[PDF] Liste rouge des Oiseaux nicheurs de Poitou-Charentes (2018)

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Liste rouge

des Oiseaux nicheurs du Poitou-Charentes 2018

2Le Poitou-Charentes présente une importante richesse biologique liée à sa position climatique et à la diversité des

substrats géologiques et des milieux, depuis les habitats de la frange littorale jusqu'aux massifs forestiers poitevins

de la Vienne en passant par les plaines et coteaux calcaires charentais, les bois thermophiles, les landes et marais

acides du sud de la Charente et de la Charente-Maritime ou le bocage des Deux-Sèvres.

Cette richesse est fortement menacée et sa conservation globale n'est pas assurée à long terme. Pourtant, la

préservation de la biodiversité est un enjeu majeur, intégré dans les politiques publiques.

Les listes rouges des espèces menacées du Poitou-Charentes sont un outil de connaissance indispensable permettant

de hiérarchiser les espèces selon leur risque d'extinction, de surveiller l'évolution de la situation des espèces,

d'informer et sensibiliser sur le type et le niveau de menaces pesant sur la biodiversité, de fournir une base cohérente

pour orienter les politiques publiques et de proposer des orientations de gestion des espèces les plus gravement

menacées et de leurs habitats.

Les associations naturalistes a?iliées à Poitou-Charentes Nature ont mis en œuvre, entre 2015 et 2018, la déclinaison

des listes rouges à l'échelle du Poitou-Charentes. Ce programme, coordonné par Poitou-Charentes Nature et la LPO

France, a eu pour objet l'évaluation de la plupart des groupes faunistiques de ce territoire, aussi bien vertébrés

(Oiseaux, Mammifères, Reptiles, Amphibiens), qu'invertébrés (Odonates, Rhopalocères, Cigales...), ainsi que celle

de la Fonge (champignons).

Chacune de ces listes rouges a été rédigée selon la méthodologie proposée par l'Union Internationale pour la

Conservation de la Nature (UICN), sur la base des lots de données mis à disposition par les structures naturalistes

œuvrant sur le territoire et en s'appuyant sur les connaissances et l'appui scientifique d'un comité d'experts locaux,

régionaux et nationaux. Les résultats de ces travaux sont synthétisés dans ce document.

DÉMARCHE D'ÉVALUATION

La première liste rouge picto-charentaise des oiseaux nicheurs a été élaborée à l'occasion de l'Atlas des

Oiseaux du Poitou-Charentes portant sur le pas de

temps 2005-2009. Cet atlas a permis d'obtenir une bonne couverture du territoire régional. En revanche, l'estimation des e?ectifs a été plus di?icile à réaliser car il a fallu transformer les classes d'abondance par maille en fourchettes d'e?ectifs. Pour certaines espèces, notamment les espèces communes, ces fourchettes sont très larges et semblent, avec du recul, éloignées de la réalité. La liste présentée ici est basée sur les critères de la méthodologie UICN complétés par une approche à dire d'expert » pour certaines espèces pour lesquelles l'ensemble des éléments n'étaient pas disponibles ou paraissaient éloignés de la réalité, notamment vis-à-vis des estimations de populations e?ectuées au niveau national. Les données utilisées pour l'évaluation des oiseaux nicheurs proviennent de la compilation des bases de données des associations de protection de la nature de l'ancienne région Poitou-Charentes. Ces données proviennent aussi bien de salariés que d'observateurs bénévoles et font l'objet d'une validation par des experts locaux. L'évaluation de cette nouvelle liste rouge porte sur la période 2012-2016 et intègre une comparaison

avec les données issues de l'atlas de 2005-2009.D'une manière générale, la mise en place de bases de

données participatives développées par Biolovision© a permis de centraliser une grande quantité d'informations malgré quelques disparités géographiques. La répartition de certaines espèces peut ainsi être légèrement biaisée par la pression d'observation sur cette période. En e?et, il n'y a pas eu d'enquêtes de type "atlas» au cours des dernières années incitant à des prospections systématiques sur l'ensemble de la région Poitou-

Charentes.

Cette liste porte sur l'ensemble de l'avifaune nicheuse du

Poitou-Charentes.

Chaque coordinateur départemental a exporté les données d'oiseaux nicheurs à partir de la base de données départementale correspondante entre 2012 et

2016 avec pour chacune des espèces le code atlas le plus

fort par maille de 10x10 km. Les codes atlas permettent de préciser le comportement de l'oiseau (ou des oiseaux) observé durant sa période de reproduction. Ils servent ainsi à préciser le statut de reproduction de l'espèce au sein de la zone étudiée, ici des mailles de 10x10 km : nicheur possible, probable ou certain. À l'échelle de la région, ce sont 485 400 données brutes qui ont été exploitées, soit 54 015 pour la Charente, 219 906
pour la Charente-Maritime, 94 616 pour les Deux-Sèvres et 116 868 pour la Vienne. Les écarts constatés entre les 3

Liste rouge

des Oiseaux nicheurs du Poitou-Charentes nombres de données dans les départements sont dûs à la mise en place di?érée des bases de données et donc à l'intégration progressive des données antérieures. Par ailleurs, un travail d'estimation des e?ectifs pour chaque espèce a été mené à partir des bases de données, des connaissances de l'espèce et des estimations de l'atlas de 2005-2009. La centralisation des informations a été réalisée par la LPO France et la répartition de chaque espèce a été cartographiée sous SIG afin de quantifier son aire d'occupation. La zone d'occurrence n'a pas été utilisée pour l'évaluation car les aires d'occupation, les tendances des populations et les e?ectifs ont permis d'e?ectuer une pré-cotation pour l'ensemble des espèces. Dans la méthodologie UICN, la zone d'occupation (AOO) correspond à la superficie occupée par un taxon sur l'ensemble des mailles UTM 93 2x2 km au sein desquelles l'espèce a été contactée lors des cinq années étudiées. En première approche, un maillage 10x10 km a été utilisé pour calculer l'AOO, les oiseaux étant des espèces mobiles avec des territoires pouvant couvrir de nombreuses mailles 2x2 km. De plus, ce maillage avait déjà été utilisé lors de l'atlas 2005-2009. La zone d'occupation minimale a été calculée à partir du nombre de mailles comportant des données de reproduction certaine de l'espèce et la zone d'occupation maximale à partir du nombre de mailles avec des données associées à un code atlas (reproduction possible, probable ou certaine). La zone d'occupation de l'espèce ayant servi de base à la cotation correspond à la moyenne de ces deux aires. Ce travail ayant été fait pour le précédent atlas, nous

avons souhaité conserver cette méthode afin de pouvoir comparer les aires d'occupation entre ces deux périodes

(2005-2009 et 2012-2016). Pour les espèces dont la répartition géographique est limitée ou très fragmentée, nous avons utilisé un maillage 2x2 km afin de pouvoir utiliser le critère B, comme préconisé par la méthodologie de l'UICN. C'est le cas pour quatre espèces : l'Échasse blanche, la Fauvette pitchou, l'Hirondelle de rivage et la Spatule blanche.

4Les catégories établies au niveau national doivent

a minima être respectées au niveau local selon la méthodologie UICN. Des ajustements ont été nécessaires pour des espèces dont les tendances sont probablement à la baisse en Poitou-Charentes mais di?icilement quantifiables sans d'autres analyses plus précises. Ces analyses prennent du temps et doivent couvrir un jeu de données plus important, notamment des données issues de protocoles (STOC...). Ces analyses biostatistiques devront être réalisées dans

les années à venir afin de préciser les tendances sur ces espèces au niveau de la région Nouvelle-Aquitaine

pour l'évaluation d'une prochaine liste rouge. En l'absence de ces éléments, nous avons considéré qu'il était plus prudent de déclasser d'un niveau (NT) certaines espèces évaluées en catégorie VU au niveau national sur la base du critère A2. C'est le cas d'espèces encore assez communes en Poitou-Charentes mais qui ont subi un déclin d'environ 30%, en France, ces dix dernières années, comme le Chardonneret élégant, la Linotte mélodieuse, le Martin-pêcheur d'Europe, le Pic épeichette, le Serin cini et le Verdier d'Europe.

Prise en compte de la Liste rouge nationale

L'avifaune est le premier groupe à avoir été étudié de façon synthétique au niveau du Poitou-Charentes. La structuration des associations de protection de la nature à la fin du XX e siècle et le développement des outils de saisie en ligne au milieu des années 2000 a permis d'accumuler plus de données, de les harmoniser et de les restituer beaucoup plus rapidement. C'est le cas notamment de la LPO, qui a créé une antenne en Charente-Maritime et une délégation en Vienne, après transformation du Groupe Ornithologique de la Vienne en

1992, tandis que le Groupe Ornithologique des Deux-Sèvres

et la Société charentaise de Protection de la Nature (devenue Charente Nature) se sont structurés respectivement en 1981 et 1970.
Les premières données relatives au statut nicheur des oiseaux ont été centralisées lors de deux inventaires nationaux : l'Atlas des oiseaux nicheurs de France en 1976 et le Nouvel atlas des oiseaux nicheurs de France en 1994, avec une collecte d'informations sur chacun des départements picto-charentais. Un premier livre rouge avait été publié en 1999, sous l'égide de Poitou-Charentes Nature (PCN), et proposait un premier statut

de vulnérabilité des espèces nicheuses.Un Atlas des oiseaux nicheurs du Poitou-Charentes, coordonné

par PCN, a été réalisé entre 2005 et 2009 et a permis de dresser un bilan des espèces présentes en période de reproduction dans la région et de leurs statuts. Des enquêtes sont menées régulièrement sur de nombreux groupes d'oiseaux au niveau national, régional ou départemental, ce qui permet de produire des états des lieux et de suivre les tendances de ces espèces (Ardéidés, Limicoles, Outarde canepetière...). Sur certains sites gérés, comme les réserves naturelles, les sites du Conservatoire Régional d'Espaces Naturels et du Conservatoire du Littoral, des suivis annuels sont réalisés pour des espèces localisées (Gorgebleue à miroir, Pipit rousseline, Gravelot à collier interrompu...) ou d'importance locale ou nationale (Goéland argenté, Sterne pierregarin...). C'est également le cas au sein des Zones de Protection Spéciale (ZPS), désignées dans le cadre du réseau européen Natura 2000 pour les espèces relevant de la directive " Oiseaux » de 1979. Un observatoire sur les rapaces diurnes nicheurs (CNRS/CEBC) est mis en place depuis 2004 au niveau national afin de connaitre les tendances de ces espèces. Ces analyses ont également lieu au niveau régional.

L'ornithologie en Poitou-Charentes

5 ÉTAT DES CONNAISSANCES ET RESULTATS DE L'EVALUATION

Liste rouge

des Oiseaux nicheurs du Poitou-Charentes métropolitaine

Ardéidés et Threskiornithidés

Maritime

Charente-Maritime

et réalisation d'actions novatrices et démonstratives favorables au Râle des genêts » ouverts sur les plaines agricoles du Marais poitevin (Vienne)

Charente-Maritime

gestion forestière en forêt de production de plaine (Faucon pèlerin, Grand-duc d'Europe...) (Vienne) et Rougequeue à front blanc du Marais poitevin.

Ci-dessous un inventaire non exhaustif des éléments qui nous ont permis d'établir cette liste :

6 Le Poitou-Charentes s'étend des contreforts du Limousin à la façade atlantique. Ses habitats sont composés de bocages, de zones humides, de boisements mais la région reste dominée par des milieux agricoles (céréales, élevages et vignes) avec des pratiques de plus en plus productivistes. L'artificialisation des milieux entraine une perte d'habitats naturels, notamment par une urbanisation croissante et le développement du réseau routier qui a?ectent de nombreuses espèces. Les corridors écologiques sont coupés par des infrastructures qui limitent les déplacements des espèces et fragmentent les zones de reproduction. L'agriculture de plus en plus intensive, l'utilisation des pesticides, la disparition des haies, l'épuisement et la stérilisation des sols, ont un impact très fort sur les espèces des espaces agricoles. Le Poitou-Charentes a une importance nationale pour un certain nombre d'entre elles. C'est le cas de l'Outarde canepetière dont la région abrite la quasi-totalité de la population migratrice d'Europe de l'Ouest. C'est également en Poitou-Charentes que se trouvent les plus fortes densités de Busard cendré ou d'OEdicnème criard. La régression quantitative et qualitative des zones humides réduit les espaces d'accueil d'un certain nombre d'espèces

(Râle des genêts, Barge à queue noire, Bécassine des marais...). À cela s'ajoute l'évolution des pratiques pastorales

avec une régression du pâturage au profit d'une fauche souvent trop précoce pour assurer le cycle biologique des espèces prairiales (Râle des genêts...). Les pratiques cynégétiques viennent s'ajouter au mauvais état de conservation de certaines espèces comme la Bécassine des marais, la Sarcelle d'été, le Fuligule milouin ou le Vanneau huppé. Ces dernières sont chassées dès le mois d'août alors qu'elles viennent juste de terminer leur reproduction. En e?et, au moment de l'ouverture de la saison de chasse, seuls les reproducteurs sont présents dans notre région, les individus nordiques arrivant plus tard. Des espèces, jusque là absentes de la région en tant que nicheuses, font leur apparition. Leurs e?ectifs réduits ou localisés constituent des menaces pour leur pérennité (Spatule blanche, Grand Cormoran, Faucon pèlerin). Ces dernières sont sensibles aux dérangements qui peuvent engendrer des

échecs de reproduction.

Plusieurs espèces sont en limite septentrionale (Bruant ortolan, Moineau soulcie, Pie-grièche à tête rousse...) ou méridionale (Pouillot si?leur, Pipit farlouse...) de leur répartition en période de reproduction et donc sensibles aux changements de leurs habitats. Les menaces pesant sur les Oiseaux nicheurs du Poitou-Charentes

7L'actualisation de la Liste rouge a permis d'évaluer le statut

de 178 espèces nicheuses en Poitou-Charentes, sur les 277 espèces nicheuses que compte la France métropolitaine. À noter que 20 espèces n'ont pas fait l'objet d'évaluation, en raison du manque de données (cas des nicheurs occasionnels) ou de leur installation récente (Grande

Aigrette, Élanion blanc...).

Le constat est assez inquiétant puisque

5% des espèces

ont disparu (RE) dont certaines depuis plusieurs décennies, 44% sont menacées d'extinction (VU, EN, CR) et 18% sont considérées comme quasi-menacées (NT). Seul 30% de l'avifaune nicheuse présente donc un statut de conservation jugé favorable. Parmi les espèces menacées, on trouve essentiellement des espèces caractéristiques des milieux agricoles et des

zones humides ainsi que quelques espèces forestières. À titre d'exemple, 14 des 23 espèces classées " En

danger critique » (CR) sont associées aux zones humides (Rousserolle turdoïde, Panure à moustache, Fuligule morillon...). Cette Liste rouge confirme également, à l'instar des résultats de la Liste rouge nationale, la dégradation du statut du cortège des espèces spécialistes des espaces agricoles, avec l'Alouette des champs, le Bruant proyer et la Tourterelle des bois. D'autre part, des espèces encore considérées comme communes il y a peu, avec le Moineau domestique, le Chardonneret élégant ou le Verdier d'Europe, dont le déclin a récemment été mis en évidence au niveau national, ont été classées comme " Quasi- menacé » en l'absence d'éléments chiffrés précis à l'échelle du Poitou-Charentes.

Coordination de la liste

Loïc Jomat (LPO France) et Philippe Jourde (LPO France)

Comité d'évaluation

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