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Général A. HURÉ

LA

PACIFICATION DU MAROC

Dernière

étape : 1931-1934

Préface

du Maréchal JUIN PARIS

ÉDITIONS BERGER-LEVRAULT

5, rue Auguste-Comte (VI 1952

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IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE

HUIT

EXEMPLAIRES HORS COMMERCE

SUR

VELIN CRÈVECŒUR DU MARAIS

MARQUÉS

H. C. I A VIII

La

toponymie des noms arabes et berbères a été mise en accord avec les transcriptions officielles du Protectorat (Le son j (jebel) se prononce dj, et gh ou kh se prononcent r).

Copyright

by Berger-Levrault, Paris, 1952 "Tous

droits de traduction, reproduction et adaptation réservés pour tous pays. Retrouver ce titre sur Numilog.com

PRÉFACE

Voici des pages posthumes consacrées à l"achè- vement de la pacification marocaine qui méritent d"être versées au dossier de l"histoire militaire contemporaine de notre pays. Elles sont signées du général Huré, ancien commandant supérieur des troupes du Maroc, auquel revient l"honneur d"avoir, à partir de l"année 1931, préparé et dirigé les opérations qui ont abouti, en 1934, à la pacifi- cation totale de la zone du protectorat français. Le général Huré avait été formé par Lyautey, et ce fut certainement une des dernières joies du vieux Maréchal, avant de s"éteindre dans sa retraite de Thorey, d"avoir vu son œuvre d"uni- fication couronnée sur le plan militaire par un de ses meilleurs disciples. Le général Huré, accouru de bonne heure au Maroc comme officier d"état-major, s"était en effet très vite distingué dans ces équipes de groupes mobiles où chacun donnait sa mesure; et Lyautey, qui allait d"instinct aux meilleurs, n"hésitait pas, dans certaines circonstances, et quel que fût leur grade, à leur confier les rôles qu"il jugeait à leur taille. C"est ainsi qu"au cours de l"hiver 1918-1919, le lieutenant-colonel Huré, alors en service à Fez, avait été désigné comme chef d"état-major du général Poeymirau chargé de contenir avec une forte colonne l"insurrection grandissante du Tafi- lalet, puis appelé à remplacer son chef grièvement Retrouver ce titre sur Numilog.com

blessé au combat de Meski. Lyautey avait estimé que nul n"était plus qualifié que ce jeune chef d"état-major, très au courant de la situation et en qui il avait pleine confiance, pour prendre un commandement qui eût dû revenir normalement à un officier général, et la suite heureuse des opéra- tions lui avait donné raison. Rentré à Rabat, au début du printemps de 1919, pour prendre les fonctions de premier sous-chef à l"état-major du " patron », le lieutenant-colonel Huré était, à peine installé, arraché à son bureau pour aller prendre le commandement d"un groupe mobile hâtivement concentré au nord de Fez. L"af- faire était grave, car il s"agissait de secourir les survivants d"un détachement aventuré sur l"Ouerha, qui venait d"être assailli et en partie massacré par un ennemi nombreux venu de la zone espagnole voisine non pacifiée. L"opération était, de plus, fort délicate en raison de la situation précaire des survivants assiégés dans la casbah où ils s"étaient réfugiés, en raison également des difficultés du terrain et des intempéries de la saison qui faisaient obstacle à une marche rapide. On pouvait craindre le pire avec un chef qui eût été malhabile ou simple- ment malchanceux. C"est pourquoi Lyautey n"a- vait pas hésité, encore une fois, à faire appel au lieutenant-colonel Huré et, encore une fois, les choses s"étant bien passées, il avait eu la main heureuse. De tels succès auraient dû maintenir le lieutenant- colonel Huré au Maroc, mais il préféra, pour des raisons de carrière, rentrer en France lors de sa promotion au grade de colonel. C"est qu"à cette époque on n"aimait pas, rue Saint-Dominique, que les officiers de cette classe fissent des séjours trop prolongés sur les théâtres d"opération extérieurs où l"on s"imaginait à tort qu"ils risquaient de perdre le sens de la vraie guerre. Retrouver ce titre sur Numilog.com

Il ne devait revenir au Maroc qu"en 1925, au plus fort de la crise déterminée par l"agression riffaine. Mais, alors que sa place eût été mieux marquée à la tête d"un secteur opérationnel, il ne se vit confier que le commandement du Génie du front nord. En dehors de Lyautey, qui avait songé à le rappeler, mais qui devait bientôt partir, personne ne s"était avisé que ce revenant était un des hommes possédant la meilleure expérience de la guerre sur le front nord. Nommé comme général au commandement de la région de Marrakech, à l"issue de la campagne, c"est dans ce commandement comportant des attri- butions à la fois politiques, administratives et mili- taires qu"il va se préparer à résoudre définitivement le problème des dernières dissidences de l"Atlas central et des confins sahariens. Son retour, malheureusement, coïncide avec un relâchement de notre effort comme cela se produit souvent après une chaude alerte. Pour écarter le cauchemar de la guerre marocaine qui commence d"effrayer l"opinion en France, on déclare que tout est fini ou presque, et l"on rapatrie des troupes. Le gouvernement français, soucieux des incidences que les moindres à-coups pourraient avoir désormais sur sa politique générale, recommande avec insis- tance une action de pénétration pacifique, appuyée par les mesures de précaution nécessaires, mais exclusive de toute opération militaire susceptible de conduire à des coups de force. Or, dans un pays de conquête inachevée, stagna- tion est synonyme de régression, et l"on va bien vite s"en apercevoir aux actes de banditisme per- pétrés avec une rare audace dans la région du Tadla et sur les confins algéro-marocains. M. Lucien Saint, nommé Résident général au commencement de 1929, essaiera bien de remettre les problèmes de pacification et de sécurité à l"ordre Retrouver ce titre sur Numilog.com

du jour, et de forcer les consignes, il ne pourra en vérité que tenter de petites choses au cours des années 1929 et 1930, et toujours avec la hantise des coups durs qui le feraient mal juger à Paris. Une avance notable, obtenue pacifiquement, est tout de même enregistrée dans la région de Marra- kech où le général Huré étend notre occupation jusqu"au Mezguita sur le haut Dra et au seuil de Boumalne entre le Dadès et le Todra. A cette allure, néanmoins, la pacification n"irait qu"à pas comptés et demanderait encore de nom- breuses années pour être achevée. Or le départe- ment de la Guerre, en prévision de la redoutable échéance des années creuses et de l"avènement du Nazisme, se montre légitimement impatient de récupérer des moyens qui font défaut à la couver- ture métropolitaine et insiste vivement pour que le rythme des opérations soit accéléré dans toute la mesure du possible. Ce sera un honneur de plus attaché à la mémoire de M. Maginot d"avoir, à la fin de 1930, comme ministre de la Guerre, et à la suite d"un voyage au Maroc où il avait accompagné le président Doumergue, décidé d"appuyer énergiquement, au sein du gouvernement, des propositions visant à accentuer notre effort, et autorisé l"état-major de l"Armée à mettre en œuvre, dans ce but, le maxi- mum de moyens. Un tel concours va donner immédiatement plus de vigueur à notre action de pacification. Le plan général en est établi dès le commencement de 1931 et le terme en est fixé au plus tard à la fin de 1934. Elle comportera toute une série d"efforts graduellement intensifiés, préparés et dirigés cha- que année par le général Huré, nommé Comman- dant supérieur en mai 1931 et collaborant étroite- ment à ce titre avec le Résident général Lucien Saint. Retrouver ce titre sur Numilog.com

On peut en suivre les étapes glorieuses dans les mémoires du général Huré que ses enfants ont tenu, par piété filiale, à faire paraître après sa mort. La haute figure de l"auteur se dégage de ces pages émouvantes d"action écrites simplement avec un grand souci d"objectivité et sans recherche de l"effet. C"était un chef aimé dont on appréciait le calme, la modestie et les solides vertus morales et militaires. Profondément juste et humain, il avait un regard toujours plein de douceur et de clarté qu"on n"aimait cependant pas rencontrer quand on avait mauvaise conscience. J"ai revécu avec émotion, en parcourant ces mé- moires, les campagnes successives d"été, au plan desquelles j"avais collaboré en tant que chargé de la liaison entre le politique et le militaire. Dans l"exécution, le plus difficile était de coordonner, à l"échelon du général Huré, l"action de chefs de région comme Giraud, Catroux, de Loustal, Nieger et Goudot, dont la personnalité fortement marquée faisait apparaître des manières réfléchies, mais propres à chacun, de faire la guerre qui n"allaient pas sans provoquer parfois quelques frictions. Les officiers de notre armée auront intérêt à lire ces souvenirs riches en enseignements de toute sorte. Nous n"en avons pas fini avec les guerres extérieures, les guerres d"Empire. Je dirai même que nous risquons d"y être engagés de plus en plus par la nécessité de défendre le monde libre. L"exem- ple de l"Indochine le prouve, et il ne fait aucun doute qu"en cas de conflit mondial, on verrait des situations troubles naître ailleurs du fait de certains antagonismes et de certaines tendances préalablement développées et entretenues en sous- main. Or, si la guerre en Afrique, comme le décla- rait Bugeaud, est affaire de bon sens et d"adapta- tion bien plus que de science apprise à l"École, il apparaît cependant nécessaire qu"elle tire parti Retrouver ce titre sur Numilog.com

de l"expérience acquise et, à cet égard, celle des procédés et méthodes qui furent employés pour la pacification garde incontestablement toute sa valeur. Retrouver ce titre sur Numilog.com

Cependant il vint un moment - c"était en 1930 - où cette attitude passive apparut comme inadmissible et le ministre de la Guerre Maginot jugea nécessaire de venir en personne étudier la question sur place. Depuis 1929 j"avais, étant commandant de la région de Marrakech, grâce à l"habileté et à l"audace de mes officiers des Affaires indigènes, effacé pacifiquement les taches de dissidence des Ida ou Tanane et des Seksaoua, franchi la crête du grand Atlas et, avec l"appui loyal du Pacha de Marrakech, amorcé notre progression dans le Dadès et le Dra. De son côté le général Giraud, commandant la région des confins algéro-marocains, avait commencé, presque sans coup férir, l"encerclement du Tafilalt en installant une compagnie saharienne à Taouz et un poste a Guefifat. Enfin le colonel de Loustal, commandant le Territoire du Tadla avait entrepris une progression méthodique dans le Moyen Atlas, en utilisant au maximun ses partisans indigènes et ses goums et en n"engageant ses troupes régu- lières que le moins possible, ce qui réduisit à presque rien le chiffre de nos pertes avouées. Maginot voulut nous consulter tous les trois et nous convoqua à Kasbah-Tadla pour étudier avec nous la situation. Il nous expliqua tout d"abord que le gouvernement était pressé d"en finir avec la dissidence, car l"horizon s"assom- brissait du côté de notre frontière de l"Est et il ne fallait pas que l"armée du Maroc fût, en cas de conflit, obligée de monter la garde sur les contreforts de l"Atlas, au lieu d"aller participer à la bataille. Il était donc nécessaire de réduire au plus tôt la dissidence marocaine, mais sans que des pertes importantes en hommes jetassent l"éveil dans les milieux politiques. Il

nous demanda ce que nous pouvions faire dans cet ordre d"idées. Le général Giraud et moi nous déclarâmes prêts à terminer l"encerclement déjà commencé du Grand Atlas par la con- quête du Tafilalt et du chapelet d"oasis réunissant le long du Dadès, du Todra et du Ferkla les confins algéro-maro- cains à la région de Marrakech. Quant au colonel de Loustal, il proposa au ministre de lui expliquer d"un observatoire du Moyen Atlas quelles progressions il avait projetées. Ni le général Giraud ni moi n"assistâmes à cette recon- Retrouver ce titre sur Numilog.com

LA DISSIDENCE MAROCAINE AU DÉBUT DE 1931 Retrouver ce titre sur Numilog.com

se donner de magnifiques bases de départ pour l"exécution de la manœuvre sur Bou-Adil. Les événements donnèrent raison aux principes de Bugeaud.

III Le

12 juillet, je m"installe à mon poste de commandement de Bou-Mia avec mon chef d"état-major militaire, le colonel Gendre, mon chef d"état-major politique, le colonel Mellier, et un état-major très réduit. Les troupes du général Nieger et du colonel de Loustal sont amenées dans la nuit du 13 au 14 en face et à une demi-étape de leurs objectifs. Quant aux partisans, ils sont acheminés dans la même nuit sur leurs positions de départ. Ils s"y installent dans les creux de terrain sans faire de feu de façon à ne pas être aperçus par les guetteurs ennemis. L"attaque est fixée à la nuit du 14 au 15. La zone d"action du groupe mobile de Meknès s"appuie à gauche au pays très tourmenté des Imetchimène dans lequel s"est installée la harka Aït-Hammou. Le pays est séparé du reste du théâtre des opérations par une crête, celle de l"Ansegmir. En raison des difficultés du terrain et de la présence des Aït-Hammou, je décide que les troupes de Meknès ne péné- treront pas en pays Imetchimène : le lieutenant des A. I. (I) Lecomte, avec 200 partisans, formera flanc-garde de ce côté. La question Imetchimène sera réglée ultérieurement. Pendant toute la journée du 14 juillet, aucun mouvement de troupes n"a lieu; sur tout le front règne le calme le plus absolu. A la nuit tombée, les partisans du général Nieger s"ébran- lent silencieusement, suivis de près par les goums et les troupes régulières. La surprise est complète sur tout le front. Partout, les partisans couronnent les crêtes qui constituent nos pre- miers objectifs. Ils n"ont trouvé devant eux que quelques guetteurs vite réduits au silence. Les goums et les troupes

I) A. I. : Affaires indigènes. Retrouver ce titre sur Numilog.com

IMP. BERGER-LEVRAULT, NANCY. 110265-11-1952.

DÉPOT

LÉGAL : 4 TRIM. 1952. Retrouver ce titre sur Numilog.com Participant d'une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d'accès

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