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DÉPARTEMENT DÉTUDES ANGLOPHONES LIVRET

GASQUET Lawrence (littérature britannique 19ème siècle relations transesthétiques

DOCTORAT ES LETTRES

SPECIALITE

LITTERATURE COMPAREE

Le monstre fabriqué

dans la littérature occidentale au tournant des XIXème et XXème siècles

Stéphanie DALLEAU

S ous la direction de M. Bernard TERRAMORSI

Professeur de Littérature Comparée

JURY Jean-Claude Carpanin MARIMOUTOU, Professeur à l'Université de La Réunion

Michel PRUM

, Professeur à l'Université de Paris-Diderot Bernard TERRAMORSI, Professeur à l'Université de La Réunion Gilles TEULIE, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille

27 septembre 2014

2 3

A mes parents et mes soeurs

4

REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier tout d'abord M. Bernard Terramorsi pour avoir bien voulu

diriger notre thèse et pour s'être toujours montré à notre écoute ; nous souhaitons également

lui exprimer toute notre gratitude pour nous avoir enseigné une méthode de lecture que nous espérons ne pas avoir trahie. Nos remerciements vont également aux Professeurs Jean-Claude Carpanin Marimoutou, Michel Prum et Gilles Teulié qui ont bien voulu accepter de faire partie de notre Jury et apporter ainsi à nos travaux leurs remarques et conseils. Ainsi qu'à tous ceux qui ont facilité la constitution du travail présenté aujourd'hui, notamment l'Ecole doctorale qui nous a

permis de bénéficier du financement des trois premières années de notre doctorat au titre

d'allocataire d'Etat ; et le service du Prêt entre bibliothèque, tout particulièrement Mlle Pauline Grebert pour son aide et sa disponibilité. Nous voulons également exprimer notre gratitude à M. Gwenhaël Ponnau qui a initié notre étude du monstre par ses précieux conseils et guidé avec bienveillance nos premiers pas dans la recherche. A ma mère et ma soeur Sabine sans qui rien n'aurait été possible je souhaite dire encore un grand merci. Arrivée au terme de ce périple j'ai également une pensée toute particulière pour mon père qui m'a appris à écrire mes premiers mots. Enfin, toute ma reconnaissance va

à ma soeur Isabelle

que j'espère ne jamais décevoir. 5

SOMMAIRE

INTROD

UCTION GENERALE 9

CHAPITRE

I- RESUMES DES OEUVRES DU CORPUS PRIMAIRE 29

-Frankenstein or The Modern Prometheus [1818] de Mary Shelley 31

-The Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde [1886] de Robert Louis Stevenson 37

-The Surgeon's Experiment [1887] de William Chambers Morrow 41

-The Great God Pan [1894] d'Arthur Machen 44

-The Island of Doctor Moreau [1896] de Herbert George Wells 50

-Le Faiseur d'hommes et sa formule [1906] de Jules Hoche 57

-Le Singe [1924] de Maurice Renard et Albert-Jean 62

CHAPITRE

II - PRESENTATION DU MYTHE DU MONSTRE FABRIQUE 68

PARTIE 1 : MYTHE ET LITTERATURE 69

1 .1

Approches du Mythe dans ses rapports avec la Littérature 69

1 .2

Littérature et mythopoétique : l'émergence du mythe littéraire du monstre fabriqué 72

6 PARTIE 2 : LE MYTHE DU MONSTRE FABRIQUE 75 2.1.

Mythe, Science et Mystère 75

2.2. Essai de découpage séquentiel du corpus primaire 78
CHAPITRE III- L'IDENTITE MONSTRUEUSE : DE L'HYBRIS A L'HYBRIDE 91

PARTIE 1 : L'HYBRIS DESTRUCTEUR 92

1.1.

Le fabricateur de monstre : figure d'un marginal 94

1.1.1. Un orgueil démesuré 94

1.1.2. Une révolte prométhéenne

101

1.1.3. Un fou criminel en puissance 109

1.1.4. Un trajet transgressif

116
1.2. Rémanence du désir et perversions fin de siècle : un nouvel érotisme 124

1.2.1.

Libido sciendi et Libido sexualis 124

PARTIE 2 : ESSE EST PERCIPI 134

2.1.

L'entresort monstrueux : la créature dans le cadre 134

2.2.

Une créature abhorrée 141

2.3.

Exhibition monstrueuse 147

2.3.1 Une peau obscène 149

7

2.3.2.

Les éléments physiques de la peur : yeux, bouche, main 156

2.4. Le pouvoir de fascination du monstre fabriqué 173

2.4.1.

L'envahissement de l'espace sonore et visuel 175

2.4.2.

Les réactions provoquées par la présence monstrueuse 179

2.4.2.1. Les frissons d'effroi

184

2.4.2.2. La panique

186

2.4.2.3. La pétrification

193

PARTIE 3 : CREATION ET PROCREATION 203

3.1.

Une écriture spéculaire

206

3.1.1. Symétrie et circularité 206

3.1.2. Des récits emboîtés qui permettent une mise en abyme de la création 212

3.1.3. Confusion et inversion des rôles 224

3.2. Le monstre fabriqué en tant que vecteur de contamination 238

3.2.1. La contamination physique : une dégénérescence abjecte 238

3.2.2. La contamination psychique : une obsession aveuglante 250

3.2.3. Le monstre fabriqué et l'Unheimlich :

l'écoeurement face au retour du refoulé 260

3.2.4.

Le suicide comme remède libérateur 270

3.3.

Retour au limon primordial

278
8

CONCLUSION GENERALE

286

ANNEXES

293

Annexe 1 : La Clé des champs de René Magritte, 1936 294

Annexe 2 : Le mythe de Dionysos 295

Annexe 3 : Hydrie attique, Ménade endormie, ca 500 av. J.-C. 296

Annexe 4 : The Nightmare de Heinrich Füssli, 1782 297

Annexe 5 : Illustration du monstre de Frankenstein, édition de Standard Novels 1831 298

INDEX NOMINUM

299

INDEX RERUM

304

BIBLIOGRAPHIE

306
9

INTRODUCTION GENERALE

10

La figure de la créature monstrueuse,

au centre de notre thèse, participe d'une

catégorie de personnages déterminés par leur situation hors de la norme, le monstre étant

généralement défini par le Grand Robert comme un " être vivant, organisme de conformation

anormale (par excès, par défaut ou par position anormale des parties) ».

Le monstre fait figure de

portentum, " funeste présage », selon le comparatiste Roger

Bozzetto :

Pour l'Antiquité, et jusqu'à l'aube de ce siècle en Occident, le monstre comme objet du monde est un signe, c'est-à-dire qu'il est porteur d'un sens. De la même manière les phénomènes astronomiques comme les comètes, sont interprétées comme annonciatrices de

grands événements. Si Aristote tient les monstres pour des "erreurs" de la nature, le frère de

Cicéron les présente comme des moyens de divination, cautionnant une sorte de tératomancie. Puisque ces formes sont singulières et marquent un écart, elles doivent avoir un e signification particulière à cause de cet écart. Ce seraient donc des signes par lesquels Dieu, ou la Nature, ou encore le diable se manifestent et donnent ainsi un avertissement aux hommes. 1 De plus, le terme " monstre » dérive étymologiquement du verbe latin " monstrare »

dont le sens est " montrer », qui lui-même est issu du verbe " monere », signifiant " avertir ».

Le Grand Robert nous apporte des précisions sur la signification du verbe " monere » :

" faire penser à ; faire se souvenir ; avertir. ĺ Monument ». Ainsi, " monere » allie le sens

de mise en garde et celui de remontrance, et se trouve être à l'origine d'un autre terme, le " monument », que Jean Clair rapproche du monstre car tous les deux ont " partie liée dans l'évocation commune d'un passé lointain, mythique ou fabuleux, qu'il faut tout à la fois conserver mais dont il faut aussi se garder. 2

Le monstre, faisant figure de monumental

serait alors un " remontreur », une construction symbolique et littéraire, un signe, qui avertit

le lecte ur, et dont le sens, appartenant au passé, reste à déchiffrer pour celui qui le regarde. Le

monstre incarnerait ainsi un signe à décoder, à rendre lisible par delà l'illisibilité première ; il

se dresse comme un sémaphore monumental, nous voilà prévenu sur le seuil de cette étude, dans cette introduction qui devient par là un avertissement. 1

Roger Bozzetto, " Le monstre obscur objet d'une fascination », in Le Fantastique dans tous ses états, Aix-en-

Provence : Publications de l'Université de Provence, coll. " Regards sur le fantastique », 2001, pp. 111-119, p. 118.
2

Jean Clair, Hubris, La fabrique du monstre dans l'art moderne, Homoncules, Géants et Acéphales, Paris :

Gallimard, coll. " Connaissance de l'Inconscient », 2012, pp. 9-10. 11

Le monstre est une créature fondamentalement

ambiguë, capable de susciter des sentiments contraires : peur et pitié, fascination et répulsion. La monstruosité morale et/ ou physique incarne parfaite ment le besoin de révolte de l'homme, une révolte contre l'ordre

établi, contre les normes. Elle excède des catégories de pensées et de classification en vigueur,

et est donc de l'ordre de l'inclassable. La créature monstrueuse est par essence une transgression absolue et c'est cela qui fascine le lecteur.

Dès à présent il est nécessaire de faire la distinction entre le monstre biologique et le

monstre littéraire, ce dernier qui est une construction symbolique, un personnage, est le sujet de notre étude. Gilbert Lascault, le spécialiste de la question du monstre en esthétique, différencie clairement ces deux catégories du monstrueux : Alors que le monstre biologique (cf. Aristote) naît du hasard, d'une impuissance de la forme

à informer la matière, au contraire la forme m créée par la littérature ou les arts plastiques est

en général voulue. Le monstre biologique trouve son origine dans une incapacité relative de la cause formelle et dans une matière qui refuse de se laisser complètement adapter à la forme. Au contraire la forme m naît d'une cause efficiente qui se veut toute puissante, d'une volonté qui veut rivaliser avec la nature et d'une matière torturée et dominée. 3 Nos travaux ne porteront pas sur une personne hors norme mais sur un personnage qui dépasse les limites de façon spécifique et dont il faudra analyser les rouages textuels.

Notre étude tâchera de ne pas s'arrêter à la seule figure du monstre comme avertissement pour

s'intéresser aussi à ce qu'il veut démontrer, à ce dont il porte la trace, la mémoire.

L'être monstrueux est une entité protéiforme qui a prêté ses traits à de multiples

représentations littéraires, en effet, la galerie des monstres fantastiques est considérable

sphinx, faunes, loups-garous, sirènes, centaures, vampires...et le champ de recherches qui s'ouvre à nous est tellement vaste qu'un choix rigoureux s'impose. Nous avons donc décidé de centrer nos travaux sur la question de la fabrication de la créature monstrueuse dans et par

des oeuvres littéraires narratives. De même, il est important d'établir des limites strictes à notre

champ d'étude, pour cette raison nous avons fait le choix thématique de focaliser notre problématique sur le monstre artificiel essentiellement " organique », c'est-à-dire fabriqué à partir de tissus d'êtres vivants. Les créatures monstrueuses faites de chair nous offrent un matériau de choix puisque comme l'a indiqué Gaston Bachelard : 3

Gilbert Lascault, Le Monstre dans l'art occidental, un problème esthétique, Paris : Klincksieck, Collection

d'esthétique sous la direction de Marc Jimenez, [Première édition 1973], 2004, pp. 23-24. 12

Les premiers intérêts psychiques qui laissent des traces ineffaçables dans nos rêves sont des

intérêts organiques. [...] C'est dans la chair, dans les organes que prennent naissance les images matérielles premières. 4 L'imagination du monstre trouve ainsi dans la matière organique une image matérielle riche,

intense et naturelle. Notre décision de focaliser notre étude sur le monstre organique fabriqué

nous permet également de constituer un corpus unifié, et a aussi pour conséquence d'exclure de notre domaine de recherches : les statues animées, les créatures mécaniques tels que les automates, ou encore les mannequins. Le monstre machinique est ainsi exclu de notre corpus

dès lors centré sur le monstre de chair et d'os, le corps humain arrangé/dérangé qui associe

l'excès et le défaut. Le terme " fabrication » nous permet de souligner le caractère artificiel des monstres

analysés, qui sont les créations de l'activité humaine et non pas de la nature. En effet, l'éveil à

la vie de ces êtres hors norme implique l'intervention d'un individu, plus qu'un fabriquant nous verrons qu'il s'agit d'un fabricateur, véritable savant fou qui se sert de sa mètis, 5 que

l'on peut traduire par " intelligence rusée », pour satisfaire sa libido sciendi, son désir de

connaissance. Le " fabricateur » est défini par le Littré comme étant celui qui fait, qui fabrique,

mais à la différence du fabriquant, il " n'est point un industriel, n'a point de fabrique et se dit

de celui qui fait quelque oeuvre ». De même, le Lexis nous donne cette définition " fabricateur,

n. m. : Ouvrier, artisan d'une oeuvre considérable : " Le fabricateur souverain [Dieu] nous créa

besaciers tous de même manière (Lafontaine) ». Nous pouvons ainsi remarquer que le sens classique du terme " fabricateur », qui nous est donné par ces deux dictionnaires, souligne le

caractère particulier et unique de l'oeuvre réalisée par le fabricateur, par la singularité de sa

production, il fait figure de véritable créateur. De plus, il est bien de remarquer que le mot

" fabricateur » bénéficie d'une seconde acception particulièrement signifiante pour notre

analyse. En effet, selon la définition du Nouveau Petit Robert, le " fabricateur » dans son sens

péjoratif désigne celui qui fabrique de la fausse monnaie, des faux papiers, il est alors synonyme de falsificateur. De même, le Grand Robert définit le " fabricateur » comme une 4

Gaston Bachelard, L'Eau et les rêves, Essai sur l'imagination de la matière, Paris : Librairie José Corti, 2003,

p. 16. 5

Voir Jean-Pierre Vernant et Marcel Détienne, Les Ruses de l'intelligence, la mètis des Grecs, Paris:

Flammarion, 1978.

13

personne qui fabrique des produits sans valeur destinés à tromper, il sert aussi à désigner une

" personne qui invente des récits mensongers ». Ainsi, à lui seul, le terme " fabricateur » nous

révèle l'identité du savant fou, à travers sa double accep tion, ce terme met l'accent sur

l'ambivalence du personnage. Il s'agit d'un être qui se rêve l'égal de Dieu mais qui se révèlera

être un démiurge inconscient et irresponsable, un faux dieu qui ne sera capable que de singer la Création. Nous pouvons également remarquer que le caractère irréfléchi de nos personnages

tératogènes est parfois inscrit dès le titre même des oeuvres étudiées, le fabricateur fait alors

explicitement place à un simple " faiseur ». En effet, le roman de Jules Hoche intitulé Le Faiseur d'hommes et sa formule, ainsi que la nouvelle de William Chambers Morrow, The Surgeon's Experiment traduite en français par Le Faiseur de monstres, emploient le même terme : " faiseur » et soulignent donc la dimension purement matérielle de la création. Le

Littré définit le " faiseur » comme : " Celui qui fait quelque chose », sa seconde acception

désigne plus particulièrement " Celui qui fabrique certains objets ». La citation illustrant cette

définition, qui est issue d'Elévation à Dieu sur tous les mystères de la religion chrétienne de

Bossuet, rend parfaitement compte de l'opposition entre le Créateur et nos démiurges : " Dieu n'est point un simple faiseur de formes et de figures dans une matière préexistante ». On notera également que notre étude s'attache plus particulièrement à la créature faite à l'image de l'Homme, le pouvoir de fascination du monstre étant décuplé par son anthropomorphisme. En effet, selon Roger Caillois : " L'aspect anthropomorphique d'un

élément paraît en effet une source infaillible de son emprise sur l'affectivité humaine »

6 La créature monstrueuse s'inscrit comme une figure d'altérité, tout en conservant des

caractéristiques humaines, ce qui lui permet d'être identifiée comme un être autre, dans lequel

l'Homme peut se reconna ître sans pouvoir l'admettre ni l'accepter. Selon Roger Bozzetto, le fantastique ne se contente pas " de la croûte de l'apparence » et permet " de rendre compte de

l'" authenticité ». Il passe pour ce faire par le biais de la monstruosité - le monstre c'est ce qui

ne rentre pas dans la " carapace de l'identique », ce qui fait sauter les verrous de la représentation codée, idéologiquement aliénante. 7

Le monstre serait alors le point focal où

s'interpénètrent deux mondes antagoniques, sa ressemblance avec l'homme induit l'abolition 6 Roger Caillois, Le Mythe et l'homme, Paris : Gallimard, 1998, p. 49. 7

Roger Bozzetto,

L'Obscur objet d'un savoir, fantastique et science-fiction : deux littérature de l'imaginaire, Aix-Marseille I : Publications de l'Université de Provence, 1992, p. 146. 14 des limites entre l'humain considéré comme le normal et le monstrueux. Le glissement qui

s'opère de la monstruosité à l'humanité provoque par conséquent une remise en question de

l'identité de l'Homme. La notion d'altérité s'inscrit au coeur de notre analyse tout d'abord par la

figure monstrueuse et également à travers l'interprétation de notre corpus. En effet, en tentant

d'interpréter un texte nous cherchons à : " pouvoir voir dans une chose autre chose. [...] Ou quelque chose d'autre, ou quelque chose de plus. C'est une autre façon d'inscrire, au coeur de toute culture de toute pensée, de tout texte, le principe d'altérité, [...] » 8 Nos récits de la fabrication monstrueuse mettent en scène des créateurs qui montrent un acharnement passionné à donner la vie de manière artificielle, ce qui a pour conséquence de les couper du processus naturel de reproduction ; dès à présent nous pouvons nous demander si cette procréation dont les auteurs s'excluent volontairement ne pourrait pas faire son retour de manière voilée. Il est d'ailleurs indéniable que la scène primitive 9 exerce une véritable fascination sur l'Homme, selon Pascal Quignard nous sommes tous " orphelins de la scène qui nous a faits. Nous la recherchons partout. C'est la soif inextinguible de ce qui nous échappe. Nous sommes réduits à imaginer l'Avent du réel. Puisque c'est impossible, nous sommes condamnés à nous mentir. » 10 Notre étude s'inscrit dans le cadre d'un doctorat de littérature comparée, nous nous emploierons don c à respecter les principes fondateurs définis par Claude Pichois et André

Michel Rousseau :

La littérature comparée est l'art méthodique, par la recherche des liens d'analogie, de parenté

et d'influence, de rapprocher la littérature des autres domaines de l'expression ou de la

connaissance, ou bien les faits et les textes littéraires entre eux, distants ou non dans le temps

ou dans l'espace, pourvu qu'ils appartiennent à plusieurs langues ou plusieurs cultures, fissent-elles partie d'une même tradition, afin de mieux les décrire, les comprendre et les goûter. 11 8

Daniel-Henri Pageaux, Le Séminaire de 'Ain Chams, Une introduction à la littérature générale et comparée,

Paris : L'Harmattan, 2008, p. 31.

9

La scène primitive désigne " la scène de rapport sexuel entre les parents, observée ou supposée d'après certains

indices et fantasmée par l'enfant. Elle est généralement interprétée par celui-ci comme un acte de violence de la

part du père. », J. Laplanche et J.-B. Pontalis, Vocabulaire de la psychanalyse, Paris : Quadrige / PUF, 2009, p.

432.
10

Pascal Quignard, " Il faut être absolument le plus secret des hommes, Grand entretien avec Pascal Quignard »,

Propos recueillis par Vincent Landel,

Le Magazine littéraire, N°525, nov. 2012, pp. 82-87, p. 85. 11

Pierre Brunel, Claude Pichois, André-Michel Rousseau, Qu'est-ce que la littérature comparée?, Paris :

Armand Colin, 1983, p. 150.

15 Notre thèse constitue le prolongement d'une curiosité initiée dès notre mémoire de

Master qui nous a servi d' " aiguillon »

12 selon les termes d'Yves Chevrel, de stimulant pour mener à terme nos travaux et notre recherche sur le monstrueux. L'interprétation d'une oeuvre est source de plaisir, la découverte d'un sens caché parmi la pluralité des possibles constitue une véritable satisfaction, Jean Bellemin-Noël, fondateur de la textanalyse, décrit parfaitement le bonheur ressenti par l'analyste :

Le même plaisir qu'éprouvent les enfants à rejouer indéfiniment au même jeu. La même

satisfaction que celle que le rêve procure en remettant en scène, toujours d'une façon

nouvelle, la même envie qui ne sera jamais assouvie. Ces bonheurs secrets sont réels. Et à ce

compte, interpréter est une activité ludique. Mais c'est d'abord une activité exaltante. Il y a de

la surprise dans cette rencontre d'un déjà connu, pour tout dire d'un reconnu. Une surprise, en

d'autres termes un court saisissement bientôt suivi d'un relâchement : tension-puis-détente, le

mécanisme même du plaisir. 13 Pour mener à bien notre quête de l'identité monstrueuse, nous avons eu plaisir à rassembler, afin de former notre corpus, des oeuvres majeures de la littérature et des textes moins connus appartenant pour la plupart à ce que beaucoup considère comme de la

paralittérature. Les oeuvres étudiées appartiennent alors à deux catégories, il existerait ainsi

deux normes esthétiques distinctes qu'Alain-Michel Boyer définit comme :

celle de la littérature officialisée, qui portait naguère la désignation de "belles lettres" ; celle

d'écrits a priori disqualifiés, désavoués, ou au mieux dépréciés - en tout cas non reconnus par

les instances qui règnent sur le monde de la culture, des écrits qui n'ont pas le statut d'oeuvres

tel qu'il est fixé par les institutions 14 Cette seconde catégorie désignerait alors une littérature de masse, qui rassemblerait sans distinction le roman de science-fiction, le roman rose, le roman policier ... L'originalité de notre thèse repose notamment ainsi, sur une lecture croisée où se confrontent des ouvrages tutélaires et des oeuvres parfois méconnues, rares pour certaines, que nous souhaitons faire découvrir ou redécouvrir aux lecteurs. Notre corpus rassemble donc des textes d'auteurs reconnus par les institutio ns culturelles : Mary Shelley (Frankenstein 15 [1818]), Robert Louis 12

" La pratique comparatiste tend à faire de tout lecteur un chercheur, un curieux, un explorateur ; pour lui la

curiosité n'est jamais une faiblesse, elle est un aiguillon. », Yves Chevrel, La Littérature comparée, [1989], Paris

: Presses Universitaires de France, 2009, coll. " Que sais-je ? », p. 123. 13

Jean Bellemin-Noël, " Quelques notes en guise de bilan méthodologique », in Lire de tout son inconscient,

Presses Universitaires de Vincennes, coll. " Essais et savoirs », 2011, pp. 259-272, p. 266. 14

Alain-Michel Boyer, La Paralittérature, Paris : Presses Universitaires de France, col1. " Que sais-je ? », 1992,

pp. 3 -4. 15

Mary Shelley, Frankenstein or the modern Prometheus, [1818], Edited by M. K. Joseph, New York : Oxford

University Press, coll. " The World's Classics », 1990. Frankenstein ou le Prométhée moderne, Traduit de

16 Stevenson (The Strange Case of Doctor Jekyll and Mister Hyde 16 [1886]), Herbert George

Wells (The Island of Doctor Moreau

17 [1896]) , connus : Arthur Machen ( The Great God Pan 18 [1894]), William Chambers Morrow (The Surgeon's Experiment 19 [1887]), Maurice

Renard (Le Singe

20 [1924]) et d'autres beaucoup moins : Albert-Jean qui a co-écrit Le Singe,

Jules Hoche (Le Faiseur d'hommes et sa formule

21
[1906]). La France et le monde

anglophone ayant fourni un matériel riche et varié, il s'agira de mener une étude comparative

dans les domaines français, anglais et éta tsunien pour repérer et interpréter les invariants, et rendre compte de l'originalité des textes choisis. La littérature fantastique est apparue au début du XIXème, au coeur de l'Occident industriel et positiviste, alors que l'homme moderne est persuadé que la science est capable de tout expliquer.

Grâce à des auteurs tels que W.

l'anglais par Paul Couturiau, Préface de Mary Shelley, Paris : Editions Gallimard, coll. " Folio Plus », 1997. Nos

éditions de référence désormais. Par convention, au cours de notre étude, les citations extraites de ce roman

seront désignées par : F suivi de la pagination correspondant au texte original ainsi que de la traduction française

et sa pagination. 16

Robert Louis Stevenson, The Strange Case of Dr Jekyll and Mr Hyde, [1886], Paris : Librairie Générale

Française, coll. " Les langues modernes / bilingue », Série anglaise dirigée par Pierre Nordon, 2004. Traduit de

l'anglais par Théo Varlet " Le Cas étrange du docteur Jekyll et de M. Hyde », in Les Savants fous, romans et

nouvelles, Présentés par Gwenhaël Ponnau, Paris : Omnibus, 1994, pp. 631-693. Nos éditions de référence

désormais. Par convention, au cours de notre étude, les citations extraites de ce roman seront désignées par : JH

suivi de la pagination correspondant au texte original ainsi que de la traduction française et sa pagination.

17

Herbert George Wells, The Island of Doctor Moreau, [1896], Londres : Hard Press, 2006. Traduit de l'anglais

par Henry D. Davray,

L'Ile du docteur Moreau

, in La Machine à explorer le temps suivi de L'Ile du docteur

Moreau

, Paris : Mercure de France, coll. " Folio », pp. 167-372. Nos éditions de référence désormais. Par

convention, au cours de notre étude, les citations extraites de ce roman seront désignées par : IDM suivi de la

pagination correspondant au texte original ainsi que de la traduction française et sa pagination. 18

Arthur Machen, The Great God Pan, [1894] in Tales of Horror and the Supernatural, Londres : John Baker

Publishers Ltd., 1964. Traduit de l'anglais par Paul-Jean Toulet, Le Grand Dieu Pan, in [Toulet] OEuvres

complètes, Paris : R. Laffont, 2003, pp. 1337-1372. Nos éditions de référence désormais. Par convention, au

cours de notre étude, les citations extraites de ce roman seront désignées par : GGP suivi de la pagination

correspondant au texte original ainsi que de la traduction française et sa pagination. 19

William Chambers Morrow, The Surgeon's Experiment, [1887], in The Frankenstein Omnibus, Publié sous la

direction de Peter Haining, Edi tions : Book Sales, 1994, pp. 213-228. Traduit de l'anglais par George Elwall

" Le faiseur de monstres », in Le Singe, l'Idiot et Autres gens, Paris : Editions Phébus, 2004, pp. 111-130. Nos

éditions de référence désormais. Par convention, au cours de notre étude, les citations extraites de cette nouvelle

seront désignées par : SE suivi de la pagination correspondant au texte original ainsi que de la traduction

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