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Belgeo

Revue belge de géographie

2 | 2022

La rose, un objet géographique Marchandisation et patrimonialisation du végétal les critères esthétiques de la création variétale de roses coupées Plant Commodification and patrimonialization: the aesthetic criteria for cut roses breeding

Mathilde

Fautras

et

Blandine

Veith

Édition

électronique

URL : https://journals.openedition.org/belgeo/54852

DOI : 10.4000/belgeo.54852

ISSN : 2294-9135

Éditeur

National Committee of Geography of Belgium, Société Royale Belge de Géographie

Référence

électronique

Mathilde Fautras et Blandine Veith, "

Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques de la création variétale de roses coupées

Belgeo

[En ligne], 2

2022, mis en ligne le 30

juin 2022, consulté le 02 juillet 2022. URL : http://journals.openedition.org/belgeo/54852 ; DOI https://doi.org/10.4000/belgeo.54852 Ce document a été généré automatiquement le 2 juillet 2022.

Belgeo

est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 4.0

International.

Marchandisation etpatrimonialisation du végétal : lescritères esthétiques de la créationvariétale de roses coupées

Plant Commodification and patrimonialization: the aesthetic criteria for cut roses breeding

Mathilde Fautras et Blandine Veith

Nous tenons à remercier toutes les personnes auprès de qui nous avons réalisé notre enquête de

terrain et qui ont accepté de répondre à nos questions. Cette recherche a bénéficié du

financement de l'Agence nationale de la recherche en France (programme RosesMonde,

2015-2019) et d'une aide financière de l'Institut français de recherche en Afrique (IFRA-Nairobi)

pour les séjours de terrain en 2009-2010 et 2017. Merci enfin aux deux évaluateur.ices anonymes

pour leurs remarques qui ont permis d'améliorer la première version de cet article.

Introduction

1 Le rapport des sociétés à la nature est une question de recherche abondammentdocumentée en sciences sociales de l'environnement (Castree, Braun, 2001 ; Fairhead,Leach, 1995 ; Robbins, 2012). La littérature a mis en évidence la prépondérance d'unrapport marchand. Au sens large, la marchandisation désigne l'application des

mécanismes du marché à la gestion de la nature - notamment avec la privatisation et la monétarisation de la biodiversité dans un contexte néolibéral (Aubertin, Vivien, 1998 ; Aubertin, Pinton & Boisvert, 2007 ; Tordjman, Boisvert, 2012). Cette marchandisation,

qui culmine avec les brevets du végétal, a généré dès les années 1970 des mouvements

de défense et de conservation de la nature, notamment dans le domaine agricole (Peschard, Randeria, 2020). Une partie de ces mouvements adopte et promeut un

rapport patrimonial au végétal, fondé sur le maintien de sa diversité, en favorisant sonMarchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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accès à tous (Via Campesina, 2007). Le concept de patrimoine, défini en tant que processus de préservation d'un objet digne d'intérêt et de valeur afin de le transmettre aux générations futures, s'est étendu à des objets de plus en plus variés : paysages, pratiques et biens immatériels (Heinich, 2009 ; Lazzarotti, 2011). Dans le domaine des jardins ornementaux, la patrimonialisation se caractérise plus spécifiquement par une critique de la réduction de la diversité et de l'esthétique des plantes disponibles sur le marché, ce qui a permis la revalorisation d'espèces botaniques

1 et de variétés anciennes

qui avaient disparu du commerce (Dubost, 1994).

2 Dans la littérature, marchandisation et patrimonialisation ont souvent été étudiées

séparément ou considérées comme contradictoires. Cependant, des études soulignent la combinaison de ces deux rapports à la nature (Calvo-Mendieta et al., 2011 ; Lavoie,

2014). En particulier, plusieurs s'accordent sur le fait que la conservation peut elle-

même créer de nouvelles opportunités de profit et d'accumulation favorables à la reproduction du mode de production capitaliste (Arsel, Büscher, 2012 ; Büscher, Dressler & Fletcher, 2014). Notre objectif est d'interroger l'intrication de ces deux logiques en tension, en s'intéressant au processus de création, peu visible et moins étudié que ceux de production ou de préservation

2. Ce processus est implicitement

arrimé à des valeurs et à un rapport symbolique au végétal, considéré comme digne

d'être transmis et diffusé. Nous nous focalisons sur une plante ornementale éphémère, en apparence peu conflictuelle et anodine - la rose destinée aux vases et bouquets - pour analyser les caractéristiques des nouvelles variétés de roses, en termes de formes des fleurs, de palette des couleurs, d'absence ou de présence du parfum.

3 La rose coupée que l'on offre, notamment à l'occasion d'événements ritualisés, est unobjet commercial éminemment esthétique aux usages codifiés. Les variations del'apparence, des goûts et les effets de mode constituent l'un des ressorts de laproduction marchande dans le système capitaliste. Ces composantes permettentd'étendre le marché en le segmentant par le jeu de la diversification des produits

destinés à la consommation de masse (Lipovetskyn, Serroy, 2013). Les logiques de création, de production, de promotion et de commercialisation sont donc étroitement

imbriquées. Pour les roses coupées, l'apparence représente l'un des éléments clés de la

création variétale, étant donné qu'elles sont achetées en premier lieu pour décorer des

espaces intérieurs. L'esthétique est définie comme une appréciation, un jugement de goût motivé par la perception, en particulier de l'apparence. Cette perception dépend du contexte culturel et social, c'est pourquoi l'esthétique est une dimension pertinente à prendre en compte pour analyser le rapport à la nature qui est sous-jacent aux processus de marchandisation et de patrimonialisation. En effet, les critères de choix, de préservation ou de promotion des variétés varient selon les lieux et les époques. Loin d'être futile, la question de l'esthétique mérite davantage d'attention en sciences sociales (Hess, 2018), en particulier dans les études sur le rapport au végétal. Dans cet

article, l'objectif est de saisir précisément comment l'évolution du rapport au végétal,

matérialisé dans l'esthétique des nouvelles roses, éclaire les dynamiques d'une filière

de production mondialisée.

4 Après avoir précisé notre démarche conceptuelle et méthodologique, il s'agit de suivre,

à travers des observations empiriques, l'évolution esthétique des variétés de roses coupées créées en Europe de l'Ouest et produites en Afrique de l'Est, en particulier au Kenya. A partir d'entretiens semi-directifs, il est possible de saisir les ressorts de la

diffusion partielle de l'esthétique des variétés pseudo-anciennes. L'entrelacement desMarchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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logiques marchandes et patrimoniales dans le processus de création éclaire alors l'amont et l'aval de la filière de production.

Analyser l'articulation entre marchandisation et

patrimonialisation du végétal ornemental Marchandisation et patrimonialisation dans le monde des roses : construction de deux idéaux types

5 La marchandisation et la patrimonialisation sont des logiques sociales en tension qui

sont apparues dans des espaces géographiques précis et à des moments variés. Elles

sont portées par des individus et des groupes sociaux en relation à l'échelle

internationale au sein d'une " chaîne de coopération » (Becker, 1988) - ici celle des roses. Pour appréhender la tension entre ces logiques sociales, notre article se focalise moins sur leur opposition que sur la façon dont les individus sont amenés à les mettre en relation - ce qui est plus rarement traité dans la littérature. Le recours au concept d'idéaux types (Weber, 1989 [1904]), issu de la sociologie qualitative allemande, permet de rendre compte avec nuance de la complexité de ces situations et de leurs évolutions. Par abstraction successive de situations sociales, la construction d'idéaux types (ou modèles caricaturaux) vise à rendre compte des transformations, voire des rapports de force entre des logiques qui semblent contradictoires. Elle permet aussi de saisir la façon dont des individus et des collectifs, dans des situations concrètes, sont amenés à combiner et concilier des éléments relevant de modèles différents.

6 En appliquant cette démarche conceptuelle au domaine des roses, nous avons élaboré

deux idéaux types de marchandisation et de patrimonialisation, à partir des situations

sociales existantes qui évoluent en parallèle ou de manière décalée dans le temps3. C'est

dans le secteur de la fleur coupée qu'une production massive s'est développée, afin de répondre à une demande croissante liée à la démocratisation de la consommation de roses pour bouquets en Europe à la fin du XX e siècle. Cette mise en marché s'est

accentuée avec l'adoption de lois sur la Propriété Intellectuelle de nouvelles variétés,

permettant la rémunération de la création variétale. Initiées aux Etats-Unis dans le cadre du Plant Patent Act en 1930, ces lois ont abouti à la mise en oeuvre de Certificats d'Obtention Végétale dans plusieurs pays européens (Veith, 2007)

4. Au-delà des

contextes spécifiques, l'idéal type de la marchandisation correspond alors à la

production massive et intensive d'une sélection drastique des meilleures variétés de roses au goût du jour, standardisées et calibrées pour répondre aux contraintes de la logistique des transports et de la commercialisation, et protégées par des titres de la

Propriété Intellectuelle.

7 La réduction de la diversité variétale disponible sur le marché, ainsi que l'évolution des

goûts, ont suscité une critique esthétique portée par des propriétaires de grands domaines. En Grande-Bretagne dès les années 1950, en Allemagne et en Belgique puis

en France, ces élites sociales ont remis à la mode les variétés anciennes disparues de la

vente. Des rosiéristes collectionneurs se sont spécialisés dans la production de ces roses oubliées (Dubost, 1994 ; Bérard, Marchenay, 2004 ; Juhé-Beaulaton et al., 2013). Des

obtenteurs (i.e. des créateurs de variétés) ont commencé à sélectionner de nouvelles

roses qui ressemblent à ces dernières, comme 'Constance Spry' créée par David Austin en Angleterre en 1960, ou encore les premières variétés de la collection Romantica

5Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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créées par la famille Meilland et introduites sur le marché français dès les années 1980.

La rose parfumée 'Yves Piaget' créée en 1981, produite pour les jardins mais aussi pour les bouquets vendus aujourd'hui en circuit court, est emblématique de cette gamme. L'idéal type de la patrimonialisation correspond à cette conservation et valorisation de la diversité des espèces botaniques, mais aussi et surtout d'un patrimoine horticole 6

ancien, en faisant la part belle à des roses oubliées et à de nouvelles variétés qui leur

ressemblent, qualifiées de " romantiques » ou " nostalgiques » et que nous appelons " pseudo-anciennes » dans cet article.

8 Ces idéaux types sont utilisés en tant qu'outil conceptuel pour analyser avec finesse le

rapport au végétal des acteurs de la chaîne des roses : il s'agit de mettre en lumière la

façon dont les situations concrètes peuvent relever à la fois de la marchandisation et de la patrimonialisation, en jouant sur les deux tableaux de manière successive ou simultanée. Historiquement, la patrimonialisation du végétal, notamment ornemental7, est d'abord apparue dans le secteur des jardins (Dubost, 1994). Nous avons cherché à comprendre comment le modèle de la patrimonialisation a influencé le secteur typiquement marchand des fleurs coupées. Cette démarche permet de rendre compte

de l'évolution de la diversité de l'offre en se focalisant sur l'évolution esthétique des

roses (1.2) dans un espace-temps précis, celui du Kenya au cours de la période

2009-2021 (cf. 1.3).

Retracer l'évolution esthétique des variétés de roses coupées

Tableau 1. Vocabulaire des roses coupées.

* Dans les faits, la distinction entre ces deux idéaux types est moins tranchée, comme le montrent les

parties 2 et 3. Source : Classication des roses en cours au Kenya en 2009

9 Les critères strictement esthétiques constituent l'un des éléments clés du processus decréation variétale, aux côtés des critères de résistance aux maladies, de robustesse de laMarchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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plante, d'abondance et de durée de la floraison, ou encore du parfum. La marchandisation et la patrimonialisation décrites ci-dessus infléchissent toutes deux les critères esthétiques contemporains, l'une par standardisation, l'autre par

diversification. En effet, l'idéal type de marchandisation se traduit sur le plan

esthétique par la mode des " hybrides de thé » (cf. Tableau 1), autrement dit des roses à

l'élégant bouton turbiné porté par une longue tige droite (cf. aussi Figure 2). Cette esthétique, devenue standard, prédomine des années 1945 à 1960 en Europe. La palette des teintes est restreinte aux couleurs basiques et souvent vives (rouge grenat, rouge vermillon, orange, jaune citron, rose, blanc). Ces couleurs sont d'ailleurs accentuées par la mise en scène des roses dans les catalogues, souvent présentées sur un fond bleu contrasté 8.

Figure 1. Diversité des formes de roses.

Source : SNHF, 1929

10 A rebours de cette uniformisation de l'apparence des roses, la patrimonialisation

amène à rechercher des formes plus proches des roses anciennes. Cela se traduit par une esthétique spécifique de fleurs aux coloris moins francs, perçus comme moins criards, plus raffinés et distinctifs. L'esthétique typique de la patrimonialisation se caractérise aussi par des branches de petites roses (sprayroses), et par des plantes aux tiges plus souples, aux formes variées (et non plus seulement des formes hybrides de thé). Concrètement, ces roses peuvent être globuleuses, en coupe, plates, imbriquées ou

à quartiers, et présentent un nombre élevé de pétales (cf. Figure 1). Fondé sur les

esthétiques typiques de la marchandisation et de la patrimonialisation, le tableau 2 liste les variables que nous avons retenues pour évaluer l'évolution de l'apparence des nouvelles roses créées et introduites dans le secteur de la fleur coupée au Kenya, cas

d'étude présenté dans la section suivante.Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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Tableau 2. Critères retenus pour évaluer l'évolution de l'esthétique des roses vers lapatrimonialisation.

* Nous n'avons pas retenu la forme " réflexe » présente sur la gure 1, car elle correspond à la forme

épanouie des premières hybrides de thé créées.

Source : autrices

Cas d'étude, données et méthodes

11 Pour appréhender cette évolution esthétique, notre étude se fonde sur le cas du Kenya,

l'un des principaux bassins de production de roses coupées dans le monde. Si la production était déjà standardisée en Europe au milieu du XX e siècle, elle est devenue particulièrement massive et intensive sous l'effet de sa délocalisation dans les zones

équatoriales d'altitude et de l'essor des brevets du végétal. A la fin des années 1970, des

rosiéristes hollandais, allemands mais aussi français et espagnols se sont installés près

de Nairobi, du Mont Kenya et sur les rives de grands lacs est-africains tels Naivasha9, où était disponible une importante main-d'oeuvre féminine, éduquée, aux salaires faibles comparés à ceux des ouvriers agricoles européens. Un climat tempéré en altitude et une durée constante de la journée tout au long de l'année permettent de produire des roses à moindre coût et à contre-saison en hiver, dans des serres non chauffées. La rose coupée est la fleur la plus vendue sur le marché européen, dont le Kenya reste le principal fournisseur

10 en tant que leader africain (Brun, Mary, 2003, p. 220). De

nombreuses études sur ce système localisé de production portent l'attention sur son insertion dans la chaîne globale des roses (Hughes, 2000 ; Riisgaard, 2009 ; Calas, 2013 ; Styles, 2019), les conséquences de la production floricole sur l'écosystème local (Harper

et al., 2011), son écologie politique (Fautras et al., 2013 ; Rouillé et al., 2015), ou encore les

conditions de travail des employées (Opondo, 2005 ; Tallontire et al., 2005 ; Kuiper,Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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2019). En complément de ces travaux, notre recherche documente les logiques et choixdes obtenteurs européens, de leurs agents commerciaux et des producteurs floricolespour introduire de nouvelles variétés dans la région. Le tableau 3 détaille les méthodes

utilisées et les données produites.

Tableau 3. Données produites et analysées.

*Il s'agit de catalogues obtenus lors de nos visites de foires floricoles au Kenya, et de catalogues disponibles en ligne. L'émergence des variétés pseudo-anciennes dans le secteur de la rose coupée au Kenya

12 Comment le mouvement de la patrimonialisation, impulsé au départ dans le monde des

jardins européens, se diffuse-t-il dans le secteur des roses coupées dont la production a

été délocalisée, entre autres au Kenya à partir de la fin des années 1970 ? A travers

l'analyse des catalogues des obtenteurs et des roses mises en avant dans les vitrines

floricoles, il est possible de retracer l'apparition diffuse de l'esthétique de la

patrimonialisation dans ce pays dès la fin des années 2000 et surtout durant la décennie suivante. L'évolution des variétés dans les catalogues d'obtenteurs européens de 2009 à 2021

13 Les catalogues d'obtenteurs diffèrent d'un pays à l'autre. Pour saisir la spécificité

kenyane, il est utile de voir au préalable les tendances observées en Europe où sont

situés les sièges des entreprises de création variétale. La proportion des variétésMarchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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pseudo-anciennes créées a sensiblement augmenté sur ce continent entre les années2000 et aujourd'hui11. À partir des critères listés dans le tableau 2, on remarque en effet

un nombre croissant de variétés à l'esthétique patrimoniale dans les catalogues

d'obtenteurs. Cette évolution est perceptible jusque chez des créateurs qui n'ont pas été

particulièrement moteurs du retour aux roses pseudo-anciennes. En 2009-2010, la

palette des couleurs était déjà relativement large par rapport à celles typiques des roses

du milieu du XX e siècle, et elle a continué à s'étendre par la suite. Par exemple, l'obtenteur français NIRP a considérablement élargi son nuancier de teintes, même s'il ne proposait au Kenya qu'une seule rose de forme ancienne, aux pétales verts, dans son catalogue de 2008-2009. Dans celui de 2017, on trouvait trois hybrides de thé au bouton rond qui s'ouvrait en quartiers, et quatre sprayroses, i.e. des roses avec des formes anciennes. Cet obtenteur est celui qui a joué la carte du plus large panel de couleurs jusqu'à aujourd'hui. En 2017, cette diversification s'était accrue avec l'introduction,

dans différents catalogues, de variétés aux pétales vert pâle et orange saumoné (ex :

deux variétés de la rubrique Country Spirit, catalogue de Tantau, 2017).

14 Autre élément notable en Europe : les critères esthétiques de la patrimonialisation sont

apparus initialement dans les gammes de sprayroses, et ce chez tous les obtenteurs dont nous avons étudié les catalogues. Et c'est encore parmi les variétés de ces branches de petites roses, qui ont toujours été un créneau haut de gamme, que l'on trouve le plus de roses patrimoniales. Mais la diversification des formes se diffuse désormais aux roses

de moyennes gammes. Une hypothèse est que l'aspect distinctif, intrinsèque à

l'émergence de la patrimonialisation, tend à s'estomper avec la diffusion de ces variétés

qui se démocratisent. Par ailleurs, dès 2009, on trouvait quelques rares gammes de roses parfumées chez certains obtenteurs. C'était le cas en particulier chez NIRP alors même que c'est l'un des obtenteurs les moins marqués par la patrimonialisation. Ainsi, que ce soit au niveau des couleurs, des formes ou du parfum, les critères de la patrimonialisation sont davantage présents dans les catalogues de la fin des années

2010 et des années 2020, que dans ceux de 2009-2010 et a fortiori dans ceux des

décennies précédentes.

15 Retrouve-t-on ces tendances au Kenya ? En 2009-2010, en dépit de leur nombrecroissant, les variétés pseudo-anciennes sont moins proposées dans les cataloguesdestinés aux producteurs africains. La majorité des variétés qui sont proposées auxfloriculteurs kenyans reste plutôt typique de la mode du milieu du XXe siècle, sur le

modèle des hybrides de thé (HT). Néanmoins, il semble que les variétés pseudo- anciennes tendent à influencer, par petites touches, l'esthétique de ces dernières. Le bouton effilé, élégant et torsadé typique des années 1950-1970

12 est désormais souvent

plus charnu en raison du plus grand nombre de pétales, et plus rond. La frontière esthétique entre les roses caractéristiques de la marchandisation et de la patrimonialisation est moins nette que l'on pouvait s'y attendre, et elle tend à s'estomper au fil du temps. Les HT ne sont plus aussi typiques qu'auparavant, ce qui s'explique sans doute en partie par les croisements génétiques successifs de divers

types de variétés. De nombreuses variétés des catalogues allient des critères des deux

idéaux types qui nous intéressent, à l'image des deux variétés orange saumoné de Tantau citées ci-dessus, au gros bouton mais à la forme légèrement imbriquée (catalogue de 2017). Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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Figure 2. Des hybrides de thé (HT) représentées à plusieurs stades de floraison.

Source : Meilland, 1969, p. 32

16 De plus, dans les catalogues récents, les hybrides de thé et les roses en général sont plus

souvent présentées la fleur épanouie, ou à plusieurs stades de floraison, et non plus seulement au stade du bouton turbiné comme c'était la mode après-guerre (cf. fleur de gauche sur la Figure 2). Par exemple, dans les catalogues de l'Allemand Kordes et du Français NIRP, les roses proposées au Kenya en 2008-2009 sont présentées aux trois stades classiques (bouton et deux stades d'épanouissement floral). Terra Nigra

présentait quant à lui ses variétés au stade de bouton et au stade épanoui. La même

année, le Hollandais Olij en revanche ne présentait ses roses qu'au stade

d'épanouissement. Dans le catalogue de Tantau en 2017, on retrouve également ce mode de présentation à trois stades pour la plupart des HT, mais pas systématiquement pour les variétés pseudo-anciennes. Chez cet obtenteur, ces dernières sont exposées dans les catalogues en bouquet, selon une présentation moins technique et plus romantique. Les roses sont rassemblées dans un bouquet de fleurs qui semblent

fraîchement cueillies au jardin, et sont associées à des feuillages et des fruits telles des

mûres vertes (cf. Fig. 3). Un souci de présentation - ou de distinction - de ces variétés

pseudo-anciennes se dégage des bouquets ronds aux tiges coupées court (par ex. de la série piano) - alors même que le catalogue mentionne des tiges de 60 à 80 cm de haut. Ce décalage entre la caractéristique technique (tige longue) et la mise en scène (tige courte) interroge et pourrait peut-être signaler une manière de cibler différents marchés

13, cependant nous manquons d'éléments pour l'affirmer.

Marchandisation et patrimonialisation du végétal : les critères esthétiques d...

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Figure 3. Présentation de variétés pseudo-anciennes en bouquet.

Source : Catalogue de Tantau 2017, pp. 42-49

17 Ces changements de forme des HT et de présentation des fleurs interpellent : on

pourrait y voir une tendance patrimoniale fondée sur une mise en scène plus romantique des roses au bouton épanoui. Les trois stades constituent en effet la présentation classique dans les catalogues de collections de roses anciennes.

Néanmoins, ce résultat ne peut être interprété avec certitude : l'analyse des catalogues

présente ici la limite que chaque obtenteur a sans doute une manière singulière de présenter ses créations, et que la direction artistique de ces documents promotionnels a pu évoluer au fil du temps.

18 Par ailleurs, un résultat significatif issu de l'analyse des catalogues tient au décalage

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