGRAPHIQUE ET HISTORIQUE DU TRAVAIL DE TERRAIN................................................. 45

CHAPITRE 2 LA TRANSMISSION : CONCEPT, PROCESSUS ET ENJEUX.............................................53

1.1 QU"EST-CE QUE TRANSMETTRE ?......................................................................................................... 58

1.2 LA TRANSMISSION EN TANT QUE PROCESSUS....................................................................................... 69

1.3 TRANSMISSION, CONFIGURATION ET INTERACTIONS SYMBOLIQUES.................................................... 73

1.4 CE QUE NOUS DISENT LES STATISTIQUES.............................................................................................. 83

CHAPITRE 3 LES ADOLESCENTS ET LES JEUNES DANS LE PROCESSUS DE TRANSMISSION DE VALEURS 93

1.1 LES ADOLESCENTS ET LES JEUNES DANS NOS ENQUETES...................................................................... 94

1.2 LES CONCEPTS D"ADOLESCENCE ET DE JEUNESSE.............................................................................. 108

1.3 LE MONDE ADULTE EN MAL DE TRANSMISSION.................................................................................. 119

1.4 LES AMIS, LE GROUPE DE PAIRS ET LE TRI DES VALEURS.................................................................... 126

DEUXIEME PARTIE CONFIGURATIONS SOCIO-HISTORIQUES ET PROCESSUS DE TRANSMISSION 130

CHAPITRE 4 "CONFIGURATION" INSTITUTION ÉDUCATIVE.............................................................133

1.1 MEDELLIN ET LE COLLEGE " FRAY RAFAEL DE LA SERNA »............................................................. 134

1.2 L"ÉDUCATION EN COLOMBIE............................................................................................................. 138

1.3 LE ROLE DE L"ECOLE DANS LE PROCESSUS DE TRANSMISSION........................................................... 143

1.4 PROBLEMATISER ET REFLECHIR......................................................................................................... 186

1.5 TRANSMISSION ET ACTION PEDAGOGIQUE......................................................................................... 188

1.6 LA DIFFICULTE DE TRANSMETTRE POUR L"IDENTIFICATION AU ROLE................................................ 190

1.7 TRANSMISSION ET APPARTENANCE SOCIALE...................................................................................... 194

1.8 MODELES DE TRANSMISSION DE VALEURS EN EDUCATION : GRUNDTVIG ET TAGORE....................... 196

CHAPITRE 5 "CONFIGURATION" FAMILLE LA FAMILLE EN INTERACTION AVEC L'ECOLE211

1.1 LA FAMILLE OBSERVEE ET JUGEE DEPUIS L"ECOLE. TRANSMISSION ET AUTORITE............................. 213

1.2 RUPTURE DE LA TRANSMISSION OU AGGIORNAMENTO DE CE QUI A ETE REÇU ?................................. 232

1.3 LES "AUTRUI SIGNIFICATIFS" : PARENTS OU ADULTES QUI ONT EU LE PLUS D"INFLUENCE SUR MOI... 235

397

1.4 CRITERES DE REFUS DES VALEURS ET RESPONSABILITE DE LA FAMILLE DANS LA DEVIANCE DES JEUNES239

1.5 COMMENT LES VALEURS VOUS ONT-ELLES TRANSMISES ?................................................................. 243

1.6 SITUATIONS D"URGENCE ET TRANSMISSION....................................................................................... 245

1.7 LA FAMILLE EN VOIE DE TRANSFORMATION...................................................................................... 247

1.8 TRANSMISSION DES IDENTITES RELIGIEUSES...................................................................................... 251

CHAPITRE 6 "CONFIGURATION" QUARTIER POPULAIRE..................................................................255

1.1 SITUATIONS DE RISQUE ET TRANSMISSION......................................................................................... 255

1.2 LES QUARTIERS SANTO DOMINGO ET SAN PABLO............................................................................. 257

1.3 JEUNES ET JEUNESSE DANS LES QUARTIERS POPULAIRES................................................................... 262

1.4 LA FAMILLE EN SITUATION DE RISQUE : L"ECHEC ET LA REUSSIE DE LA TRANSMISSION..................... 272

1.5 L"ECOLE DANS LES ZONES DE RISQUE : SON ROLE VITAL ET SES DEFAILLANCES DANS LA TRANSMISSION278

1.6 COMMENT LES VALEURS VOUS ONT-ELLES ETE TRANSMISES ?.......................................................... 281

1.7 LES AMIS ET LEUR RESPONSABILITE DANS LA DEVIANCE DES JEUNES................................................ 287

1.8 RUPTURE DE LA TRANSMISSION OU AGGIORNAMENTO DE CE QUI A ETE REÇU................................... 289

CHAPITRE 7 "CONFIGURATION" COMMUNAUTÉ INDIENNE : LE PEUPLE PAEZ (NASA).........293

1.1 HISTOIRE, TRADITION ET PROCESSUS DE TRANSMISSION.................................................................... 296

1.2 L"ECOLE : LIEU DE "CONSCIENTISATION" ET D"EMANCIPATION......................................................... 315

1.3 LE JEUNE DES COMMUNAUTES INDIENNES......................................................................................... 317

1.4 LA FAMILLE : TRANSMISSION DES VALEURS TRADITIONNELLES ET MODERNITE................................ 320

1.5 REFUS DES VALEURS, AGGIORNAMENTO OU OUVERTURE A DE NOUVELLES VALEURS ? .................... 323

TROISIEME PARTIE L'INCORPORATION DE VALEURS....................................................................327

CHAPITRE 8 LE PROCESSUS D'INCORPORATION DE VALEURS .......................................................329

1.1 J"AI REÇU, J"AI INCORPORE ET TRANSMIS, JE TRANSMETTRAI............................................................ 331

1.2 LES EXIGENCES DE LA TRANSMISSION............................................................................................... 335

1.3 LE RECEPTEUR ET LE VECU DES VALEURS INCORPOREES................................................................... 362

ANNEXE I TABLEAU DES INTERVIEWÉS ..................................................................................................385

ANNEXE II MODÈLE D'UN TRAVAIL D'ENTRETIEN..............................................................................391

398

ANNEXE III D'AUTRES ENTRETIENS ..........................................................................................................405

BIBLIOGRAPHIE ..............................................................................................................................................425

TABLE DE MATIERES.....................................................................................................................................441

INTRODUCTION

399

Le but de ce travail de recherche est l"étude du processus de transmission et d"incorporation des valeurs comme partie essentielle de l"éducation.

L"objet est de montrer ce qui devrait permettre de mieux comprendre les difficultés contemporaines de cette transmission. Notre souci fondamental est

de comprendre les éléments qui interviennent pour l"appropriation existentielle et critique des valeurs. Il s"agit donc d"une réflexion qui part de

l"expérience des acteurs, pour découvrir ce qui détermine la "transmission" et l""incorporation". Notre intérêt n"est donc pas de nous demander :

quelles valeurs doit-on transmettre ? Il existe de multiples réponses selon les cultures, groupes humains, sociétés, etc.. Une première hypothèse vise à

montrer qu"il existe un "comment" de la transmission, c"est-à-dire un processus et des conditions qui peuvent s"appliquer partout, et aussi un processus

dans l"appropriation de tout ou d"une partie de ce qui a été transmis. Précisément, au cours de notre travail, nous avons constaté que ce "comment" de

la transmission échappe le plus souvent aux chercheurs. Nous nous demanderons donc quels sont les éléments intervenant dans ce processus et quelles

en sont les exigences pour qu"une transmission des valeurs aboutisse à leur incorporation.

Ces questions marquent le chemin de notre recherche : il nous faudra montrer comment se façonnent, se généralisent, se légitiment, se détectent,

s"interprètent, se vivent ou se rejettent les valeurs. Pour y répondre nous ferons cette démarche : d"abord, en quoi consiste la transmission (chapitre 2),

ensuite, comment elle peut s"effectuer à travers des différences, des divergences - y compris sur des points essentiels - et des conflits (chapitres 4, 5, 6

et 7). Enfin, nous étudierons comment se fait l"entrecroisement dialectique entre le passé, le présent et l"avenir désiré. La transmission est donc un

phénomène qui échappe à la simple répétition, ou à une reproduction passive de certaines vérités essentielles qu"une génération cherche à "passer" aux

autres générations. Si le passé a une valeur d"exemplarité, vouloir l"imposer peut bloquer la dynamique de la construction sociale de la réalité de

l"époque. Ecrire le présent suppose une page nouvelle, mais enrichie de tout ce qui est déjà écrit et qu"on a lu et vécu. L"avenir se construit dans le

présent, avec l"expérience du passé, mais demeure ouvert aux changements d"un monde qui vit la tension entre l"ouverture et le repli de la défense

opposée par les minorités, les cultures, les nationalités fortes de leurs propres systèmes de valeurs (chapitre 1).

La société contemporaine ne fonctionne pas selon les valeurs enseignées par la famille, l"école et tous les responsables de la transmission. Dans le cas

de l"école (chapitre 4), la transmission est confrontée parfois à des modèles alternatifs "intellectualistes" pour lesquels l"éducation est exclusivement

une "organisation de connaissances". Dans le cas de la famille (chapitre 5), en tant que premier transmetteur de valeurs, elle se voit de plus en plus

confrontée à de nouveaux modèles familiaux qui ont brisé définitivement sa structure apparemment simple : père, mère, enfants. Pourtant, au cours de

notre recherche, nous constaterons les insuffisances, en tant que transmetteurs, non seulement de la famille et de l"école, mais aussi de toutes les

figures "normatives" de la société. On s"aperçoit qu"il existe un modèle différent de transmission, celui de la "socialisation pratique" et du "sens

pratique" et que dans ce modèle la transmission de compétences techniques n"est jamais séparée de la transmission des compétences axiologiques.

Dans une étude sur la transmission, on ne peut pas faire comme si la valeur était un ensemble déjà constitué, parce qu"il y a des modalités de

transmission, selon les types de valeurs transmises, selon les configurations et selon les réalités sociales, qui ont une influence décisive sur les

processus de transmission. Nous parlons donc des nouveaux types de communautés, des différentes propositions, des typologies différentes, des

régions abritant d"autres configurations et de systèmes de valeurs différents. Enfin, nous échangeons par des langages, où les paroles n"ont pas le même

400

degré de compréhension, selon les milieux, les lieux et les cultures (chapitres 4, 5 et 6), ce qui fait du phénomène de la transmission une réalité

complexe.

Pourquoi avons-nous choisi l"adolescence et la jeunesse comme le miroir pour étudier ces processus ? (chapitre 3). L"adolescence est la période où le

jeune abandonne les comportements de l"enfance et acquiert ceux des adultes. En psychologie, on peut parler de l"enfance comme d"une époque

d"imitation, tout autant que de volonté de conformer l"autre à son désir. Il existe chez l"enfant plutôt un sens de l"identification, et le sentiment qui va le

guider sera en effet l"admiration, même si les parents ont une attitude ferme et autoritaire. Les "adultes", eux, ont déjà un système de valeurs plus ou

moins intégré. Par contre, les adolescents et beaucoup de jeunes vivent le moment où la tâche principale est d"arriver à construire une personnalité

intégrée et cohérente, une identité capable d"établir des relations positives avec les autres et avec eux-mêmes. Les adolescents ont toujours été le casse-

tête des familles et de la société, parce que leurs " excès ont tout le temps inquiété et perturbé la société des adultes »

1. Comme disait Winnicott :

" Vous avez semé un enfant. Vous récoltez une bombe ! ». Les adolescents évaluent constamment les adultes, ce qu"ils peuvent lire de leur

authenticité, cherchant s"ils incarnent ou non d"une façon tangible, visible, les valeurs qu"ils exigent ou essaient de transmettre. Même un jeune en

désaccord avec l"adulte est sensible à son authenticité : " La famille est un monde idéal. On fait d"elle un tableau qui la signale comme un exemple du

partage. On voit les parents heureux dans un arc en ciel... Chouette ! Mais, d"un moment à l"autre, j"ai vu que ce n"étaient que des mensonges. »

(Sebastián, 15 ans).

L"ethnographie du monde contemporain ne doit pas s"en tenir à l"échelle unique de la monographie de la communauté parce que les individus

participent d"univers sociaux divers et il faut donc saisir leurs comportements à différentes échelles : celle de petites collectivités, celle de grands

ensembles culturels, articulées entre elles par toute une série de médiations

2. Au cours de notre cursus, nous sommes retourné en Colombie, pour nous

livrer pendant cinq mois à plusieurs entretiens avec des adolescents, mais aussi avec des jeunes, des parents et des enseignants

3. Notre objectif a été de

saisir le point de vue des acteurs impliqués sur le terrain. Dans l"étude des configurations et des processus de transmission inhérents à celles-ci, notre

travail montrera les différences suivant une gradation : d"abord, l"école et le poids de l"institution (chapitre 4), ensuite deux groupes d"amis ou combos

4

1 TROGER, Vincent. Une jeunesse longtemps sous contrôle. Sciences Humaines, 127, Mai 2002, p. 20.

2 Cf. JOURNET, Nicolas. Pour une ethnologie de l"homme ordinaire. Rencontre avec Christian Bromberger. Sciences Humaines, 127, Mai 2002, p. 38.

3 85 personnes rencontrées et 67 entretiens en total dont 51 individuels et 12 avec plus de deux personnes. Dans la première Annexe de notre travail on trouvera la liste complète des entretiens.

4 En Colombie on donne le nom de " combo » au groupe d"amis qui se rencontrent toujours dans un coin de rue, pour le différencier de la " bande » qui a comme caractéristique d"être un groupe

organisé de délinquants. Nous reviendrons sur ce sujet dans le chapitre suivant, avec plus de détails dans les chapitres 3 et 6.

401

et six jeunes filles d"un quartier populaire avec les défis propres à une ambiance sociale conflictuelle (chapitre 6) et, enfin une Communauté Indienne

engagée dans un processus de conscientisation et d"émancipation pour maintenir ses racines contre l""envahisseur" occidental (chapitre 7). Bien que

ces configurations, composées chacune de multiples autres configurations avec leurs interactions symboliques rendent notre travail complexe, elles

nous permettront d"entamer, après l"analyse des entretiens, la construction d"une théorie sur les éléments marquants dans le processus de la

transmission des valeurs et de son aboutissement, ce que nous appelons "incorporation des valeurs" (chapitre 8).

La démarche de notre travail est ethnographique et non psychanalytique. Toutes les figures des comportements humains s"articulent - dans la logique

ethnographique - autour de l"idée que ce sont les interactions, qui, non seulement dirigent nos conduites, mais également forgent nos pensées. Le

travail sociologique, nous dit François Dubet, ne peut être mené sans une définition préalable des règles du jeu, des concepts utilisés et de leurs

articulations qui permettent de "lire" dans le flux des discours et la multiplicité des échanges. Ne serait-ce que pour rapporter les propos des acteurs et

la manière dont ils rendent compte de leurs pratiques, il faut disposer d"un code, de schémas interprétatifs et d"hypothèses quant aux "causes" et au

"sens" de l"action. Leur regard sur le monde dépend de ce que l"interactionnisme symbolique va appeler une construction psychique qui est une série

d"aller-retour entre eux et l"environnement, c"est-à-dire dans les configurations et par des interactions symboliques vivantes et parfois fort

changeantes. Très succinctement, on peut rappeler que l"ethnographie, spécialement lorsqu"elle se réfère à l"interactionnisme symbolique, se présente

comme une méthode nécessitant de tenir compte du contexte historique, social, culturel, mondial, et des variations multiples de celui-ci

5 ; de

comprendre les processus, les relations, la dynamique des groupes, les motivations de la vie quotidienne des acteurs ; de percevoir les significations

symboliques qui émergent dans leurs interactions comme acteurs éducatifs ; de trouver les significations profondes, plutôt que de recevoir seulement

les paroles des acteurs ; de tenir compte enfin de soi-même en tant que chercheur 6.

Se livrer à des entretiens, c"est entendre des individus qui vivent dans des configurations et des interactions symboliques particulières, un " univers de

discours » comme dit G.H. Mead, découvrir quelles influences les ont marqués davantage, c"est-à-dire saisir les expériences qui ont eu une influence

significative sur eux et l"explication que les individus eux-mêmes font de ces expériences et influences. Le type d"entretien auquel nous nous sommes

livré visait à élaborer un récit de vie, une autobiographie sociologique, mais centrée sur l"aspect particulier de la transmission de valeurs. Étant donné

que dans un entretien, on perçoit chez l"interviewé une partie composée essentiellement d"assertions verbales, que l"acteur peut facilement manipuler à

5 Ce que nous avons fait en situant notre travail de terrain dans les contextes sociopolitiques et géographiques du pays et du continent (Fin du chapitre 1), des trois lieux de recherche (chapitres 4, 6 et 7),

de la famille en décrivant sa problématique actuelle (chapitre 5) et la situation particulière que vivent les jeunes interviewés (chapitre 3).

6 " Le chercheur est un instrument bien affiné qui a de notables aptitudes, mais qui est aussi une personne, avec ses valeurs, ses croyances et sa personnalité» Cf. WOODS, Peter. Investigar el arte de la

enseñanza. El uso de la etnografía en la educación. Buenos Aires : Paidós, 1998, p. 74-75.

402

sa guise, et une partie constituée surtout d"expressions indirectes qu"il lui est difficile de contrôler, nous étions très attentifs à cette sorte d"expressions

qui, accompagnées de gestes significatifs, se révélaient comme les plus importantes pour notre travail. Dans la transmission de valeurs ce qui est

fondamental c"est la manière de communiquer, le rapport étroit avec la réalité et la qualité des interactions. Pour G.H. Mead, le langage, les gestes

significatifs et les autrui significatifs, sont autant de " symboles », qui marquent les fondements symboliques de la communication sociale. Nous

sommes conscients de la difficulté de s"appuyer sur le matériel verbal pour une recherche ethnographique, et aussi du fait qu"une grande partie de ce

qui est transmis ne passe pas par la parole consciente. Néanmoins, cela ne nous empêche pas de recueillir un outillage de première qualité, essentiel

pour comprendre le sujet de notre recherche. Comme dit Georges Santayana, " mots et images ressemblent à des coquilles ; ils ne font pas moins partie

de la nature que les substances qu"ils recouvrent, mais ils parlent mieux à l"oeil et s"ouvrent davantage à l"observation »

7. Henri Lefebvre est aussi

éclairant : " Au coeur du quotidien et de ses paroles se trouvent des valeurs éthiques, supports de la vie sociale qui la rendent supportable. Le discours

et le quotidien recouvrent d"une chair faible mais douce la crudité et la brutalité des rapports structurels, squelette de la société »

8. Nous nous sommes

donc livré, après avoir retranscrit ces entretiens, à une analyse précise de leur contenu en nous imprégnant de ces discours pour saisir la manière de

penser de leurs acteurs, tenant compte du fait que la phase suivante de transcription ne se réduit pas à transposer un texte, mais qu"elle est aussi un

moment d"imprégnation, d"incorporation. Nous avons divisé notre travail en trois parties :

La première partie est la contextualisation de notre objet de recherche et comporte trois chapitres : la problématique des valeurs aujourd"hui ; la

transmission : concept, processus et enjeux ; les adolescents et les jeunes dans le processus de transmission de valeurs. On constate aujourd"hui,

comme dit Jean Nabert, l"omniprésence de l"éthique qui s"exprime par les interrogations d"une société dont les règles de conduite ne sont plus fixées

par des repères idéologiques ou religieux, ou des autorités très affirmées, laissant les individus seuls et les sociétés parfois désemparées devant les

choix de vie. Pour G.H. Mead, la morale est centrée sur la conduite sociale et c"est en tant qu"être social que l"homme est moral. Ni réduite à des

essences, qui exigent l"intuition avant d"être concrétisées dans la conduite, ni réduite à une imposition de normes, la valeur a un élément de

permanence opposé à ce qu"il y a dans le désir de changeant ou de capricieux. " La transmission d"une valeur relève d"un processus et c"est bien dans

l"expérience sensible que le débat s"enracine. La valeur a donc un statut mixte entre objectivité d"un déjà-là institué et engagement subjectif »

9. C"est

sur cet engagement subjectif que va se centrer notre travail.

7 SANTAYANA, George. Cité par GOFFMAN, Erving. La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi. Paris : Les Editions de Minuit, 2003, p. 7.

8 LEFEBVRE, Henri. Critique de la vie quotidienne. De la modernité au modernisme. Pour une métaphilosophie du quotidien. Vol. III. Paris : L"Arche Éditeur, 1981, p. 66-67.

9 GUILLOT, Gérard. Quelles valeurs pour l"École du XXe siècle ? Paris : L"Harmattan, 2000, p. 9-10.

403

Mais avant de parler du processus de transmission de valeurs nous devons nous poser ces questions : Qu"est-ce que la transmission ? Qu"est-ce que

transmettre ? (chapitre 2). En les éclairant, appuyés sur la pensée de Norbert Elias, de G.H. Mead et d"Erving Goffman, nous étudierons les concepts de

"configuration" et d""interaction", outils qui nous permettront d"entamer l"étude des éléments intervenant dans le processus de transmission de valeurs

et de leur incorporation. Les deux concepts fondamentaux de Norbert Elias pour nous aider dans notre travail sont : celui de "configuration", qui

permet de dépasser l"antinomie "individu - société", et celui de "processus", qui substitue à l"idée de causalité des modèles dans lesquels évoluent

ensemble, et de façon interdépendante, les phénomènes sociaux

10. Pour les " interactions symboliques » et les " autrui significatifs », Erving Goffman

nous donne les éléments pour les comprendre. Pour cet auteur, les interactions sociales constituent la trame d"un certain niveau de l"ordre social, parce

qu"elles sont fondées sur des règles et des normes, tout autant que les grandes institutions, telles la famille, l"État, l"Église, etc.. L"interaction directe,

spontanée, universelle est celle que crée la communication linguistique interpersonnelle, parfois banalisées par les chercheurs. De son côté, G.H. Mead

dit que les ensembles de relations sociales sont en permanente interaction symbolique et qu"ils sont confrontés avec des systèmes de valeurs. Enfin,

Pierre Bourdieu nous dit que chaque milieu social véhicule et transmet un "habitus" - sorte de code de conduite intériorisé - qui oriente les façons de

s"exprimer, de penser et d"agir en conformité avec ce milieu.

Dans la deuxième partie, nous nous sommes plongé dans l"étude de la façon dont les valeurs sont transmises. À partir des expériences de nos

interviewés, nous avons cherché les éléments qu"on peut signaler comme les plus importants pour une transmission réussie et aussi les éléments qui

l"empêchent. La valeur n"apparaît pas comme telle, mais elle se déduit, c"est de l"ordre de l"inférence : un principe axiologique est en action. La

famille (chapitre 5), l"école (chapitre 4), dont nous présentons deux exemples de transmission réussie dans les oeuvres de Nicolas Grundtvig et de

Rabindranath Tagore, et la réalité sociopolitique et culturelle des différentes configurations où l"individu est immergé, ont, toutes deux, un rôle décisif.

Enfin, nous avons étudié, dans le cas du quartier populaire et de la communauté indienne, comment les valeurs peuvent être plus visibles dans des

situations d"urgence, voire extrêmes. Quelles sont pour les jeunes et les adultes les caractéristiques des "autrui significatifs" en tant que transmetteurs,

quels sont les critères de refus et d"acceptation des valeurs, comment les valeurs ont été transmises, dans quelles conditions une valeur transmise

devient une façon propre d"être (= incorporation), ce sont là quelques unes des principales questions posées à nos interviewés.

Dans la troisième partie, muni de cette richesse d"informations, nous arrivons au coeur de notre travail : les conditions pour une transmission réussie de

valeurs et leur incorporation. Nous nous somme fixé deux buts : en premier lieu en suivant notre hypothèse des aspects communs intervenant dans

10 " Si pour comprendre la structure d"une molécule on n"a pas besoin de savoir ce que signifie se ressentir comme l"un de ses atomes, il est indispensable, pour comprendre le mode de fonctionnement

des groupes humains, d"avoir accès aussi de l"intérieur à l"expérience que les hommes ont de leur propre groupe et des autres groupes ; or on ne peut le savoir sans participation et engagement actifs ».

ELIAS, Norbert. Engagement et distanciation. Paris : Fayard, 1993, p. 29. 404

n"importe quelle situation ou réalité, nous avons cherché les plus importants de ces aspects ; en second lieu, et c"est notre deuxième hypothèse, nous

voudrions montrer que le processus de transmission entraîne l"appropriation de la valeur, ce que nous nommons "incorporation", et qu"il existe aussi

quelques pistes pour comprendre ce qui se passe chez l"individu qui accepte la valeur transmise. Ici nous développons ce que l"on peut préciser des

aspects qui interviennent chez quelqu"un qui "reçoit" une valeur et la fait sienne. C"est-à-dire, plus que l"usage d"une valeur, il s"agit de rechercher

comment on l"intègre en en faisant une manière de vivre, de se comporter dans le monde, un guide de nos actions et de nos choix. Dans ce processus

d"appropriation, nous essayerons de relever quelques aspects comme : ce que nous entendons par "Incorporation", l"interaction et la socialisation,

l"affectivité et l"illusion axiologique, l"importance de l"exemple - témoignage, qui permet de "voir" les valeurs ; la place du dialogue, de la réflexion et

de la décision comme éléments essentiels, la comparaison comme motivation et invitation à la réflexion, les valeurs en "stand-by" ou la suspension

temporaire d"un système ou de certaines valeurs dans la construction de son propre système de valeurs.

Pour terminer il faut tenir compte du fait que notre travail de terrain s"est déroulé en Amérique latine. Tandis que le monde anglo-saxon est engagé au

niveau même de sa philosophie, dans le pragmatisme et l"empirisme, les pays latins, dont la Colombie est un bon exemple, sont restés davantage fixés

sur les valeurs au sens traditionnel. Elles sont ici régulées différemment, parce que les sentiments et l"affectivité occupent une place importante. Les

Latins gardent encore un esprit de clan où le lien familial est essentiel. Pourtant, et c"est une des hypothèses de notre travail, il existe des éléments

communs qui, mis en pratique, permettront de réussir la transmission dans n"importe quels groupe ou situation du monde moderne.

quotesdbs_dbs35.pdfusesText_40
[PDF] selon rica qui fait la mode

[PDF] montesquieu contre la peine de mort

[PDF] rapport de stage mairie service communication

[PDF] présentation d'une mairie

[PDF] il est plus sûr d être craint que d être aimé

[PDF] rapport de stage collectivité territoriale

[PDF] rapport de stage marché public

[PDF] rapport de stage mecanique auto gratuit

[PDF] rapport de stage carrosserie peinture automobile

[PDF] l'esprit des lois montesquieu pdf

[PDF] rapport de stage bibliothécaire

[PDF] montesquieu 1748 l esprit des lois livre viii de la corruption des principes des trois gouvernements

[PDF] exemple rapport de stage espe

[PDF] corpus montesquieu de l'esprit des lois

[PDF] rapport de stage master meef second degré