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Continuitédes rites : le nombril deségliseset le placenta des hommes en Polynésie orientale par

Bruno SAURA

RÉSUMÉ

Le rituel chrétien de pose de la première pierre d'une église ou d'un temple revêtenPolynésie orientale une importance symbolique particulière.Ilrépond enéchoà deux traditions autochtones de fondation : l'enterre- tion de son cordon ombilical. Cette mise en perspective n'est pas simplement le fait de l'observateur extérieur. Il existe en effet, pour ceux qui les vivent, des correspon- quen- ces indépendantes, ils s'influencent réciproquement, se répondant tant dans leur logique que par la nature des objets qu'ils engagent en commun. tion, première pierre.ABSTRACT The Christian ritual constisting in laying the founda- tion stone of a temple or a church bears in Eastern Polynesia a deep symbolic signification. As a matter of fact,itechosbacktwoautochtoneoustraditions offoun- dation still ver yobserv ed, the burial of theinfant's placenta, and the conservation of its umbilical cord. These correspondances are not only a really for the analyst : as will be shown in this article, the rituals do interfere mutually, both in their logic and through the objects involved in its accomplishment. K???????: ritual, placenta, umbilical cord, founda- tion rites, foundation stone.Ilestunrituelchrétien,sanslienapparentavec les traditions polynésiennes, qui faitàTahiti l'objet d'un investissement social important : celui de la pose de la première pierre d'uneéglise ou d'un temple.Àcette occasion, chaquefidèle apporte un petit objet personnel qui sera enfermédans un bocal, lui-même scellédans les fondations de l'édifice. Après avoir décrit ce rituel, nous chercheronsàexpliquer son impor- tance symbolique et les raisons du succèsdesa perpétuation en faisant observer qu'il répond en échoàdeux autres rites de fondation, eux d'ori- ginepolynésienne :ceuxliésàl'enterrementouà la conservation du placenta d'un nouveau-néainsi que ceux relatifsàson cordon ombilical. On s'apercevra que cette mise en parallèle n'est pas simplement le fait de l'observateur qui ana- vivent, correspondance et interrelation¢même ces rituels. Bien qu'appartenantàdes séquences indépendantes (d'un côté, naissance d'une per- sonne ; d el'autre, construction d'une maison collective), ils se répondent en effet, tant dans leur logique que par la nature même des objets

qu'ils engagent en commun.* Universitéde la Polynésie Française, B.P. 6570 Faaa Aéroport. Tahiti. Polynésie française. email : brunosaura@yahoo.fr

La pose de la pierre d ef ondation(niu)

Nous commencerons par reconstituer le rituel

de pose de la première pierre (diteniu)àla fois sur la base d'observations de terrain etàl'aide des comptes rendus rédigés e n tahitien etpubliés dans les chroniques de la Mission protestante locale dans les années 1940-1950 (journalVe'a porotetani : L e lienprotestant) 1

Cette tradition concerne toutes lesÉglises

chrétiennes de Polynésie française. Toutefois, la religion protestanteétant la plus ancienne et la plus répandue dans l'ensemble culturel tahitien (îles-du-Vent,îles-sous-le-Vent et lesîles Austra- les), nous nous intéresserons tout particu- lièrementàl'Église protestante locale. Nous préciseronségalement que le rituel de la pose d'unniucomprenant un bocal n'existe pas dans la construction des maisons privées de type non religieux.

Chez les protestants, l apremière pierre peut

être soit celle d'un temple (far epurera'amaison de prière ouhiero, terme plusérudit, du grec hieros) soit celle d'une maison de réunion (fare putuputura'a)oud'une maison paroissiale (fare cultuelles ainsi que des activités religieuses plus ordinaires (répétitions de chants, etc.). Plusieurs termes sont utilisés d emanière assez interchangeabl e pourdésigner cette première pierre. Ils appartiennent au vocabulaire tahitien truction desmaraeou temples traditionnels. Les missionnaires ayant traduit la Bible en tahitien au début du???

ème

siècle ont choisi d'en conser- ve r certains pourrendr e l anotionde'pierre angulaire'ou de'pierre d'angle'(parfois,'tête de l'angle') quifigure dans l'Ancien Testament (Esaie 28 : 1 6 ; Psaumes 118 : 22) et leNouveau Testament (I Pierre 2 : 4-6 ; Ephésiens 2 : 19-22, etc.) 2 Cette pierre est dite en tahitien'o¯fa'i-tihi¢ pierre (de) fondation¢et, moins souvent,'o¯fa'i- poro¢pierre (d') angle¢; O npar le ausside 'o¯fa'i-niu 3

¢pierred'ancrage,pierrepivot,pierre

de fondement¢, l etermeniu(base/ancrage),àla fois nom et verbe,étant lui aussi souvent employéen lieu et place de'o¯fa'i-tihi. est tantôt intitulédans les journaux protestants Niuraa'ofai-tihi'ancrag e (de la)pierre-angu-laire/defondement',tantôtHaamauraaite'ofai- tihi'installation/fixation/scellement de la pierre- angulaire/de fondement'(voirVe'a porotetani, juin-juillet 1949 : 5). ambigu car il peut serviràdésigner soit une partie de l'édifice plus large que la première pierre propr ement ditesoit,àl'inverse, l eseul contenu d e celle-ci, et non lapierr e e ntantque contenant.

Au sens premier, extensif,nius'appliqueà

l'ensemble de la fondation du bâtiment, comme l'atteste ce récit de la construction du temple protestant de Rangiroa, en 1949 :"Les fonda- tions¢te niu¢du templeétaient déjàachevées [lorsque] la pose de la pierre d'angle¢ofai tihi¢ eut lieu le 14 mai. Les travaux se sont déroulés ainsi : les fondations ont débutéle 4 mai [...] et

49 pieds et 6inchesde long, pour 28 pieds de

large»(Ve'a porotetani,juin-juillet 1949 : 6). nel signifiant base, socle (ave c unedimension toutefois plusétendue ou horizontale pour le termepapa, tandis queniu, qui signifieégale- vertical, uneélévation).

On comprend donc que l'emploi du termeniu

ple relève de la métonymie puisqu'il désigne aussi l'ensemble de la fondation de l'édifice. Il est par conséquent toutàfait possible que la première posée lors de la construction de la dalle ou de ses murs de soutènement. Confirma- tion en est donnéeàtravers le récit de la pose de la première pierre du temple de Pu¯aoaà Huahine, toujours en 1949. Lors de la cérémo- nie,"... les mursétaient déjàhauts ; mais on distinguait bien la cavitéservantàrecevoir le bocal¢mohina¢dans le mur , ducôtéintérieur» (Ve'a porotetani, juin-juillet 1949 : 5). Cette exactement une pierre, mais plutôt une cache, une sorte de coffre ou coffrage en ciment et en pierre, bien qu'elle soit aussi appelée dans d'autres textes'ofai-tihi(première pierre) ou 'ofai-niu(pierre-fondation). Quantàla cérémo-

1. La pluralitédes graphies de la langue tahitienne explique que selon les sources citées,unmême terme puisseêtreécrit de

différentes manières, s'agissant surtout de la notation de la glottale et de la longueur des voyelles.

2. Même s'ils sont très attachésàla perpétuation de ce rite, les dirigeants de l'Église protestante tahitienne rappellent dans le

manuel officiel de liturgie de l'E.E.P.F. (1991 : 216) qu'il"n'est pas d'autre fondation (niu)nécessaireàl'homme (de

bâtir/d'ancrer) que celle déjàexistante qu'est le Christ».

3.Ve'a porotetani(décembre 1949, p. 3),àpropos de la maison de réunion paroissiale Siona-Tap u dePape'ete.

40SOCIÉTÉDES OCÉANISTES

nie deniura'a'ofai-tihi(ancrag e d elapremière pierre), elle consiste davantage iciàdonner un contenuàcette pierre qu'àla poser.

Il arrive fréquemment en effet, dans les con-

versations tahitiennes, que le termeniusoit uti- lisépour désigner le bocal placédans la cavité d'un temple, e t nonl'ensemble de la fondation. que sorte, comme le noyau/coeur/pivot/fonde- ment (niu) symbolique du plus grandniuqu'est la dalle de fondation (niuoupapa)del'édifice.

Les objets transmis

Outre un bocal en verre d'assez grande taille

¢en général, au moins 40 centimètres de hau- teur¢, l a cache ditepremière pierre contient toujours une Bible (en langue tahitienne) et par- fois d'autres objets trop volumineux pourêtre introduitsdanslebocal 4 .Àl'intérieurdecelui-ci sont placés des pièces de monnaie et des petits colliers ou bijoux, parfois en or, offerts par les paroissiens ;certainsfidèlesnousontrelatéavoir déposédans le bocal de leur temple un petit message pour leurs descendants et les membres de la communautéqui le liraient un jour, ou encore, une petite pirogue miniature qu'ils avaient fabriquée, etc. mentionnant officiellement la date de la pose du niu, le nom du responsabl e destrav aux decons- truction (souventàla tête d'un groupe defidèles bénévoles), le nom du pasteur, des diacres et des membres des autorités,feia mana'gens (de) pou- voir',présentsàla cérémonie. Ce texte est la plupart du temps enroulécomme un parchemin, un double enétant conservéau siège de la Mis- sion protestante (devenu e en1963ÉgliseÉvan- gélique de Polynésie française)àPape'ete. Par- fois, c'est sur une feuille de métal que sont inscrits ces noms. L'utilisation d'un bocal en verre, hermétiquement fermépour que son contenu soitàl'abri des agr essions dutemps (moisissure, etc.), et le fait que la plupart des objets rassemblés soient en matériaux durables, témoignent de l'importance accordéeàla trans- mission sur une longue duréedeceprécieux legs qu'est leniu 5

D'une manière plus théorique, l ar aisonde

dations d'unédifice religieux n'est pas sans nous rappeler quelques pages classiques de l'Essai surle sacrificede Marcel Mauss, dont Rogu Dragan (1999 : 49) a récemment soulignéles limites s'agissant précisément de rendre compte du choix de cet objet qu'est la monnaie : Mauss posait que l'enterrement d'une victime dans les fondations d'unédifice pouvait serviràla fabri- cation d'un esprit gardien du lieu, ou bienàse tant qui auraitété"lésépar les travaux»(1969,

III : 271). Ces explications laissent notamment

de côtéles cas oùle sacrifice n'est qu'un"simu- ment de pièces de monnaie dans une fondation : "Le point capital de la théorie de Maussétait qu'au cours du sacrifice, l'objet sacrifiéest détruit, celaétant le seul moye n del'intégrer au vie. Mais on ne détruit pas la monnaie, ou l'encens, o u le rouleaua v ec le nomdufondateur, comme dans les pratiques récentes de fondation. On les protège même, laissant une cachette pré- vueàce but dans les fondations de l'édifice» (1999 : 53). Pour Radu Dragan, l'explication est ailleurs :danslavaleursoitdirecte(intrinsèque), soit indirecte (simplement symbolique) de la monnaie."Ce qui est [...] intéressant est le fait que l'on n'incorpore pas aux fondations des piè- ces de grande valeur, tout comme les pièces don- nées au mort : car la monnaie se symbolise elle- même [...]. La monnaie, dénominateur universel le rite n'est qu'une fausse monnaie, comme pen- sait Mauss, i lser ait pluse xact dedir e quela monnaie est un moye nappropriépour tout rite, et surtout pour le sacrifice»(1999 : 53-54,

60-61).

pluralitédeniu. Il resteànous intéresser au choix du lieu de le temple. En Polynésie orientale, l'emplacement exact de la'première-pierre'varie souvent. Bien qu'elle soit dite pierre angulaire, elle ne se trouve pas nécessairement dans un des angles de l'édi- fice mais parfois près d e l aported'entrée;ou bien sous l'abri de la cloche (fare oe)¢qui n'est guère, chez les protestants, situéetrès haut, et toujours prèsdel'entrée du temple¢; ou encore sous la chaire d u pasteur(purupiti), elle-même situéeàl'avant du temple, tantôt sur le côté,

4. Voirparexemple,pourlaposeduniudutempleTaremadeMaevaàHuahinelesamedi16mars1991,LadépêchedeTahiti

(22 mars 1991 : 40).

5. Quantàla Bible, elle est par essence ensemble de"paroles solides»(parau pa'ari), c'est-à-dire, de traditions, et"parole

chrétienne.CONTINUITÉDES RITES EN POLYNÉSIE ORIENTALE 41
tantôt a u milieu de celui-cifaceàla porte d'entrée. Plusieurs informateurs s'accordent pour dire que la première pierre doit surtout se Dans le cas d'unédifice démoli et reconstruit, ce qui est fréquent quand on sait le goût des Polynésiens pour la construction des bâtiments religieux, il se peut que le temple ait plusieurs 'o¯fai-tihi(pierres angulaires) et/ou plusieursniu (noyaux) 6

Ainsi, un compte rendu de 1947évoque-t-il le

haamauraa toru i te of ai-tihi ot efare-pureraa

Salema i Vaitoare, soit la"troisième pose/

fixation de la pierre d efonda tion dutemple SalemàVaito'are»dans l'île de Taha'a, en ces termes :"[Lepasteur]Tuturifituneprière,après quoi, l'ancienne construction fut dégagée/ découverte, e t(l'on vit qu') i l yav aitdeuxofai- tihi(pierres de fondation), celle du premier tem- ple et celle du second temple. Ce fut l'Adminis- trateur d'État qui retira les deux bocaux contenus dans chaque pierre d efondation» (Ve'a porotetani,décembre 1947 : 5).

Dans le cas oùil y aurait plusieursniu(pierres

tant soitàles inclure séparément dans la nou- velle cache, soitàouvrir les bocaux etàplacer leur contenu dans un troisième. Sans anticiper sur les fonctions duniu, on peut d'ores et déjà faire remarquer qu'en cas de démolition d'un temple, i l estnécessaire d efair eappelàla mémoire collective, e n particulier au seindes familles de pasteurs et de diacres, pour retrouver le ou lesniuafin d e n e pasles endommagerlors des travaux.

Le cérémonial de la pose duniu.

La cérémonie de pose duniuproprement dite

voit une alternance de prières , de chants etde teuretdesdiacres,separtagentlestâches :prière d'ouverture ; sermon sur la base d'un verset biblique ; lecture du texte manuscrit qui sera glissédans leniu; scellement de celui-ci, suivi d'une nouvelle prière. nom (i'oa) est donnéàce bâtiment (topa

'tombé';ma'iri'glissé, passé') par l'un des offi-ciants ; autrement, il reprend le nom de l'édifice

préexistant. Le nom d'un temple ou d'une mai- lieu biblique tahitianisé(par exemple, Siona, prononcéTiona, pour le mont Sion ; Betela, prononcéPetera, pour Béthel, etc.), mais il peut s'agir d'un nom dotéd'une symbolique plus large : Te Hoa Tum u(L'Ami Véritable), ou Pou Ata (Pilier des nuages) pour certains desédifices ci-dessus mentionnés 7 Pour en reveniràl'ambiguïtéde l'utilisation des termes souvent interchangeablesniuet'o¯fai- tihidésignant tantôt les fondations entières ,tan- tôt l a cachea britant le bocal,tantôt l ebocal forte dimension symbolique ou de la grande valeur d'abstraction de ces termes.Niune dési- gne pas simplement les'racines'd'unédifice reli- gieux. Il est aussi l'ancien nom du cocotierà Tahiti et aux Tuamotu ; e tl'on sait que, dans ces

îles, comme le précise Stimson et Marshall

(1964) dans leur dictionnaire des dialectes des

Tuamotu,"des poteaux en tronc de cocotier

sont fréquemment utilisés dans les fondations des maisons» 8 .Niupeut encore s'appliquerà divers objets, désigner le sillage d'un bateau, un guerriercourageux,etc.(voirDavies1851 :155).

Dans tous les cas, une idée domine, celle de

profondeur ou de soliditéd'une entreprise, d'un édifice ou bien d'un homme, pilier d'une armée, par exemple.

La polysémie du termeniu(fondement/

ancrage) estégalement, pour partie, l aconsé- quence de l'acculturation religieuse et matérielle de la Polynésie qui, on va le voir, a entraînéun changement dans la nature des objets placés dans leniuou constituant leniu. Malgrétout, nous soulignerons surtout les similitudes exis- tant entre l e moded'apparition et, pourrait-on dire, le processus d'engendrement desmarae tion symbolisée par leniudans le cas de la reconstruction desédifices chrétiens d'au- jourd'hui.

L'engendrement des temples

S'agissant de la nature des objets placés dans

leniu, notons que la circulation régulière de

6. Pa rexemple , l etemple protestant Tir oamadeMata'uraàTupua'i (Tubuai,îles Australes), dont la construction aurait

commencéau débu t desannées 1950, fut inauguréen 1958, restauréen 1985, puis entièrement démoli en 1995 et inauguréà

nouveau en 1998. (D'après Teri'inuipe'etauta¯ne'ehu Teinauri et Thomas Hauata, entretien en juillet 1997).

7. Te Hoa tumu pour lefare putuputura'a(maison de réunion) du'amuira'a(section de la paroisse) Siona-Tap u dePape'ete

(voirVe'a porotetani,décembre 1949, p. 3) ; Pou Ata pour le temple¢qui ne serafinalement jamais inauguré¢de Pu¯aoaà

Huahine (voirVe'a porotetani, juin-juillet 1949 : 5).

8. Stimson (1964 : 332) :"The coconut log i sfrequentl y usedf o r ahousef ounda tioninpr esent-dayOceania».Lemême

auteur indique l'existence d'un terme désuet, Niuta¯kohua, nom d'un cocotier de la légende de Ma¯ui et Atarana, et s'appliquant

peut-être aussi au cocotier censése trouver au centre d umonde .Ici,niusignifie doncàla fois cocotier et pilier de fondation.

42SOCIÉTÉDES OCÉANISTES

orientaleàlafin?????

ème

siècle.Quantaupremier il est celui de Papeto'aiàMo'orea, dont les ment hexagonal, inauguréen 1827, est d'ailleurs le plus vieux monument chrétien en pierre de tout le Pacifique. Toutefois, tout prêteàpenser qu'il a fallu attendre plusieurs décennies plus tard pour qu'un bocal soit systématiquement inclus dans les fondements d'unédifice religieux chrétien. sie orientale, l apierr eangulair e oupremière pierreétait véritablement une pierre e t nonune cache creuse. Le pasteur Grégoire Tumarae, dit qu'àVaiuru, dans l'île de Ra'ivavae (Australes), lefar eparoita('maison paroissiale'), comprenait deuxniu, deux pierres non creusées : une pierre carrée,'o¯fa'ima'atea, spongieuse comme du corail, et une pierre ronde, d e couleurrouge foncé,'o¯fa'i'ute'ute.L'une paraissait provenir d'une construction plus ancienne¢dont on ignore l anatur e,chrétienne ou non¢, e ttoutes les deuxétaient placées près d e l aported'entrée de Mahanatoa avait pourniuune seule pierre rouge, mais pas non plus de bocal.

Continuitédes traditions

L'idéed'introduire dans les fondations d'un

temple un bocal contenant des reliques corres- pondàune pratique chrétienne assez récente (environ cent cinquante ans) en Polynésie orien- tale, mais plus ancienne dans l'Occident chré- tien. En revanche, l'importance accordéeàla pose de la première pierre d'unédifice religieux révèle une préoccupation conjointe des deux ensembles culturels.

Ainsi, dans le Tahiti des temps anciens, la

pierre l a plus importanted'unmaraeétait son ha'ai, dalle de corail ou pierre basaltique corres- pondantàla branche aînéed'une famille ou chefferie. C'est assis sur cette pierre o uadossé

contreellequesiégeaitsonreprésentanttitulaire.Évoquant le premiermaraesupposéavoirété

de Ra'iatea, la dernière reine de Tahiti, Marau Ta'aroa (1971 : 51-52) précise que ceha'aiétait aussi entouré,àdroite etàgauche, d equatre pierres, ditesterahu.

Si leha'aiformait la pierre centrale dumarae,

il semble qu'il n'enétait pas d'ordinaire l apre- mière pierre, comme le suggère la suite du texte, relative au fameuxmaraeFarepu'a d eV aiari(à Tahiti) :"D'après l atr adition,après avoir créé Hiti nui¢Tahiti¢,Ta'aroa posa son pied sur un bloc de corail blancàVaiari. [...] De ce bloc de corail blanc fut détachée l apierr e qui servitde fondation au temple de Far epua ; ainsi quele papa,ousiège roya l d ec e temple ,quifutappelé

Te papa o te toa o Taaroa,lesiège de corail de

Taaroa»(1971 : 52). Ici, lepapa(socle) s'identi- fie donc auha'ai.

Dans sa narration desétapes de la construc-

tion d'unmaraenational (1962 : 139), Teuira

Henry nomme'ofa'i-faoa

9 (pierre principale de fondation) la première pierre dumarae,préci- sant que celle-ciétait de grande taille."[...] Une autre pierre appeléeti'a-va(debout-dominant) était placée dans le coin opposéet ces deux pier- resétaient appeléestihi-marae(cornes du marae)'» 10 .Établissant elle aussi le parallèle entre les traditions judéo-chrétiennes et celle de

Tahiti, Teuira Henry ne manque pas d'ajouter

que ces pierres avaient"la même signification que les cornes des Temples juifs»(ibid.).

C'est toujours par"clonage»qu'apparais-

saient de nouveauxmarae, dont la construction s'organisait autour d'une pierre retiréed'un ve r que ce soitleha'ai(siège central) qu'emporte le fondateur d'un nouvelédifice, comme leha'ai de Vaea¯ra'iàRa'iatea qui devint la première pierre d uprestigieuxmaraeVai'otahaàBora

Bora (voir Cadousteau 1987 : 8). Mais, logique-

ment, la fondation d'unmaraeétant le fait d'une branche cadette qui s'émancipait de sonmarae familial (en en créant un autre), leha'aidemeu- raitlesiègedesaînésetdoncdumaraed'origine ; et ce sont d'autres pierres, angulaires ou non, de cemarae, quiétaient prélevées pour servir de commencementàun nouveaumarae 11 . Quant

9. Plus loin (1962 : 205), elle nomme la cérémonie de pose de cette pierreFaora'a. Les consonnes h e tfétantéquivalentes en

tahitien, il faut lireHaora'apour la cérémonie etHaoapour le nom de la pierre d efonda tion.V oir aussiDa vies (1851 :97-98).

10. On retrouve ici la base du terme'o¯fa'i-tihidésignant aujourd'hui la pierre angulaire.

11. Puis, les nouveauxmaraedevenaientàleur tour desmaraed'origine de nouvelles lignées, e t ainsi desuite .Même si

logiquement, tous lesmaraedevraientêtre issus d'un mêmemaraefondateur que certaines traditions présentent comme

Vaea¯ra'i, il reste qu'àl'échelle de chaqueîle, unmaraeétaitégalement reconnu commemaraecentral,maraed'origine ou de

souche, dit'ere'ere fenua(socle sombre) oupu¯-marae:marae - noya u(pu¯désignant une origine, u ncentr e ; onretrouver acette

racinedansletermepu¯fenuadésignantleplacenta).Pourl'îledeHuahine,ÉmileHiro(1997 :30)évoqueainsilemaraeMata'irea

chefferieétait-elle considérée comme"première»de l'île : ainsi, selon le même auteur,'Öpoaétait lepu¯mata'eina'a(chefferieCONTINUITÉDES RITES EN POLYNÉSIE ORIENTALE

43
au termeniuproprement dit, Teuira Henry (1962, p. 140) le traduit par''fondation''et explique qu'il correspondait non pasàla pre- mière pierre maisàla première rangée d epierres (premierétage) dumarae,c'est-à-dire,àson socle.

Contrairementàla situation contemporaine,

seulsédifices religieux. Tout d'abord, il faut se garder de percevoir lemaraecomme unédifice tien. Il existait en effet de nombreuses sortes de marae, ce terme s'appliquantàtout espace, en généra l unestructur e lithique sur laquellese déroulaient des cérémonies, qu'elles soient agri- coles, familiales, guerrières , etc.P ar ailleurs,les résidences royales (ou de chefferie), lesquelles étaient entourées d'habitations de gens de moin- dre rang disposantégalement demarae, e tainsi de suite. S i bienqu'il s'avère parfois difficile de desmaraeplacésàproximitéimmédiate, comme l'ont bien montréles fouilles de Pierre Vérin (Australes). Il est possible d'émettre l'hypothèse que, jadis, en Polynésie orientale, l'ensemble des habita- tions d'importance auraientétépourvues d'une première pierre, un noya uou'coeur'(pu¯), que seuls lesédifices religieux auraient conservé 12 ontétéédifiés, au???quotesdbs_dbs50.pdfusesText_50
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