[PDF] Les risques psychosociaux au regard des relations individuelles et





Previous PDF Next PDF



Répertoire de la Recherche publique au Gabon

17 ene 2003 Etude critique des oeuvres linguistiques anciennes. ... 1999a Participation à la réunion de concertation du Réseau International des ...



Les risques psychosociaux au regard des relations individuelles et

30 mar 2018 Néanmoins celui-ci reste soumis à la réunion de critères stricts ... idée trouve confirmation dans la jurisprudence ancienne laquelle ...



Sous la direction du Pr. Pascal RICHOMME

11 dic 2015 2ème Symposium International AFERP-STOLON 15-17 juillet 2015



Actes du colloque Ecophyto Recherche & Innovation 2021

29 abr 2022 une bibliothèque de 900 souches ! ». ... cucurbitacés à la Réunion. ... individuelles ou collectives plus ou moins anciennes de remise en.

LES RISQUES PSYCHOSOCIAUX AU

REGARD DES RELATIONS INDIVIDUELLES

ET COLLECTIVES DU TRAVAIL

Sous la Direction de Madame Martine MEUNIER-BOFFA

THESE POUR L'OBTENTION DU GRADE DE DOCTEUR EN DROIT PRIVE

PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT

le 19 Avril 2016 par

Mme Noémie MOYAL

Membres du Jury :

M. Jean David AVENEL

Professeur des Universités, Doyen de la Faculté d'administration et échanges internationaux - Université Paris-Est Créteil (Président du Jury)

M. Charley HANNOUN

Professeur à l'Université de Cergy - Pontoise (Rapporteur)

M. Max PEYRARD

Professeur émérite d'économie à l'Université Paris I - Sorbonne (Rapporteur)

Mme Martine MEUNIER-BOFFA

Vice-Doyenne AEI, HDR à l'Université Paris-Est Créteil

A mes parents, à mes frères

et soeurs, et à mes nièces,

A mes grands-parents,

A ma famille,

A mes amis,

aucun mot ne pourrait exprimer toute la gratitude et l'amour que je vous porte. L'université Paris XII - Val-de-Marne n'entend donner ni approbation, ni improbation aux opinions émises dans la présente thèse. Lesdites opinions doivent être considérées comme étant propres à leur auteur. iREMERCIEMENTS Enfin, est venu le temps d'adresser mes remerciements à toutes les personnes sans qui, ce

travail de thèse n'aurait jamais été possible. Véritable résultat d'une activité constructive de

l'esprit, il n'a pas toujours été facile d'écrire cette oeuvre juridique. En effet, doutes,

questionnements, incertitudes et sentiment de solitude, entachant ma profonde motivation, m'ont fait souvent perdre de vue ma grande ambition. Par chance, la présence et le soutien quotidien de bon nombre de personnes m'ont largement permis de compenser ces émotions négatives. Je me dois, alors, de présenter à chacune d'elles ma profonde gratitude. Mes premiers remerciements vont, évidemment, à ma directrice de thèse, Madame Martine Meunier pour avoir accepté d'encadrer mon travail, pour avoir su se rendre disponible chaque fois que je lui en faisais la demande, pour avoir su écouter chacune de mes interrogations et

comprendre chacune de mes réflexions me laissant alors une certaine liberté d'écriture. Si avant

chaque entretien, l'anxiété me gagnait, après chacun d'eux, c'est la confiance que je retrouvais.

Rigoureuse, clairvoyante mais surtout humaine et généreuse, Madame Martine Meunier a su parfaitement me rassurer lorsque cela m'était nécessaire. J'ai également beaucoup de reconnaissance à témoigner envers l'ensemble des membres du

jury lesquels, par l'évaluation et l'appréciation de mon travail, ont contribué à améliorer

nettement sa qualité. Ainsi, je remercie Monsieur le Doyen, Jean-David Avenel qui, en présidant

le jury, a montré un très grand intérêt à l'égard de mon écrit. Cet honneur est d'autant plus grand

que ses domaines de compétence sont autres que le Droit (Professeur des sciences de gestion).

Grâce à son accueil plus que chaleureux, mon intégration fut idéale au sein du corps enseignant

de l'Université de Paris-Est-Créteil. Je suis infiniment gré aux rapporteurs, Messieurs les

Professeurs Max Peyrard et Charley Hannoun, de s'être rendus disponibles pour la lecture de ma thèse. Toute ma profonde gratitude va à mes très chers parents pour m'avoir offert un

environnement privilégié me permettant ainsi de réaliser ce projet, Ô combien important. Depuis

mon jeune âge, mon père s'est employé à me transmettre le goût du sacrifice : c'est chose faite,

papa ! Quant à ma mère, véritable source d'inspiration pour moi, elle n'a cessé de m'exprimer sa

ii tendresse par des mots doux et de me faire partager sa créativité : merci, maman ! Mes frères et soeurs m'ont donné également le courage de ne jamais baisser les bras. Merci

à David pour m'avoir permise de m'épanouir, en dehors du droit, en travaillant à ses côtés dans

un lieu où " folie » est le maître-mot. Merci, aussi et surtout, pour nous avoir offert le plus beau

des cadeaux : notre nièce, Elly. Je tiens à exprimer à ma très chère soeur jumelle, Olivia, tout

l'amour que je lui porte, elle qui s'est tenue à mes côtés depuis la création de ce projet et qui,

sans le moindre signe de fatigue m'a aidé à le mettre en forme, sur ordinateur, jusqu'à tard la

nuit. Enfin, je remercie mon tendre beau-frère, Harry, pour m'avoir montré que la persévérance

est le chemin le plus court vers la réussite ! J'exprime ma gratitude à toutes mes " supers » amies, Yaël, Elsa, Rivka et Salomé, pour

m'avoir consacré leur temps précieux. Leurs esprits critiques ont permis de nouvelles remises en

question faisant ainsi évolué le sens de mon projet. Un grand merci à ma meilleure amie, ma confidente, Sarah, qui a su, me rendre la vie plus légère et divertissante par sa personnalité débordante d'humour et d'énergie. Je ne pourrais, évidemment, pas citer individuellement tous ceux qui, dans mon esprit et dans mon coeur, ont contribué à ma réussite, qu'ils en soient tous remerciés. iii iv SOMMAIRE

REMERCIEMENTS .................................................................................................................................................... i

SOMMAIRE ............................................................................................................................................................ iv

INTRODUCTION ...................................................................................................................................................... 1

PARTIE I : LE LIEN SANTÉ/TRAVAIL, UN LIEN EN RUPTURE ...................................................................................... 8

TITRE I LA NAISSANCE DES RPS : LA CAUSE DE LA RUPTURE DU LIEN " SANTÉ/TRAVAIL » ......................................... 9

Chapitre I : Le risque psychosocial, un terme aux nombreuses définitions ........................................................... 15

Section I : Définitions ............................................................................................................................................ 16

Section II : Causes multifactorielles jurisprudentielles et/ou légales ................................................................ 26

Section III : Cas particulier du harcèlement moral au travail ............................................................................. 35

Chapitre II : Le risque psychosocial, le fardeau des employeurs ............................................................................ 50

Section Préliminaire : Le contrat de travail : délimitation matérielle du pouvoir de direction face aux RPS. 51

Section I : Un fardeau au regard de l'obligation de sécurité de l'employeur ................................................... 57

Section II : Un fardeau au regard du système probatoire défavorable à l'employeur..................................... 63

Section III : L'obligation de sécurité du salarié : une obligation sans incidence sur la responsabilité de

l'employeur ............................................................................................................................................................ 68

TITRE II LA NAISSANCE DES RPS : LA CONSEQUENCE DE L'INTERVENTION DES PARTENAIRES SOCIAUX................. 72

Chapitre I : RPS, résultante de l'impuissance des IRP face à l'employeur ............................................................. 74

Section I : Les actions exercées dans un intérêt exclusivement collectif .......................................................... 78

Section II : Les actions exercées dans un intérêt exclusivement individuel ....................................................124

Chapitre II : RPS, résultante d'une mésentente entre partenaires sociaux .........................................................146

Section I : Les RPS, conséquence de la mauvaise qualité du dialogue social..................................................150

Section II : La place du dialogue social dans la hiérarchie des normes et ses relations avec l'ordre public

social, la loi ou le contrat de travail ...................................................................................................................197

v

PARTIE II : LE LIEN SANTÉ/TRAVAIL, UN LIEN A RECONSTRUIRE........................................................................... 228

TITRE I RECONSTRUCTION LEGISLATIVE INDISPENSABLE DES RPS ...........................................................................231

Chapitre I : Une correction législative nécessaire à l'encadrement de la notion de " risque psychosocial » ...236

Section I : Proposition d'une nouvelle définition juridique du risque psychosocial.......................................237

Section II : Proposition d'une nouvelle indemnisation du risque psychosocial résultant de l'inexécution de

l'obligation de sécurité de résultat à la charge de l'employeur ......................................................................274

Chapitre II : Une intervention (corrective) législative nécessaire à la mise en place d'un nouveau régime de

responsabilité ...........................................................................................................................................................308

Section I : Une application extensive des maladies professionnelles et accidents du travail aux risques

psychosociaux ......................................................................................................................................................309

Section II : Une nouvelle responsabilité patronale résultant du champ d'application élargi des maladies

professionnelles et accidents du travail ............................................................................................................322

TITRE II UNE RECONSTRUCTION ORGANISATIONNELLE RENFORCEE DES INSTANCES REPRESENTATIVES DU

PERSONNEL ....................................................................................................................................................................355

Chapitre I : Une réorganisation renforcée des instances représentatives du personnel face au pouvoir

patronal : un renforcement nécessaire à la lutte contre les risques psychosociaux ..........................................359

Section I : Une réorganisation renforcée de la représentation .......................................................................360

Section II : Une réorganisation renforcée de certaines prérogatives : la consultation et la négociation .....384

Chapitre II : Un renforcement du dialogue social indispensable à l'amélioration de la condition sociale du

salarié dans l'entreprise ...........................................................................................................................................402

Section I : Renforcement du dialogue social par l'implication renforcée des acteurs sociaux .....................404

Section II : Renforcement du dialogue social par l'inclusion d'un nouvel objet : la responsabilité sociétale

d'entreprise .........................................................................................................................................................426

CONCLUSION GENERALE ..................................................................................................................................... 444

BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................................... I

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS UTILISEES ............................................................................................... XXI

TABLE DES MATIERES ........................................................................................................................................ XXVI

1INTRODUCTION

De tout temps, les lois proscrivent ou limitent les excès liés à la nature profonde de

l'Homme. Déjà, dans les Dix commandements, la Seconde table de la loi faisait référence aux

multiples comportements que l'Homme devait avoir à l'égard de son prochain. Ainsi, " quelque chose est dû à l'être humain du seul fait qu'il est humain », écrit Paul Ricoeur

1. La nature

humaine justifie, alors, de respecter ce " quelque chose ». Selon Platon, l'éminence qui fait de

l'Homme une valeur à respecter sans autre condition que d'être humain

2 est la dignité humaine.

Que signifie le terme " dignité » ? Issu du latin " dignus » ou " dignitas » signifiant " digne

d'honneur et d'estime », seuls étaient considérés comme dignes, à l'époque de l'Antiquité gréco-

romaine, les hommes dont le statut social élevé reflétait pouvoir et excellence. Affirmer cela

revient à réfuter la thèse Kantienne, dans la Critique de la raison pratique, selon laquelle " la

dignité humaine est une fin et non un moyen accordée à tout homme en tant qu'être

raisonnable ». Aux termes de ses mots, Kant fait d'elle une véritable interdiction morale à

laquelle nous ne pouvons y déroger

3. Dans ces circonstances, le respect de la dignité est

indissociable du respect de la liberté humaine et réciproquement

4. Pour déterminer si une

situation constitue une atteinte à la dignité, deux outils d'interprétation ont été dégagé à savoir,

1RICOEUR (P.), in J.-F. De Raymond, Les Enjeux des droits de l'homme, Paris, Larousse, 1988, p. 236-

237

2L'idée de la nature spirituelle de l'âme chez PLATON et dans la théologie chrétienne, selon laquelle

l'âme humaine, en vertu de sa nature spirituelle, a une certaine ressemblance divine (imago Dei). A cet

égard, voir L'Etat ou La République de Platon, traduction de Jean-Nicolas GROU, revue et corrigée sur le

texte grec de BEKKER (E.), Paris, éd. Chez Lefèvre, 1840, p. 426. 3

V. aussi ABIKZHER (F.), La dignité humaine, un concept nouveau In La dignité de la personne

humaine, dir. PAVIA (M.-L) et REVET (T.), Paris, Economica, 1999, p. 52 : l'humanité est une valeur

impérative à protéger et qui se matérialise à la travers la dignité humaine

4 KANT (E.), Fondements de la métaphysique des moeurs in Métaphysique des moeurs, I, Fondation,

Introduction, trad. RENAUT (A.), p. 108

, Paris, Delagrave, 1952, p. 758 : La maxime kantienne est ainsi

formulée: " Agis de façon telle que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans tout autre,

toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen. » 2

" le respect » et " l'humiliation »5. Véritables boucliers contribuant à empêcher toute atteinte à la

condition humaine, Henri Atlan aurait-il fait une première ébauche juridique de ce que peut-être

la dignité humaine en droit De ces visions philosophiques, s'est dégagée une pensée juridique. En effet, en1948, la

Déclaration des droits de l'Homme

6 consacre, pour la première fois, la notion de dignité humaine.

S'ensuit le Conseil Constitutionnel à l'occasion de la décision du 7 juillet 1994 relative à la loi

dite de " bioéthique ». Sur le fondement du Préambule de la Constitution de 1946, le juge

constitutionnel fait de la dignité un " principe à valeur constitutionnelle » l'intégrant, ainsi, à la

pyramide des normes

7. Puis, c'est au tour de la Cour d'appel de Paris de s'y intéresser. Par un

arrêt du 28 Mai 1996, la Cour évoque ce droit par le biais de la " stigmatisation dégradante pour

la dignité humaine des personnes ». Et, quelques mois avant, le 27 octobre 1995, le juge

administratif se saisissait de la question, dans la célèbre affaire de " lancer de nains » de

Morsang-sur-Orge en faisant de la dignité une véritable composante de l'ordre public. De cette entreprise jurisprudentielle, la notion de " dignité humaine » ressort plus forte :

désormais, vecteur de la régulation du système social, du droit et du maintien de l'ordre public, la

" dignité humaine » est une valeur inspirant la société démocratique qui est la nôtre.

Initialement concept philosophique, la dignité est devenue un concept juridique liant les

Hommes entre eux.

" La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de

leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix

dans le monde »

8. Dans ce sens, elle sert de base juridique pour faire valoir d'autres droits :

liberté, justice et paix. C'est à ce titre que le Professeur Dominique Terré la qualifie de " notion-

5ATLAN (H.), Connaissance et gloire de la dignité humaine, Diogène n° 215, Juillet-Septembre 2006,

Paris, PUF, p. 12

6ROUSSEAU (D.), Synthèse, in Le principe du respect de la dignité de la personne humaine : actes du

Séminaire Uni Dem organisé à Montpellier du 2 au 6 juillet 1998 en coopération avec le Pôle universitaire

européen de Montpellier et du Languedoc-Roussillon et la Faculté de droit - Commission européenne pour

la démocratie par le droit, Strasbourg, Ed. du Conseil de l'Europe, 1999, pp. 109-111

7 Le juge constitutionnel modifie substantiellement les termes dudit préambule " asservir et dégrader » en

"asservissement et dégradation »

8 Première ligne du Préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH)

3cadre »

9. N'est-ce pas, d'ailleurs, le propre du " droit fondamental » de servir de fondement

juridique à d'autres droits en vue d'une plus grande protection ? Si cette notion a longtemps été passée sous silence, le Conseil constitutionnel dans sa

décision du 22 janvier 1990, confère au " droit fondamental » une valeur constitutionnelle : " aux

libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur

le territoire de la République ». Ainsi, le droit à la dignité devient un droit fondamental dont l'objectif est d'éclairer et protéger les droits de chacun. Encore faut-il comprendre ce que signifie " protection d'autres

droits ». Celle-ci peut s'entendre de deux manières : soit la dignité sert de principe directeur

influant sur d'autres principes dépourvus d'une protection absolue comme le respect de la vie, la

protection de la liberté d'autrui ; soit la dignité donne lieu à des droits indérogeables tels que

l'interdiction de la torture. Touchant, alors, à plusieurs domaines, il convient de se demander si le droit du travail a-t-il

échappé à ce principe tentaculaire ?

Parce que l'évolution philosophique comme juridique montre que ce principe protecteur instaure une morale ainsi qu'une éthique dans les relations entre les hommes, le droit du travail

ne peut évidemment pas y échapper. Marqué au fer rouge, l'article 31 de la Charte des droits

fondamentaux de l'Union Européenne du 7 décembre 2000 rappelle également que " tout

travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité ».

D'un côté, en optant, non pas pour les termes " tout homme » ou " chacun » mais pour

celui de " travailleur » et de l'autre, en mettant sur un pied d'égalité " santé, sécurité et dignité »

pour parler des conditions de travail, le législateur nous assure, sans ambiguïté, que la " dignité

humaine » est un principe directeur du droit du travail. Dès lors, un travailleur, s'estimant

dégradé ou avili dans ses conditions de travail, a la possibilité d'agir sur ce terrain. A ce sujet, " le monde de l'entreprise n'est pas un monde blanc ou noir. Il est souvent

contradictoire, toujours pleins de contrastes ». Dans son ouvrage, la Santé du salarié, la

9 TERRE (D.), Les questions morales du droit, Paris, PUF, Coll. Ethique et philosophie morale, 2007, p.

108

4sociologue Françoise Dupuy paraît convaincue qu'aujourd'hui, les entreprises soient " en passe

de perdre le contrôle d'elles-mêmes (...) génératrices de désastres psychosociaux (...) elles ne

savent plus ce qu'elles font »

10. Par " désastres psychosociaux », cette écrivaine semble faire

référence aux nouveaux risques qui inondent lentement, depuis les années 1980, la sphère de

l'entreprise : stress au travail, épuisement professionnel, harcèlement ou violence psychologique

menant parfois au suicide ... D'après l'Organisation Internationale du Travail, chaque année, 160

millions de nouvelles maladies prendraient racine dans le travail et plus d'un million de décès

seraient liés directement avec le travail. De plus, 47% des salariés français déclarent éprouver du

stress

11 et un tiers des salariés présente des difficultés psychologiques12. C'est dire combien ces

risques psychosociaux, révélateurs d'un profond " mal-être » au travail, traduisent au-delà du

problème social un problème tant dans l'organisation du travail que dans les relations entre les

salariés et la hiérarchie. Dans ce contexte, le lien " santé/travail » semble rompu... Ce sujet nous amène ainsi à nous poser plusieurs questions que nous essaierons d'analyser

tout au long de la thèse. Immédiatement, nous viennent à l'esprit les interrogations suivantes :

quelle place, l' " humain » occupe-t-il dans l'organisation du travail ? Comment en arrive-t-on à

des situations de perte du lien santé/travail au sein de l'entreprise ? Et, comment recréer de la

cohésion sociale au sein de l'entreprise ? Le lieu du travail, en principe, ne devrait pas constituer une menace pour la santé du

travailleur. Car, par le contrat de travail, l'employeur se doit de lui assurer protection et respect

de leur sécurité et santé. Pourtant, affirmer qu' " aller au travail devient un enfer »

13 revient à

penser que le contrat a évolué en ce qu'il exige du salarié non plus de mettre à disposition de son

employeur sa force de travail mais également sa personne dans son intégralité qu'elle soit

physique ou psychique

14. De cette observation, se dégage une autre interrogation. Donnée

10 DUPUY (F.), La santé du salarié, sous l'égide de la Revue juridique d'Ile de France, PELISSIER (J.),

éd. Dalloz

11 Source CSA/Liaisons sociales

12 Source IFAS

13RAVISY (P.), Avocat au barreau de Paris, Le harcèlement moral au travail, éd. Delmas, 3° éd., 17 Juin

2004

14 SUPIOT (A.), Critique du travail, éd. PUF, 2° éd., 2002, p. 67 et s.

5subjective, le psychologique est difficilement quantifiable. C'est pourquoi, comment être sûr que

le trouble du salarié prend sa source non pas dans l'extérieur mais dans l'organisation du travail ?

Si tel est le cas, comment le détecter à temps ?

La réalité de ces risques psychosociaux renvoie une autre réalité celle du lieu de travail

devenu un lieu de subjectivation dans lequel le salarié met à l'épreuve sa personnalité et son

estime de soi. Lointaine est donc la société où le management de proximité permettait aux

salariés de se sentir socialement soutenus et considérés ainsi que reconnus dans leur mission au

sein d'une équipe de travail. Tiraillé par des impératifs économiques de gestion, de productivité

et de rentabilité, ce manager s'est peu à peu éloigné des membres de son équipe au point que ces

derniers se sentent quasi inexistants. Cette absence de reconnaissance au profit d'une intensité dans le travail est source de stress au travail, d'épuisement professionnel poussant parfois le

salarié, dans le cas le plus extrême, à tenter de mettre fin à ses jours. Ce type de management est

une aberration, un non-sens dans la mesure où il fait perdre au salarié toute sa motivation,

élément indispensable à la réalisation de performance et bénéfice économique. Seule compte la

santé économique de l'entreprise.

A la question " le bien-être du salarié est-il antagoniste de l'intérêt économique de

l'entreprise ? », nous avons tendance à répondre que nos entreprises privées ne doivent pas faire

l'économie de " l'humain » si elles veulent être compétitives. La compétitivité ne peut être

atteinte et consolidée que par et dans le travail : une société en santé est avant tout une société dans laquelle ces salariés sont en bonne santé : sains de corps et d'esprit !

Comment améliorer ces conditions de travail ?

Aujourd'hui, les salariés ont de véritables attentes à l'égard des entreprises lesquelles

n'apportent, à notre sens, que des réponses insuffisantes et insatisfaisantes : installation de salles

de détente, de relaxation voire de cellules psychologiques dans l'entreprise ; organisation de

programmes de sensibilisation et d'information sur ces phénomènes psychosociaux. Du côté des

entreprises, plutôt que donner quelques pistes contribuant à prendre conscience de cette réalité en

entreprise, ou du côté des pouvoirs publics, plutôt que de débattre sans cesse sur la question, il est

urgent d'agir dans le fond sur le terrain juridique car rien n'est encore véritablement fixé en

matière de risques psychosociaux et pour preuve, aucune définition juridique ne leur est donnée,

6seules des définitions empiriques ont été rendues par des médecins, psychologues, sociologues,

ou ergonomes.

Dépourvus de base légale et les pouvoirs publics tardant à s'emparer de la question, il nous

a semblé urgent de stabiliser ces risques psychosociaux dans un cadre juridique. S'il est

nécessaire, il demeure néanmoins insuffisant pour améliorer le bien-être et la cohésion sociale

dans l'entreprise. Au-delà de la question de la définition juridique, il s'agit alors de savoir quels

outils sont déjà à la disposition des parties à la relation de travail (employeur et salarié)

garantissant la santé du travailleur dans l'entreprise. Plus précisément, les instruments

institutionnels permettent-il de pallier efficacement le problème lié aux risques psychosociaux ?

De toute évidence, il convient de répondre par l'affirmative étant entendu que des instances

représentatives du personnel ont été conçues et pensées pour garantir et protéger les intérêts du

salarié. A la seule vue du sombre paysage qui se dessine dans nos entreprises privées, ces

représentants semblent pourtant incapables et inefficaces pour contrecarrer les décisions

patronales consistant à faire primer l'intérêt économique sur l'intérêt social. Aujourd'hui, un

équilibre entre ces instances de représentation collective et l'employeur est à rechercher afin de

remettre au centre l' " humain » au sein de l'entreprise. Fondée sur un processus de dégradation des conditions de travail et plus particulièrement

de la santé au travail, la croissance économique, après laquelle courent nos entreprises françaises

privées, a de toute évidence détruit l'Homme dans son épanouissement professionnel dans la

mesure où ce dernier est voué, désormais, à travailler dans un climat de tension, d'insécurité et de

souffrance. Pour stopper cette tendance, il est indispensable de repenser les règles du droit du travail relatives aux relations individuelles et collectives.

Aujourd'hui, nous sommes confrontées, à des sociétés où les valeurs traditionnelles se sont

écroulées, mais demain nos représentants doivent pouvoir être capable de dialoguer avec

l'employeur car l'être humain doit pouvoir vivre et grandir au sein de son entreprise !

7L'avenir mérite que nous y fassions face avec objectivité, persévérance et combativité. Le droit

du travail doit impérativement se construire autour de l'idée de protection de la santé des

travailleurs 15. L'important est donc de montrer que, devant les risques psychosociaux - traduction d'un malaise tant dans les relations individuelles entre employeur et salariés que dans les relations

collectives entre employeur et représentants du personnel - qu'il est possible de reconstruire le

lien " santé/travail » (Partie II) actuellement en rupture (Partie I) afin de garantir un cadre de

travail sain où les individus s'épanouiraient.

15 V. quelques textes importants tels que la loi du 9 avril 1898 sur l'indemnisation des accidents du travail,

la loi n° 76-1106 du 6 décembre 1982 relative au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de

travail, la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991 qui introduit l'obligation de sécurité à la charge du salarié,

la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale qui prend pour la première fois en compte

les questions de la santé mentale du travailleur ou encore la tentative prise en compte de la pénibilité au

travail par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites et son décret

d'application sur la pénibilité, D. n° 2011-353 du 30 mars 2011

8PARTIE I : LE LIEN SANTÉ/TRAVAIL, UN LIEN EN RUPTURE

Dans un premier temps, notre démarche intellectuelle consiste à dénoncer la situation actuelle des risques psychosociaux face aux relations individuelles et collectives de travail. Nous allons faire l'étude approfondie des risques psychosociaux afin de comprendre d'abord, en quoi constituent-ils une cause de rupture du lien Santé/Travail (Titre I) et ensuite, dans quelles mesures sont-ils une conséquence directe de l'intervention des partenaires sociaux (Titre II).

9TITRE I

LA NAISSANCE DES RPS : LA CAUSE DE LA RUPTURE DU LIEN " SANTÉ/TRAVAIL » " Même dans un monde en mutation, nous ne saurions tolérer de compromis sur le droit au travail sûr et salubre

16 ». Par cette déclaration, l'Organisation Internationale du Travail

(ci-après, " OIT »), dans une brochure diffusée à l'occasion de la journée mondiale de la sécurité

et de la santé au travail, réaffirme l'obligation faite à tous les intervenants au contrat de travail de

faire primer la sécurité, la santé et la vie au travail sur les changements imposés dans le travail.

Plus largement, ces trois notions (sécurité, santé et vie au travail) sont garanties et encadrées par

le droit, et spécialement par le contrat de travail. Qu'en est-il véritablement de ce contrat de

travail ? Est-il efficace au point d'en appréhender la réalité des relations de travail ou n'est-il pas,

au contraire, source de tous les problèmes juridico-sociaux actuels ?

Pour y répondre, il est primordial de revenir sur le sens premier qui a été donné à ce

" contrat de travail » au XIX° siècle. Dans la version d'origine du Code civil de 1804, il était

question de louage d'ouvrage et d'industrie aux articles 1779 à 1799. L'une des trois sortes exposées à l'article 1779

17 était le louage des gens de travail qui s'engagent au service de

quelqu'un. Par la suite, ce " louage de services » était prévu à l'article 1789 du Code civil, qui

demeure aujourd'hui dans une section intitulée " du louage des domestiques et ouvriers ». Ce

n'est qu'à partir des années 1890 que l'expression " contrat de travail » fut évoquée

18 puis

consacrée par le Code du travail de 1910 à l'article L. 1221-1 : " le contrat de travail est soumis

aux règles de droit commun. Il peut être établi selon les formes que les parties contractantes

16" Santé et vie au travail, un droit humain fondamental »

17La deuxième sorte de louage étant celui des voituriers, tant par terre que par eau, qui se chargent du

transport des personnes ou des marchandises ; et la troisième étant celui des entrepreneurs d'ouvrages par

suite de devis ou marchés

18 Quant au législateur, il a employé pour la première fois cette expression dans la loi du 18 Juin 1901 sur

le service militaire.

10décident d'adopter ».

Reposant sur des textes codifiés, aucune définition précise n'est donnée du " contrat de

travail ». C'est le juge qui, par son célèbre arrêt du 22 juillet 1954, a contribué de manière

décisive à l'élaboration d'une qualification du contrat de travail : c'est le contrat " par lequel une

personne physique, le salarié, met son activité à la disposition d'une autre personne physique ou

morale, l'employeur, sous la subordination sous laquelle elle se place moyennant rémunération

19 ». A cette époque, la seule question qui intéressait était de savoir ce que

l'expression " lien de subordination » recouvrait. Était-ce une " dépendance juridique » ou " un

état de dépendance économique » ? Si certains auteurs préféraient le terme de " lien de

dépendance économique », la Cour de cassation n'a pas hésité à trancher en faveur de la première

conception, celle de la " dépendance juridique ».

En effet, dans sa décision du 6 juillet 1931

20, elle retient que " la condition juridique d'un

travailleur à l'égard de la personne pour laquelle il travaille ne saurait être déterminée par la

faiblesse ou la dépendance économique dudit travailleur et ne peut résulter que du contrat conclu

entre les parties ». De plus, " la qualité de salarié implique nécessairement l'existence d'un lien

juridique de subordination du travailleur à la personne qui l'emploie », en ce sens que le contrat

doit avoir pour effet de placer ce travailleur sous la direction, la surveillance et l'autorité » de son

cocontractant. Ainsi, en se soumettant à l'autorité de son employeur

21, le lien de subordination,

issu du contrat de travail lui-même, semble instituer implicitement une hiérarchie, une relation de

pouvoir

22 en référence à la contrainte, à l'obligation ou l'obligatoire, au commandement23. De

cette situation naît une inégalité seule créée par le droit. Cette terminologie parait être, déjà au

19 Cass. Soc. 22 Juillet 1954, Bull. Civ., IV, n° 576. Cet arrêt sert de référence quant à la définition d'un

contrat de travailquotesdbs_dbs27.pdfusesText_33
[PDF] biblio bio Abonnement général - France

[PDF] biblio Casse Noisettes

[PDF] biblio cier liste - Mairie de Cier-de - France

[PDF] BIBLIO dossier peda - France

[PDF] biblio ESF

[PDF] Biblio fermes pédagogiques

[PDF] BIBLIO FICTION MOYEN AGE Le : 11/12/2007 Livre Armand - France

[PDF] biblio flash langues cecrl

[PDF] Biblio guerre

[PDF] Biblio harcèlement

[PDF] biblio janvier 2017 - Saint-Jude

[PDF] biblio la nuit - La Bibliothèque

[PDF] Biblio Math 24 - Laboratoire de Mathématiques et Applications

[PDF] Biblio Mikaël Ollivier

[PDF] Biblio Olmsted V2