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8 avr. 1994 soutenance et mis à disposition de l'ensemble de la ... much more skillfully than the originals ever were- He is a clever man.>>98.

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THÈSE

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE GRENOBLE

Spécialité : Doctorat LLSH/Études Anglophones

Arrêté ministériel : 7 août 2006

Présentée par

Marie THÉVENON

Thèse dirigée par Claire MANIEZ

préparée au sein du Laboratoire EA3016 - Centre d'Études sur les Modes de la Représentation Anglophone (CEMRA) dans l'École Doctorale n° 50 - Langues, Littératures et Sciences

Humaines

Les " avatars du moi » chez Paul

Auster : autofiction et

métafiction dans les romans de la maturité Thèse soutenue publiquement le 23 novembre 2012devant le jury composé de :

Mme Nathalie COCHOY

Professeur des Universités à l'Université de Toulouse 2 (Rapporteur)

Mme Claire MANIEZ

Professeur des Universités à l'Université de Grenoble 3 (Directrice de thèse)

M. Arnaud SCHMITT

Professeur des Universités à l'Université de Bordeaux 4 (Membre)

Mme Sophie VALLAS

Professeur des Universités à l'Université d'Aix-Marseille (Présidente, Rapporteur)

Université Stendhal

The Devil comes to the writer and says, "I will make you the best writer of your generation. Never mind generation - of this century. No - this millennium! Not only the best, but the most famous, and also the richest; in addition to that, you will be very influential and your glory will endure for ever. All you have to do is sell me your grandmother, your mother, your wife, your kids, your dog and your soul." "Sure," says the writer, "Absolutely - give me the pen, where do I sign?" Then he hesitates. "Just a minute," he says. "What's the catch?" Margaret Atwood, Negotiating with the Dead. A Writer on Writing. (90-91) 1

Remerciements

Je souhaite remercier avant tout ma directrice de recherche, Mme Maniez, pour l'aide, les

précieux conseils et le soutien qu'elle m'a apportés, ainsi que le temps qu'elle m'a accordé

tout au long de mes années de recherche. J'aimerais également remercier ma famille pour leur soutien, et en particulier mon père,

Louis Cresson, pour avoir toujours été à mes côtés, même pendant les moments les plus

difficiles. Je remercie également mes amis qui m'ont encouragée jusqu'au bout et en particulier dans la dernière ligne droite. Je remercie l'Université Stendhal, l'Université d'Oxford, l'Université Joseph Fourier et l'Université Lumière qui m'ont permis de découvrir le monde académique pendant mes années de doctorat et m'ont aidée à trouver ma voie. Je remercie également mes nombreux

collègues rencontrés au fil des années qui m'ont soutenue et qui ont toujours été là pour

m'apporter leur aide. Je remercie enfin Mme Cochoy, Mme Vallas et M. Schmitt d'avoir accepté de faire partie de mon jury de thèse. 2

Table des matières :

Première partie : L'espace austérien : une dualité entre monde extérieur

et monde intérieur.............................................................................................19

Chapitre 1 : L'espace extérieur : New York et les États-Unis...........................23

1) Lieux réels, lieux fictifs : New York et son empreinte sur l'oeuvre austérienne..............23

a) Varick Street, Columbia, " The White Horse Tavern » et l'errance austérienne........26

b) La statue de la Liberté : symbole new-yorkais par excellence...................................32

2) L'" ailleurs » ou l'espace au-delà de New York..............................................................35

a) L'" ailleurs » et l'inconnu...........................................................................................36

b) Le Vermont, espace sauvage.......................................................................................39

Chapitre 2 : Espace intérieur : la chambre close et le monde de l'esprit..........48

1) Une construction intertextuelle de la chambre close.......................................................48

2) La mise en scène de la chambre close dans l'(auto)fiction austérienne..........................55

a) Solitude et enfermement.............................................................................................55

b) Mort symbolique et renaissance au sein de la " chambre close » austérienne...........65 Chapitre 3 : Bouleversements autofictionnels et fuites " hors du monde » :

des tournants identitaires...............................................................................................68

1) Des narrateurs bouleversés par le monde extérieur qui se réfugient dans le monde

a) L'impact du divorce chez Peter Aaron et Nathan Glass..............................................69

b) L'impact de la mort chez David Zimmer.....................................................................73

3

c) L'impact de la maladie chez Nathan Glass et Sidney Orr...........................................80

* La renaissance de Sidney Orr après la maladie.........................................................83

* La redécouverte de la vie après la maladie chez Nathan Glass.................................87

2) Du rejet de l'espace intérieur à la fuite vers le monde extérieur.....................................90

a) L'échec de Tom Wood et la fausse identité de Harry Brightman...............................96

b) La chute de Benjamin Sachs.....................................................................................103

c) La pénitence de Hector Mann...................................................................................116

d) La disparition de Nick Bowen..................................................................................122

Deuxième partie : Le temps austérien.....................................................................138

Chapitre 4 : Le temps austérien premier : mémoire, histoire familiale

et mnémotechnique.......................................................................................................143

1) Les " connecteurs » entre passé et présent : la " trace »................................................144

a) Les photographies en trois dimensions dans Oracle Night.......................................145 b) Les " traces » comme indices d'un passé oublié dans Travels in the Scriptorium...147 c) La sauvegarde de la " trace » avant la mort dans The Brooklyn Follies...................149

2) " Image wed to place » ou le lien entre expérience et souvenir....................................151

Chapitre 5 : Temps et récit..........................................................................................156

1) La fuite du temps...........................................................................................................156

a) La course contre la montre de Peter Aaron.......................................... ....................159

b) Le présent comme rempart au passage du temps dans The Brooklyn Follies...........168

c) Oracle Night et la distance entre récit et événements...............................................172

d) L'influence structurelle de Proust.............................................................................175

2) Préservation écrite des souvenirs sous le prisme de l'héritage judaïque.......................178

a) Introduction à l'héritage judaïque austérien..............................................................179

b) La mise en scène de la judéité dans les romans austériens.......................................183

4 Chapitre 6 : Histoire, histoire : temps personnel et temps universel................190

1) Histoire passée...............................................................................................................191

a) Leviathan, Benjamin Sachs et la bombe atomique ..................................................192

b) Hector Mann et ses pérégrinations au sein d'une époque changeante......................198

2) Histoire " au présent »...................................................................................................201

a) Oracle Night et The Brooklyn Follies ou comment parler des attentats de " 9/11 »

sans en parler.................................................................................................................205

b) Man in the Dark, " l'après-9/11 » et la réinvention de l'Histoire sous forme

de combat politique.......................................................................................................209

Troisième partie : Métafiction et mise en scène de l'écriture............................223

Chapitre 7 : Le langage, un mystère à déchiffrer..................................................226

1) Le besoin de langage et les conséquences de la privation de parole.............................227

a) Le silence et ses conséquences................................................................................227

b) La non-maîtrise du langage et ses conséquences....................................................234

2) L'inadéquation du langage............................................................................................238

a) Le langage et sa réception.......................................................................................239

b) Un signifiant trop éloigné de son signifié...............................................................243

3) La reconquête du sens...................................................................................................248

a) Reconquérir le sens par la suggestion et le sens caché des noms propres..............249

b) L'influence de la poésie dans l'art de la suggestion................................................253

4) Le pouvoir du langage...................................................................................................256

a) L'impact des mots hors de la page............................................................................256

b) Le pouvoir quasi-divin de la création.......................................................................259

5

Chapitre 8 : Le carnet rouge.......................................................................................267

1) Les origines du " red notebook »...................................................................................269

2) La réapparition du " red notebook » dans l'oeuvre austérienne.....................................276

a) Un carnet envoûtant...................................................................................................277

b) Le côté obscur du carnet............................................................................................283

Chapitre 9 : La mise en scène de l'écriture.............................................................291

1) L'écrivain au travail......................................................................................................292

a) L'histoire d'une écriture contre la montre : le récit commenté par Peter Aaron.......292 b) The Book of Illusions et le travail de recherche de David Zimmer...........................298

c) Oracle Night et les affres de la création chez Sidney Orr.........................................302

d) Nathan Glass et " The Book of Human Folly ».........................................................319

2) L'écrivain qui n'écrit pas - l'oralité des récits...............................................................324

a) Travels in the Scriptorium et le récit oral de Mr. Blank............................................325

b) Man in the Dark et la narration silencieuse..............................................................342

Chapitre 10 : L'intratextualité et le bilan de l'oeuvre austérienne....................354

1) Des figures fantômes du passé.......................................................................................358

a) Peter Stillman et David Zimmer................................................................................358

b) Fanshawe et Trause : des écrivains absents qui ont laissé leur trace.........................361

2) Des personnages qui rencontrent enfin leur créateur....................................................364

a) Anna, Sophie et Samuel Farr : des aide-soignants issus de l'imaginaire passé.........364

b) James P. Flood : une victime qui en veut à son créateur...........................................369

c) Un bilan littéraire en la personne de Quinn...............................................................371

6

Introduction

Poète, puis traducteur, Paul Auster ne s'est tourné vers l'écriture en prose qu'après la mort de son père. Son premier livre1, The Invention of Solitude, est une autobiographie qui plonge le lecteur, dès le départ, dans le monde austérien en mettant en place de nombreux thèmes qui ne cesseront de réapparaître au fil de ses romans : la mort, la solitude, l'écriture, la mémoire, la " chambre close »... Ce premier ouvrage constitue en quelque sorte la base de l'oeuvre austérienne et les romans qui suivent semblent puiser dans l'expérience autobiographique de l'auteur telle qu'il la présente dans son oeuvre première. Comme l'observe Dennis Barone : " Auster's fiction often draws on autobiographical material, but [...] it does so in a very complex manner. One reads Auster's fiction and the

general outline of his life becomes clear » (1995, 1). C'est donc dès le début de sa carrière

d'écrivain que Paul Auster met en place un parallèle entre son oeuvre et sa propre vie. Bien que les récits à la première personne existent depuis toujours, c'est la fin du dix-

septième siècle qui marquera l'émergence affirmée de ce genre toujours plus populaire. Le

terme " autobiographie » n'a cependant été introduit que très tardivement dans la langue

française : la décision de l'Académie Française date de 1842. Parmi les récits à la première

personne, une distinction entre plusieurs genres est nécessaire. Il nous semble important de

mettre, tout d'abord, l'accent sur la différence entre " mémoires » et " autobiographie »

dans la perspective d'une évolution historique, puis nous nous intéresserons de la même façon à la différence entre " récit véridique » et fiction. D'après Sébastien Hubier, l'autobiographie appartient à celui qui se pense " comme un

être d'exception » (2003, 54) puisqu'elle est " centrée » sur sa propre existence, à la

différence des mémoires qui sont consacrés aux bouleversements historiques auxquels

l'écrivain a assisté ou auxquels il a pris part et qu'il raconte à partir de ce qu'il a vu de ses

propres yeux. Les mémoires comprennent donc des enjeux idéologiques ou politiques, ce qui n'est pas nécessairement le cas des autobiographies. Si la première personne est utilisée aussi communément, ce n'est pas parce que chacun

se perçoit " comme un être d'exception », mais plutôt pour renforcer la crédibilité du

1Nous excluons Squeeze Play, son premier roman écrit sous le pseudonyme de Paul Benjamin, du corpus

littéraire de Paul Auster puisque l'auteur lui-même l'a renié et ne le considère pas comme faisant partie de

son oeuvre. 7 discours romanesque. Il s'agit surtout de " faux mémoires » et d'" autobiographies fictives ». Comme l'explique Sébastien Hubier : " L'utilisation de la première personne,

liée à la volonté de présenter la société dans sa complexité, tend à rapprocher le roman de

la réalité, à le faire passer pour vrai, et à placer le lecteur en position de voyeur [...]. Ces

effets de réel tendent à nier le caractère fictionnel du roman, à faire de ce dernier la simple

transformation d'un vécu antérieur à son écriture » (89). Dans son article, intitulé " Pourquoi l'autobiographie ? », paru dans Le Monde le 2 novembre 2002, Thomas Clerc décrit la littérature personnelle comme un véritable " phénomène d'époque » (11). Nous pouvons nous demander si la popularité grandissante

des récits à la première personne n'est pas liée au fait que la littérature devient le lieu

d'une expérimentation qui devient l'enjeu principal des oeuvres. La philosophie s'est

insérée dans la littérature afin de mieux appréhender la réalité, et l'arrivée de la

psychanalyse a mis l'accent sur les phénomènes involontaires ainsi que sur la relation intime et souvent inconsciente entre oeuvre et auteur. Le roman moderne est apparu au même moment que la psychologie puis la psychanalyse. Ces domaines ont contribué à accroître la conscience de soi de l'écrivain et ont commencé à lui faire craindre les analyses de ses critiques, toujours prêts à retourner son texte contre lui. En effet, les

" pactes fantasmatiques » décrits par Philippe Lejeune ont participé à une nouvelle forme

de lecture influencée par la psychanalyse qui tend à dégager la personnalité inconsciente de

l'auteur2. Avec la psychanalyse vient la crise du sujet, qui entraîne inéluctablement la crise de la fiction. L'analyse devient ainsi plus importante que l'action, ce qui met l'accent sur l'expérimentation mise en oeuvre dans le texte. Les repères temporels se brouillent et les récits se vident petit à petit de leur substance romanesque. Non seulement ce ne sont plus des " êtres d'exception » qui monopolisent cette catégorie de récits, mais, bien au contraire, ce sont les vies les plus banales qui sont racontées, mais de la manière la plus originale possible. L'accent est donc mis sur le récit comme lieu d'une expérimentation d'une nature nouvelle. C'est vers la fin du dix-neuvième siècle que, plutôt que de promouvoir le réel, la

fiction prend le dessus en insistant sur le fait que tout n'est en fait que fiction et que le réel

n'existe pas. Comme l'explique Sébastien Hubier : " À partir des années 1890 [...], la littérature se détourne progressivement de la fonction référentielle du langage, et la

logique, mimétique, de la représentation le cède à une logique, poétique, de recréation de la

2On peut citer ici le travail de Charles Mauron, en particulier son ouvrage Des métamorphoses obsédantes

au mythe personnel, Paris, José Corti, 1963. 8

réalité par les mots, à des fins spirituelles » (110). C'est cette remise en cause des référents

et des valeurs qui conduira à une critique du sujet cartésien avec la découverte de l'inconscient. Cette crise dans le monde littéraire du roman induit une fiction qui se donne l'apparence de la réalité mais qui s'avoue invention, projetant une expérience individuelle sur un univers fictif afin d'explorer les possibles qu'offre l'imagination. James Joyce, Thomas Mann, Aldous Huxley, Rainer Maria Rilke et Marcel Proust sont quelques exemples des écrivains à avoir inauguré ce changement dans la littérature : " Le paysage

littéraire du "tournant du siècle" aux années 1960 est clairement dominé par la

transposition en fiction des fragments d'une expérience » (Hubier, 112). Dès lors, le genre

littéraire est ambigu : ce n'est pas une autobiographie car l'expérience est modifiée de sorte

à ne pas être exactement celle de l'auteur, cependant elle s'en rapproche assez pour ne pas

être entièrement une fiction imaginaire : " il s'agit [...] de dire la vérité et en même temps

de ne pas la dire, de jouer avec leur identité et non de l'énoncer sincèrement comme dans l'autobiographie, ni de la projeter en la modifiant profondément comme dans le roman » (Hubier, 114). Au vingtième siècle, l'utilisation du " moi » dans la fiction devient bien plus " un moyen de s'inventer qu'une méthode de se retrouver » (Hubier, 114) : C'est, on le voit, un jeu identitaire (et mis en abyme) entre identification et détachement

qui, laissant toute liberté aux écrivains de dévoiler et de rêver leur vie, répond à cette

crise de la fiction qui persiste depuis le seuil du XXe siècle. Non seulement la littérature narrative permet tour à tour de dire une vérité intime, de la celer, de la métamorphoser ou de s'y soustraire, mais elle offre également la possibilité de la créer, en une dynamique qui, au contraire de celle qui préside à la naissance de l'autobiographie, est résolument tournée vers l'avenir. [...] Il semble qu'il existe pour les écrivains du XXe

siècle, réticents à écrire de pures et simples fictions, une possibilité de parler d'eux tout

en s'inventant, par l'écriture même, une existence nouvelle. L'imagination n'a pas disparu, mais, au lieu de se disperser, elle se trouve recentrée sur la personne même de

l'auteur : elle s'appuie sur une réalité autobiographique dont la notoriété est publique,

mais elle dépasse cette réalité et vise, comme dans le roman, à une manière

d'universalité. (Hubier, 114) C'est en 1977 qu'est utilisé pour la première fois le terme " autofiction ». Inventé par Serge Doubrovsky qui l'emploie sur la quatrième de couverture de son roman Fils (1977),

ce terme décrit une fiction dont il est à la fois l'auteur et le personnage principal. Quelques

années plus tard, Doubrovsky commente son utilisation du terme, notamment dans deux articles : " Ecrire sa psychanalyse » (1979) et " Autobiographie/Vérité/Psychanalyse » (1980). Il explique que le pacte autofictionnel est " scellé par des textes dans lesquels 9 auteur, narrateur et personnage partagent la même identité onomastique, mais dont l'intitulé générique indique qu'il s'agit de romans » (Hubier, 121) : Fausse fiction, qui est histoire d'une vraie vie, le texte de par le mouvement de son écriture, se déloge instantanément du registre patenté du réel. Ni autobiographie ni roman, donc, au sens strict, il fonctionne dans l'entre-deux, en un renvoi incessant, en un lieu impossible et insaisissable ailleurs que dans l'opération du texte. Texte/vie : le texte, à son tour, opère dans une vie, non dans le vide. (Doubrovsky, 1988, 69-70) Dans sa thèse, L'autofiction. Essai sur la fictionnalisation de soi en littérature,

devenue référence en la matière, Vincent Colonna résume l'analyse du terme

" autofiction » de Doubrovsky en quatre points. D'un point de vue fonctionnel, Doubrovsky considère l'autobiographie comme étant " l'apanage des vies mémorables »,

alors que l'autofiction serait le " refuge des vies ordinaires ». C'est grâce aux " atours de la

fiction » dont elle est dotée que l'autofiction permet à chacun de raconter sa vie : " Les humbles qui n'ont pas droit à l'histoire, ont droit au roman » (Doubrovsky, 1980, 90).

L'autofiction serait un avatar de l'autobiographie, cherchant à résoudre certaines difficultés

propres à l'écriture de soi. D'un point de vue thématique, Doubrovsky observe que

l'autofiction se doit d'être un " récit vrai » (Colonna, 16) possédant l'authenticité du vécu,

mais dans lequel est autorisé une part d'intervention et d'aménagement de l'écriture, notamment dans le but d'y recueillir les perceptions, les impressions, les sentiments et les souvenirs d'une vie entière. D'un point de vue formel, il s'agit de la mise en " langage d'une aventure », de " l'écriture d'une existence » (18). C'est une " exploration de la

littérarité du langage » (18) qui n'est pas sans rappeler la citation de Jean Ricardou : " Un

roman est [...] moins l'écriture d'une aventure que l'aventure d'une écriture » (1967, 111).

D'après Doubrovsky, " [l]'autofiction, c'est la fiction que j'ai décidé, en tant qu'écrivain,

de me donner à moi-même et par moi-même ; en y incorporant, au sens plein du terme, l'expérience de l'analyse, non point seulement dans la thématique, mais dans la production du texte » (1980, 96). Enfin, d'un point de vue générique, Doubrovsky tient à souligner

l'originalité de son entreprise au sein de la littérature et des " horizons d'attente » en usage.

Vincent Colonna résume ainsi la définition de l'autofiction donnée par Doubrovsky dans

ses deux articles : " [a]vatar de l'autobiographie, référentielle en théorie mais assez fictive

en pratique, romanesque au sens d'une certaine modernité, inédite en son genre, tels sont les caractères de l'autofiction selon Doubrovsky, du moins jusqu'à Fils » (21). Comme Doubrovsky l'explique dans Autobiographiques, l'autofiction est " un de ces territoires 10 nouveaux et privilégiés du romanesque contemporain » (7). Pour lui, Fils ne relève ni du roman, ni du " roman autobiographique », ni de l'autobiographie. Il pense ainsi avoir réussi à remplir la " case aveugle » de la typologie de Philippe Lejeune qui présentait l'hypothèse d'un texte faisant de l'auteur un personnage tout en le présentant comme fictionnel. Apparaissant comme " une solution pour sortir l'autobiographie des impasses dans lesquelles elle s'est engouffrée » (Hubier, 121), le terme " autofiction » vient effectivement compléter les recherches théoriques de Philippe Lejeune dans son Pacte autobiographique (1975). Si, dans un premier temps (en 1973), Lejeune avait reconnu la

possibilité théorique de cette forme, il l'a ensuite refusée en pratique et représentée sous la

forme d'une case aveugle3. Cet " aveuglement » de Lejeune face à une forme de fiction

pourtant assez répandue montre que son hypothèse de départ est biaisée par le fait qu'il ne

trouve pas d'exemples empiriques d'autofiction. Rappelons cependant que lors de cette analyse de Lejeune, le terme " autofiction » n'avait encore pas été inventé, ce qui peut expliquer cette curieuse méconnaissance initiale de la part du spécialiste du genre autobiographique. Lejeune utilisera par la suite le terme " autofiction » pour la première fois dans une note de bas de page d'un article publié en 1978 mais s'en tiendra à la définition initiale de Doubrovsky. C'est lorsqu'il écrit Le Pacte autobiographique (bis) en

1983 que Lejeune prend enfin en compte l'existence empirique de l'autofiction. Dans son

article de 1984 " Autobiographie, roman, nom propre », Lejeune s'intéresse de plus près à

ce genre littéraire qu'il avait jusque-là laissé de côté. Il en propose une définition qui vient

compléter celle de Genette dans son ouvrage Moi aussi deux ans plus tard : " Pour que le lecteur envisage une narration apparemment autobiographique comme une fiction, comme

une "autofiction", il faut qu'il perçoive l'histoire comme impossible, ou comme

incompatible avec une information qu'il possède déjà » (Lejeune, 1986, 65). Le défautquotesdbs_dbs26.pdfusesText_32
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