[PDF] Humanimalité: les figures du poète





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LA MÉTAPHORE DANS LES POÈMES FRANÇAISES DARTHUR

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Les poetes du XVIIIe siecle comme ceux du xvre si~cle



Chapitre 1. Lart de la parole - Question 2 : Léloquence peut-elle s

L'éloquence du poète qu'est Virgile n'a rien à voir à première vue



Métaphore et pensée dans loeuvre de Victor Hugo (1852-1864)

6 juil. 2021 du recueil de poèmes à l'essaim d'oiseaux les ressemblances sont ... même que l'homme est l'animal où vit / L'âme

THESE DE DOCTORAT DE

LE MANS UNIVERSITE

ECOLE DOCTORALE N° 595

Arts, Lettres, Langues

Spécialité : Langue, littératures françaises, littératures francophones -1864) Thèse présentée et soutenue au Mans, le 8 juin 2021

Unité de recherche (3L.AM)

Thèse N° : 2021LEMA3002

Par

Guillaume PEYNET

Rapporteurs avant soutenance :

Jean-Marc Hovasse Professeur à Sorbonne Université Michel Murat Professeur émérite de Sorbonne Université

Composition du Jury :

Présidente : Judith Wulf

Examinateurs : Éric Bordas Professeur à

Jacques Dürrenmatt Professeur à Sorbonne Université Jean-Marc Hovasse Professeur à Sorbonne Université Michel Murat Professeur émérite de Sorbonne Université Myriam Roman Maîtresse de conférences à Sorbonne Université Dir. de thèse : Franck Laurent Professeur à Le Mans Université 1

Université du Mans

École doctorale ALL (Arts, Lettres, Langues)

Doctorat

Littérature française

(1852-1864)

Guillaume Peynet

Thèse dirigée par M. Franck Laurent (université du Mans)

Soutenue au Mans le 8 juin 2021

Jury :

M. Jacques Dürrenmatt, professeur à Sorbonne Université M. Jean-Marc Hovasse, professeur à Sorbonne Université M. Michel Murat, professeur émérite de Sorbonne Université (rapporteur) Mme Myriam Roman, maîtresse de conférences à Sorbonne Université 2 3

Remerciements

Ma gratitude va

et de fermeté. Je remercie également MM. Éric Bordas, Jacques Dürrenmatt, Jean-Marc

Hovasse,

membres de mon jury. La naissance et le développement de mon projet de thèse doivent beaucoup à trois professeurs : Mme Marie- Ulm pendant trois ans, qui par son cours sur Les Misérables a suscité en moi cet enthousiasme ; M. Bertrand Marchal, qui a été mon directeur de recherche pendant mes deux années de Master, qui a dirigé mes premiers travaux sur la métaphore ; enfin M. Thomas Conrad, tuteur de ma n projet pour obtenir un contrat doctoral, et qui a été lui aussi un passionnant professeur. Je remercie Mme Claude

mes travaux et de recueillir des conseils et des avis précieux. Le personnel de diverses

bibliothèques municipales de Paris a rendu possible une partie importante de mes recherches. Mes camarades du Groupe de travail des jeunes hugoliens Jordi Brahamcha-Marin, Agathe Giraud, Victor Kolta, Hélène Kuchmann, Hélène Thil - nel et amical chaleureux, stimulant, instructif collègues enseignants et docto Catharina a un

droit spécial à ma reconnaissance ni mes étudiants, dont les mots sympathiques et les

ma famille à mes -

écouté et soutenu dans les moments de découragement et à mes amis, eux aussi oreilles et

soutiens fidèles : merci tout particulièrement à Emmanuel et Guillemette, Clémence et Anso,

et à Lancelot. 4 5

Abréviations et conventions

, nous utiliserons les abréviations suivantes :

ND de P : Notre-Dame de Paris

N le P : Napoléon le Petit

Ch : Châtiments

LC : Les Contemplations

LS1 / LS2 / LS3 : Première / Deuxième / Troisième Série de La Légende des siècles

LM : Les Misérables

" PS » : " Promontorium Somnii »

WS : William Shakespeare

QVE :

Notre édition de référence Victor

Hugo en dix-huit volumes dirigée par Jean Massin et publiée par le Club français du livre de

1967 à 1970 : nous désignerons chacun de ces volumes par le seul nom Massin suivi du

numéro du volume en chiffres romains (Massin I, II, III, etc.).

Références des citations : 1.

renvoyons dans un chapitre titre de op. cit., art. cit. ou éd. cit. 2. Lorsque plusieurs citations viennent de la même page du livre auquel nous renvoyons, nous avons

souvent évité la prolifération des notes de bas de page en indiquant le numéro de la page une

en précisant dans la note pour quelles citations vaut le renvoi. 6 7

Introduction

Hugo évoque dans William Shakespeare " le res-

1 ». Ces derniers mots

paraissent décrire le style de Hugo lui-même, tant la métaphore abonde chez lui, tant elle lui

est coutumière pour formuler ses idées. Mais en même temps, les deux accouplements de substantifs, " », " la pensée fleur », condensent la tension problématique à la fois de ce et

de cet objet stylistique en général : la métaphore. Elle est image, et elle est idée : comment

peut-

valant pour elle-même, ornementale ce que la théorie de la métaphore, depuis le XXe siècle,

récuse avec horreur et en même temps elle est pensée Hugo se sait là provocateur, lui qui

écrit ces lignes contre une critique qui lui a reproché la vacuité intellectuelle de ses

métaphores

2. Comment est-elle à la fois fleur et pensée ? Toute notre thèse essaiera de

répondre à cette question posée à propos des métaphores hugoliennes. Mais au préalable, il

nous faut chercher à y répondre à propos de la métaphore en général, parce que nos analyses

seront nécessairement conditionnées par certaines options théoriques.

De la métaphore

La présente section propose donc un parcours à travers les grandes problématiques

agitées par la théorie de la métaphore depuis son origine, et elle présente les positions sur

lesquelles se fondera notre étude des métaphores hugoliennes.

Substitution ornementale vs interaction cognitive

Dans un article intitulé " Metaphor », paru en 1954 et repris en 1962 dans Models and Metaphors, le philosophe analytique Max Black a établi une opposition célèbre entre concep-

tion substitutive (substitution view) et conception interactionnelle (interaction view) de la

métaphore. Les positions prises dans cet article se comprenn

1 WS, II, I, 4, Massin XII, p. 237.

2

Nous reviendrons sur ce point, et sur le passage de William Shakespeare cité ci-dessus, dans notre premier

chapitre. 8 légitime

apport intellectuel irréductible. Il faut pour cela récuser la traductibilité parfaite de la

métaphore dans le langage non métaphorique commence par définir, pour les rejeter, les substitution views de la métaphore : elles rique (appelons- expression littérale (appelons-la L) qui aurait exprimé la même signification si elle avait

été utilisée à la place. Selon ce point de vue, la signification de M dans son occurrence

un sens autre que son sens propre ou normal, dans un contexte qui permet de détecter le sens impropre ou anormal et de lui faire subir la transformation appropriée 3. Deux raisons peuvent expliquer le recours à la métaphore ainsi comprise - valent littéral L dans la langue utilisée, ou le plaisir s un a decoration4 - jetons sans réserve ; chaque locu-

littérale, il y a toujours une différence de signification reste à mieux décrire la particularité

sémantique de la métaphore. Toutefois il nous semble que le rejet par Black de la substitution view a engendré par la

concevoir la métaphore par opposition à un langage littéral, de distinguer un sens propre et un

sens figuré. Jacques Dürrenmatt explique bien la logique de cette position : il remarque que du naturel revient continuel- carte la métaphore ; or naturel (a) " », (b) " », (c) " - » ou encore (d) " qui est sans aff ». La métaphore apparaît ainsi comme un emploi inhabituel (b), recherché (c), voire

tion de la métaphore à une sorte de littéralité usuelle du langage la figure se constituant

comme écart normale » dont on se

3 Max Black, " Metaphor », in Models and Metaphors : Studies in Language and Philosophy, Ithaca, New York,

Cornell University Press, 1962, p. 31. Je traduis.

4 Max Black, " Metaphor », in Models and Metaphors, p. 34.

9 - simplement » signi-

fiante, dont la langue employée pour des énoncés scientifiques ou techniques serait

minimum ». Il suffit de prélever une des figures de Hugo pour se rendre compte que le terme " normal » attendu est bien

difficile à déterminer. Ainsi quel mot pourrait remplacer " simplement » le terme de

" lame » dans " Son onde est une lame aussi bien que le glaive » 5 ?

Pourtant, quand on définit la métaphore comme écart par rapport au langage littéral, on ne dit

normale » (" n se serait éloigné »), ce qui reviendrait à une conception substitutive - phorique elle-même ne signifie pas littéralement

un lecteur littéraliste. Littéralement, " Son onde est une lame aussi bien que le glaive »

ce que le e, avec en elle le sentiment de contradictions problématiques.

Littéralement, " Achille est un lion

un homme : la compréhension littérale ne pose aucun problème ici, elle est simplement

fausse, mais pourrait être vraie dans une situation de fiction redoublée (fictive par rapport à la

fiction reçue) où le héros achéen aurait été changé en lion ; seul le contexte oblige à dépasser

le sens littéral. Il est capital de maintenir la distinction entre signification littérale et signifi-

seconde. La notion de sens figuré e ce " sens » et le sens littéral ou propre si on les conçoit tous deux comme un contenu conceptuel analytiquement dégageable et exposable parler de signification métaphorique, le suffixe de signification définir, est un sens premier sur lui, passe à travers lui, et a donc besoin de lui comme préexistant au moins logiquement.

substitutive aux anciens penseurs de la métaphore, rhétoriciens antiques, classiques et néo-

classiques. Jean Molino, Françoise Soublin et Joëlle Tamine écrivent dans " Problèmes de la

métaphore une conception purement ornementale de la métaphore », associée à " une

5 Jacques Dürrenmatt, La Métaphore, Paris, Honoré Champion, " Unichamp-Essentiel », 2002, p. 10-12. " Son

onde est une lame aussi bien que le glaive » Au peuple » des Châtiments, VI, 9, Massin VIII, p. 721. 10 », " triomph[e] à Rome [autrement dit chez Cicéron et Quintilien] et y règn[e] sans partage

6 Institution oratoire de

Quintilien, les choses paraissent plus complexes. Certes Quintilien écrit : " un trope est le sion [verbi vel sermonis mutatio] de sa signification propre

à une autre [a propria significatione in aliam], avec avantage [cum virtute]7 ». Mais il

remarque un peu plus loin que "

[significationis gratia], certains pour leur beauté [decoris]8 » : pour lui, donc, tous les tropes

ne sont pas purement ornementaux. La même idée revient à propos de la métaphore en

particulier (tralatio en latin) :

on transfère un nom ou un mot du contexte où il est propre à un contexte où soit le terme

propre manque, soit le terme transféré est meilleur que le terme propre. Nous le faisons soit par nécessité [quia necesse est], soit pour plus de signification [quia significantius estté [quia decentius]9.

Exemple : "

pour mieux signifier choses que ces termes empruntés

10 ». Si la formulation métaphorique peut servir à mieux

littérale équivalente. Mais alors comment expliquer la première citation, celle qui fait du trope

une mutatio a propria significatione in aliam ? Comme ceci : quand Quintilien dit que le significatio propriadénote plus purement et simplement c : Achille est un lion ne veut pas signification que sa dénotation littérale ce qui ne veut pas dire que cette signification est on nouvelle. On peut sauver de la même manière les développements de Dumarsais au XVIII e siècle. " La métaphore est une figure par

6 Jean Molino, Françoise Soublin, Joëlle Tamine, " Présentation : Problèmes de la métaphore », article introduc-

teur du numéro 54 de la revue Langages, spécialement consacré à la métaphore, 1979, p. 10.

7 Quintilien, Institution oratoire, VIII, VI, 1. Je traduis. 8 Quintilien, Institution oratoire, VIII, VI, 2. Je traduis. 9 Quintilien, Institution oratoire, VIII, VI, 5-6. Je traduis. 10 Quintilien, Institution oratoire, VIII, VI, 7. Je traduis. 11

11 ».

Mettons que cette première citation est pour le moment incompréhensible - ? Dumarsais continue : " Un mot pris dans un sens métaphorique perd sa signification propre et en prend une nouvelle qui ne se ». Dumarsais semble ici pris en flagrant délit de conception substitutive.

Mais il ajoute plus loin : "

sommeil12 ». " Dit plus » : on littérale

équivalente. Mais alors, les deux premières citations ? Eh bien, Dumarsais nous paraît faire de

son mieux pour cerner le phénomène métaphorique avec une langue conceptuelle pauvre qui

ne dispose, au lieu du couple sens (ou signifié) / dénotation (ou référent), que du terme

signification (ou sens utilisé comme synonyme). Dans la deuxième citation, Dumarsais veut certainement dire : un terme métaphorique perd sa dénotation propre et en prend une nouvelle. Dans la première citation, il veut certainement dire : la métaphore transporte le signifié dénotation nouvelle13 ainsi seulement transporter une signification à une autre signification prend du sens. ation et une certaine altération du

sa dénotation littérale : tout cela découle de ce qui précède, mais reste à préciser. Pour ce

faire, revenons à Max Black, qui remplace la conception substitutive de la métaphore par une

conception interactionnelle dont il trouve le principe chez I. A. Richards : " quand nous

utilisons une métaphore, nous avons deux pensées de choses différentes qui agissent ensemble

et qui sont portées par un seul mot, ou une seule expression, dont la signification est le

résultat de leur interaction 14

ce que lui semble suggérer un passage de Richards, à savoir que seules soient sélectionnées et

11 César Chesneau du Marsais, Traité des tropes [1730], Paris, Le Nouveau Commerce, 1977, p. 112 pour cette

citation et la suivante.

12 César Chesneau du Marsais, Traité des tropes, p. 116.

13

La distinction entre sens et dénotation est due au logicien allemand Gottlob Frege (" Sens et dénotation »

[1892], in Écrits logiques et philosophiques, Paris, Seuil, 1971). Nous nous en resservirons pour expliquer le

-288. 14

I. A. Richards, The Philosophy of Rhetoric, Oxford University Press, 1936, p. 93, cité par Max Black dans son

article " Metaphor », in Models and Metaphors, p. 38. Je traduis. 12

la métaphore. Ce refus est capital, et il nous semble tout de suite gâché : Black, pour mieux

décrire le phénomène, propose une image15, celle du fil

seules certaines zones resteraient transparentes. Le ciel étoilé, vu à travers un tel écran, ne

présenterait plus que certaines étoiles supprime certains détails, en

16 ». Ce dernier énoncé est

parfaitement juste, mais insuffisant. Il y a deux problèmes : a) e sélection de certains traits seulement

la métaphore. Certes, il affirme que des traits auparavant inaperçus de cet objet sont révélés,

b) Que désormais le signifié alt métaphore est un deuxième problème - métaphoriqueLa Métaphore vivee la signification métaphorique procède de toute la phrase voire de tout le contexte discursif 17, : dans loupest un loup qui est le siège de la signification métaphorique, tandis que signifie exactement comme dans ou pour vivre seul 18 est un loup quand elle est appliquée métaphoriquement à . Pour ce faire, modifions son image du filtre et de 15 epiphora allotriou onomatos (Poétique, 1457 b 6) signifie " transport

théoriser la métaphore : la valeur intellectuelle de cette figure, et son rôle déterminant dans la conceptualité la

plus fondamentale, sont assez démontrés par toute la théorie de la métaphore, comme nous sommes en train de le

voir. En revanche, nous pensons que la métaphore appelle une description métaphorique simplement au même

titre que , par une sorte de nécessité autodescriptive, comme certains auteurs nous ont semblé le suggérer.

16 Max Black, " Metaphor », in Models and Metaphors, p. 41. Je traduis.

17 " Da

transposition du nom a sans cesse fait éclater le cadre du mot, et a fortiori celui du nom, et imposé de tenir

pour le milieu contextuel dans lequel seulement la transposition de sens a lieu

La Métaphore vive, Paris, Seuil, 1975, p. 87).

18

-même écrit, peu après la phrase citée dans la note précédente : " Est-ce à dire que la définition de la

métaphore comme transposition du nom soit fausse

réelle, au sens que Leibniz donne à ces deux expressions ; la définition réelle montre comment la chose est

engendrée » (La Métaphore vive, p. 87). Façon un peu artificielle de reconnaître sans reconnaître ce que nous

affirmons plus nettement

entendu, mais ça ne rend pas moins réel le changement de signification des termes métaphoriques seulement.

13

être

un loup est comparable à un fond dont la surimpression du signifié de éclaire et avive certaines zones, tandis que le reste est visible mais dans ; les traits communs au signifié de valent pleinement, mais ceux qui ne sont pas communs demeurent actifs avec un statut un peu différent : actifs pour de faux, pourrait-on dire. En reconfigurant ainsi le modèle de Black, on retrouve une certaine analyse sémique de la

métaphore. Les sèmes, pour la sémantique componentielle, sont les unités minimales de

certains sont dénotatifs (ils correspondent à des propriétés objectivement constatables dans la

réalité), les autres sont connotatifs : /froid/ et /blanc/ sont des sèmes dénotatifs de neige,

tandis que /pur/ est un sème connotatif. Or pour Michel Le Guern, " [le mécanisme] de la au niveau de la communication logique par la suppression, ou plus employé

19 ». La correction " ou plus exactement par la mise entre parenthèses » est heureuse,

git précisément de penser cette rémanence non dénotative des sèmes qui ne peuvent

deviennent connotatifs : " la puissance de connotation de la métaphore croît à mesure que la

précision de la dénotation diminue

20 », écrit Le Guern ; "

souvent le sens propre qui fonctionne au niveau connotatif, et le sens second qui assure la cohérence dénotative

21 », écrit C. Kerbrat-Orecchioni. Mais la notion de connotation est assez

floue ou en tout cas plurivoque, comme le note Le Guern lui- puissance de connotation de la métaphore » : elle consiste dans " imagination22 ». Cela est fort juste, mais

psychologique. Faut-il renoncer à caractériser logiquement le statut des sèmes qui ne peuvent

valoir littéralement ? Nous proposerons une hypothèse plus loin dans la sous-section sur la

19 Michel Le Guern, Sémantique de la métaphore et de la métonymie, Paris, Larousse, 1973, p. 15.

20 Michel Le Guern, Sémantique de la métaphore et de la métonymie, p. 20. 21

Catherine Kerbrat-Orecchioni, La Connotation, Lyon, Presses universitaires de Lyon, [1977] 1984, p. 115, cité

par Éric Bordas, Les Chemins de la métaphore, Paris, PUF, " Études littéraires. Recto-verso », 2003, p. 17.

22
Michel Le Guern, Sémantique de la métaphore et de la métonymie, on appelle

complexité, encore mal inventoriée, de ces systèmes, rend particulièrement délicat le maniement de ce concept

de connotation » (p. 20-21). Il distingue en particulier connotations sociologiques (celles dont parle le linguiste

danois Hjelmslev) et connotations psychologiques, " »

(p. 21). Dans chacune de ces deux catégories, il distingue connotation libre (le texte poétique dont chaque lecteur

achève la signification à sa manière, en ajoutant ses connotations à la dénotation) et connotation obligée (p. 21).

La métaphore a une connotation psychologique et obligée (p. 21). 14 métaphore, la fiction et le ressemblance.

Métaphore, ressemblance et comparaison

Le rôle joué par la ressemblance dans la métaphore, et corollairement la parenté plus ou moins étroite entre la métaphore et la comparaison : ces deux questions ont été beaucoup toute la tradition classique et néoclassique, la métaphore est fondée sur une ressemblance entre le dénoté littéral : " il est important de savoir créer des métaphores », explique-t-il dans la Poétique, " : créer de

23 ». Le même Aristote, dans la Rhéto-

rique un apprentissage,

et la métaphore est concernée au premier chef : elle procure " un apprentissage et une

connaissance par le genre

24 -à-

concepts, qui définit la

métaphore dans la Poétique (antérieure à la Rhétorique), avec les quatre modalités bien

25) ;
notionnel motivation ressemblance trop éloignée ; Aristote, qui donne le même conseil, met aussi en garde contre les ressemblances trop évidentes ; la figure plaît si le rapprochement est astucieux, elle a : " en philosophie aussi, la détection de similitudes y compris entre 26 ». Si la métaphore

est fondée sur une ressemblance, alors elle est apparentée à la comparaison : Aristote, un peu

23 Aristote, Poétique, 1459 a 6-7, trad. Michel Magnien, Paris, Librairie Générale Française, " Le Livre de poche

Classique », 1990, p. 122.

24 Aristote, Rhétorique, III, 10, 1410 b 14-15. Je traduis.

25

Aristote, Poétique, 1457 b.

26

Aristote, Rhétorique, III, 11, 1412 a 12-13, trad. Pierre Chiron, Paris, Flammarion, " GF », 2007, p. 479.

15 mot27 ; la

postérité dira plutôt, Quintilien notamment, que " la métaphore est une comparaison abrégée

[similitudo brevior]28 ». Dans son article " Metaphor », Max Black rompt une fois encore avec la tradition en

discutant le rôle de la ressemblance dans la métaphore et sa parenté avec la comparaison. Cela

tient toujours à son souci de réfuter les substitution views " présente » une ressemblance, explique-t-- raison et donc on la compa- rison view est un cas de conception substitutive29. Il y a là, nous semble-t-il, un raccourci la métaphore peut " présenter » une ressemblance sans avoir purement et simplement le sens mais il faudra préciser comment la métaphore " présente » la vague qui frôle la vacuité

30 tenté de considérer les similitudes comme

données objectivement tentation », qui nous

semble une vérité. Sans nul doute, " la ressemblance admet toujours des degrés, si bien

-t-il ou, peut--t- C sur telle et telle échelle de degrés de P » dans les représentations partagées,

31 il serait impossible

lyser la motivation des métaphores, comme nous le ferons tout au long de cette thèse, 27 "
de comparaison]. » Aristote, Rhétorique, III, 10, 1410 b 17, éd. cit., p. 471. 28
Quintilien, Institution oratoire, VIII, VI, 8. Je traduis. 29
comparison view comparison view est un cas particulier de substitution view placé par une

comparaison littérale équivalente ». Max Black, " Metaphor », in Models and Metaphors, p. 35 (je traduis).

30

Max Black, " Metaphor », in Models and Metaphors, p. 37 pour cette citation et les trois suivantes. Je traduis.

31

Un apport intéressa

sens standard dans un dictionnaire le système des lieux communs associés » la représentatio par exemple,

dans le cas du loup, " quelque chose de féroce, carnivore, traître, etc. » ; cela " peut inclure des demi-vérités ou

de franches erreurs » (p. 40 ; je traduis). De même, pour Michel Le Guern, la métaphore fonctionne uniquement

sur le plan des sèmes alors que la métonymie atteint le plan des référents (Sémantique de la métaphore et de la

métonymie). Tout cela ne diminue en rien le rôle de la ressemblance ni son objectivité, mais les déplace

seulement au niveau des représentations linguistiques. 16 met en évidence des caractéristiques -même. L est la suivante : "

». Créer la ressemblance nous

paraît une formule inexacte. On peut dire que la métaphore crée ou provoque la perception ; mais la ressemblance elle-même est un

rapport entre deux choses, le partage de propriétés communes, de sorte que créer la

ressemblance : la métaphore ferait considérer comme semblables des choses qui parfois là un fait indéniable. Hugo décrit son recueil des Contemplations dans ces cinq vers : " Ce ma prison, / Je vous le confie, air, souffles, nuée, espace

32 ! » Certes les trois derniers vers

apportent des motivations supplémentaires à la métaphore (les poèmes contiennent des

souvenirs, o ; le poète exilé fait paraître un recueil qui pas moins. Or, elles ne sont pas inexistantes : il y a

manière, est chose ailée33. Mais la distance entre les deux choses reste particulièrement

sensible, et elle contribue à la réussite de la métaphore ; cette relative gratuité, cette opacité

retiendrons le diagnostic suivant : la ressemblance est en jeu dans la métaphore parce que la métaphore invite à percevoir la ressemblance ; elle est un " voir comme

32 LC, " À celle qui est restée en France », IV, Massin IX, p. 394.

33
Certaines ressemblances sont faciles à formuler littéralement ( est une propriété commune à et recueil de poèmes : chose ailée propriété de poème mais peut-être seulement parce que les langues naturelles toutes les dénotations imaginables ? 17 suite de Marcus B. Hester34

deux choses qui est irrecevable littéralement, mais recevable comme une exagération à partir

35
ressemblance. La métaphore implicite une ressemblance, et donc recevoir la méta

chercher à percevoir la ressemblance : surimprimer le signifié du terme littéral sur celui du

terme métaphorique, et en retirer une représentation mentale hybride où une partie du sens du

36, autou

Le soleil boit la lumière37, et de les considérer ci- dérons ces métaphores comme imparfaites, inaccomplies, et cela sans jugement de valeur aucun Dans la suite de ce travail, nous utiliserons beaucoup le terme assimilation pour désigner blance. Nous parlerons sans scrupule du comparant et du comparé de la métaphore. Nous : idées flots.

34 La Métaphore vive, p. 268-271, rendant compte des analyses de Marcus B. Hester dans The

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