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La co-création de la valeur publique au sein des classes

6 jui. 2022 préparatoires aux grandes écoles au Maroc : un écosystème à ... organisations du secteur public les classes préparatoires aux grandes.



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    Prépas

    Les prépas aux carrières sociales.Les prépas économiques et commerciales.Les prépas littéraires.Les prépas Médecine.Les prépas paramédicales.Les prépas scientifiques.Préparer Sciences Po (IEP)Prépas Artistiques / Mise à niveau en Arts Appliqués.
  • Comment intégrer une classe préparatoire au Maroc ?

    Conditions de candidature
    Être titulaire du baccalauréat marocain de l'année en cours avec la mention « assez bien » au moins. Toutefois les candidats titulaires d'un baccalauréat des séries techniques industrielles (STE, STM) ou sciences mathématiques (SM) ne sont pas soumis à la condition de mention.
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Pierre Vermeren*

De quels ingénieurs parle-t-on?

Situation et trajectoires

des ingénieurs des grandes écoles

Le cas du Maroc

Abstract:This article is devoted to Moroccan engineers, most of whom have been trained in prestigious engineering colleges in France. They represent a minority compared to the rest of engineers who attended higher education schools in Morocco, yet their privileged positions have almost given them an aristocratic status. This is quite representative of the unequal social structure of Morocco and of the role played by its monarchic regime - the Makhzen - which tends to favor the technocratic and social elite. This study purports to show how such domi- nation of the economic and political life of the country by a few chosen persons has genera- ted a counter-reaction. Second-rate higher education establishments attended by middle class students have been an ideal breeding ground for Islamic fundamentalism. Today, they turn out a political and social elite craving for recognition and real power.

Résumé.Cet article est consacré au cas des "ingénieurs de conception" marocains, formés la

plupart du temps dans les grandes écoles françaises. Cette fraction des ingénieurs marocains (dont

la majorité est formée dans les écoles d'ingénieurs du Maroc) n'est pas loin de constituer une

véritable aristocratie de fonction. Ce phénomène illustre la structure sociale très inégalitaire du

Maroc et la stratification opérée par la monarchie (le Makhzen) pour sélectionner ses élites, qui

sont aujourd'hui des élites à la fois technocratiques et sociales. Cette domination des "technocrates"

sur l'appareil d'État marocain, analysée ici à travers des publics étudiants de grandes écoles, s'ac-

compagne de l'émergence d'une contre-élite sociale de contestation. Les écoles d'ingénieurs de

REMMM 101-102, 247-264

* Historien.

second rang, peuplées par les éléments des classes moyennes, ont été le premier terreau des mou-

vements islamistes en milieu universitaire. Elles produisent aujourd'hui une contre-élite poli- tique et sociale qui piétine aux portes du vrai pouvoir. Le cas des ingénieurs marocains illustre à quel point la condition des ingénieurs du Maghreb se révèle hétérogène 1 . Cette situation n'est pas nouvelle, puisque cela fait maintenant près de quarante ans qu'il existe au Maroc plusieurs filières concur- rentes pour la formation des ingénieurs. Toutefois, depuis le début des années 1980, l'avènement du chômage des diplômés a révélé que le "marché" de l'encadre- ment, qui était ouvert jusque-là, est devenu un champ concurrentiel. La ferme-

ture de l'État à l'ensemble des diplômés, dont il était depuis l'indépendance le prin-

cipal pourvoyeur d'emplois (225000 emplois créés de 1956 à 1965), a signifié qu'il ne suffisait plus d'être diplômé, et notamment ingénieur, pour prétendre à l'em- ploi public. Cette situation de concurrence a donné un avantage de poids aux ingé- nieurs formés dans les écoles et par les cursusles plus prestigieux, en particulier ceux qui sont issus des grandes écoles d'ingénieurs françaises. Mais avec la crise de l'État qui s'est engagée depuis l'instauration du plan d'ajustement structurel en 1983, la fonction publique menaçait d'être désertée par les ingénieurs les plus diplômés, au profit du secteur privé en plein essor dans les années 1990, ou en raison d'une fuite à l'étranger. Le palais a donc mené une politique de revalorisation de la condition des ingénieurs au sein de la haute fonc- tion publique, qui a conduit à la situation actuelle, soit la présence d'une sorte de corps d'État des ingénieurs de conception à la tête de l'administration et des grandes entreprises publiques. La technocratie marocaine était née. Cette évo- lution s'est déroulée parallèlement au déclassement des ingénieurs publics, relé- gués parmi les cadres moyens de l'administration. Cette histoire doit être lue selon nous au travers de logiques sociales qui don- nent à voir un véritable éclatement de la profession et de la condition des ingé- nieurs au Maroc. En s'intéressant ici à l'élite des ingénieurs marocains, nous comprendrons en creux la relégation subie par la majorité du corps des ingénieurs, celle-ci renvoyant à la fois à une logique de classes sociales, et à une ligne inéga- litaire de partage dans la formation des ingénieurs marocains. Nous allons d'abord évoquer la dualité qui préside la formation des ingé- nieurs marocains. Puis nous verrons que le chômage des diplômés épargne les ingénieurs issus des formations les plus prestigieuses. Enfin, nous verrons com- ment cette élite consolide son système de domination sur l'État à travers le sys- tème des grands corps d'État. La dualité au sein des formations d'ingénieurs Depuis les années 1960, la formation d'ingénieur est très recherchée par les bacheliers marocains. Il faut toutefois préciser que des années quarante jus-

248 / Pierre Vermeren

1. Ce texte reprend des éléments d'une thèse publiée, cf. P. Vermeren, 2002.

qu'aux années soixante, les bacheliers issus des milieux sociaux favorisés pré- féraient s'adonner aux sciences juridiques, voire à la médecine. Si bien qu'à cette époque, la filière de l'ingéniorat, et plus généralement des études scien- tifiques, fut une voie de promotion sociale pour des étudiants brillants issus des milieux populaires ou de la classe moyenne, notamment israélites (Abra- ham Serfaty ingénieur des Mines versusMehdi Ben Barka pour les mathé- matiques). Cette situation s'est par la suite retournée, puisque la dégradation de l'image sociale des études juridiques (qui s'est accélérée depuis les années

1980) s'est accompagnée de la remontée des études scientifiques, en particulier

des formations de haut niveau dans les grandes écoles étrangères. Cette situa- tion reste en partie vraie, même si l'on note depuis une dizaine d'années la rude concurrence des études commerciales, en particulier auprès des lycéens des lycées français (Vermeren, 2001). Le secteur de la formation des ingénieurs est aujourd'hui très disparate. Jusque vers 1980-1985, il y avait la filière des grandes écoles françaises, et celle de l'EMI (école Mohammedia des ingénieurs) à Rabat. Aujourd'hui, l'existence de nom- breuses autres écoles d'ingénieurs et des classes préparatoires nationales sont venues brouiller ce tableau. On a assisté en fait à une dualisation de ce secteur de formation. Les grandes écoles d'ingénieurs du Maroc ont un recrutement socia- lement plus sélectif que dans les années soixante, mais elles sont toujours dépas-

sées par les grandes écoles françaises, et par les cursusd'ingénieur à l'étranger d'une

manière générale (que nous n'aborderons pas ici). Nous allons successivement montrer à travers plusieurs exemples comment la pyramide des formations d'ingénieurs marocains cache de profonds clivages sociaux. Pour cela, nous allons étudier le cas de l'école Mohammedia d'ingénieurs (EMI) et de l'école nationale d'industrie minérale (ENIM), deux grandes écoles marocaines, puis le cas des classes préparatoires: celles de France (les lycées Poin- caré à Nancy et Saint-Louis à Paris) et enfin celles du Maroc (à travers l'exemple du lycée Mohammed V à Casablanca). L'étude du public étudiant de l'EMI durant les années 1960-1970 nous a amené à constater leur caractère de filière de relégation. L'EMI souffrait de la concur- rence des écoles françaises, et ce n'est qu'à partir du milieu des années soixante- dix que l'on a observé un léger frémissement social (avec un transfert des classes populaires vers les classes moyennes urbaines). La question est de savoir si, à par- tir des années 1980, l'installation de classes préparatoires nationales a réussi à redo- rer le blason de ces formations. Nous allons nous en tenir ici à l'analyse de l'évolution des publics étudiants de l'EMI au cours des années 1980, avec une incursion à l'école nationale d'in- dustrie minérale de Rabat (ENIM), qui illustre le cas des écoles de second rang nées au cours des années 1970 (1972 pour l'ENIM). À Rabat, l'EMI reste la première école d'ingénieurs du pays par son rayon- nement et sa taille jusqu'au début des années 1990 (quand l'école Hassania de Casablanca semble prendre le dessus). L'EMI a contribué à former plus de 4000 De quels ingénieurs parle-t-on ? Situation et trajectoires... / 249 ingénieurs depuis sa création 2 et s'est ouverte à la fin des années 1980 au recru- tement par les classes préparatoires, comme l'ENIM. Pour analyser le public de ces deux écoles au début de la décennie 1990, nous disposons de deux échan- tillons constitués de 68 étudiants de la promotion 1993 pour l'EMI et de 65 de la promotion 1994 pour l'ENIM. L'échantillon de 1993 de l'EMI marque une nette inflexion par rapport aux échantillons des années 1970-1980. En 1993, l'évolution observée marque la dimi- nution des classes pauvres et rurales. Les lieux de naissance sont désormais très largement urbains puisque 70 % des étudiants sont nés en ville, tandis que

92,5 % des familles y résident. La part des grandes villes est prédominante tant

pour les lieux de naissance (53 % dont 32,5 % pour Casablanca, Rabat et Fès) que pour les lieux d'habitation (64,7 % dont 45,5 % pour les trois villes). Un fait marquant reste cependant l'ampleur du recrutement des étudiants qui pro- viennent de tous les confins du Maroc. Les petites et moyennes villes du Maroc sont notoirement sur-représentées (28 % des lieux d'habitation), que ce soit du Maroc atlantique (Kénitra, Mohammedia) du Moyen-Atlas (Khénifra, Sefrou), de l'Oriental (Oujda, Nador) ou du Sud (Safi, Ouarzazate). De ce fait, la part des étudiants ruraux, que ce soit par leurs lieux de naissance ou d'habitation familiale, a chuté très fortement: 22 % des étudiants sont nés à la campagne (ou dans de petits bourgs) contre 41,6 % en 1981; 7,3 % y rési- dent habituellement (contre 19,4 % en 1981 et 38,7 % en 1970). La conquête de l'EMI par la classe moyenne urbaine est confirmée par les lycées de provenance des étudiants et par les catégories socio-professionnelles (CSP) des pères. Le tiers des élèves provient en effet d'un des huit grands lycées publics du Maroc (comme Moulay Idriss de Fès). Deux étudiants sont même passés par les éta- blissements français de la Mission (ou agence pour l'enseignement français à l'étran- ger depuis 1990). Enfin, les pères, par leurs professions, appartiennent largement à la classe moyenne marocaine (que l'on peut difficilement estimer à plus de 20 % de la population totale): c'est le cas de 55,5 % d'entre eux, tandis que les fonc- tionnaires sont majoritaires (51,8 %). Les classes supérieures sont en progression par rapport à 1981, (26 % contre

13,3 %), mais les classes moyennes sont devenues majoritaires et représentent

le centre de gravité social. À l'autre extrémité de l'échelle, les classes populaires sont minoritaires: avec 20 %, elles sont davantage issues de milieux urbains (ouvriers, petits artisans) que ruraux (5,5 % de fils de fellah). Avec près de

15 % de fils d'enseignants, 5,5 % de fils d'officiers, 11 % de professions intel-

lectuelles ou de direction, la frange des pères ayant suivi des études supérieures est loin d'être négligeable, même si l'on est loin des niveaux observés à l'AEFE. Les mères elles-mêmes ont souvent suivi une formation scolaire puisque 27 % d'entre elles occupent des emplois qualifiés (presque toujours dans la fonction publique). Pourtant, l'ascension sociale des parents s'arrête aux portes des beaux quartiers. Parmi les élèves de Rabat ou Casablanca, seuls 20 % y habitent, tan-

250 / Pierre Vermeren

2. Entrevue avec M. Bennani, Directeur de l'ENIM en 1994.

dis que la plus grande part est issue des quartiers populaires (48 %) ou de classes moyennes (32 %). En définitive, l'EMI est devenue le fief des classes moyennes. Cette situation bloque l'ascension sociale des enfants des classes populaires que l'on retrouve dans les "universités-casernes". Pourtant, il existe toute une gradation d'éta- blissements, et l'on pourrait analyser très longuement la montée relative des enfants des classes populaires au fur et à mesure que l'on descend dans la hié- rarchie des établissements. Le seul exemple de l'ENIM, qui se trouve dans le quar- tier de l'Agdal, à quelques centaines de mètres de l'EMI, suffit à le prouver. Les ruraux et CSP inférieures sont plus nombreux à l'ENIM qu'à l'EMI, les fils de fonctionnaires moins nombreux. Comme si la différence sensible de pres- tige entre les deux écoles devait permettre à l'EMI de recruter un public un peu plus favorisé et pourtant puisé à la même source des classes préparatoires. Ces formations d'ingénieurs, offertes dans les écoles nationales, ne concernent donc qu'à la marge les élites scolaires et sociales marocaines, et constituent en quelque

sorte un sas entre les filières d'élite et la Faculté. La formation des élites présente

donc une topographie complexe. Ce sont les paliers réservés aux enfants de la classe moyenne qui ont joué un rôle très important dans le mouvement islamiste étudiant des années 1980. L'as- cension stoppée de ces diplômés confrontés au blocage de l'État national est selon nous un facteur important de leur engagement islamiste militant, dans des filières où l'absence d'enseignements littéraires et de sciences humaines n'incite pas par ailleurs à la pensée critique. L'idée selon laquelle ils pourraient disposer de fonctions dirigeantes dans un système politique débarrassé des ingénieurs "bourgeois" formés à l'étranger et non arabophones, est certainement l'un des vecteurs de leur engagement politique, même si ce n'est bien sûr pas le seul. Les classes préparatoires de France sont restées en revanche le bastion des "héritiers" 3 . Concernant les "taupins" marocains, nous avons centré l'étude sur deux lycées représentatifs, le lycée Henri Poincaré de Nancy et le lycée Saint-Louis

à Paris.

Entre 1975 et 1993, 121 étudiants marocains (98 % en "taupe") sont passés par le lycée Poincaré. De 1975 à 1983, les Marocains deviennent de plus en plus nombreux dans les "math sup" du lycée pour culminer à 15. Il faut souligner qu'à partir de 1985, les bourses d'études versées par le Maroc (quand elles le sont),

non réévaluées depuis plus de 10 ans, fondent parallèlement à la dépréciation du

dirham. Seuls désormais les étudiants très aisés peuvent suivre cette scolarité. D'autre part, à partir de 1988, la suppression des bourses marocaines (liée à la création des classes préparatoires au Maroc), ainsi que les conséquences de l'ara- bisation du secondaire en 1989, expliquent le quasi-tarissement du nombre de De quels ingénieurs parle-t-on ? Situation et trajectoires... / 251

3. Le terme " héritier » emprunté à Pierre Bourdieu est ici utilisé au sens de "jeunes gens issus des caté-

gories sociales privilégiées". Distinction n'est pas faite ici entre héritiers dont l'héritage est principalement

économique et héritiers d'un capital culturel. "taupins" marocains à Poincaré (2 en "math sup" en 1993). Les dernières pro- motions sont en majorité issues des établissements français au Maroc et composées d'élèves très aisés. Pour montrer l'embourgeoisement progressif des "taupins" marocains du lycée Poincaré, nous avons coupé en deux parts à peu près égales le groupe des

121 étudiants marocains

4 : 63 pour la période 1975-1980 et 58 pour la période

1981-1993. L'évolution des lieux de naissance des étudiants tend à montrer une

poussée des élèves issus des grandes villes du Maroc. Les étudiants marocains du lycée Poincaré sont urbains, conformément à la nature du public lycéen du Maroc au milieu des années 1970. Loin de voir aug- menter le nombre des éléments ruraux, on assiste en vingt ans à leur diminution, puis à leur disparition en fin de période. Concernant leur origine scolaire, on observe une même évolution au profit des grands lycées urbains, en particulier ceux de la Mission. La part de ces derniers passe de 15,5 % pour la première période à 28,3 % pour la seconde, ce qui en dit long sur l'appartenance de plus en plus marquée de ces étudiants à une couche sociale très aisée. Le rajeunisse-

ment général des étudiants atteste d'ailleurs du fait qu'ils ont été des élèves au

parcours scolaire de plus en plus modèle (les élèves n'ayant jamais redoublé pas- sent ainsi de 38,6 % à 65 %). L'indicateur le plus significatif est en fait la catégorie socioprofessionnelle (CSP) des pères. Déjà très minoritaire durant la période 1975-1980, la part des classes populaires disparaît quasiment: elle passe de 11,1 % à 1,8 %. Plus signi- ficatif est le fait que cette régression se fait au profit des classes supérieures qui passent de 18,5 % à 40,7 %. Un grand nombre de pères sont hauts fonction- naires, ingénieurs, universitaires ou officiers. Les patronymes rencontrés parmi ces élèves ne rappellent guère ceux que l'on a observés à l'EMI. Les noms ber- bères caractéristiques sont quasi absents, au profit des patronymes fassis (Berrada, Kadiri, Benmoussa, Belghiti Alaoui, Bennani) qui composent une bonne par- tie de l'échantillon. La fonction publique et les fonctionnaires moyens (la part des enseignants passe ainsi de 16,5 % à 18,5 %) prédominent, tandis qu'un grand nombre de mères sont elles-mêmes professeurs. Les classes moyennes sont majoritaires, passant de

70 à 57 %. Mais ces classes moyennes habitent les quartiers mixtes de fonc-

tionnaires des grandes métropoles et sont suffisamment aisées pour pallier les carences des bourses marocaines. À Nancy, les fils de "bonnes familles" sont de plus en plus nombreux quand l'EMI devient l'école des classes moyennes. Pour autant, les classes préparatoires du lycée Saint-Louis présentent un profil encore plus aristocratique qu'à Poincaré, quartier Latin oblige. Par rapport à la période qui court de 1956 à 1974, nous assistons à un ren- forcement des effectifs et à la poursuite des grandes tendances sociologiques observées alors. Le public des préparationnaires marocains du lycée Saint-Louis est devenu entièrement élitiste. Pour la période 1975-1995, nous disposons

252 / Pierre Vermeren

4. Nous avons eu accès aux dossiers d'inscription des élèves dans les archives du lycée Poincaré.

d'un échantillon exhaustif de 84 étudiants marocains (dont 16,6 % de filles). Les Marocains passent de 1 élève pour la période 66-70 à 32 élèves pour les années

81-86. Toutefois, une coupure assez nette s'opère lors de la création des classes

préparatoires de coopération au Maroc, associée aux conséquences de l'arabisa- tion des classes scientifiques des lycées marocains. Ainsi pendant quatre années (de 1989 à 1992), il n'y a plus que 4 nouveaux élèves marocains. Leur nombre croît à nouveau par la suite, mais au profit des seuls élèves des lycées de l'AEFE. Bien que les archives du lycée ne fournissent que des données limitées au sujet de ces préparationnaires (profession des parents et adresse des familles), il a été possible de constituer deux échantillons significatifs pour les années 1975-

1980, et un second pour les promotions 1989-1995.

L'analyse des données recueillies à Saint-Louis donne à voir un public presque monocolore. Et les choses sont encore plus accentuées dans les années 1990. À ce stade, l'évolution entamée depuis plusieurs décennies est achevée, puisque cette filière est devenue l'apanage exclusif des héritiers. Si l'on compare en effet l'échan- tillon des 19 Marocains de la période 1975-80 avec celui des 16 étudiants des années 1990, on constate que tous les étudiants de la seconde période sont d'ori- gine urbaine 5 . Encore l'écrasante majorité provient-elle désormais de Casablanca et Rabat. Ce constat est d'ailleurs appuyé par la provenance des lycéens du second échantillon qui sortent à 94 % des lycées de l'AEFE 6 . À partir de là, l'étude des CSP paternelles montrent une quasi disparition des professions moyennes en dix ans. Dans la période 1975-1980, plus du tiers des pères relevaient encore d'une profession intermédiaire (avec près de 12 % d'enseignants). Mais dans les années 1990, 94 % des pères occupent une profession relevant des CSP supé- rieures (les entrepreneurs, patrons du commerce et de l'industrie côtoient les hauts fonctionnaires). Il n'y a plus alors qu'un seul enseignant, mais il s'agit d'une

mère qui est tutrice légale. Feuilleter le fichier de ces élèves revient à égrener la

liste du gotha marocain, et plus particulièrement fassi 7 , ce qui atteste du carac- tère purement reproductif dévolu à cette filière depuis une vingtaine d'années.

Au total, la filière des classes préparatoires françaises apparaît au cours des années

1990 comme la filière d'excellence type, et comme un haut lieu de la reproduction

des héritiers marocains. Il nous faut maintenant voir comment se présente, au Maroc, la filière des classes préparatoires de coopération mises en place avec l'objectif de se substituer aux classes préparatoires de France (et qui permettent d'ailleurs aux étudiants d'in- tégrer les écoles françaises, pour les meilleurs d'entre eux). De quels ingénieurs parle-t-on ? Situation et trajectoires... / 253

5. Pour le premier groupe, on ne trouve encore que 84,2 % d'étudiants issus de Rabat, Fès et Casablanca,

ils sont en revanche 94 % dix ans plus tard (car il y a une élève de Salé).

6. Les lycées de provenance des étudiants du premier groupe sont inconnus.

7. Sans être exhaustif, on relève parmi cette liste les noms des familles maghzen ou de commerçants fas-

sis suivants: Benabdeljlil, Laraqui, Slaoui, Guedira, Guessous, Tazi, Douiri, Chami, Balafrej, Guerraoui,

Bennani, Benjelloun, Naciri, Bennis, Lahlou, Berrada, Agoumi, Bengharbit, Kettani, Cherif Idrissi,

Alaoui, Benchekroun...

L'analyse du public étudiant du lycée Mohammed V de Casablanca, l'un des plus prestigieux lycées publics du pays, ne doit pas occulter les autres classes pré- paratoires du Maroc, comme celles de Marrakech, qui recrutent essentiellement des enfants des classes populaires, notamment rurales et montagnardes. Au lycée Mohammed V, nous avons travaillé sur les fiches d'inscription des élèves de deux promotions, celle de 1984-85 au temps où la classe préparatoire

venait d'être créée (50 élèves) et celle de 1993-94 lorsque cette "prépa" a atteint

sa vitesse de croisière (50 élèves). Cette classe préparatoire se présente d'emblée

comme accueillant des éléments majoritairement issus des milieux populaires, issus de la région casablancaise pour la plupart. Dans la première promotion, les étudiants habitant les grandes villes du Maroc sont minoritaires: 42,8 % (dont

34 % de Casablanca). La majorité des étudiants provient donc des petites villes

autour du Grand Casablanca (32,6 % pour Khouribga, Mohammedia) et des cam- pagnes de la Chaouïa (24,4 %). Ils appartiennent aux classes populaires et moyennes comme en atteste la profession de leurs pères ou leurs quartiers d'ha- bitation, pour les Casaouis; 31,8 % des pères sont ouvriers, petits paysans ou arti- sans; 54,4 % occupent des professions moyennes, dont plus du cinquième dans l'enseignement. De ce fait, les professions supérieures sont peu représentées (13,6 %). À Casablanca, ces familles habitent pour moitié dans des quartiers populaires du Grand Casablanca et des quartiers de classes moyennes du centre ville. Il semble qu'en période de lancement de ces classes préparatoires, les familles aisées n'aient pas voulu prendre le risque d'y inscrire leurs enfants, d'autant que ceux-là, au milieu des années 1980, bénéficient pleinement des classes préparatoires françaises. Il faut noter qu'aucun élève de la Mission ne fait alors partie de l'échantillon. Pourtant, avec les années et les premiers résultats de ces "prépas", il existe une inflexion assez nette dans le recrutement des classes préparatoires du lycée

Mohammed V.

Le second échantillon de 1993-94 atteste d'une très nette urbanisation des effec- tifs: 86,3 % des élèves sont maintenant issus des grandes villes du Maroc (dont

77,2 % de Casablanca). Les petites villes proches de Casablanca n'envoient plus

que 11,36 % des élèves et les campagnes à peu près aucun (1 seul élève sur 44,

2,2 %). De même, le niveau social des pères est plus élevé qu'auparavant. Les

ouvriers ne sont plus que 20 %, tandis que la part des classes moyennes passe à

62 % (même si la part des enseignants a diminué à 15 %), et les professions supé-

rieures à 17,7 %. Cette évolution est également lisible dans les quartiers d'ha- bitation des Casaouis, puisqu'ils sont largement issus des quartiers de standing moyen (52,7 %) et supérieur (10,2 %). Les quartiers populaires et de la grande périphérie sont devenus minoritaires, autour de 36 %. Les lycéens continuent de provenir en majorité des lycées publics, seul un élève provenant du groupe scolaire privé d'Anfa (mais aucun de l'AEFE même si l'on sait par ailleurs que certains élèves de la Mission fréquentent néanmoins ces classes préparatoires). Deux lectures probablement complémentaires peuvent être faites de l'évolu- tion sociale du public dans la classe préparatoire du lycée Mohammed V. La pre-

254 / Pierre Vermeren

mière consiste à penser que la "prépa" ayant fait ses preuves, les élèves des classes moyennes supérieures, et secondairement des classes supérieures, l'investissent davantage, d'autant qu'elle offre des débouchés et l'espoir de décrocher une École française. Cette évolution se fait au détriment des élèves des milieux popu- laires, et surtout ruraux. Mais on peut aussi penser que l'on voit ici un des effets de l'arabisation totale du baccalauréat scientifique marocain qui a abouti en

1989. Le passage des mathématiques enseignées en arabe au lycée à un ensei-

gnement français des sciences en "prépa" décourage les élèves des milieux popu- laires. A contrario, les élèves des classes moyennes issus eux aussi des lycées publics, et qui se voient désormais plus ou moins interdire l'accès aux classes pré- paratoires de France, se rabattent sur la filière qui leur tend les bras, ce qui a un effet d'éviction des élèves d'origine populaire. Quant aux élèves des couches les plus favorisées, ils sont là pour les mêmes raisons, même si le gros de leurs effec- tifs passés par l'AEFE continue d'aller en France, et ce d'autant plus que l'arri- vée des "Médi I" 8 dans ces lycées publics se passe souvent très mal. En conclusion, les études d'ingénieurs apparaissent aujourd'hui comme une véritable pyramide dont les étages sont occupés par différentes couches sociales. Au sommet, les études au sein des écoles d'ingénieurs françaises, qui accueillent les élèves des milieux les plus aisés. Le passage par les classes préparatoires fran- çaises agit ici comme un facteur discriminant en faveur des familles les plus dotées de capital financier et culturel. Ensuite, l'étage des classes préparatoires de la coopération est un mixte, mais il est largement dominé par la classe moyenne et diplômée, que l'on va retrouver pour partie dans les écoles françaises, mais surtout dans les plus grandes écoles marocaines (EMI). Les prépas décen- tralisées au Maroc permettent à quelques éléments des classes populaires, mais surtout aux classes moyennes, l'accès à des écoles d'ingénieurs nationales. Les étudiants de ces grandes écoles nationales sont eux-mêmes répartis selon une distribution sociale qui va de la grande école nationale (EMI), quasiment réservée aux classes moyennes, aux petites écoles de second rang (type ENIM de Rabat), où les étudiants populaires constituent une minorité d'autant plus pré- sente que l'établissement est moins coté. Pour autant, les tensions sur le marché de l'emploi des ingénieurs vont jusqu'à toucher l'EMI (qui connaît pour la pre- mière fois ce problème en 1998). Cette situation s'accompagne de surcroît de la domination sur le marché de l'emploi (public comme privé) des ingénieurs for- més à l'étranger. Mieux formés, parfois ingénieurs de conception, sortant d'écoles que les employeurs marocains considèrent comme plus performantes, les ingé- nieurs qui reviennent de France trouvent plus facilement des emplois et à un salaire plus élevé dans le privé. De quels ingénieurs parle-t-on ? Situation et trajectoires... / 255

8. Médi 1 est la chaîne de radio franco-marocaine qui émet au Maghreb depuis la fin des années 1970.

Sa musique occidentale et la dominante francophone en font un vecteur de la culture française par oppo-

sition à la très austère Radio télévision marocaine (RTM). Les "Médi I", cela pourrait donc signifier

pour la jeunesse populaire conservatrice les "Français", les "émancipés", les "occidentalisés"...

Face à la concurrence dont ils sont victimes, les étudiants des écoles d'ingénieurs du Maroc ressentent l'inégalité et le déclassement. La dualité du système traverse aussi cette formation d'ingénieur qu'ils croyaient être la plus prestigieuse. On comprend en partie pourquoi, à Rabat, c'est au sein du plus prestigieux établis- sement de l'enseignement supérieur, l'EMI, qu'a démarré la contestation isla- miste dans les années 1980. La contestation est ici menée par des étudiants issus des classes moyennes plus que populaires, et qui se trouvent bloqués dans leur ascen-

sion par les héritiers, à l'inverse de la génération précédente qui avait bénéficié de

l'ouverture d'un appareil d'État qu'il fallait construire et peupler.

L'élite des ingénieurs échappe

au chômage de masse des diplômés Le problème du chômage des diplômés se pose au Maroc depuis le début des années

1980 (1983 pour les littéraires, 1987 pour les scientifiques), période qui correspond

au désengagement et à la fermeture de l'État, jusque-là premier pourvoyeur d'em- plois pour cette catégorie de la population. Or, sous le coup du plan d'ajustement structurel (1983) et de la crise économique mondiale, le secteur privé a été incapablequotesdbs_dbs29.pdfusesText_35
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