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HGGSP 2-2

FORMES INDIRECTES DE LA PUISSANCE, APPROCHE GEOPOLITIQUE

Introduction : Jusque dans les années 1990, l'affirmation de la puissance des États passait principalement par la force

militaire et par le pouvoir économique. Mais le changement de contexte et l'intensification des relations et des

interdépendances du monde contemporain ont fait émerger de nouvelles formes de puissance qui reposent davantage

sur la capacité à convaincre et à influencer que sur la coercition. Pour s'affirmer sur la scène internationale, les États

cherchent désormais de nouveaux moyens d'exprimer et d'exercer leur puissance notamment à travers des formes

indirectes, en mobilisant le soft ou le smart power. Ces formes plus " douces » de la puissance passent entre autres

par la diffusion progressive de la langue, par le contrôle de l'information et des réseaux numériques ou encore par la

maîtrise des voies de communication.

Problématique : Dans quelles mesures les États et ent reprises recourent-ils à de s for mes indirectes de

puissance ?

I. LaLangue,unoutild'affirmationetdepuissance.

A. Unoutilauservicedelapuissance.

Un outil historique : La langue est un des outils historiquement employés par les États et les empires pour exercer

leur puissance. Dans l'antiquité, le latin permettait de distinguer les habitants des régions de l'Empire Romain, des

populations dites barbares, qui ne le parlaient pas. Dès la fin du XIX e siècle, pour affirmer la place de la francophonie

(ensemble des personnes qui utilisent le français comme langue ma ternelle, ou d 'usage, de socialisation,

d'enseignement), l'État français créé un réseau d'institutions qui lui permet de diffuser sa culture et sa langue sur tous

les continents. L'Alliance française apparaît en 1883. Suivant le même principe les Britanniques fondent en 1934 le

British Council qui sera suivi en 1950 par l'Institut Goethe des Allemands. Plus récemment la Chine a développé depuis

2004 le réseau des instituts Confucius.

B. Françaisetanglaisàl'assautdumonde.

L'anglais langue internationale : l'anglais est de nos jours la langue la plus diffusée dans le monde. Sa popularité et sa

diffusion s'explique par la domination économique et culturelle du Royaume Uni jusqu'au début du XXe s puis des

États-Unis depuis les années 50 avec la diffusion de l'American Way of life. L'anglais est la langue internationale de

référence et elle inc arne l e processus de mondialisation. Aujourd'hui, cette dom ination est renforcée par le

développement de nouvelles pratiques de consommation comme la diffusion de séries tv à succès en VOST.

Le poids croissant du français : De son côté, le français, qui était la langue internationale de la diplomatie au XIXe s ,

bénéficie de la forte croissance démographique des pays francophones d'Afrique. S'il est difficile à estimer, le nombre

de personnes parlant français dans le monde devrait atteindre les 715 millions d'ici à 2050, ce qui ferait du français la

langue la plus parlée dans le monde. De plus, la culture française se diffuse de diverses façons : ouverture d'une

antenne du Louvre à Abu Dhabi, festivals du film français dans les grandes métropoles du monde, ouverture de

restaurants gastronomiques par des chefs étoilés français un peu partout sur la planète, développement de la chaîne

TV5 monde...

Enfin le rô le des diaspora s (dispersion d'une communauté na tionale, ethnique , religieuse... dans le monde qui

parvient à conserver son identité culturelle en maintenant des liens de solidarité forts entre ses membres) est

déterminant dans la circulation d'une langue. On observe donc que l'anglais et le français conservent une place de

choix dans les relations internationales (à l'ONU, l'OMC, l'UE...). Néanmoins il convient de noter que les autres

puissances linguistiques comme la Chine, le Brésil ou encore l'Inde, aspirent à concurrencer ces positions dominantes.

II. Lesnouvellestechnologies,unenjeudepuissance.

A. Lamiseenconnexiondumonde.

Des réseaux numériques qui connectent le monde entier : Les nouvelles technologies de l'information et de la

communication (NTIC) permettent les transferts de données via des réseaux de télécommunications dans divers

domaines : la finance, le commerce, la sécuri té... Dével oppé à l'origine pour un usage m ilitaire, Internet met

aujourd'hui en relation des milliards d'êtres humains et est devenu un outil privilégié pour communiquer. De fait, en

2018, Facebook revendiquait plus de 2,3 milliards d'utilisateurs et on compte 3,5 milliards de personnes ayant accès

à un réseau social (Facebook, Instagram, Snapchat...). On estime également qu'il y a aujourd'hui autant de téléphones

portables que d'individus dans le monde (7,6 milliards). C'est 10 fois plus qu'il y a 20 ans. Enfin, chaque jour, plus de

5 000 milliards de dollars sont échangés sur les marchés de transaction grâce aux réseaux numériques.

Le développement de nouveaux rapports de force internationaux : Le développement des nouvelles technologies a

permis aux grandes puissances économiques et militaires de se les approprier à des fins géostratégiques. C'est ce que

l'on appelle la cyberguerre. Les nouvelles technologies permettent en effet de mener une guerre à distance. Le

développement de drones de combat par l'armée américaine, pilotés depuis les États-Unis mais intervenant au Moyen

Orient (Irak, Syrie), en est un exemple. Mais les États utilisent aussi les outils numériques pour pratiquer le cyber-

espionnage et lancer des attaques numériques, à l'image de la Chine accusée en 2013 par les États-Unis d'avoir

pratiqué le cyber-espionnage contre le gouvernement et les entreprises américaines. Ces outils servent aussi à

influencer des élections. La Russie est d'ailleurs soupçonnée d'avoir tenté d'influencer les élections américaines de

2016 et française de 2017 par l'utilisation des réseaux sociaux.

B. L'émergencedesgéantsdunumérique.

GAFAM et BATX : Les géants du numérique américain, qu'on appelle les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon,

Microsoft) sont parmi les plus importantes et puissantes entreprises boursières du monde à tel point qu'en 2017 le

Danemark a nommé un ambassadeur auprès des GAFAM. De fait, Google capte environ 90% des recherches internet

et Amazo n domine le secteur d e la vente en ligne. Mai s cette toute puissance est a ujour d'hui mena cée par

l'émergence d'acteurs chinois dans le secteur du numérique. Ceux que l'on appelle les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent,

Xiaomi) ont une domination incontestée en Asie. Ainsi, Baidu (l'équivalent de Google en Chine) est le premier moteur

de recherche utilisé par plus d'un milliard de Chinois et Alibaba domine la vente en ligne.

Une impuissance des États ? Les intérêts des géants du numériques et des États peuvent converger. Par exemple le

développement du réseau de câbles dans le monde entier par China Telecom (entreprise publique chinoise) est utile

au BATX pour concurrencer les GAFAM. Mais ces relations peuvent aussi être conflictuelles. Certains États, à l'image

de l'UE, ont légiféré ces dernières années, afin de garantir la protection des données personnelles des utilisateurs. Ils

luttent également contre les tentatives des GAFAM de se substituer à la fiscalité qui pèsent sur eux dans certains États.

Les États-Unis de leur côté menacent Google de démantèlement pour leur position hégémonique qui empêche la

concurrence (loi anti-trust). C. Laluttefaceauxexcèsdesnouvellestechnologies.

Résistance aux nouvelles technologies : Nanotechnologies et biotechnologies, qui permettraient de développer les

capacités physiques et mentales d'un individu, font craindre une dérive de l'utilisation des nouvelles technologies. Et

de fait, ce qui jusqu'à présent semblait relever du scénario de science-fiction, semble se mettre en marche. Depuis

2013, Calico (filiale de Google) poursuit des travaux pour lutter contre le vieillissement quand Neuralink (propriété du

groupe Tesla) mène des recherches afin d'améliorer l'intelligence humaine par l'implant de puces dans le cerveau.

Partout dans le monde des protestations émergent. La robotisation de plus en plus systématique du secteur industriel

fait craindre le développement d'un chômage de masse dans ce secteur.

Une remise en cause des fondements démocratiques : Les lanceurs d'alerte ou encore les hackers, sont aujourd'hui

en mesure de déstabiliser les États en révélant des scandales ou en paralysant les réseaux informatiques. En 2008,

l'Estonie a fait l'objet d'une cyber-attaque paralysant le pays pendant plusieurs jours. D'un autre côté, les États

peuvent aussi utiliser les nouvelles technologies pour contrôler et censurer l'information et pour espionner leurs

populations. Ainsi, la Chine a pour projet d'instaurer un permis à point du citoyen, basé sur la surveillance de la

population par les réseaux sociaux et l'installation de caméra dans l'espace public. III. Lamaitrisedesvoiesdecommunication:unattributdelapuissance.

A. Unemaitriseauservicedelapuissance.

Un enjeu stratégique majeur : Rome dans l'Antiquité, Venise au Moyen-âge ou encore l'Empire d'Espagne à l'époque

moderne, toute ces puissances historiques ont rayonné dans le monde grâce au contrôle des voies de communication,

qu'elles soient maritimes, fluviales ou terrestres. Aujourd'hui encore, la maitrise des voies de communication à des

fins comme rciales est un des outils du soft power des g randes puissances, e n particul ier avec l'essor de la

mondialisation. Les États investissent donc dans l'aménagement d'infrastructures. En effet, la gestion des réseaux et

des hubs (gare, aéroports, ports) est déterminante dans l'affirmation de la puissance des États.

Des voies de communicati on vulnérabl es : De par t le ur importance stratégi que, le contrôle des voi es de

communication est un objet de convoitise et est devenu ces dernière années, un facteur des tensions géopolitiques

internationales. L'instabilité politique au Moyen-Orient ou l'essor de la piraterie dans l'océan Indien, viennent en effet

perturber les échanges maritimes, notamment en ce qui concerne l'épineuse question des détroits. Par exemples :

- Dans le détroit d'Ormuz, où plus de 30% du pétrole mondial transite, les tensions sont régulières entre l'Iran

(état riverain) qui menace de fermer le détroit, et la communauté internationale (en particulier les États-Unis

dont la V e flotte de guerre patrouille à proximité du secteur).

- Dans le détroit de Malacca où les États riverains indonésiens sont obligés de mobiliser leurs marines militaires

pour assurer la sécurité des navires marchands contre la piraterie.

B. L'émergencedenouvellesvoies.

La route maritime du Nord-ouest : Avec l'impact du réchauffement climatique sur l'océan glacial Arctique, la fonte de

la banquise va permette l'ouverture de la route maritime du nord-ouest entre le Groenland et l'Alaska, et du nord-est

qui longe le littoral russe. Cette nouvelle voie suscite la convoitise des grandes puissances riveraines comme la Russie

ou les États-Unis, mais aussi de la Chine, car elle permettrait de réduire considérablement la durée des trajets entre

l'Asie et l'Europe ou l'Amérique du Nord (et donc de réduire également les coûts liés au temps de transport).

Les nouvelles routes de la soie : Depuis les années 1980, l'ouverture de la Chine au marché mondial a entrainé la

modernisation de ses infrastructures portuaires et de ses axes de transports vers l'intérieur du pays. En 2017, avec

13% des exportations mondiales, elle était le premier exportateur de marchandises. A l'initiative du président Xi

Jinping depuis 2013, les nouvelles routes de la Soie sont au service de la puissance commerciale chinoise. Il s'agit d'un

réseau de voies terrestres (routières, ferroviaires) et maritimes que la Chine développe dans une centaine de pays

d'Asie, d'Afrique et d'Europe pour un budget estimé à 1 000 milliards de dollars. Avec ce projet, la Chine cherche à

assurer ses im portations et ses exportations m ais aussi à renforcer sa coopération économique avec l'U nion

Européenne (dont elle est le deuxième partenaire économique). Enfin, la Chine cherche à diffuser une image positive

(et à faire oublier certaines tensions géopolitiques en lien avec le renforcement de sa puissance militaire ou l'achat de

terres agricoles en Afrique) mais aussi à devenir une puissance influente de la scène internationale.

Conclusion : La puissance des acteurs internationaux (États, unions d'États, organisations, entreprises...) se mesure et

s'exprime par les composants traditionnels du hard power. Mais la puissance dépend aussi de capacités indirectes à

influencer le monde, comme la langue, la maitrise des technologies de l'information et de la communication, le

contrôle des voies de communication ... en bref de l'ensemble des éléments qui composent le soft power. De plus en

plus hard power et soft power vont de pair avec pour ambition la construction d'un smart power qui apparaît

aujourd'hui comme un élément indispensable au rayonnement d'une puissance.quotesdbs_dbs46.pdfusesText_46

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