[PDF] xavier beauvois - le petit lieutenant





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U N F I L M D E J A L I L L E S P E R T ROMAIN DURIS I

ENTRETIEN AVEC JALIL LESPERT. Du trio de personnages principaux Max



un film de Jalil lespert lubna aZabal benoît magimel sami bouaJila

Un film de Jalil Lespert. Avec. Benoît Magimel. Lubna Azabal. Sami Bouajila. Bérangère Allaux. Archie Shepp. Scénario de Jalil Lespert et Yann Apperry.





Untitled

Votre film est inspiré par la bande dessinée Une sœur de Bastien Vivès. Quand l'avez-vous découverte ? C'est Jalil Lespert acteur



LE BIOPIC : COMPARAISON DE DEUX FILMS teur(s) casting

YVES SAINT-LAURENT DE JALIL LESPERT (2014) : 101'. SAINT-LAURENT DE BERTRAND BONELLO (2014) : 144'. PARTIE COLLECTIVE (NOTÉE SUR 10) : TRAITEMENT OBJECTIF 



xavier beauvois - le petit lieutenant

prété par Jalil Lespert. La mise en scène fait preuve d'une efficacité et d'une précision singu- lières réussissant le tour de force de mettre à plat.



Yves Saint Laurent » réalisé par Jalil Lespert

réalisé par Jalil Lespert. Avec. Pierre Niney de la Comédie-Française



De guerre lasse par Olivier Panchot (review)

24 août 2021 Int. Jalil Lespert Tchéky Karyo



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14 déc. 2011 Jalil Lespert avec. Isabelle Carré Antoine Duléry Ramzy Bedia. Bouli Lanners Marie - Ange Casta Daniel Duval avec la participation de Lubna ...



PREMIERS CRUS

Avec Gérard Lanvin Jalil Lespert

LE PETIT

LIEUTENANT

X AVIER B

EAUVOIS

par Axel Zeppenfeld

LYCÉENS

ET APPRENTIS

AU CINÉMA

ÉDITORIAL

Le quatrième long métrage de Xavier Beauvois manifeste une grande vigueur, d'abord liée à l'hu- meur enthousiaste du " petit lieutenant » inter- prété par Jalil Lespert. La mise en scène fait preuve d'une efficacité et d'une précision singu- lières, réussissant le tour de force de mettre à plat une réalité policière qui passe pour linéaire et sans charme, sans l'isoler pour autant des affects et des mondes intérieurs des personnages. Cette nature regardée en face, comme un document, permet de toucher au mieux le véri- table propos de Beauvois, bien que celui-ci ne s'éclaire véritablement qu'en bout de course : la solitude de Caroline Vaudieu, incarnée par Nathalie Baye. Le film confronte ainsi le spectateur à ce qui pourrait sembler l'approche cinémato- graphique la plus simple possible : le réalisme. Mais celui-ci est au fond la notion la plus mystérieuse, pour elle-même et par les moyens qu'elle met en oeuvre. Il s'agi- ra pour nous de les analyser et de distinguer l'image du monde qui perce à travers cette austérité.

SOMMAIRE

Directeur de publication : Véronique Cayla.

Propriété : CNC (12 rue de Lübeck - 75784 Paris Cedex 16 - Tél.: 01 44 34 36 95 - www.cnc.fr).

Directeur de collection : Jean Douchet. Rédacteur en chef : Emmanuel Burdeau. Coordination éditoriale :

Thierry Lounas. Conception graphique : Thierry Celestine. Iconographie : Eugenio Renzi. Auteur du

dossier : Axel Zeppenfeld. Révision : Pauline Chopin. Rédactrice pédagogique : Ariane Allemandi.

Conception et réalisation : Cahiers du cinéma (9, passage de la Boule Blanche - 75012 Paris -

Tél.: 01 53 44 75 75 - Fax. : 01 53 44 75 75 - www.cahiersducinema.com).Les textes sont la propriété du CNC. Publication septembre 2007. Dossier maître et fiche élève sont à la disposition des

personnes qui participent au dispositif sur : www.lyceensaucinema.org

Synopsis 1

Le réalisateur 2Xavier BeauvoisGenèse 3Document de travailChapitrage 4

Analyse du récit 5

Parti pris 6Ouverture pédagogique 1Acteur/Personnage 8Nathalie Baye

Ouverture pédagogique 2Mise en scène 10DéfinitionOuverture pédagogique 3Analyse de séquence 12Ouverture pédagogique 41, 2, 3 14Ouverture pédagogique 5Figure 15Ouverture pédagogique 6Point technique 16Le hors-champ sonoreOuverture pédagogique 7Filiations / Ascendances 17

Atelier pédagogique 18

Lecture critique 19

Passage du cinéma 20

Sélection

vidéo & bibliographie différente. Deux exemples. L'arrivée des quatre inspecteurs dans le restaurant (chapitre 3) est l'occasion d'un plan où l'oeil peut s'attacher à suivre chacun des personnages, sans grande profondeur de champ, étalés sur l'ensemble du cadre : Morbé discutant à gauche avec un client, Antoine encore mal à l'aise, etc. Plus loin (chapitre 10), lors de la première discussion avec le juge, lorsque celui-ci dit à Vaudieu de l'appeler, Solo et Antoine se lancent un regard amusé qui contribue à ajouter des dimensions supplémentaires, des histoires dans l'espace filmé.

Immanence

La précision et la singularité du style de Beauvois tiennent notamment à ceci :

sans que l'efficacité du polar en soit altérée, le cinéaste s'intéressera toujours plus

aux émotions des personnages qu'à la situation elle-même. Cette liberté, que peu de metteurs en scène s'autorisent, consiste à parfois se désaxer, quitte à ne pas montrer ce vers quoi, spontanément, on tournerait la tête. Pourtant, Beauvois n'est pas cinéaste de l'ellipse, de l'intervalle, de la suggestion, prompt à laisser se dérouler l'essentiel à coté du cadre. Le plan représente au contraire tout ce qu'il y a à voir. En conséquence, la pensée du film ne va pas au-delà de ce qui est filmé, de ce qui compte immédiatement pour le cinéaste ; au cours d'un dialogue, lorsque les choses dites n'atteignent pas directement les personnages, Beauvois suit cette exclusion avec la caméra. Au fond, il se veut particulièrement attentif à eux, curieux, proche de leurs impressions ; ennui, préoccupations, etc., ces senti- ments prennent le dessus sur la logique académique de la séquence. Du coup, le film ne crée pas de deuxième espace mental, à partir de ce qui n'est pas cadré. Le plan n'est jamais contaminé de l'extérieur par cet ennui, ces préoccupations, etc. Du hors-champ, en effet, seul le son a souvent son importance, pas cependant pour ouvrir à un monde parallèle, non filmé : plutôt pour enrichir le plan d'une plus grande expressivité, comme le ferait une musique (Cf. " Point technique »). Beauvois crée une continuité entre le film et la réalité, de sorte que l'on puisse douter du lieu exact du réel. La mise en scène s'intéresse si peu au hors-champ,

à un éventuel espace théorique, qu'elle en devient immédiate. Le film affirmantêtre tout ce qu'il y a à voir, le spectateur trouve un nouveau rapport de conti-

nuité avec le film : dans le hors-champ, au contrechamp des personnages. À partir de la double mise en scène du défilé à l'académie, Beauvois cherche à dévoiler, révéler les structures. Comme Robert Bresson avant lui, il traque la fac- ticité du redoublement que constitue la mise en scène d'un monde qui en est

déjà une. Cette volonté radicale était à l'origine d'un cinéma indépendant de tous

les autres arts, à commencer par le théâtre. Pour mieux comprendre cette intui- tion bressonienne, il faut aborder le problème du gros plan et invoquer le phi- losophe Gilles Deleuze, pour qui, dans L'Image-mouvement, Ç il n'y a pas de gros plan de visage, le visage Žtant lui-mme un gros plan.ÈOn pourrait le dire autre- ment : le visage est déjà une scène. Filmée, la scène est redoublée. Le gros plan survient alors, dans Le Petit Lieutenant, lorsque le sujet est en prise avec une double mise en scène, celle du film et la sienne, intime. Le gros plan de visage est utilisé à deux occasions : lors de la projection romantique du dan- ger qu'éprouve Antoine juste avant son agression ; et lors du désespoir final de Vaudieu, vertigineux aussi, sur la plage. Avec la même distance qu'il y a entre réalité et monde, Beauvois creuse, au coeur de son plan, l'écart qu'il y a entre la neutralité du réel et la diversité des subjectivités. Soudainement isolés par un plan de coupe, les individus s'y voient renvoyés à leur solitude. Les paroles dites "hors champ » deviennent alors lointaines : à première vue frontale, la mise en scène se met d'abord au service des affects. Dans le réalisme, il ne s'agirait donc pas de proposer le meilleur simulacre de réalité possible, mais de trouver des moyens de mise en scène pour pénétrer les mondes des personnages. 11

Ouverture

PŽdagogique 3Casting naturaliste

L'aspect "documenté», sinon documen-

taire, du film se perçoit rapidement, alors même que le filmage en refuse les tics. À quoi cela tient-il ? En grande partie à la réussite du casting des personnages se- condaires, négligés dans les mauvais films, primordiaux dans les bons. Laissons les élèves explorer leurs souvenirs du film sans leur révéler d'abord les clés de la méthode Beauvois. Après discussion, on peut visionner des extraits faisant la part belle au personnage secondaire. Ren- contre de SDF dans la rue, interrogatoi- re de Kaminski (chapitre 6). Ou encore

Piotr et l'interprète russe (chap 19). Les

élèves doivent deviner le "truc» de ce

tour de magie naturaliste. L'acteur est naturel parce qu'il joue son propre rôle: les clignements d'yeux de Kaminski, par exemple, sont "réussis» parce qu'ils sont l'effet d'une authentique nervosité. Ce choix de casting audacieux, "acteurs» non professionnels face à un petit noyau de stars, est une des prouesses du Petit

Lieutenant, non une paresse de cinéaste

dilettante. Le personnage de Kaminski existe avec force, par la vertu de longs plans fixes cadrés serrés, quand dans la vie réelle le "SDF» n'est plus qu'un sigle. ANALYSE DE SÉQUENCEChapitre 14 du découpage, de 01:06:02 à 01:10:32 Bien qu'elle n'installe pas de suspense à proprement parler, la séquence des coups de couteaux est une des plus expressives et des plus ten- dues. En comparaison de celle de l'arrestation à Nice, cette scène varie notoirement les valeurs des cadrages, moins pour insinuer un danger que pour insister sur la vision romantique, bientôt froidement séchée, qu'Antoine a de son métier. La mise en scène entre dans l'ac- tion pour reproduire la vision, inspirée des films, que le héros a de sa fonction.

Une aventure anodine

Dans les séquences qui précèdent, l'enquête s'est accélérée. Pour la première fois, deux événements sont montés en parallèle : la visite des foyers et l'arrestation d'Anton, puis son interrogatoire. On retrouve alors Louis et Antoine, caméra embarquée, embedded, à l'arrière de la voiture (1). Le plan pourrait lancer une dynamique d'action. Pour l'instant, encore privé d'aventure, le spectateur assiste au débat entre l'inertie de l'un et la curiosité de l'autre. Louis manifeste sa fatigue et son désir d'interrompre les recherches. Antoine le convainc de visi- ter un dernier foyer. Ce premier plan pourrait occasionner une cer- taine méfiance : pourquoi le film revient-il vers leur prospection, si l'action n'avance pas ? La séquence doit relancer le récit. (2) La voiture arrive de face et se gare. Les deux flics sortent, la camé- ra suit Louis disant à Antoine de le rejoindre une fois vérification faite, avec un court panoramique vers la gauche, comme si on allait le suivre au comptoir. Ce léger mouvement de caméra induit la trivialité de cette dernière petite routine. Les messages sont contradictoires : rien ici ne porte à croire que cet épisode sort de l'ordinaire. Une courte ellipse conduit au fait : au plan suivant (3a), Antoine est déjà devant l'ordinateur du réceptionniste et trouve le nom de l'homme recherché. Filmer ce qui précède aurait induit un suspense dans la séquence ; la logique est ici un paradoxe de récit sec et sans fard (on va d'un élément signifiant à un autre, sans gonflement du temps) et de mise en scène qui joue le jeu du polar. Antoine demande au réceptionniste de ne pas prévenir Pavel et part, suivi en panoramique, chercher son collègue au café (3b). Une urgen- ce s'insinue. La rupture créée par l'ellipse et la surprise de trouver le

meurtrier sur le registre, la caméra portée et l'agitation d'Antoinefont monter la cadence. On voit, à travers la porte vitrée, le petit lieu-

tenant commencer à traverser la rue. Le plan 4répond étrangement au précédent. Comme si les espaces - lieu d'enquête, lieu de repos -, les niveaux - sérieux, pas sérieux -, se confondaient soudainement, Antoine apparaît dans un champ pratiquement identique à celui qu'il vient de quitter. Posée à même distance de l'action, la caméra filme son entrée par une porte égale- ment vitrée. Perte des repères, aplatissement des régimes, ce jeu de miroir presque surnaturel trouve un écho sur le visage d'Antoine, per- plexe en l'absence de Louis, et comme désorienté par l'illusion d'op- tique. La caméra fait un panoramique vers le comptoir et le demi posé là, souverain et seul. Toujours en réponse à ce dérèglement spatial, Beauvois fait un raccord original : le sujet filmé regarde hors champ, la caméra " panote » vers l'objet en question. Puis, coupe sur le sujet de départ (5) : le person- nage est dans l'urgence, au pied du mur, comme si la mise en scène l'enjoignait à prendre une décision rapide. Notons qu'Antoine est lais- sé seul et abandonné : le café, les tables, le comptoir sont curieuse- ment vides et silencieux. L'effet sur le spectateur est concret. Contraint d'agir par la mise en scène, celle de lui-même qui le détruit, Antoine se retourne et ressort du café. D'un pas pressé il se dirige, au plan 6, de l'entrée du foyer vers l'as- censeur. Devant celui-ci, il se montre inutilement impatient, plus par envie d'y aller seul que par discrétion. L'irrationnel de son com- portement annonce le tragique à venir et incite le spectateur à une nouvelle méfiance. Celle-ci se voit confirmée par le plan suivant. En

7a, se faufilant dans le couloir, Antoine glisse, spectral, vers la chambre

443. La caméra se rapproche. Le danger est encore relativisé par les

échos de la mise en scène : la même impression avait déjà affleuré lors- qu'il avançait dans les couloirs inconnus du commissariat, vers la fête des stups (chapitre 4). Aucune verticalité, aucune hiérarchie entre les dangers, tout est aplati. L'accélération répond seulement au roman- tisme du héros.

Resserrement

Antoine arrive, hésitant, à la porte. Il tape, patiente puis retape. L'ouverture (7b) produit un nouveau plan à l'intérieur du plan. Les cadres dans le cadre sont, pour Beauvois, signe d'enfermement. Quasiment des cercueils. Au plan suivant (8), le resserrement du

cadre (dans la séquence, mais surtout à l'échelle du film) assure leléger gonflement de la tension. Antoine a un regard nouveau, comme

rendu mal à l'aise par la proximité de la caméra. En 9, Pavel fait mine de ne pas reconnaître Piotr sur la photo ; il paraît inoffensif, on est presque rassuré par sa placidité. Il y a contradiction entre cet homme qui semble prisonnier de sa chambre, acculé par les pas pressants du lieutenant vers l'intérieur et les contrechamps d'Antoine filmé serré, caméra portée. Le plan 10, en particulier, est brutal tant il fragilise la position dominante qu'a Antoine sur la scène. Cadré bizarrement, de trop près, le gros plan semble hors sujet. Il est encadré une dernière fois, en souvenir, déjà mort. En inversant l'axe des champs lorsqu'Antoine passe, en amorce, à droi- te du cadre, la mise en scène poursuit la confusion, la perte des repères du héros (11). Tout se passe vite, mécaniquement : l'homme se dirige vers une étagère, un autre contrechamp (12) montre Antoine qui attend, presque soulagé. Puis, partant d'un gros plan sur le cou- teau à cran d'arrêt activé (13), l'assassin, animé d'une terrible force, enfonce plusieurs fois l'arme dans le ventre du petit lieutenant. Au- delà de la déflagration, l'étrange ballet des deux hommes est traver- sé d'une grande tristesse. Plus que tordu de douleur, le visage d'Antoine incarne le tragique de la situation : la compréhension de ses fautes, de sa condition semble lui arriver en bloc. Un léger faux rac- cord rompt alors le spectacle pesant de sa chute. En 14, il s'effondre à demi résigné, avant d'avoir un sursaut défensif lorsque Pavel lui prend son portefeuille. Après que celui-ci est sorti du champ, Antoine tente de se redresser, mais le froid enregistrement de la caméra res- tée "debout" réduit l'espoir du spectateur de le voir revenir. Les deux plans suivants accusent la situation : Louis arrive dans le foyer (15), encadré lui aussi par les éléments du décor, puis dans le couloir (16). La logique du travelling arrière permet cette fois une découverte plus rationnelle, tournée vers l'ouverture (du champ), que le piège de l'arrivée d'Antoine. 12

Enfin de l'action

13

Ouverture

PŽdagogique 4Coupable témérité

Quel est l'enjeu de la séquence ? L'exer-

cice à proposer sera le suivant : à partir de toutes les remarques formelles tirées de l'analyse filmique, chercher à déduire son sens global. Ou pour le dire autre- ment, que semble vouloir affirmer

Beauvois, par ces choix esthétiques sin-

guliers ? On peut déjà noter que la sé- quence fonctionne en deux temps.

D'abord une accélération du rythme qui

fait attendre une épreuve, dont on espère qu'elle sera pour Antoine l'occasion de révéler enfin son héroïsme. S'il parvient

à arrêter le suspect, quel coup de

maître !, puisqu'il est seul. Dans les récits de bataille mythique, le héros est glo- rieux parce qu'il vainc en solitaire, face au nombre ou à la surpuissance. Ici, le dénouement est d'autant plus dramatique qu'il correspond à un total retournement de situation. Rien dans le montage ni la mise en scène n'a construit de suspense inquiétant ; pas de montage alterné, par exemple, insistant sur la dangerosité du Méchant, prêt à dégainer... Le fait d'arme est refusé au héros virtuel qui se méta- morphose, dans le deuxième temps de la séquence, en victime de sa propre bêtise, coupable de sa témérité.1 2 3a 3b 4a 4b 5 6 7a 7b 8 9 10 11a 11b 12 13 14 15 16

Ouverture

PŽdagogique 5Contre-exemple

La belle sobriété de cette séquence appa- raît d'autant plus nettement a posteriori, lorsqu'on connaît l'ensemble du film.

Quelle séquence constitue le pendant de

celle-ci, qui sera donc perçue relative- ment à la première ? Fin du chapitre 21,

à la réunion des A.A., Alain, toujours

aussi sombre, obtient à nouveau la paro- le. Repassons la séquence, puis discu- tons. Ce deuxième volet est-il réussi ?

Quelle différence avec le premier ?

L'attitude d'Alain, évidemment. Mais si la

première est de tonalité sombre, qu'en est-il de celle-ci ? Les élèves auront peut- être du mal à être critiques, s'ils postulent que l'auteur a toujours raison. Le pro- fesseur peut alors parler de l'écriture en trois temps de toute oeuvre de cinéma.

Première étape : le scénario. Souvent

écrit à plusieurs. Puis le tournage, qui

apporte l'infinité des détails imprévus.

Troisième phase : le montage. Beauvois

s'est peut-être demandé, avec son mon- teur, s'il fallait garder cette scène très "démonstrative », où la souffrance se verbalise en une colère excessive parce qu'injuste. Il a choisi de la garder, mais le spectateur a le droit de se poser la question.

1, 2, 3

Au début du chapitre 4, de 00:14:33 à 00:15:32 Après que quatre des hommes de la brigade, dont Antoine, ont participé à une séance d'entraînement au tir, l'intérêt se porte sur Caroline Vaudieu, assistant à une réunion qui paraît d'abord étrangère au reste du film : quelques personnes se tiennent la main en cercle et font une sorte de prière. Une autre réunion aux Alcooliques Anonymes aura lieu plus tard (chapitre 21), lorsque l'espoir aura quitté la supérieure du petit lieutenant. Ce court passage est à la fois révélateur de la morale de Beauvois et programmatique de la construction du récit : qua- siment son sommaire. Un homme tient un discours encourageant sur sa lutte contre l'alcoolisme, il dit son abstinence depuis neuf ans. Le ton est relativement gai. Pourtant, à bien l'écouter, rien de très positif n'est énoncé. L'homme exprime, en substance, son sentiment de n'avoir pas évolué depuis qu'il ne boit plus. La parole est ensuite donnée à Alain. Mutique, il est le témoin de l'inexprimable du film, de l'im- puissance face à une nature dominante et aux pulsions, alcooliques ou plus lar- gement destructrices.

IndiffŽrence

1: l'homme de droite, Jean, plutôt à l'aise, apparemment habitué, décrit ses

efforts et ses difficultés avec l'abstinence. Pendant ce temps, Alain, prostré, per- sécute un petit objet entre ses doigts. Sa présence, à gauche, ouvre le plan et le discours de Jean à une certaine trivialité. Seul dans le plan, Jean aurait paru plus seul mais aussi plus touchant. Là, il joue un jeu social.

2: contrechamp au discours de Jean, un plan de coupe sur Vaudieu crée la

césure avec le témoignage suivant. L'expression de Nathalie Baye y est quasiment neutre ; elle est pourtant traversée d'un discret pincement de bouche, et son regard s'abaisse avec une légère tristesse. Elle paraît compatissante, à l'écoute. Beauvois n'utilise pas ce plan de coupe classiquement, comme respiration, mais, là encore, pour filmer ce qui l'intéresse, c'est-à-dire l'écoutant au détriment du dit. Le contenu du monologue devient alors secondaire. À la fin du plan, la

thérapeute donne la parole à Alain.3: le plan paraît long. Alain se mure dans le silence, au bord des larmes ; fina-

lement, il fait signe qu'il n'est pas capable de parler. La stratégie de Beauvois est caractéristique : par rapport au monologue précédent, il ne change pas d'échelle de plan. Bien que le régime émotionnel soit soudainement bouleversé, la camé- ra se place à même distance des deux intervenants. Partant d'une morale, d'un détachement paradoxalement attendri, Beauvois propose un exercice de sobriété. L'usage aurait voulu que le plan du silence d'Alain fût rapproché, ou du moins filmé autrement que le précédent ; l'hom- me aurait été isolé dans le cadre, par réflexe grammatical ou pour appeler l'émotion. Beauvois condense sa mise en scène en trois plans : la mise à plat des échelles, des situations dans la construction d'un espace brut quoique poten- tiellement commun. Ce plan a un autre effet : tout comme la présence d'Alain renvoyait à la parti- tion sociale du monologue de Jean, la présence de celui-ci pendant le silence de l'autre l'isole d'autant plus. La proximité de son voisin souligne la convention sociale et accroît l'imperméabilité de sa condition. Comme un indice de plus, ces deux plans font écho au volontarisme de la première partie du film (1) et à la détresse de la deuxième (3). Ils formalisent le miroir déformant évoqué plus haut : cette indifférence est, avant tout, le point de vue morne et écrasé de

Vaudieu (2).

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