ANTHOINE BOESSET - Je meurs sans mourir
Récit de Mnémosyne : Quelles beautés Ô mortels pour assurer la valorisation du patrimoine musical français des XVIIe et XVIIIe siècles.
Clio et Mnémosyne : lavatar fin-de-siècle
petite Clio jadis fille comme on sait de Mnémosyne et de Zeus
Colette PIPON. - Et on tuera tous les affreux. Le féminisme au risque
Lorsque le Mouvement français pour le Planning familial (MFPF) opte Le mémoire de maîtrise de Colette Pipon lauréate du prix Mnémosyne
CORRECTION DU DEVOIR MAISON type Brevet
Français 3ème / Cycle 4. CORRECTION DU DEVOIR MAISON type Brevet. Support : extrait des Gratitudes Delphine de Vigan (2019).
_ MANUELS SCOLAIRES GENRE ET EGALITÉ
Jan 3 2013 masculiN
Atlas de la mémoire.Mémoire de MA
de lire la mémoire comme un atlas Mnémosyne à la manière de celui d'Aby Warburg
HÖLDERLIN ET LA THÉOLOGIE
trad française
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Bulletin de lAFIA
Apr 10 2020 Le Bulletin de l'Association française pour l'Intelligence ... Équipe Mnémosyne - LINE : Des neurosciences computationnelles aux sciences de.
« Les élèves sont capables dapprendre » : Techniques de
l'élixir du prochain millésime ; et Mnémosyne déesse de la mémoire
LEPOÈMEHARMONIQUE
VINCENTDUMESTRE
ANTHOINEBOESSETJe meurs sans mourir
Illustration : Louis Le Nain
Bacchus et Ariane
, avant 1635Orléans, Musée des Beaux-Arts
©Photo RMN
Le commentaire de cette oeuvre par Denis Grenier se trouve en page 7 du livretAnthoine Boesset (1587-1643)Je meurs sans mourir
1. Una musiqua
2.Départ que le devoir me fait précipiter
3-5. Ballet des fous &des estropiés de la cervelle
Entrée de l'Embabouinée
Entrée des demy-fous
Entrée des Fantasques
6. Ballet des vaillans combattans
7. Récit des Syrènes : Quel soleil
8. Récit d'Amphion et des Syrènes : Quels doux supplices
9. Récit du Dieu des Songes : Quelle merveilleuse advanture
10. Récit de Mnémosyne : Quelles beautés, Ô mortels
11. Récit du temps : Bien que je vole toutes choses & Aux voleurs, au secours, accourez tous
12.Je meurs sans mourir
13.A la fin cette bergère
14. Entrée des Laquais
15.Dove ne vai, crudele
16.Frescos ayres del prado
17.La gran chacona (Luis de Briceño)
18. La Pacifique (Louis Constantin)
19.Ô Dieu !
20.Nos esprits libres et contents (anonyme)
4'10 5'32 2'22 1'26 2'10 1'29 2'05 0'58 2'47 1'39 2'16 2'32 3'55 1'49 4'27 3'56 2'55 3'08 4'23 5'28LEPOÈMEHARMONIQUE
Claire Lefilliâtre, dessus
Bruno Le Levreur, haute-contre
Jean-François Novelli, taille
Arnaud Marzorati, basse-contre
Kaori Uemura, dessus de viole
Sylvie Moquet, dessus de viole
Sylvia Abramowicz, basse de viole
Anne-Marie Lasla, basse de viole
Françoise Enock, violone
Joël Grare, percussions
Massimo Moscardo, archiluth & guitare baroque
Benjamin Perrot, luth & théorbe
Vincent Dumestre, guitare baroque & théorbe
La Pacifiqueest enregistrée avec l'aimable participation de Florence BOLTON, basse de viole
Dove ne vai, crudele
, traduit en français par Jean-François Lattarico Una musiqua, Frescos ayres del prado & La gran chacona , traduits en français par Annick OstertagEnregistré à Paris en novembre 2003
Chapelle de l'hôpital Notre-Dame de Bon Secours Prise de son & montage numérique : Manuel MohinoPhotographies du livret : Robin Davies
Cet enregistrement s'inscrit dans la collaboration établie entre Alpha & le Centre de Musique Baroque de Versailles pour assurer la valorisation du patrimoine musical français des XVII e et XVIII e siècles. Il fait suite aux Grandes Journées Louis XIII programmées par le CMBV au Château de Versailles en octobre 2003. 7Louis Le Nain [attribué à]
Laon, 1602-1610 - Paris, 1648
Bacchus et Ariane
, avant 1635Huile sur toile,102 x 152 cm
Orléans, Musée des Beaux-Arts
Les frères Le Nain ne sont pas les peintres " de sujets d'actions basses et souvent ridi- cules » dont Pymandre cause avec hauteur dans les Entretiensde Félibien ; à l'origine de ladoctrine classique, le texte fondateur de la théorie de l'art français cristallise son caractère
académique, voué à la Grande Manière. Certes les Laonnois, admis avant 1630 à la maîtrise
de Saint-Germain-des-Prés, plus accueillante que la capitale, dont la corporation des peintresveille à préserver - un euphémisme - l'homogénéité et les privilèges, sont-ils surtout connus
pour leurs tableaux de " genre ». Or ils ont tâté, à quelques reprises, de l'histoire, de l'allégo
rie, et de la fable. Louis, " le Romain », dont on suppose la prim ogéniture, aurait même fait le voyage d'Italie, et pratiqué l'art transalpin, modèle absolu de bien des générations. Le thème d'Ariane abandonnée à Naxos par le perfide Thésée et sauvée par unBacchus éperdument amoureux qui, en l'épousant, la rendra éligible à la résidence olym
pienne, fait partie d'un fonds abondamment traité par les artistes depuis l'Antiquité. Dans cette foulée, la traduction des Images et Tableaux de platte-peinturede Philostrate par l'humaniste renaissant Blaise de Vigenère connaît un engouement qui se prolonge jusque sous Louis XIII. Cet ouvrage collige, décrit, et annote les arguments des principaux thèmesdu répertoire mythologique ; le texte est accompagné d'illustrations où les artistes puisent
des idées pour l'invention et l'ordonnance de leurs oeuvres. Un court poème à tonalité moralisatrice commente le sujet de l'estampe : 8L'ingrat est toujours infidèle,
Le lascif veut toujours changer,
Si Thésée oublie sa belle,
Et le bien qu'il a reçu d'elle,
L'ayant préservé du danger ;
Bacchus n'a pas moins d'inconstance,
Car il aime le changement,
Ny Ariadne d'imprudence,
D'avoir choisi un tel amant :
Sa volupté fut la plus forte,
Bien que son mal fut à sa porte.
La gravure qui met en présence un tendre Bacchus accourant à Naxos sauver Ariane de ladéchéance où l'a abandonnée le rescapé du labyrinthe de Minos, donne à voir l'empresse
ment du dieu envers la mortelle. À l'arrière-plan, on assiste aux manoeuvres de départ de l'esquif qui conduit le vainqueur du Minotaure vers Athènes. Le Nain connaît la source, dont, selon la coutume, il inverse la composition. La barque de Thésée a disparu de même que le paysage de l'arrière-plan auquel sont substituées des strates de nuages aux couleurs pastel, qui ont pour effet de rabattre le regard vers l'avant du tableau. Au premier plan, Ariane alan guie ne semble pas avoir aperçu son sauveur couronné lequel, glissant sa jambe droite sur une planchette - présente sur certains sarcophages romains -, alors que la gauche est enco re dans la barque, à peine accostée, est sur le point de l'aborder. Venu par mer plutôt que sur son char - cf. l' Ariannade Rinuccini mis en musique par Monteverdi -, il avance avecune discrétion et une délicatesse inhabituelle de la part du bruyant apôtre des plaisirs : la
tendresse fera effet, la léthargie de la dormeuse est sur le point de prendre fin. Le vêtement de Dionysos virevolte dans l'air marin, dont on a l'impression d'humer les embruns, tandisque, protégée par un rocher, Ariane épuisée a laissé glisser sa tunique, ce qui révèle les jolies
rondeurs de sa poitrine. La carnation d'un blanc immaculé est relayée par la pâleur de Bacchus ; la fraîcheur juvénile participe de l'ordonnance du tableau et de son éloquence. Cette luminosité structurante s'oppose au fond qui, dans un chiaroscuroqui déno- te la dette de Louis envers le Caravage et ses émules - Valentin ? - met en présence desmarins pleins de vigueur tout à leur office, qui abordent l'île avec précaution. L'ecphrasis
s'en tient aux données essentielles. Aucun détail anecdotique ne vient distraire l'oeil, lequel
se concentre sur l'essence du propos : la rencontre imminente des amants. D'autres sources transparaissent, au premier rang desquelles, nous semble-t-il, Michel-Ange, dont l'art, vilipendé par Roland Fréart de Chambray, distingué co-inspirateur de la théo-
rie classique, n'est pas agréable aux Français. Abolissant la perspective, Le Nain manifeste lui
aussi une indifférence au décor ; comme le Florentin, le Laonnois s'intéresse à la figure humai-
ne, masculine et virile, et campe des personnages, certains vus de dos, qui rappellent ceuxaperçus à la voûte de la Sixtine. L'homme qui se penche sur sa rame tient des ignudi, serrés
entre deux plans, de la chapelle papale. Le motif à l'exact centre géométrique du tableau, pos
térieur galbé d'un marin à la puissante anatomie, renvoie à la figure centrale du Serpent d'ai-
rain du cycle romain ; le personnage soutenant la Croix, instrument de la Passion, duJugement dernier
, autocitation de l'artiste, se présente dans la même attitude ; la ressem- blance du voisin de la vergue de Le Nain est confondante. Sous l'écorce du détail - dontDaniel Arasse a démontré le rôle nourricier du sens - ces parerga ne donnent-ils pas à pen-
ser que lors de son passage à Rome le peintre français aurait visité le Vatican, et retenu la leçon
plastique du maître de la Haute Renaissance ? La page renvoie au lieu mythique de l'art occi dental, témoignage inattendu de la romanité du peintre, qui trouverait ici un point d'orgue. Au-delà de cette robustesse michelangélesque, solidité inhabituelle sous des pin- ceaux français, Le Nain se montre aussi héritier direct de Fontainebleau, dont l'arrangementdu tableau se révèle tributaire : une scène semblable du Primatice à la Galerie d'Ulyssea
9 10servi de modèle ; d'ailleurs un délicieux relent de maniérisme bellifontain se profile sous la décla-
mation. À la vue de la délicatesse et de l'élégance du traitement dévolu à Ariane, bientôt
élevée à une autre dignité, on songe à Laurent de la Hyre, dont la fine poésie du milieu
du siècle, qui préfigurera l'idiome classique, est peut-être héritière. Convié à Paris par Marie
de Médicis, Orazio Gentileschi a aussi laissé des traces, tout comme la subtilité éthérée du
Guide, second Raphaël, admiré des Français. L'éclectique Louis a-t-il puisé chez le Pisan et
le Bolonais la blancheur féminine, marmoréenne et lumineuse, de l'héroïne rêveuse et de
ses voluptueuses draperies ? La chaste nudité de l'adolescente est-elle complètement étran gère aux sensuelles héroïnes de Jacques Blanchard ? Je meurs sans mourir: Ariane n'est point morte, qui reprend vie. Ni ne cesse devibrer le tableau au fil des clés que l'histoire diachronique suggère à l'écoute de la voix pure
et claire - allusion non voilée à l'interprète d'airs qu'ont peut-être entendus les Le Nain -
qu'est sur le point de faire entendre la future immortelle. En écho, ce tableau est traversé par la grâce, sentiment on ne peut plus français, lequel imprègne une oeuvre qui respire le char me de l'innocence.Denis Grenier
Département d'histoire
Université Laval, Québec
Denis.Grenier@hst.ulaval.ca
© Avril 2004
ut pictura musicaLa musique est peinture, la peinture est musique
Ce recueil composé de pièces d'Anthoine Boesset conclut la première partie de notre travail,
commencé en 1999, sur l'air de cour français - en quelque sorte le dernier volet d'un triptyque qui
rassemble les plus fameux compositeurs d'airs de cour: Estienne Moulinié, Pierre Guédron, Anthoine
Boesset. L'oeuvre profane de ce dernier, même si elle est plus importante que celle des deux autres
musiciens, rassemble 230 airs, ce qui, en une quarantaine d'années de vie musicale, représente très
peu. Le souci de perfectionnisme de Boesset explique en partie cela, et lui-même le confirme (non sans quelque orgueil) dans sa préface du VIII e livre, en 1632 : " Cependant je me donne la hardiessede présenter ces Airs qui ne sont pas en grand nombre, comme venans de celuy qui laisse très volon-
tiers la quantité des ouvrages aux autres, & qui travaille pour l'eslite plus que pour la multitude. »
Vincent Dumestre
11 "Mais quoy ?... Nous sommes en une saison ou les Poëtes, & les Musiciens ne donnent que les heures perdues à la devotion ; on n'estime plus les pensées si elles ne sentent un peu du blaspheme & de l'impiété, les sainctes fureurs de la poësie deviennent plus froides que la glace quand on ne se propose plus de sujéts sur la Terre qui les puisse animer... Il faut dire à mesme temps que les hommes parlent mieux que le Sainct Esprit, & que l'eslegance, & les bonnes paroles ne sont pas si familieres en la bouche de Dieu qu'en celle des mortelz..."La Despouille d'AEgipte, 1629.
Que pouvait en effet le poète "spirituel" qui tentait, à l'aide de ses cantiques en français, de
purifier les âmes perverties par le libertinage qui régnait dans l'air de cour ? Depuis le début
du siècle, l'air de cour s'immisçait partout ; ses mélodies délicates gagnaient toutes les
classes sociales. Chez Pierre Ballard, "seul imprimeur du roi pour la musique", on pouvait se procurer les quatre ou cinq parties vocales séparées de la " grande " version, quintessence de ce que les pages, chantres, violes et luths de la Chambre du roi interprétaient à la cour. Ballard avait élargi son public en proposant une version parallèle pour voix et tablature, arrangée par le luthiste Gabriel Bataille ou les auteurs eux-mêmes. Le succès de cette col lection hâta l'évolution du genre durant le règne de Louis XIII. La production profane du Blésois Anthoine Boesset (1587-1643), publiée entre 1606 et 1643, est probablement le plus bel exemple de cette évolution. Chanteur et compositeur, successivement Maître de la Musique de la Chambre du roi, de la reine, puis Surintendant des deux Musiques (1623), Boesset était l'héritier de la grande tradition polyphonique quelui avait transmise son beau-père Pierre Guédron. Sa production (près de 250 pièces), qui
surpasse celles de son prédécesseur et d'Étienne Moulinié, s'inscrivait encore dans cette tra
12 13 dition. Les innovations qu'il y apporta, en partie stimulées par sa riche production destinée aux ballets de cour, précipitèrent paradoxalement le déclin de cette polyphonie savantedont il fut pourtant considéré comme le maître incontesté. Malgré la réédition tardive de ses
neuf livres d'airs polyphoniques (1685-1689), ce sont bien les versions pour voix et accom pagnement qui connurent la postérité la plus grande. Les récits et dialogues pour voix etluth de son dernier recueil, publié l'année de sa mort, allaient donner à l'air de cour un tour
plus galant qui convenait davantage à la sensibilité des cercles précieux du milieu du siècle.
Cette sensibilité allait elle-même influencer les goûts artistiques de la cour de Louis XIV,
conquise par les airs sérieux pour voix et basse continue de Michel Lambert ou Sébastien LeCamus.
Airs de cour, airs mondains et art de sociétéÀ la cour ou à la ville, à la Chambre du roi ou dans les "salons" raffinés, on chantait l'amour
et les différentes passions qu'il suscite. Au temps du "vert galant" Henri IV, on avait pu s'amuser de la chanson d'une paysanne harcelée puis abandonnée sans ménagement par un gentilhomme de passage. Le règne de Louis XIII fut plus sage, en apparence. La poésie délaissait l'inspiration populaire et paillarde pour se concentrer sur les sentiments plus nobles de la plainte amoureuse ; strictement codifiés, ceux-ci stimulaient un véritable jeu desociété pour lequel les nombreux recueils de poésies et d'airs de cour imprimés offraient un
répertoire conséquent où amants transis et amantes cruelles se cherchent, se trompent, se reconquièrent... Polyphonique ou pour voix seule et luth, l'air de cour était avant tout un exercice d'éloquence où la qualité du discours primait sur la vraisemblance du propos ; on "ne cherchait nullement à dire vrai, mais à dire bien" (Georgie Durosoir). Jalonnant cet enre- gistrement, quatre airs invitent à parcourir les chemins amoureux d'un pays imaginaire, que la précieuse Madeleine de Scudéry allait bientôt nommer "Tendre". Imprimé en 1624, de facture simple tant dans sa forme que dans le traitement verti cal du contrepoint, l'air À la fin cette bergèrecommunique son optimisme en une irrésis-tible danse qui culmine dans l'exclamation de joie finale. Digne héritier de Guédron,
14 Boesset ne dédaignait pas s'inspirer des rythmes populaires pour souligner les sujets pasto-raux récurrents, dont les bergers et bergères, idéalisés par la bonne société, peuplaient l'uni
vers des airs de cour. Mais une grande part de l' "esprit" du règne de Louis XIII tient dans la belle poésie anonyme Je meurs sans mourir, dont Boesset s'est emparé en 1626. Le premiervers évoque à lui seul les subtiles nuances des transports de l'âme, à la manière des clairs-
obscurs d'un tableau de Georges de La Tour. Loin des contrastes souvent saisissants de la poésie italienne, le poème est un ample oxymore où le doute gagne l'âme aimante, seule,loin des yeux de l'être aimé. Dans une belle économie de moyens, Boesset a peint cette soli-
tude dans un air pour voix seule et basse qui, pour n'être pas encore "continue", en possède déjà la carrure simple et harmonique, véritable soutien d'une ligne vocale dont les courts
mélismes renforcent encore la fragilité du discours. Publié en 1642 dans une unique version à quatre voix et basse "Pour le Luth", l'airDépart que le devoir me fait précipiterillustre à l'inverse le degré ultime de l'art polypho-
nique de Boesset. Alors que les nombreuses versions manuscrites pour voix et basse conti nue témoignent de l'assimilation de cette ligne de basse "Pour le Luth" comme réel soutien harmonique, c'est cependant la version polyphonique première qui exprime toute la forcede cette pièce qui synthétise à elle seule les considérables apports du compositeur : irrégu
larités métriques, alternances des effectifs, ambitusélargis, figuralismes, fragments décla-
matoires... C'est là sans doute l'un des plus beaux exemples d'un art qui se devait d'allier le plus savant contrepoint à l'élégance la plus éloquente. Troublées par les rigueurs de l'amour terrestre, les âmes égarées pouvaient se plon ger dans les nombreux recueils de cantiques spirituels qui fleurirent à partir de 1619. Lespoètes s'y attachaient à lutter contre les libertins "en se servant des mêmes armes dont ils
se sont servy pour perdre les âmes" et greffaient leurs vers spirituels sur les airs de cour à la
mode. Prévues pour voix seule, les parodies de la Despouille d'AEgipte(1629) s'adaptaientaisément à la version polyphonique, comme l'illustre ici le cantique Ô Dieu ce ne sont point
vos armesdont les vers "apostoliques" font subtilement écho aux regrets du modèle mon- dain de Boesset, l'air Iris vos rigueurs inhumaines(1624). La Pacifique, imposante fantaisie instrumentale à 6 voix de Louis Constantin (1585-1657), chef des Vingt-Quatre Violons du roi, rappelle également que l'exigeante polyphonie
restait l'apanage de la Musique de la cour. Devant les prétentions croissantes des amateurs éclairés des influents "salons", les musiciens du roi savaient montrer que l'art qu'on pratiquait au Louvre faisait encore autorité ; l'on se devait, pour paraître à la mode, d'imiter l' "air
de la cour" et ce qui plaisait au monarque, notamment les ballets que dansaient régulière ment les seigneurs ou les dames de la cour. Les fées des forêts de Saint-Germain(1625) et la musique instrumentale dans les ballets de cour Au début du carnaval 1625, les gradins de la grande salle du Louvre étaient prêts pour accueillir comme chaque année le "Ballet du roi". Le 9 février, "cinq fées bouffonnes des forests de St Germain... viennent en la présence des reines et des dames de Paris... pour admirer leurs beautez et leurs mérites... Et comme chacune d'elles preside bouffonnes- quement sur quelque science particulière, leur humeur railleuze qui se mocque des ballets sérieux les convie à venir offrir l'une après l'autre à la compagnie un plat de leur mes
tier...". Le ton était donné, et le spectateur était averti des cinq tableaux constituant cette
mascarade pour laquelle Boesset avait composé airs et récits sur des paroles de René Bordier, "Poète du Roy pour les ballets". Les pièces instrumentales et les chorégraphiesavaient comme toujours été composées par l'ensemble des maîtres de ballet. Après la fée de
la musique, Gillette "la hasardeuse" (fée des joueurs) présidait au jeu de "Tourniquet" quiégayait des Laquais et des singes. Jacqueline "l'entenduë" envoyait à son tour son "récit"
devant elle pour chanter ce que son art magique pouvait sur les "estropiez de cervelle". Lacharmante fée nourrissait le secret espoir de guérir les "embabouinés", esprits naïfs, van
tards et chicaneurs. L'un d'entre eux dansait sa joie de sortir bientôt de l'erreur. Toute la cour reconnut sous le masque du danseur le nouveau favori du roi, le comte de Chalais, quiallait bientôt être décapité pour haute trahison ; on appréciera jusqu'où pouvait aller la sati
re... Les pauvres esprits "embabouinés" se rallièrent bientôt au parti de quatre "demy-fous"
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