[PDF] Blaise Pascal : «Les Provinciales»

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ÉTUDES LITTÉRAIRE S

BLAISE

PASCAL

Les

Provinciales

PAR GÉRARD

FERREYROLLES

PRESSES

UNIVERSITAIRES DE FRANCE Retrouver ce titre sur Numilog.com

ÉTUDES LITTÉRAIRES

Collection dirigée par Jean-Pierre de Beaumarchais et

Daniel Couty

ISBN

2 13 038565 6

Dépôt légal -

1 édition : 1984, avril

© Presses

Universitaires de France, 1984 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris Retrouver ce titre sur Numilog.com

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AVERTISSEMENT

Il y

a un double mystère des Provinciales. Le mystère de toute œuvre de circonstance qui survit aux circonstances d"où elle tire sa naissance : la grâce efficace et la direction d"intention apparemment ne passionnent guère nos contemporains, mais Les Provinciales qui en traitent vivent toujours. Second mystère : qu"une œuvre aussi reconnue reste à ce point méconnue ; son étude, écrivait en 1967 Jean Mesnard, " serait complètement à renouveler ». Contrairement à l"assertion courante selon laquelle tout aurait déjà été dit sur Pascal, le plus long de ses ouvrages " achevés » demeure en bonne partie à découvrir. On ne prétend point ici renouveler l"étude des Provinciales mais, en synthéti- sant les données dont nous disposons et proposant au passage tels aperçus inaccoutumés, on espère montrer que ce renouvellement est en cours. A mesure qu"ainsi le second mystère cessera d"exiger une explication, le premier continuera de recevoir la sienne. Dans ce volume, les citations des Provinciales et des écrits annexes (Factum pour les Curés de Paris; second, cinquième et sixième Ecrits des Curés de Paris) seront suivis d"un double renvoi à la pagination : a / d"une édition savante : celle de Louis Cognet, parue chez Gar- nier en 1965, qui donne en outre les fragments d"une 19 Pro- vinciale, la Lettre d"un Avocat au Parlement à un de ses amis, le Projet de mandement contre l"Apologie pour les Casuistes, l"Avertissement sur les dix-huit Lettres et le Ron- deau aux RR.PP. Jésuites sur leur morale accommodante; b / d"une édition de poche : Garnier-Flammarion, 1981 (pré- sentée par A. Adam).

Rappelons

enfin qu"une étape décisive sera franchie pour l"établissement et la compréhension du texte des Provinciales, avec la parution attendue du tome IV de l"édition procurée par Jean Mesnard des Œuvres complètes de Pascal ( Desclée de Brouwer, " Bibliothèque européenne »). Retrouver ce titre sur Numilog.com

dans son refus simultané des couples d"hérésies symétriques qui ne manquent pas de se former autour des couples de vérités paradoxales qu"elle annonce au monde. Dans le domaine qui nous retient en particulier, les jansénistes se font fort, selon les formules de Pascal concluant les Ecrits sur la grâce, de défendre la nature humaine et l"omnipotence divine " sans ruiner le libre arbitre par la grâce, comme les luthériens, et sans ruiner la grâce par le libre arbitre, comme les pélagiens »

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/ Le problème moral : laxisme, casuistique, probabilisme. - La lutte que mènent Les Provinciales contre la morale relâchée porte à son plus haut point d"intensité une campagne amorcée au début du XVII siècle, et élargie dans les années 1640-1644. Certes, le laxisme - entendu comme une disposition qui pousse à minimiser, voire à nier, le caractère obligatoire de la loi morale - a toujours existé, mais la nouveauté à partir du XVI siècle est qu"il reçoit avec le probabilisme le renfort d"un système susceptible de le justifier. On peut considérer comme une première réaction d"hostilité au laxisme en morale politique la condamnation prononcée par la Faculté de Théologie de Paris, aussitôt après le meurtre d"Henri IV, contre le De rege et regis institutione du jésuite Mariana où était légitimé, dans certaines circonstances, le recours au régicide. Ce grief, d"encourager à " tuer les rois » (fr. 954), sera inlassablement opposé à la Compagnie de Jésus pendant trois siècles. Une seconde vague de critiques déferle en 1640- 1644. C"est de Rome que part l"attaque, avec la mise à l"Index en septembre 1640 de trois livres du P. Bauny, parmi lesquels sa Somme des péchés qui se commettent en tous états. La France prend le relais, la France où la rivalité entre l"Université de Paris et les collèges jésuites rend la Sorbonne particulièrement attentive à repérer toute proposition critiquable dans les écrits

1. Ed. citée, p. 348 b. Retrouver ce titre sur Numilog.com

des Pères jésuites ou les thèses de leurs étudiants : elle censure à son tour la Somme des péchés, puis blâme en 1641 le De Hie- rarchia et Hierarchicis du P. Cellot, avant de poursuivre devant le Parlement la condamnation de la doctrine du P. Héreau qui excusait un peu trop facilement l"homicide, le tyrannicide et le duel (1643-1644). En 1643, alors que com- mence la querelle autour de l"Augustinus, Arnauld, jeune docteur, publie un petit factum intitulé Théologie morale des Jésuites : c "est à ce florilège de propositions laxistes - où figurent notamment celles du P. Antoine Sirmond qui dis- pensent d "aimer Dieu - que remonte la première esquisse du dessein des Provinciales. Enfin, hors des frontières fran- çaises, l" augustinienne Université de Louvain censurait en 1649 deux propositions du P. Lamy sur l"homicide, en 1653 une série de dix-sept autres propositions tirées pour la plupart d "auteurs jésuites, et en 1657 encore vingt-six. L"arsenal où puisera Pascal est donc pour l"essentiel déjà constitué : mais il lui reviendra de faire éclater le scandale dans l"opinion. Quelle origine assigner à ce pullulement de maximes relâ- chées, que s efforce de suivre la multiplication des censures ? Faut-il rendre la casuistique responsable du laxisme ? En droit, il n"y a point de lien nécessaire entre ces deux termes. La casuistique, en effet, n"est que l"étude des cas de conscience : son objet est d "appliquer la loi morale, universelle par essence, à la singularité d "une situation concrète. Tâche indispensable, qui a toujours constitué la casuistique, avant même que n "existe le mot, en partie intégrante de la théologie morale. Saint Augustin faisait de la casuistique avant la lettre lorsqu"il s "interrogeait sur des situations mettant en conflit par exemple véracité et charité, dans le De mendacio. Et le premier traité de casuistique proprement dite est sorti de la plume d"un saint : la Summa de paenitentia et matrimonio (vers 1235) de Raymond de Pennafort. Il est clair que toute casuistique n"est pas nécessairement laxiste : sa qualification lui vient du système de référence auquel elle emprunte ses solutions. On Retrouver ce titre sur Numilog.com

pourra donc trouver aussi bien des casuistiques sévères. La meilleure preuve en est l"existence d"une casuistique janséniste ou jansénisante : sans évoquer même Saint-Cyran, le directeur de conscience par excellence à Port-Royal, qui en tant que tel devait chaque jour résoudre les cas qui lui étaient soumis par ses pénitents, il suffira de citer les Résolutions de plusieurs cas de conscience touchant la morale et la discipline de l"Eglise par le docteur de Sorbonne Jacques de Sainte-Beuve, et en 1670 la Théologie morale ou résolution des cas de conscience selon l"Ecriture Sainte, les Canons et les Saints Pères rédigée par François Genet sur l"ordre de Mgr Le Camus, évêque de Grenoble. On déduira de là que Pascal, dans Les Provinciales, n"a nullement voulu s"attaquer à la casuistique prise en soi, mais bien aux " nouveaux casuistes » (5 Prov., p. 90/81), aux " casuistes relâchés » (ibid., p. 75/74) qui prennent pour guides dans leurs résolutions des docteurs contemporains déjà relâchés eux-mêmes, au lieu de suivre l"autorité immuable de l"Evangile, des conciles et des Pères de l"Eglise. La casuistique n"est donc facteur de laxisme que dans la mesure où le laxisme l"a corrompue d"abord. Si maintenant on cherche l"élément qui a introduit le laxisme dans la casuis- tique jésuite, on pourra aisément l"identifier dans la doctrine du probabilisme : " c"est le fondement et l"ABC de toute notre morale », déclare le bon Père de la 5 Provinciale (p. 85/78). Le mot de " probabilisme » est né dans la seconde moitié du XVII siècle, et appartient au vocabulaire technique de la théologie : Pascal préfère parler de " la doctrine des opinions probables » (p. 84/78). Une opinion probable, comme l"indique l"étymologie, est une opinion qui mérite d"être approuvée, une opinion digne d"obtenir l"adhésion de l"esprit dans une situation où la vérité n"apparaît point avec évidence. Au Moyen Age, quoique la doctrine ne soit pas encore systéma- tisée, on distingue deux cas : ou bien l"on doute qu"une action soit permise, tout en sachant que l"action contraire est irréprochable, et alors il faut choisir la seconde en vertu Retrouver ce titre sur Numilog.com

La collection Etudes littéraires propose, pour les grandes œuvres de la littérature française, un parcours critique à la fois précis et complet, qui s"attache à inscrire leur pro- cessus de création dans l"histoire des formes et des idées (Contexte) sans négliger leurs déterminations biographiques (Auteur) ; à décrire les conditions et les étapes de leur rédaction (Pré-texte) ; à définir leur spécificité textuelle par l"analyse de leur structure, de leurs thèmes, de leur écriture (Texte) ; à rendre compte de leur retentissement culturel (Fortune de l"œuvre). Précieux instrument de travail pour l"étudiant, qui trouvera en outre dans chaque volume un ou plusieurs exercices d"application (Explication de texte) ainsi qu"une Bibliographie commentée et un Index théma- tique, cette collection s"adresse également à un public cultivé, désireux d"accroître encore son plaisir de lire en disposant d"une information succincte mais sûre, traitée par des spécialistes et mise à jour des acquis de la recherche.

VOLUMES

PARUS :

1. Charles Baudelaire - Les Fleurs du mal par Jean-Pierre Giusto 2.

Emile Zola - Germinal par Colette Becker

3. Blaise Pascal - Les Provinciales par Gérard Ferreyrolles 4.

Le Roman de la Rose par Armand Strubel

22404678/4/

84 20 FF Retrouver ce titre sur Numilog.com

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