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1 PARTIE : LES TABLES CLAUDIENNES

LES RAISONS DE L'EXTENSION DE LA CITOYENNETE A TOUS LES HABITANTS DE. L'EMPIRE. 1. Comment l'empereur explique-t-il sa décision ? Caracalla a tué son frère Geta 



Conduite de la séquence : fiche professeur

Tibère2 qui demandait la citoyenneté en faveur d'un Grec de ses en faveur des Gaulois de l'empereur Claude et les décisions de l'empereur Caracalla.



DOSSIER PÉDAGOGIQUE

La Table claudienne tion dynastique en raison de troubles neurologiques ... de l'empereur Claude et de ses actions se dessine.



COURS PROF

1 / Quelle est la mesure principale de la table claudienne ? 1 / Pourquoi les sénateurs romains sont contre les décisions de l'empereur. Claude ?



2022

5 juil. 2022 la Table Claudienne de Lyon. ... Le droit latin connaît ses origines dans la Ligue latine qui réunissait Rome ... Le premier empereur.



Citoyenneté et Empire à Rome Ier-IIIe siècle ap. J.-C.

La table Claudienne porte la retranscription du discours que l'empereur que celui de ses enfants l'esprit des Romains était vraiment fatigué de la ...



LA DAMNATIO MEMORIAE DANS LES ŒUVRES HISTORIQUES

Le règne de Tibère apparaît dans les sources comme le dure de damnatio memoriae se met en place. Ses deux pales (décision sénatoriale en dehors du cadre d'un 



LACTIVITÉ JURIDIQUE DE LEMPEREUR CLAUDE (Suite et fin)

Suétone qui rapporte cette décision



LACTIVITÉ JURIDIQUE DE LEMPEREUR CLAUDE

ses prédécesseurs Tibère et Caligula



Thème 1 question 2 : citoyenneté et Empire à Rome du Ier au IIIe

A Tibère2 qui demandait la citoyenneté en faveur d'un Grec de ses clients Gaulois de l'empereur Claude et les décisions de l'empereur Caracalla.

La Revue des droits de l'homme

Revue du Centre de recherches et d'études sur les droits fondamentaux

22 | 2022

Revue des droits de l'homme

N°22

La citoyenneté comme

dignitas en droit romain (dé)-classer et/ou exclure

Clément

Bur

Édition

électronique

URL : https://journals.openedition.org/revdh/14895

DOI : 10.4000/revdh.14895

ISSN : 2264-119X

Éditeur

Centre de recherches et d'études sur les droits fondamentaux

Référence

électronique

Clément Bur, "

La citoyenneté comme

dignitas en droit romain (dé)-classer et/ou exclure ? », La Revue des droits de l'homme [En ligne], 22

2022, mis en ligne le 05 juillet 2022, consulté le 28 septembre

2022. URL

: http://journals.openedition.org/revdh/14895 ; DOI : https://doi.org/10.4000/revdh.14895 Ce document a été généré automatiquement le 28 septembre 2022.

Tous droits réservés

La citoyenneté comme dignitas en

droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

Clément Bur

1 Qui dit citoyenneté dit généralement Rome1, et lors d'un précédent colloque sur la

citoyenneté

2, Michel Humbert avait été invité pour parler de ce que l'on conçoit

ordinairement comme une caractéristique de la citoyenneté romaine, qui lui vaut de figurer depuis des décennies dans les programmes du secondaire : son ouverture

3. Dans

l'imaginaire collectif, en effet, on résume souvent la citoyenneté romaine à cette

épithète : ouverte

4. L'édit de Caracalla, ou constitution antonine de 212 ap. J.-C. qui

octroya la citoyenneté romaine à tous les habitants libres de l'Empire, en est largement responsable. Il en va de même de l'autre document souvent étudié dans le secondaire : la Table Claudienne de Lyon. Cette dernière, sur laquelle figurait une décision argumentée de l'empereur Claude de 48 ap. J.-C., n'accordait pas la citoyenneté romaine aux Gaulois, comme on le lit souvent, mais elle autorisait les notables gaulois, déjà citoyens, à entrer au Sénat de Rome et donc à être magistrats romains. Pour défendre sa décision, Claude opposait déjà l'ouverture de Rome, source de sa puissance, à la fermeture des cités grecques, cause de leur déclin

5. Cette simplification courante

conduit à voir le monde romain en mode binaire : libres et non libres, citoyens et non citoyens

6. En réalité, même l'obtention de la citoyenneté pleine et entière était souvent

le résultat d'un parcours avec des stades intermédiaires. Devenus Romains, les exclus d'hier étaient désormais classés avec leurs concitoyens dans la hiérarchie civique, si bien que tous n'avaient pas les mêmes droits ni les mêmes devoirs. En présentant la citoyenneté romaine comme le résultat d'une ascension sociale et en montrant son caractère que l'on jugerait aujourd'hui inégalitaire

7, on peut ainsi l'envisager comme

une dignitas renforçant le mirage méritocratique entretenu par les Romains. La citoyenneté comme dignitas en droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

La Revue des droits de l'homme, 22 | 20221

I - Différentes formes de citoyenneté

2 Naturellement, de nombreux habitants de l'Empire étaient exclus de la citoyenneté : les

esclaves bien sûr, mais aussi les étrangers et les femmes. Le retrait de la citoyenneté était, lui, une décision grave que seuls les comices pouvaient prendre. À notre connaissance, ils ne le faisaient d'ailleurs presque jamais. Ils actaient plutôt l'exil décidé par un citoyen pour se soustraire à une condamnation ou à la colère du peuple en le frappant d'interdictio aquae et ignis. Le retrait de la citoyenneté ne faisait pas partie de l'éventail des peines, c'était plutôt une conséquence d'une sanction plus lourde 8 comme la vente trans tiberim (au-delà du Tibre) de celui qui ne venait pas se faire recenser ou la déportation du coupable de perduellio (haute trahison)9. Dans les deux cas, le citoyen s'était de lui-même retranché de la communauté en passant à l'ennemi ou en refusant d'être comptabilisé parmi ses membres.

3 Il arrivait cependant que certains citoyens renoncent volontairement à la citoyennetésans pour autant trahir leur cité. Sous la République, lorsque les Romains fondaient des

colonies, ils avaient le choix entre des colonies de droit romain, peuplées de citoyens, et des colonies de droit latin, peuplées d'alliés latins et de Romains qui perdaient de ce fait leur citoyenneté romaine au profit d'une citoyenneté de droit latin. Ce sacrifice permettait d'obtenir un lot de terres dans la colonie et donc l'espoir d'une vie meilleure

10. Le droit latin connaît ses origines dans la Ligue latine qui réunissait Rome

et les autres peuples du Latium. Le foedus Cassianum de 493 av. J.-C. fondait ainsi une isopolitie entre les cités latines : l'installation définitive dans une nouvelle cité de la Ligue, y compris Rome, permettait d'acquérir sa citoyenneté

11. Au IIIe siècle, les citoyens

latins obtinrent le droit de venir voter dans les seules assemblées plébéiennes12. Une

rupture intervint à la suite de la Guerre Sociale et de l'octroi de la citoyenneté à tous les

Italiens au début du Ier siècle av. J.-C. Les colonies latines furent désormais fondées hors

de la péninsule. Par ailleurs l'obtention de la citoyenneté romaine ne découlait déjà plus du déménagement à Rome mais de la gestion d'une magistrature locale13. Ce qui

était, à l'origine, une possibilité offerte à n'importe quel Latin selon les règles de la

réciprocité entre pairs s'était transformé en une récompense pour les notables locaux.

Entre-temps, on le voit, les rapports de Rome avec ses alliés étaient devenus fortement asymétriques, de sorte que la citoyenneté romaine était devenue un statut qui conférait certains privilèges

14. Rappelons que sous l'Empire, elle n'impliquait plus de véritable

participation politique ni même militaire, les assemblées n'étant quasiment plus réunies et l'armée étant devenue professionnelle.

4 Si le droit latin était un statut intermédiaire entre le citoyen romain et l'étranger, il

n'était pas le seul. Sans entrer dans les détails, nous pouvons en présenter quelques- uns. Pour cela, suivons l'exposé que Gaius, juriste du IIe siècle ap. J.-C., offre en préambule de son manuel de droit : GAIUS, Institutes, I, 9-10 : La principale distinction afférente au droit des personnes est que les hommes sont libres ou esclaves. De plus, parmi les hommes libres, les uns sont ingénus (ingenui), les autres affranchis (libertini) (trad. Julien Reinach, CUF).

5 À l'opposition binaire chère aux Modernes (libres et non-libres), Gaius ajoute donc

immédiatement une distinction au sein des hommes libres entre ingénus et affranchis, qui ne renvoyait pas seulement à une différence de statut social et de prestige. La

coutume (mos maiorum) empêchait les affranchis, bien qu'ils fussent devenus citoyensLa citoyenneté comme dignitas en droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

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romains, de briguer les honneurs, mais cette macule servile disparaissait à la

génération suivante

15. En outre, les lois matrimoniales d'Auguste concernaient les

ingénus, auxquels elles défendaient d'épouser certaines catégories de personnes

comme les prostitués et les proxénètes, mais non les affranchis

16. Ces mêmes lois

défendaient en revanche aux sénateurs et à leurs descendants d'épouser des affranchis.

6 Au sein des affranchis eux-mêmes, Gaius distinguait à nouveau trois catégories :

GAIUS, Institutes, I, 12 : D'autre part, il y a trois espèces d'affranchis : citoyens romains (ciues Romani), latins (Latini) et déditices (dediticiorum numero) (trad. Julien

Reinach, CUF).

7 Les esclaves qui, avant d'être affranchis, avaient été punis par leur maître ou qui

avaient combattu comme gladiateurs (Gaius parle " Des esclaves d'une condition aussi humiliante »

17), devenaient certes libres mais non citoyens : ils étaient assimilés à des

étrangers vaincus à la guerre, des déditices, d'où leur nom

18. Quant aux Latins Juniens,

il s'agissait des esclaves qui n'avaient pas été affranchis selon la procédure régulière ou

qui l'avaient été avant leur 30 ans, de sorte qu'ils ne bénéficiaient pas de tous les droits

du citoyen. Ce statut apparut sous l'Empire vraisemblablement pour freiner l'acquisition de la citoyenneté via l'affranchissement : on la réservait donc aux esclaves plus âgés et, surtout, à ceux qui le méritaient

19. Les Latins Juniens étaient dans une

position intermédiaire là encore, mais ils pouvaient espérer devenir pleinement affranchis et donc citoyens romains principalement pour services rendus

20, au

contraire des déditices qui se retrouvaient dans " la pire espèce de liberté » selon Gaius

- n'ayant pas même le droit de résider à Rome

21 et étant exclus des bénéficiaires de la

citoyenneté d'après l'édit de Caracalla 22.

8 Pour les anciens ennemis de Rome, l'octroi de la citoyenneté impliquait la fin de

l'indépendance de leur cité qui conservait néanmoins son autonomie politique et juridique interne. L'intégration dans la cité romaine permettait d'exiger d'eux des charges fiscales et militaires principalement. Toutefois, cette citoyenneté n'était pas toujours pleine et entière. Jusqu'au début du IIIe siècle av. J.-C., les peuples non latins

reçurent la ciuitas sine suffragio, c'est-à-dire la citoyenneté sans le droit de vote ni celui

de briguer les magistratures à Rome. Selon Michel Humbert, ce statut était jugé temporaire et devait déboucher sur la citoyenneté optimo iure, c'est-à-dire de plein droit, à l'issue d'un processus de romanisation dans lequel les préfets envoyés par Rome pour dire le droit dans les municipes jouaient un rôle central23. Cette extension de la cité

prit fin lorsque Rome affronta les cités grecques d'Italie du Sud au début du IIIe siècle et

les peuples gaulois de Cisalpine, mais la Guerre Sociale amena les Romains à octroyer la citoyenneté à tous les Italiens dans les années 89-88 av. J.-C., tout en maintenant les

provinciaux sous des statuts divers, certains étant néanmoins citoyens. Cette

intégration des Italiens ne se fit cependant pas sans débats, notamment sur ses modalités concrètes, et elle ne fut achevée qu'en 70 av. J.-C.

9 Si les Italiens réclamèrent la citoyenneté romaine et firent même la guerre pourl'obtenir, c'est qu'elle apparaissait désormais comme un statut enviable qui n'était plus

accordé qu'avec parcimonie par les Romains. En effet, avec la conquête du monde

méditerranéen, être citoyen devint un privilège avec des bénéfices très concrets. Par

exemple, depuis 167 av. J.-C., les citoyens romains ne payaient plus le principal impôt direct (le tributum) grâce au butin qu'ils avaient amassé. Dès lors que le peuple romain devint à son tour le maître du monde, en faire partie devenait un honneur et l'on

retrouve cette idée dans la discussion autour de la notion de maiestas populi RomaniLa citoyenneté comme dignitas en droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

La Revue des droits de l'homme, 22 | 20223

(majesté du peuple Romain) au tournant des IIe et Ier siècles av. J.-C.24. La citoyenneté put ainsi apparaître aux historiens de la fin de la République comme une récompense que l'on pouvait concéder aux anciens ennemis vaincus, s'ils la méritaient, alors qu'il s'agissait en réalité plutôt d'une sanction, comme le rappelait Michel Humbert25. Cette perception de la citoyenneté romaine comme récompense conduisit également à distinguer différents types d'affranchis et à repenser le droit latin. Il y avait donc une multitude de statuts parmi les habitants libres de l'Empire et la citoyenneté romaine

était au sommet de l'échelle. Ce renversement de perception de la citoyenneté avait été

opéré du fait de la prodigieuse expansion romaine, et sans doute aussi sous l'influence des réformes du IVe siècle av. J.-C. et de la mise en place du regimen morum, sur lequel nous allons revenir.

II - L'égalité géométrique

10 Au coeur même de la citoyenneté optimo iure, la seule dont nous parlerons désormais, se

trouve le principe d'égalité géométrique, ce qu'a souligné Claude Nicolet dans son

Métier de citoyen

26 : tous les citoyens n'avaient pas les mêmes droits car ils n'avaient pas

non plus les mêmes devoirs. Pour faire simple, même si chaque citoyen avait une voix, les plus riches avaient un poids électoral plus important car le vote se faisait au sein d'une unité de vote (tribu pour les comices tributes et centurie pour les comices centuriates)

27. Or, les riches étaient répartis dans un plus grand nombre d'unités de

vote (la majorité pour les comices centuriates) dans lesquelles ils étaient moins nombreux que dans les unités rassemblant les citoyens pauvres

28. Ce procédé avait

d'une certaine manière la même fonction que le vote à deux degrés étudié par Pierre

Rosanvallon

29 : permettre la participation de tous mais réserver la décision finale aux

boni, aux gens de bien. En contrepartie, les riches servaient davantage dans les légions et payaient plus d'impôts car le recrutement et le prélèvement se faisaient, au moins à l'origine, dans le même cadre. On le voit, être citoyen ne signifiait donc pas la même chose pour tous. Ainsi, les prolétaires - les plus pauvres qui représentaient jusqu'à la moitié de la communauté civique et qui étaient regroupés dans une seule des 193 centuries - ne servaient pas dans les légions, ne votaient presque jamais (car on arrêtait le vote une fois la majorité atteinte et que l'on commençait par les riches) et ne payaient presque pas d'impôts.

11 Pour l'historiographie allemande des quarante dernières années, les comices étaient

des organes de consensus plutôt que de décision et l'enjeu aurait surtout été de donner

à voir la cité hiérarchisée

30. Les opérations de vote seraient ainsi l'un des nombreux

rituels de la vie publique romaine, à côté des fêtes religieuses (notamment des jeux) et

des assemblées délibératives (contiones). Si l'on suit cette historiographie, la

participation des citoyens les plus pauvres aurait été avant tout symbolique, une manière d'affirmer leur appartenance à la communauté civique et de se distinguer des non-citoyens

31. Cyril Courrier a, de son côté, récemment défendu que la plèbe était en

réalité bien plus politisée qu'on ne le pense généralement, qu'elle se présentait également comme une garante du mos maiorum et comme le pendant du Sénat. Elle avait différents moyens pour intervenir, surtout informels

32. Dans ce cadre, la

citoyenneté ne se serait pas réduite seulement à un statut. Néanmoins, les modes de participation des citoyens à la vie publique différaient nettement selon leur situation

dans la hiérarchie civique : quand les nobles votaient, géraient des magistratures,La citoyenneté comme dignitas en droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

La Revue des droits de l'homme, 22 | 20224

prenaient la parole ou siégeaient au Sénat, les pauvres, eux, se contentaient de participer aux rituels civiques et d'y exprimer leur approbation ou leur désapprobation par des cris, des applaudissements, voire des jets de pierre, non sans une certaine efficacité 33.

12 Plusieurs éléments justifiaient cette mise à l'écart des plus pauvres des modesinstitutionnels de prise de décision. Tout d'abord, l'idée que, seuls les propriétaires

ayant quelque chose à défendre, il était naturel qu'ils fussent en première ligne et aussi

qu'ils décident de la guerre. Il en allait de même pour les riches et l'impôt. Surtout, il y

avait un mépris à peine voilé pour les Romains non propriétaires, dont le travail

éloignait de la vertu nécessaire à la participation à la res publica et dont l'intégrité était

amoindrie par le versement d'un salaire 34.

III - Le regimen morum

13 Il serait faux cependant de parler de citoyenneté censitaire car les plus pauvres

n'étaient pas privés du droit de vote. Ils avaient simplement un moindre poids électoral - et encore peut-être seulement dans les comices centuriates - et ils étaient moins souvent amenés à exercer leurs droits et leurs devoirs, même s'ils pouvaient faire entendre leur voix différemment. En outre, la hiérarchie civique ne découlait pas uniquement de la fortune : l'honneur était également pris en compte. Tout cela découle d'une loi mal connue de la fin du IVe siècle av. J.-C., le plébiscite ovinien, qui enjoignait aux censeurs de recruter au Sénat les meilleurs de la cité 35 :
FESTUS, De la signification des mots, p. 290 Lindsay s. u. Praeteriti senatores : jusqu'à ce que la loi du tribun Ovinius intervînt, par laquelle il était prescrit que les censeurs choisiraient pour faire partie du Sénat chacun des meilleurs de chaque ordre en procédant par curie. À partir du moment où ceci fut mis en application, ceux qui

étaient laissés de côté et ceux qui étaient exclus de leur rang [sénatorial] étaient

frappés d'ignominie (trad. Michel Humm modifiée).

14 Les censeurs étaient deux magistrats élus tous les cinq ans environ et pour dix-huit

mois. Ils étaient chargés de recenser la population et d'inscrire les citoyens dans les centuries et les tribus. À partir de cette loi, la censure joua un rôle central dans le fonctionnement de la République et devint le couronnement de la carrière politique romaine. Sélectionner les meilleurs invitait à apprécier la conduite de ceux qui aspiraient à entrer au Sénat, véritable organe du gouvernement de Rome, mais aussi dans l'ordre équestre qui constituait le second ordre de la cité, investi de certaines prérogatives. Dès lors se mit en place une surveillance des moeurs : le regimen morum. Contrairement à ce que l'on a longtemps pensé, nous avons établi dans d'autres écrits que cela ne passait pas par un interrogatoire de chaque citoyen par les censeurs

36 et que

l'examen était plus strict et, surtout, s'aventurait davantage dans la vie privée, à mesure que l'on s'élevait dans la hiérarchie civique

37. Néanmoins, tous les citoyens

étaient concernés et nous avons conservé des cas de simples citoyens à côté de ceux de

sénateurs ou de chevaliers qui sont bien sûr surreprésentés en raison de la nature de nos sources.

15 Les cas dont nous parlons sont ceux d'une dégradation. En effet, l'obligation de recruter

les meilleurs conduisit à éliminer les indignes comme le souligne notre unique source sur le plébiscite ovinien. On sait ainsi qu'à chaque censure, en moyenne 3 à 6 sénateurs sur 300 étaient exclus du Sénat

38. Il en allait sans doute de même pour les 1 800La citoyenneté comme dignitas en droit romain : (dé)-classer et/ou exclure ?

La Revue des droits de l'homme, 22 | 20225

chevaliers et pour les simples citoyens. Les sénateurs dégradés par les censeursperdaient donc leur rang et leur carrière politique était le plus souvent brisée39.

L'examen des moeurs donnait lieu à de véritables spectacles de l'honneur et du déshonneur, rappelant les cérémonies de dégradation statutaire étudiées par Harold

Garfinkel

40. On rassemblait la communauté autour de ses valeurs (le mos maiorum) en

rejetant l'infâme qui les avait transgressées.

16 Il ne s'agissait pas cependant d'une exclusion de la citoyenneté : le sénateur redevenait

chevalier, voire simple citoyen, le chevalier quittait les centuries équestres pour celles de la première classe censitaire, et le citoyen ? Pour ce dernier, les sources utilisent la formule aerarium facere et tribu mouere. On a longtemps cru qu'il s'agissait d'exclure le citoyen de sa tribu et de sa centurie, donc de le priver de sa citoyenneté ou du moins de son droit de vote. En réalité, on le reléguait dans une des quatre tribus urbaines avec les affranchis et les non-propriétaires, ce qui réduisait son poids électoral dans la mesure

où elles étaient plus peuplées que les 31 tribus rustiques rassemblant les propriétaires.

De manière parallèle, on l'inscrivait dans une centurie de prolétaires ou de la dernière classe censitaire, si bien qu'il n'était sans doute plus amené à voter, même si on maintenait ses obligations militaires et fiscales. Il s'agissait donc d'un déclassement découlant du fait qu'on assimilait le mauvais citoyen à un citoyen pauvre ou à un affranchi sur lequel la cité ne pouvait guère compter 41.

17 Avec la mise en place du regimen morum, la citoyenneté acquit donc une dimension

morale : les censeurs veillaient à ce que les citoyens répondent aux attentes de la communauté. En pleine deuxième guerre punique, en 214 av. J.-C. et encore en 209 av.

J.-C., 2 000 citoyens furent ainsi dégradés parce qu'ils cherchaient à échapper au service

militaire, effrayés par les victoires sanglantes d'Hannibal

42. Grâce à cet examen des

moeurs, la classe dirigeante romaine se retrouvait légitimée puisqu'elle pouvait se proclamer comme une aristocratie - au sens étymologique du terme - après avoir sacrifié quelques brebis galeuses. À l'inverse, se comporter comme le citoyen idéal pouvait permettre une ascension dans la hiérarchie civique : après les coupes claires dans les rangs du Sénat à cause des désastres militaires, en 216 av. J.-C. des soldats quiquotesdbs_dbs46.pdfusesText_46
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