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DÉFINIR ET SITUER LÉCRITURE DINVENTION

QU'EST-CE QUE L'ECRITURE D'INVENTION ? textes observés en cours d'écriture (genèse ... Rédiger un écrit d'invention est un exercice littéraire.



Lécriture dinvention - Lycée Maupassant

L'écriture d'invention. Longueur du travail : au moins une copie double. Elle a généralement une visée argumentative. Travail préparatoire :.



Ecriture dinvention réécriture et enseignement de la littérature:

29 mars 2018 2 - L'ECRITURE D'INVENTION A L'EXAMEN SELON LE TEXTE OFFICIEL . ... CHAPITRE VI : ÉCRITURE D'INVENTION ET REECRITURE EN SEQUENCE.



ÉCRITURE DINVENTION : LA LETTRE

ÉCRITURE D'INVENTION : LA LETTRE. I. La lettre : formes & objectifs. A) Les différentes formes de lettres. Le type de lettre dépend du destinataire indiqué 



FICHE 15 Fiche élève Écriture dinvention : changement de narrateur

Fiche n° 15 – Écriture d'invention : changement de narrateur – FICHE ELEVE Lisez le texte suivant et le sujet d'invention qui l'accompagne.



METHODOLOGIE DE LECRIT DINVENTION

METHODOLOGIE DE L'ECRIT D'INVENTION. Fiche n°1. REDIGER UNE LETTRE. Le sujet d'écriture peut vous demander de rédiger une lettre.



LÉCRITURE DINVENTION OU LÉCRITURE EN LIBERTÉ

Et c'est là que je place l'écriture d'invention : face à ce dilemme elle se rend



PRATIQUES DECRITURE EN LYCEE

L'écriture d'invention n'échappe pas à ces règles. 2° principe : Ce qui peut être noté c'est l'amélioration d'un texte en fonction d'une correction 



FICHE 15 Fiche élève Écriture dinvention : changement de narrateur

Fiche n° 15 – Écriture d'invention : changement de narrateur – FICHE ELEVE Lisez le texte suivant et le sujet d'invention qui l'accompagne.



Présentation de lécriture dinvention & conseils méthodologiques : L

L'écriture d'invention ne consiste pas uniquement à faire preuve d'imagination il s'agit aussi de respecter certaines contraintes

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Contact : ddoc-theses-contact@univ-lorraine.fr

LIENS Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 122. 4 Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 335.2- L 335.10

UNIVERSITE DE METZ

DEPARTEMENT DES SCIENCES DU LANGAGE

ÉCRITURE D"INVENTION, RÉÉCRITURE ET

ENSEIGNEMENT DE LA LITTÉRATURE

TOME 1

Mes plus chaleureux remerciements vont à André Petitjean pour la confiance qu"il m"a accordée en acceptant de diriger cette thèse, pour ses lectures et ses conseils avisés

J"adresse des remerciements particuliers

à mes élèves du lycée public Saint-Sernin qui m"ont souvent rappelé que le métier d"enseigner est aussi une chance et une joie à mes collègues et amis qui m"ont apporté leur concours dans la correction et la relecture de mon travail à Monique Soutoul pour ces longues et passionnantes années de compagnonnage intellectuel, pour son indéfectible soutien et sa stimulante présence. à Nadine Barrière pour sa disponibilité, son écoute, son patient travail de relecture à Philippe Jean qui m"a épargné bien des déboires informatiques à Mélanie Girard qui m"a fait toucher du doigt la complexité de l"enquête statistique à tous mes amis et proches qui ont mis un point d"honneur à ne pas me divertir mais dont les quelques mots, les quelques attentions ont toujours été le témoignage de leur affectueux soutien

à François sans la présence et la générosité duquel cette recherche n"aurait pas eu la

même saveur et à qui je dédie cette thèse " La page est un théâtre des métamorphoses »

Jean Ricardou

SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE......................................................................................8

PREMIERE PARTIE .....................................................................................................20

CHAPITRE I : L"ECRITURE D"INVENTION DANS LES TEXTES OFFICIELS23 1

- LE CORPUS DE REFERENCE.........................................................................................23

2 - UNE DEFINITION PROBLEMATIQUE DE L"ECRITURE D"INVENTION..............................24 3 - L"ECRITURE D"INVENTION : UN DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES LECTORALES ET

SCRIPTURALES

4

- LES DISCOURS DE LEGITIMATION...............................................................................39

E

N GUISE DE CONCLUSION (PROVISOIRE)........................................................................45

CHAPITRE II : LES PRATIQUES DECLAREES DE L"ECRITURE 1 - LES DONNEES SOCIO-PROFESSIONNELLES : UNE INDIFFERENCIATION DES PRATIQUES. 2 - SOURCES ET FINALITES DE L"ECRITURE D"INVENTION................................................50 3 - LE POSITIONNEMENT DE L"ECRITURE D"INVENTION DANS LES ENSEIGNEMENTS : EN FIN

DE SEQUENCE

C CHAPITRE III : L"ECRITURE D"INVENTION AU BACCALAUREAT..............83 1 - ÉLEMENTS POUR UNE DESCRIPTION DE L"E.I AUX E.A.F.............................................83 2 - L"ECRITURE D"INVENTION A L"EXAMEN SELON LE TEXTE OFFICIEL...........................84 3

- ANALYSE STATISTIQUE DES SUJETS...........................................................................85

C CHAPITRE IV : BILAN CRITIQUE DE L"ECRITURE D"INVENTION............100 1 - UNE RENOVATION DE L"ECRITURE HYPOTHEQUEE...................................................101 2 - L"ECRITURE D"INVENTION : UNE EXPRESSION PROBLEMATIQUE..............................102

3 - L"ARTICULATION LECTURE/ECRITURE : UNE VALORISATION DES APPRENTISSAGES PAR

L 4 - DE QUELQUES PROBLEMES SOULEVES PAR L"EXERCICE DE L"IMITATION.................105 C

DEUXIEME PARTIE...................................................................................................114

CHAPITRE V : LA REECRITURE : UN ENJEU LITTERAIRE ET DIDACTIQUE

DE L"ECRITURE .........................................................................................................117

1 - UNE EVOLUTION DES CONCEPTIONS DE L"ECRITURE ET DE SON APPRENTISSAGE.....117 2 - LA REECRITURE : UNE OPERATION COMPLEXE AUX MULTIPLES ENJEUX...................134 CHAPITRE VI : ÉCRITURE D"INVENTION ET REECRITURE EN SEQUENCE 1

- QUELLE REECRITURE AU LYCEE ?............................................................................155

2

- LA REECRITURE EN SEQUENCE.................................................................................165

3

- LES MEDIATIONS DE LA REECRITURE.......................................................................204

4

- LA R.E.S. ET L"EVALUATION....................................................................................217

5

- LA REECRITURE ET LE RAPPORT A L"ECRITURE........................................................220

TROISIEME PARTIE..................................................................................................240

INTRODUCTION : REFLEXIONS LIMINAIRES SUR UNE ETUDE SELECTIVE DE PROTOCOLES DIDACTIQUES ET DE PRODUCTIONS D"ECRITS CHAPITRE VII : LES SEUILS ROMANESQUES...................................................247 1

- LA PRATIQUE DE L"IMITATION.................................................................................247

2

- L"INCIPIT ROMANESQUE..........................................................................................256

3

- ÉCRIRE UN PORTRAIT A LA MANIERE DE BALZAC....................................................268

4 - QUE LE PASTICHE SE TOURNE VERS LE LECTEUR......................................................282 CHAPITRE VIII : SCENE D"ENFANCE ET ECRITURE DU " JE » ...................284

1 - LE PROTOCOLE DE LA REECRITURE EN SEQUENCE : ORGANISATION ET OBJETS DE

SAVOIRS ET D

2 - L"ANALYSE D"UNE PRODUCTION D"ELEVE : LES ECRITS D"ARNAUD........................310 CHAPITRE IX : LES VARIANTES DE LA FABLE................................................339 1 - UNE CONCEPTION DYNAMIQUE DE LA SEQUENCE D"ETUDES LITTERAIRES...............341 2

- ANALYSE D"UNE PRODUCTION D"ELEVE..................................................................348

CHAPITRE X : LES COMMENTAIRES DE L"ECRIT D"INVENTION..............362 1

- L"AUTOCOMMENTAIRE............................................................................................362

2 - ANALYSE COLLECTIVE D"UN ECRIT D"INVENTION....................................................372 3 - BROUILLON D"ECRIVAIN, ECRITURE D"INVENTION ET CERCLE DE LECTEURS...........384

INDEX DES AUTEURS ...............................................................................................438

TABLE DES SCHEMAS ET TABLEAUX ................................................................444

TABLE DES MATIERES ............................................................................................447

TABLE DES ANNEXES........................................................................ 458

INTRODUCTION

GÉNÉRALE

INTRODUCTION 9

En termes de pratiques scripturales, les écrits de glose (la dissertation et le commentaire

littéraire) sont les représentants par excellence d"une approche raisonnée de la littérature

au lycée, caractérisée par la restitution encadrée et formalisée des savoirs de référence

littéraires. Exercices canoniques de l"institution scolaire, ils contribuent, dans l"esprit de nombreux acteurs de l"enseignement du français, à la construction identitaire de la discipline " français » au lycée. En ce sens, l"une des innovations majeures des nouveaux programmes (2000-2001) qui consiste à établir de nouveaux équilibres au sein des

pratiques scripturales par l"intermédiaire de l"écriture d"invention n"a pas toujours été

bien comprise. En fait, l"écriture d"invention n"est pas, à proprement parler, une création des nouveaux programmes. Si l"appellation est une nouveauté, les écrits scolaires qu"elle désigne ont

été, en revanche, pratiqués pour plusieurs d"entre eux au cours des décennies passées et

pendant la période plus lointaine de l"enseignement de la rhétorique. Plutôt que

d" " innovation », il est sans doute préférable de parler d"institutionnalisation et de

réhabilitation d"une pratique existante mais marginale dans les classes de lycée. L"écriture

d"invention, dans sa définition et dans les formes textuelles qu"elle investit à présent, a ceci de particulier qu"elle sédimente, sous son nom, un ensemble hétérogène de gestes

d"écriture qui sont apparus à différents moments de l"histoire de la discipline et ne

partagent pas, de ce fait, les mêmes finalités éducatives, ni les mêmes soubassements idéologiques (Petitjean, 2003). En effet, après Violaine Houdart-Merot (1998) et André Petitjean (2003), on peut

distinguer trois périodes qui ont été régulièrement marquées par des conflits idéologiques

INTRODUCTION 10

dont les écrits scolaires portent la trace, tant dans leurs positions de domination respectives que dans les valeurs qu"on leur prête. Il y a eu tout d"abord, au cours du dernier tiers du XIX

ème siècle, les années de fondation

de l"enseignement de la littérature contre celui de la rhétorique. Or on sait que ce dernier se caractérisait par un enseignement en latin et alliait la connaissance, l"admiration des

Anciens et la référence aux auteurs classiques parmi lesquels étaient particulièrement

distingués les auteurs du Grand Siècle (M. Jey, 1993). À travers la fréquentation des

textes qui étaient l"émanation de l"esprit des Belles Lettres et des valeurs qui font

l"homme de culture, l"école remplissait sa mission éducatrice d"édification des consciences et de transmission des valeurs morales, ciment de l"unité nationale. On

procèdait à des exercices d"imitation, depuis longtemps éprouvés, responsables du

développement d"un art d"écrire, dans le respect du style adapté à la nature des discours

des grands auteurs. On accédait à cet art d"écrire grâce à l"application des principes

intangibles de la composition rhétorique (inventio, dispositio, elocutio, actio) garantissant

les exigences classiques de naturel, de clarté et d"équilibre. Les discours reproduits

appartenaient aux " petits » comme aux " grands » genres en fonction du niveau de classe. La narration, le portrait, la lettre, le discours oratoire formaient le socle discursif

des apprentissages. C"est par imprégnation des modèles que l"élève concevait son écrit,

non dans une prétention à l"originalité mais dans une reconnaissance respectueuse des

modèles consacrés. Les sujets d"écriture proposés par le maître formaient le matériau de

l"invention dont la teneur était invariablement d"ordre moral, historique ou littéraire.

L"élève se devait d"être en empathie avec le sujet de son discours, d"adopter une posture de co-énonciateur en parlant comme s"il était le locuteur authentique du discours et de développer une pensée ou des faits édifiants. Ce modèle normatif de reproduction-imitation a fini par être contesté en raison de son

artificialité. La rupture a été officialisée avec l"introduction de la composition française en

1880 qui a supplanté l"exercice de la composition des discours en latin

1. La dissertation

sur des sujets historiques, littéraires ou moraux s"est alors imposée, avec cependant des

1 A. Petitjean rappelle toutefois que la rédaction en latin n"est pas systématique. Dès les années 1850, les

candidats au baccalauréat, par tirage au sort, peuvent composer, soit en français, soit en latin.

INTRODUCTION 11

soubresauts et des renversements de domination durant la période 1880-19252. Les

adversaires de la rhétorique se sont répandus dans de multiples écrits prêtant à la

dissertation les qualités (réflexion, faisabilité...) qui faisaient défaut aux amplifications

rhétoriques. Il deviendra progressivement évident et reconnu que la dissertation permet d"allier clarté de l"exposé, esprit critique et correction de la langue. Jusqu"aux années soixante les positions respectives des écrits scolaires n"évolueront pas ou peu. La dissertation et l"analyse littéraire auront imposé " la culture du commentaire » (Charles, 1985) depuis ce moment charnière de refondation de la discipline où la littérature scolarisée est devenue un objet que l"on paraphrase et analyse. La présence hégémonique de la glose ne doit cependant pas faire oublier la persistance, tout au long du vingtième siècle, des écrits d"imitation. En effet, V. Houdart-Merot recense au cours de la période 1925-1960, aux côtés des écrits de commentaire, des discours d"amplification, sous la forme de genres tels que la narration, l"épistolaire et le portrait. Les manuels de littérature ont continué à proposer des sujets d"imitation-amplification, mais dans des proportions significativement réduites

3. Les années soixante marquent une

nouvelle étape dans l"histoire de la discipline. Le système des humanités, fussent-elles modernes, ne résistera ni aux problèmes de la massification scolaire ni aux changements

paradigmatiques des théories littéraires susceptibles d"influencer l"enseignement de la

littérature. La dissertation, tant vantée contre les exercices de rhétorique, va

progressivement entrer dans " l"ère du soupçon ». Seront contestés sa prétention à

développer l"esprit critique, son formalisme et dénoncée son infaisabilité par la majorité

des élèves. Sous l"impulsion des mouvements pédagogiques tels que " Les Cahiers

pédagogiques », les pratiques scripturales des années soixante-dix tendront alors à se

diversifier en ouvrant un espace à des exercices d"écriture autres que ceux du

commentaire et dont l"enjeu sera d"encourager l"expression et la créativité de l"élève, tout

en favorisant la réflexion sur la littérature (G. Idt, 1975). C"est ainsi qu"on verra se multiplier des activités reposant sur le principe de la manipulation de textes (expansions, transformations...) auquel l"écriture d"invention des

2 La présentation statistique des sujets du baccalauréat par Martine Jey montre clairement la suprématie

progressivement consolidée de la pratique dissertative. (Jey, 1998, pp. 108-110).

3 Nous faisons figurer en Annexe 1 (p. 460) les sujets d"imitation-amplification contenus dans le manuel de

littérature Castex et Surer (1966).

INTRODUCTION 12

nouveaux programmes ne manque pas de se référer. On substitue un niveau de langue, un genre, un style à un autre ; on transforme les modes narratifs, qu"il s"agisse de l"ordre, de

la durée ou de la fréquence. Ces inventaires d"opérations d"écriture restent silencieux sur

les dispositifs didactiques que de telles activités nécessitent mais présentent l"intérêt

d"ouvrir la voie à une réflexion sur la place et les fonctions de la créativité dans un enseignement littéraire, sans rejeter les exercices de réflexion. Il reste que l"institution restera sourde à ces innovations et maintiendra la prédominance de la glose, notamment par l"introduction du résumé de texte puis du texte argumentatif dont les contenus

porteront tour à tour sur les problèmes sociaux ou éthiques puis sur des objets littéraires.

Il faudra donc attendre l"année 2000 et la refondation des programmes de lycée pour que les propositions de ces années-là trouvent une forme institutionnalisée

4. Avec l"écriture

d"invention, est validée l"hypothèse d"une sédimentation des pratiques scolaires,

phénomène analysé par André Chervel (1998). Cet écrit hétérogène sert, en effet, la

réhabilitation d"une démarche rhétorique d"imitation de modèles et de reproduction de

discours de genre. Les finalités toutefois sont autres et ont perdu leur intention édifiante et

morale. À travers lui, ce sont aussi les pratiques expressives, ouvertes à la créativité qui

sont rendues possibles, à côté d"exercices plus formels inspirés des théories linguistiques

ou de la rhétorique des tropes qui sont proposés avec plus ou moins de bonheur par les manuels. Diversifier les pratiques d"écriture, aborder le littéraire par le faire, renouer avec une tradition rhétorique qui profiterait des acquis les plus récents concernant l"apprentissage

de l"écriture sont autant de motifs de légitimation de l"écriture d"invention, relayés par le

discours officiel. Bon nombre de critiques se sont pourtant élevées contre cette " innovation », accusée de dénaturer et d"affaiblir l"enseignement des lettres au lycée (Jarrety, 2000, Joste, 2002). L"analyse développée par Bertrand Daunay (2003) à propos des positions idéologiques

4 Pendant les années quatre-vingts et quatre-vingt-dix, il n"y a pas de changement notable dans la répartition

des écrits au lycée. La dissertation et le commentaire restent les deux piliers de la formation à l"écriture.

Notons toutefois que la disparition ? regrettable ? du résumé finit d"introduire un peu plus de formalisme et

de technicisme dans l"approche du texte argumentatif par le biais d"une analyse formelle d"un texte

littéraire, assortie d"une production écrite appartenant à un genre littéraire et dont la visée est aussi

argumentative.

INTRODUCTION 13

qui sous-tendent le front de la critique montre bien comment un objet scolaire peut concentrer et radicaliser un conflit de valeurs qui excède l"objet proprement dit et fait de

lui le symptôme de positions idéologiques antagonistes. L"officialisation de l"écriture

d"invention aurait pour conséquence d"effacer la frontière entre le collège et le lycée,

entre un enseignement consacré à la maîtrise de la langue et un autre réservé à la

connaissance de la littérature, de rompre aussi la hiérarchie des écrits scolaires.

L"imitation et la pratique ludique de l"écriture doivent être contenues aux premiers

apprentissages et le commentaire à l"appropriation raisonnée du savoir littéraire. Selon A.

Joste (2002), en admettant que l"écriture d"invention ait une légitimité, elle ne peut

s"exercer que dans des " exercices de langue », hors du cadre littéraire, dont la langue est d"une autre essence. Elle ne saurait concurrencer les pratiques du commentaire et de la dissertation, seuls véritables exercices capables d"ouvrir les élèves à une connaissance exigeante de la littérature et de participer à une compréhension des textes littéraires. Que le texte littéraire puisse faire l"objet de détournements, de manipulations, de

récritures, cela remet en cause une vision sacralisée des textes littéraires et revient à les

instrumentaliser, à les mettre au service du seul développement du savoir écrire des

élèves. Il est piquant de constater combien les discours militants réfractaires à la réforme

ont exagéré les menaces que cette dernière était censée faire peser sur la littérature et son

enseignement. Non seulement, la dissertation n"a pas disparu, mais en plus les textes littéraires sont, dans des proportions encore plus importantes qu"auparavant, au centre de la discipline au lycée. Nous ne nous reconnaissons pas dans ces propos alarmistes, portés par des jugements

hâtifs et péremptoires, éloignés de notre conception de l"enseignement du français. Pour

autant, l"écriture d"invention que les instructions officielles définissent et que les épreuves

du baccalauréat mettent en oeuvre n"est pas exempte de critiques, loin s"en faut. Nous estimons que la mise en application de ce type d"écrit au cours de ces dernières années, son traitement souvent contestable dans les manuels, sa configuration dans les épreuves du baccalauréat ont en effet, par bien des aspects, amplifié les dérives que le curriculum officiel laissait présager.

Premièrement, en faisant du texte littéraire la référence obligée de l"écriture d"invention,

on a rendu d"autant plus délicate sa conceptualisation en tant qu"" objet didactique »

spécifique. Dès lors, il n"est pas assuré que l"écriture d"invention soit perçue comme un

INTRODUCTION 14

véritable outil heuristique, fondé sur une articulation dialectique entre la lecture et

l"écriture, entre la compétence épitextuelle et la compétence métatextuelle, capable de

contribuer activement à la construction de savoirs et de savoir-faire. Deuxièmement, la part prépondérante de l"argumentation dans les finalités de l"exercice, le formalisme dans la reproduction des discours de genre, l"artificialité des consignes

d"écriture décontextualisées qui conduisent à privilégier des techniques narratologiques

ou des procédés rhétoriques, déconnectés d"une réflexion sur le sens des écrits produits,

ont indiscutablement affaibli la lisibilité et la signification d"une pratique de l"écriture d"invention. C"est ce que nous tenterons de démontrer dans la première partie de notre thèse, en nous

référant aux discours des différents acteurs de la discipline. Nous nous proposons de

conduire, tout d"abord, une analyse du discours officiel, en nous appuyant sur trois sources principales : les Instructions Officielles (I.O.), les Accompagnements des Programmes (A.P.) qui explicitent les choix de la réforme et livrent des recommandations en vue de son application, enfin les commentaires des concepteurs des programmes et des représentants de l"institution, développés dans les revues pédagogiques ou didactiques. Nous poursuivons l"examen de cet écrit scolaire par la présentation statistique d"une étude réalisée sous la forme d"un questionnaire auquel ont répondu plus de cent professeurs de

français. La synthèse de leurs réponses livre des hypothèses intéressantes sur la façon

dont l"écriture d"invention est appliquée dans les classes de seconde et de première. Il nous est toutefois apparu qu"un panorama critique de cet objet scolaire demeurerait incomplet, en l"absence d"une lecture des sujets d"invention, conçus, chaque année, dans le cadre des épreuves anticipées de français du baccalauréat. En effet, l"observation de plus de cinquante sujets nous semble un bon indicateur des évolutions qu"a connues un écrit scolaire depuis sa conception et de la stabilisation d"une forme qui exerce finalement une influence déterminante sur les pratiques de classe et sur la compréhension que les professeurs et les élèves ont de l"écrit d"invention. L"examen approfondi de l"écriture d"invention débouche sur le constat de déficiences que l"on trouve à l"origine même de la configuration officielle de cet écrit et qui fonde, en grande partie, la modélisation de l"écriture d"invention que nous développons dans la seconde partie de notre thèse.

INTRODUCTION 15

Premièrement, nous estimons que cet écrit, comme tout autre objet d"enseignement, fait

système et devient intelligible dans un contexte d"apprentissage. La productivité d"un

écrit n"est pas uniquement déterminée par ses propriétés intrinsèques ; son positionnement

vis-à-vis des autres activités importe tout autant ; son mode d"incorporation à un projet d"enseignement englobant garantit ou non une exploitation optimale de ses potentialités de formation. L"élaboration didactique d"un savoir ? issu de pratiques sociales de référence comme la production de discours de genre ? implique une chaîne de solidarités

entre les différentes activités disciplinaires. L"écriture d"invention n"est certes pas un

objet isolé ; le texte officiel insiste sur la nécessité du lien entre un texte-source et un écrit

d"invention. Mais une telle affirmation ne remet pas en question l"organisation générale d"une séquence d"apprentissage et n"implique pas de revoir la responsabilité de chacune des sous-matières et activités du français dans la construction des savoirs et des savoir- faire. Autrement dit, nous avançons l"hypothèse que l"introduction de l"écriture

d"invention au lycée aurait dû conduire à une réévaluation des interactions lecture/écriture

et à une remise en question plus générale des dispositifs d"apprentissage généralement

observés. Deuxièmement, le constat d"une stabilité dans l"organisation des enseignements est la

conséquence d"une conception inchangée des fonctions de l"écrit au lycée. Un parallèle

peut être établi entre les finalités des écrits de glose et celles des écrits d"invention.

L"écrit remplit d"abord une mission d"évaluation des savoirs acquis et bien plus rarement un rôle de construction et de développement du savoir-écrire. En limitant l"exercice de

l"écriture d"invention à une fonction d"évaluation sommative, on escamote ses autres

potentialités, au premier rang desquelles la fonction heuristique du développement de la compétence scripturale, ignorée par les préconisations officielles. Dès lors, comment concevoir une approche différente de l"écriture d"invention qui puisse

répondre à la faiblesse de sa configuration didactique, conjuguée à une vision restreinte

des fonctions de l"écriture ? C"est, dans une large mesure, le sens donné à notre

recherche. Sur la base d"expérimentations empiriques menées avec des classes de seconde et de première, nous proposons une modélisation de la pratique d"écriture d"invention, soutenue par une double référence théorique : d"une part, une approche socio- constructiviste de la compétence scripturale, d"autre part, une conception des processus

d"écriture inspirée de la génétique textuelle. Schématiquement, nous pouvons d"ores et

déjà avancer que l"écriture d"invention s"inscrit dans une programmation de séquence et

INTRODUCTION 16

repose sur la réécriture du texte d"élève. Cette rupture avec la pratique dominante de

l"écrit unique, généralement positionné en fin d"apprentissage et évalué comme un objet

de synthèse des acquisitions littéraires et langagières, a plusieurs implications. Celles-ci

peuvent être réparties en fonction des différents pôles qui entrent dans la composition d"un système didactique. Du point de vue de l"activité enseignante, compte tenu du fait que l"écriture d"invention est envisagée comme la mise en oeuvre de savoir-écrire décomposables, faisant appel à un ensemble de compétences de nature et de complexité variées, on assiste à un réaménagement des habitus professionnels. Le principe d"un étalement temporel de

l"activité scripturale modifie la fréquence, la nature et le rôle des interventions

professorales. La centration sur les processus d"apprentissage appelle une série de gestes et de procédures, sur l"initiative de l"enseignant : retenons pour l"instant une

diversification des modalités d"interaction lecture/écriture, la mise en place d"évaluations

diagnostique et formative, le recours à des interactions de tutelle qui sont " les moyens grâce auxquels un adulte ou un " spécialiste » vient en aide à quelqu"un qui est moins adulte ou spécialiste que lui » (Bruner, 1983, p. 261), la mise en oeuvre de situations de remédiations, d"interactions entre pairs.

Du point de vue des acquisitions des savoirs et savoir-faire, la réécriture engage une

réflexion par le faire, sur la valeur du signifiant, sur la combinaison des composantes du discours dans la construction de la signification. Toute intervention sur la forme, pour peu qu"elle ne se limite pas à une phase de correction morpho-syntaxique, est susceptible de

réorienter la réception du texte et de ménager de nouvelles strates de sens. L"activité de

fictionalisation, à laquelle nous réservons une place importante dans nos recherches, se

développe à travers un processus de transformation ou de transposition de la matière

textuelle initiale. Par ailleurs, le développement de la compétence langagière constitue un objectif central de l"écriture d"invention. Couplée à une conscientisation progressive des enjeux et des contraintes de la communication fictionnelle, par le jeu de la réécriture

différée, cette compétence n"est pas nécessairement indexée à la notion d"amélioration.

Nous préférons à cette dernière la notion de variation, plus adaptée pour rendre compte

des ressources de la réécriture dans un projet d"écriture dynamique et évolutif

(Herschberg Pierrot, 2005). Du point de vue des représentations et des postures de l"apprenant vis-à-vis de la pratique

scripturale, nous avançons l"hypothèse que la réécriture permet de construire une posture

INTRODUCTION 17

d"auteur, conscient des effets pragmatiques que les différents états d"écriture provoquent, et de faire évoluer ses représentations concernant les processus de l"écriture. Introduire

une régularité de la réécriture nous semble, en effet, un moyen pertinent pour interroger

certains dogmes, largement partagés par les élèves de lycée. - un dogme conceptuel qui réduit l"écriture à un objet de médiation, au service de l"expression et de la représentation.

- un dogme cognitivo-scriptural qui entérine l"idée que la pensée précède l"écriture

et que l"écriture n"est qu"une opération de mise en mots d"un déjà-là, préconçu

intellectuellement. - un dogme esthétique qui reconnaît les qualités formelles d"une production écrite en fonction de critères normatifs qui fondent le bien-écrire. - un dogme artistique qui interprète la singularité, l"originalité d"un écrit comme

étant l"expression du don et de l"inspiration, et non le résultat d"un travail et des

influences intertextuelles 5. - un dogme téléologique qui valorise le produit achevé et moins le processus de génération de l"écriture. L"ensemble de ces réflexions, articulées autour de la notion de réécriture, forment le substrat théorique et didactique qui justifie un autre positionnement de l"écriture dans

l"enseignement de la littérature au lycée. " La réécriture en séquence » (R.e.S.) est

l"expression que nous avons retenue pour désigner l"approche pragmatique de l"écriture

d"invention que nous défendons. La deuxième partie de la thèse en énumère les principes

et décrit au préalable les sources théoriques dont ils s"inspirent, en réservant une attention

particulière à la génétique textuelle et aux conceptions de la réécriture. La troisième partie

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