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UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE-PARIS3

École doctorale120-Littératurefrançaise et comparée

THÈSE DE DOCTORAT

Discipline:Langue, littérature et civilisation françaises

Françoise SIMILLE

LA NOTION DE PASSAGE DANS L'UVRE DE

PHILIPPE JACCOTTET

Thèsedirigée parM. Michel COLLOT

soutenue le 2 décembre 2010 Jury:

M. Bruno BLANCKEMAN

M. Michel COLLOT

M. Jean-Michel MAULPOIX

M. Patrick NÉE

2

À mes petits enfants, Anatole, Alice et...

"Jene peints pas l'estre, je peints le passage»

Montaigne,Essais, III, 2

"Croire aux mots comme souliers, non comme épingles de fixation.»

Pierre-Albert Jourdan,Fragments(1961-1976)

3

Remerciements

J'exprime ici toute ma reconnaissance à Michel Collot qui a accepté de diriger cette étude et m'a accordé le temps nécessaire pour qu'elle soit menée jusqu'à son terme. Sa vigilance soutenue, discrètemais efficace, m'a été l'encouragement dont j'avais besoin et qui a fait de ce plaisir de retraite un tacite engagement à son égard autant qu'envers moi-même. Ses cours et séminaires, donnant visages à la poésie actuelle, ont, pendant ces années, maintenuvif l'intérêt que je portais à ce travail et constamment enrichi mes perspectives de lectrice. Je remercie affectueusement Bernadette et Monique, amies fidèles, et mes enfants, Laurence et Jérôme, pour des relectures qui leur ont pris un temps précieux, et surtout mon mari qui, outre son indispensable aide en informatique, m'a apporté, avec une inlassable patience, un soutien sans réserves. 4

TABLE DES MATIERES

Éditions desuvres de Philippe Jaccottet données en référence6

INTRODUCTION7

PREMIERE PARTIE-Une thématique du passage15

1L'opposition entre passage et obstacle16

L'attrait pour les passages libres16

La joie des passages libres16

les raisons de cet attrait21

Ouvertures et obstacles au passage48

transparence etouverture48 opacité et fermeture53 l'angoisse de l'obstacle et de l'enfermement57 Le fantasme de la traversée ou de l'abolition magique de l'obstacle66 la traversée de l'obstacle66 l'abolition magique de l'obstacle69

2La dialectique de l'obstacle et du passage: la nécessité de la limite74

La limite, abri contre l'illimité74

le désarroi face à l'illimité74 la limite heureuse78

La limite, ouverture au passage87

la limite, forme et sens87 la limite,jalon et mesure de la distance92 la limite médiatrice de l'illimité98

3La dialectique de l'obstacle et du passage: le seuil103

De l'autre côté du seuil?103

le désir de passage103 le caractère sacré de la limite, l'interditet la transgression109 le recul, ses raisons111 le charme de l'entraperçu et de l'invisible deviné115 "Sur le seuil»121 l'un et l'autre, les deux côtésà la fois121 ni l'un nil'autre, l'entre-deux comme suspens127 le seuil genèse133 la sublimation verticale, la métamorphose interstitielle140

DEUXIEME PARTIE-Une poétique du passage146

1Le passage, l'échange entre le monde, le moi et l'autre148

La rencontre du monde148

La nature de la rencontre148

L'échange entre le moi etle monde152

Une esthétique de la transparence161

Le poète héraut du monde161

La transmission du moi à l'autre167

Une éthique de la transparence174

Les obstacles subis176

Les obstacles liés à l'image de soi182

Les obstacles liés à la subjectivité du regard190 Les obstacles liés à la volonté de contrôle193 5

2Un monde ouvertet sans barrières200

Un monde ouvert, de traversée de la limite201

les trouées spatiales201 les trouées temporelles205 Un monde de liens, de passage d'un élément à l'autre211 la poésie comme saisie de rapports211 un monde d'unité harmonieuse217

La métaphore-passage227

Une conception renouvelée de la métaphore227

L'unité des éléments du monde231

Le passage continuentre les éléments du monde237

La métamorphose du monde242

TROISIEME PARTIE-Une ontologie du passage253

1Un au-delà de ce monde?255

Les fleurs ne sont pas que belles: "Une lumière philosophique»255

L'ouverture sur un sens255

Un passage au-delà262

Un fondement religieux?266

Un mysticisme?277

Un spiritualisme?284

Un idéalisme poétique?289

2L'au-delà dans l'ici297

"Ici, ici, ici!»297 "L'Autre dans le Même »297

La présence303

Le sacré312

"L'autre état»318

L'"éveil» et laplénitude318

Le fugitif dépassement de la finitude325

La barque, l'obole et le passeur332

Parole poétiqueet passage346

Le même passage ouvert par l'art346

"N'étais-je pas entré, cette nuit-là, à l'intérieur d'un poème?»355

3Le passage inachevé366

La "mystérieuse barricade»366

L'incomplétude de la révélation366

La limite infranchissable (l'échec de la poursuite)371 La limite à ne pas franchir: "Maintenant, je prends le parti de l'impossible»385

Une écriture du seuil390

Le passage est dans le passage410

4Le leurre du passage?415

Le douteet la réaffirmation415

"un monde de fumées»415 "Et, néanmoins...»423 Une éthique de la fidélité et de la mesure: "Il faut rester ouvert à l'obscurité impénétrable»429

CONCLUSION443

BIBLIOGRAPHIE450

INDEX499

6 Éditions desuvres de Philippe Jaccottet données en référence À la lumière d'hiver, précédé deLeçonset deChants d'en bas, Gallimard, 1977, 104p. À partir du mot Russie, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2002, 63p. À travers un verger, suivi de LesCormoranset deBeauregard, Gallimard, 1984, 112p.

Airs, poèmes 1961-1964, Gallimard, 1967, 94p.

Après beaucoup d'années, Gallimard, 1994, 105p. Beauregard:inÀ Travers un verger, suivi de LesCormoranset deBeauregard, Gallimard, 1984, 112p.
Le Bol du pèlerin (Morandi), Genève, La Dogana, "Images", 2001, 93p.

Cahier de verdure, Gallimard, 1990, 85p.

Carnets 1995-1998 (La Semaison, III), Gallimard, 2001, 153p.

Chants d'en bas:inÀ la lumière d'hiver, précédé deLeçonset deChants d'en bas, Gallimard,1977,

104p.
Les Cormorans:inÀ Travers un verger, suivi deLes Cormoranset deBeauregard, Gallimard, 1984, 112p.
Correspondance avec Gustave Roud:titre abrégé de JACCOTTET Philippe, ROUD Gustave, Correspondance 1942-1976, Gallimard, "Les cahiers de lanrf", 2002, 559p. Cristal et fumée, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 1993, 85p. Des Histoires de passage, prose 1948-1978, Lausanne, Editions du Verseau, Roth et Sauter, 1983, 184p.
Écrits pour papier journal, chroniques 1951-1970, Gallimard, "Les Cahiers de la nrf", 1994, 300p. L'Effraie:inPoésie 1946-1967, Gallimard, "Poésie", 1971, 192p.

Éléments d'un songe, Gallimard, 1961, 192p.

L'Entretien des Muses, chroniques de poésie, Gallimard, 1968, 315p. Et, néanmoins, proses et poésies, Gallimard, 2001, 96p. Gustave Roud, Pierre Seghers, "Poètes d'aujourd'hui", 1968, 192-[8]p. L'Ignorant:inPoésie 1946-1967, Gallimard, "Poésie", 1971, 192p. Israël, cahier bleu, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2004, 85p.

Leçons:inÀ la lumière d'hiver, précédé deLeçonset deChants d'en bas, Gallimard, 1977,104p.

Libretto, Genève, La Dogana, 1990, 79p.

Notes du ravin, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2001, 64p. Nuages, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2002, 31p.

L'Obscurité, récit, Gallimard, 1961, 173p.

Observations et autres notes anciennes, 1947-1962, Gallimard, 1998, 136p. Paysages avec figures absentes, Gallimard, 1976, 189p. Pensées sous les nuages, poèmes, Gallimard, 1983, 80p. Poésie 1946-1967, Gallimard, "Poésie", 1971, 192p. La Promenade sous les arbres, Lausanne, La Bibliothèque des arts, 1988, 153p. Requiem (1946), suivi deRemarques (1990), Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 1991, 51p. Rilke par lui-même, Seuil, "Écrivains de toujours", 1970, 192p., ill. La Seconde semaison, carnets 1980-1994,Gallimard, 1996, 235p. La Semaison, carnets 1954-1979, Gallimard, 1984, 283p. Tout n'est pas dit. Billets pour la Béroche 1956-1964, Cognac, Le Temps qu'il fait, 1994, 141p. Truinas, le 21 avril 2001, Genève, La Dogana, "Poésie", 2004, 56 p. Unetransaction secrète, lectures de poésie, Gallimard, 1987, 345p. 7

INTRODUCTION

Philippe Jaccottet a intitulé l'un de ses billets pour laFeuille d'avis de la Béroche puis l'ensemble de ceux qu'il a réunis en un volume:Tout n'est pas dit1. Il fautbien cet implicite encouragement pour s'autoriser à proposer une nouvelle étude sur une uvre qui a d'ores et déjà, et du vivant de son auteur, suscité tant de pages et d'ouvrages remarquables, du précoce chapitre de Jean-Pierre RicharddansOnze études sur la poésie moderne2,au récent ouvrage de Patrick Née:Philippe Jaccottet. Àla lumière d'ici3,parcours marqué, entre autres, de ces deux grands amers que sont Philippe Jaccottet. L'évidence du simple et l'éclat de l'obscur, deJean-Claude Mathieu4etPhilippe Jaccottet.Trajectoires etconstellations:lieux, livres, paysages, d'AlineBergé5. Mais prendre la notion de passage pour clé de lecture decetteuvre- ce qui répond à une immédiate et bien ancienne intuition de lectrice-n'est-ce pasune approche qui reçoit même, en quelque sorte, la caution du poète, lui qui, non sans quelque ironie complice,ouvrele texte deBeauregard6sur ces mots:"Encore une histoire de passage...»?Et, parce que, dans sonuvre comme "le long de la rivière», "tout est passage»7en effet, la même expression se retrouve, sous la forme plurielle: Des Histoires de passage8, commetitre d'un ouvrage, publié en 1983, dans lequel Jaccottet a réuni des extraits de ses divers carnets, deLa Promenade sous les arbres, Élémentsd'un songe,L'Obscurité,Paysages avec figures absentesetCristal et fumée9. Rien n'y figure, en revanche, ni deBeauregardprécisément, ni d'À travers un verger, textes antérieurs pourtant, et des plus chargés de sens quant à cette notion,trop peut-

1Tout n'est pas dit. Billets pour la Béroche 1956-1964, Cognac, Le Temps qu'il fait, 1994, 141 p.

2Jean-Pierre Richard, "Philippe Jaccottet», inOnze études sur la poésie moderne, Seuil, "Pierres vives",

1964, 303p., pp.257-276.

3Patrick Née,PhilippeJaccottet. À la lumière d'ici,Hermann, "Savoirs, Lettres", 2008, 420 p.

4Jean-Claude Mathieu,Philippe Jaccottet. L'évidence du simple et l'éclat de l'obscur, José Corti, "Les

essais", 2003, 552 p.La référence à cet ouvragesera ensuite abrégée en: "Jean-Claude Mathieu,Philippe

Jaccottet".

5Aline Bergé,Philippe Jaccottet.Trajectoires etconstellations:lieux, livres, paysages, Lausanne,

Payot, "Études et documents littéraires", 2004, 473p.

6À travers un vergersuivi deLes Cormoranset deBeauregard, Gallimard, 1984, 112p.Ici,Beauregard,

p.68.Les références àLes Cormoranset àBeauregardrenverront toujours à cette édition sans que soit

mentionné son titre principalÀtravers un verger.

7LaSemaison,carnets 1954-1979, Gallimard, 1984, 283 p.Ici, pp.33-34.

8Des Histoires de passage, prose 1948-1978, Lausanne, Editions du Verseau, Roth et Sauter, 1983,

184p.Ouvrage cité ensuite sous le titreabrégé deDes Histoires de passage.

9La Promenade sous les arbres,Lausanne, La Bibliothèque des arts, 1988, 153p.

Éléments d'un songe, Gallimard, 1961, 192 p.

L'Obscurité, récit, Gallimard, 1961, 175 p.

Paysages avec figures absentes,nouvelle éd. revue et augmentée, Gallimard, 1976, 189 p. Cristal et fumée,Saint-Clément-de-Rivière,Fata Morgana, 1993, 85p. 8 être...10Du moins l'ouvrage, guide sur le chemin à suivre, met-il pleinement en lumière l'importance de la notion de passage dans l'uvre de Jaccottet et la pleine conscience qu'en a le poète.Ne précise-t-il pas encore,quelquevingt ans plus tard, dans Truinasque, si, lors des obsèques de du Bouchet, lui viennent à la pensée des vers de Mnémosyne11, c'est "pource thème du passage qui [l]'aura accompagné toute [s]a vie»12?Or, sur cette notionconstamment présenteaux détours ou au cur desuvres de Jaccottet,beaucoup a été dit, certes, mais plutôt, quelle qu'en soit la pertinence et la richesse, en remarques éparses ou analyses partielles, sans doncqu'elle soitabordéede front, placéeau centre de la réflexion. Même le beau livre de Judith Chavanne,Philippe Jaccottet. Une poétique de l'ouverture13, que, par la proximité des sujets, ces pages croisent souvent, s'oriente plutôt vers une pensée de l'ouvert, alors que la notion de passage, plus dynamique, plus transitive, porte à une réflexion sur le moment etla nature de l'ouverture comme événement. On voudraitdonc ici proposer une synthèse, aussi exhaustive que possible, qui cerne la richesse tout à la fois multiformeet très cohérente d'une notion porteuse, pour Jaccottet, de l'essence même de la poésie. Jaccottet "ne cesse de revenir [aux] paysages», à ceux, par prédilection-mais non exclusivement-qui ont fait de lui "l'habitant de Grignan». Le passage en est toujours la traversée. Il l'est d'abord, selon le premier sens du mot "pas», comme marche à travers ces lieux dont les noms émaillent les notes descarnets oules proses poétiques telleLa Promenade sous les arbresdont le titre emblématique vaudrait pour d'autres recueils:Paysagesavec figures absentes, aussi bien, est "un recueil, au fond, de promenades dans les paysages qui entourent ce pays où nous sommes»14. Le mouvement de "Bois et blés» y mène, en effet, d'un bosquet d'yeuses à la combe dorée où mûrissent les épis;et, sur le plateau de Saint-Blaise, "marcherau milieu de chardons aux vieilles dorures, dans le bruit des cigales,aveuglé par le miroitement des

étangs, » entraîne le suspens émerveillé de cette phrase infinitive15;"Hameau», dans

Après beaucoup d'années, textetout entier consacré à une mystérieuse réflexion sur le

passage, est initié par le souvenir, revenu dans la nuit "avec une intensitépareille à

10Ce n'est d'ailleurs pas la seule surprise qu'y réservent leschoix de Jaccottet; est retenue, par exemple,

cette note intégrale deLa Semaison: "Le souci d'être rigoureusement véridique se heurte à beaucoup

d'obstacles. Dont le moindre n'est pas le refus, ou le scrupule d'ajouter au désespoir qui gagne les esprits.

Alors que, peut-être, ce que j'appelle ma vérité n'est qu'une erreur, une insuffisance de profondeur ou de

passion.»(DesHistoires de passage, p.175 etLa Semaison, p.241); mais ne le sont ni l'une ni l'autre

de celles qui l'encadrent, dont voici pourtant les premières lignes: "Relecture, sans doute trop rapide, de

divers poèmes. Combien peu me semblent aujourd'hui nécessaires, combien peu ouvrent ou entrouvrent

la porte de l'autre monde présent peut-être dans celui-ci», et: "Je reviens à la pensée des "deux nuits",

celle qui est transparente, vaste, magique, et l'autre, la prison dont on ne sort pas»... Philippe Jaccottet, Gallimard,"Bibliothèque de la Pléiade",1989, XXVI, 1267p., pp. 879-880.

12Truinas, le 21 avril 2001,Genève, La Dogana, "Poésie", 2004, 56 p. Ici, p.30.Le titre de cet ouvrage

sera ensuite abrégé en:Truinas.

13Judith Chavanne,Philippe Jaccottet. Une poétique de l'ouverture, Seli Arslan, 2003, 253 p.

14"Interview avec Philippe Jaccottet», propos recueillis par Mel B. Yoken,The French Review,

Champaign, Illinois, vol. LIX, n° 4, mars 1986, pp. 596-599.15Paysages avec figures absentes,p.135.

9 celle que produit la fièvre, d'autres images de promenade»16;les dernières pages d'Observations et autres notes anciennes, déjà, s'intitulent "En chemin»17... J'ai pu seulement marcher et marcher encore, me souvenir, entrevoir, oublier, insister, redécouvrir, me perdre. Je ne me suis pas penché sur le sol comme l'entomologiste ou le géologue:je n'ai fait quepasser, accueillir, écrit Jaccottet dans les pages qui ouvrentPaysagesavec figures absentes;puis, après une réflexion, menéetrop loin peut-être:"Autant se remettre en chemin...», conclut-il. Ainsi la poésie est-elle d'emblée liée au passage, même dans son acception la plus simple, la plus concrète, ainsila rencontre du paysage est-elle bien le lieu privilégié de l'expérience poétique.Voilà qui implique qu'elle ne puisse être narcissiquement penchée sur son image, dans une immobile contemplation d'elle-même;elle n'existe que dans la relation qu'elle tisse, en tant que logos, entre un ego et le cosmos. Une phrasedeEt,néanmoins,dans la première des pages dédiées "aux liserons des champs»,phrase en demi-teintes parce que Jaccottet y craint le piétinement, met cette triade en lumière sous l'égide du passage: Encore des fleurs, encore despaset des phrases autour defleurs, et qui plus est, toujours à peu près les mêmespas, les mêmes phrases?18 Une telle conception rapproche Jaccottet de poètes, un temps réunis autour de la revueL'Ephémère, qui, tels Yves Bonnefoyet André du Bouchet, notamment, ont, par leur désir de renouer avec le monde sensible, rendu au lyrisme ses lettres denoblesse,

un lyrisme refondé, lucide, étayé sur l'analyse réflexive, un "lyrisme critique», selon le

concept de Jean-Michel Maulpoix19. Elle inscrit par ailleurs cette étude dans le sillage de la pensée de Michel Collot20pour qui la question du sujet et du référent ne peut être exclue du champ du littéraire en général et de la poésie en particulier. Pour dégager la problématique du passage dans l'uvre de Jaccottet, un regard sur le champ sémantique du mot n'est peut-être pas inutile. Le passage, il va sans dire, n'est pas l'apanage du seul marcheur:tout trajet d'un point à un autrede l'espace est passage, et ces mouvements qui animent le paysage sont toujours source de joie pour Jaccottet. C'est ainsi qu'il se donne pour modèle "lepassage irrésistible des oiseaux»21, compare le cours des eaux au "passage

16Après beaucoup d'années,Gallimard, 1994, 105p.Ici, p.55.

17Observations et autres notesanciennes, 1947-1962, Gallimard, 1998, 136p. Ici, p.127.

18Et,néanmoins, proses et poésies,Gallimard, 2001,96p. Ici, p.71.

19Jean-MichelMaulpoix,Pour un lyrisme critique, José corti,"En lisant, en écrivant", 2009, 256p.

Cf. également,D'un lyrisme critique, textes rassemblés par Jean-Michel Maulpoix,Le Nouveau Recueil,

n° 52, sept-nov. 1999,pp.37-146.

20Cf., notamment:

Michel Collot,L'Horizonfabuleux.II, XXème siècle/ 1 ill. de Nicolas de Staël, José Corti, 1988, 224p.

Michel Collot,La Poésie moderne et la structure d'horizon, PUF, "Écriture", 1989, 264p. Michel Collot,La Matière-émotion, PUF, "Écriture", 1997,341p.

21Poésie 1946-1967,préf. de Jean Starobinski,Gallimard,"Poésie",1971,192p. Ici,L'Ignorant, p.89.

Les références àL'Ignorantrenverront toujours à cette édition sans que soit mentionné le titrePoésie

1946-1967.

10 précipité d'un troupeautranshumant»22ouperçoit "le cielcomme une paroi de verre vibrant à peine au passage de l'air rafraîchi»23. Le terme désigne aussi, par conséquence, le lieu où l'on passe, que l'on traverse, le chemin qui permet l'avancée;et Jaccottet se réjouit, là encore, qu'" il y [ait] des passages dans les prés...»24. Mais pourquoi se demander, juste à la suite d'une telle notation, si l'on n'est pas "tout à fait écervelé»?Et qu'en est-il de violettes "frayeuses de chemins»25?Quant à ce titre:A travers un verger, ne pourrait-il laisser surpris un lecteur qui, dès les premières lignes du texte, apprend que le poète n'est que "passédevant» ce lieu?La poésie, assurément, ouvre dans le monde d'autres passages que ceux tracés ou suivis par nos pas. Que les fleurs "fraient » des chemins, quelle qu'en soit la nature, suppose une difficulté à écarter, un obstacle à surmonter. Et en effet, historiquement, le terme passage a d'abord signifiédéfilé,col, acception que le motpasa tardivement reprise et gardée en toponymie.Jaccottet, dansAprès beaucoup d'années, précise, par exemple, que le col de Larche est aussi appelé "pas de la Madeleine». Le passage est en ce cas la brèche, la trouée qui dans une ligne de crête fait communiquer les deux versants;il est

le lieu qui sépare et réunit unen deçàet un au-delà. Or c'est l'image d'un col dans un

tourbillon de neige que la floraison des amandiers fait se lever dans la pensée du poète, prêt à "franchirle verger comme un réfugié la frontière qui le sauve». Comme lepas de la porte, le passage devient alorsseuil,non plus chemin droit ouvert devant lespas, mais limite transversale, que l'on peut, certes, franchir, mais à condition que la porte

soit ouverte, qu'on en ait les clés, ou, puisque le territoire de l'autre côté de la frontière

est "l'étranger», qu'on soit en possession d'unpasseport, d'unlaissez-passerou d'un mot de passe. Pour passer la frontière, le col abrupt ou la rivière dangereuse, un guide

même est parfois nécessaire au voyageur inexpérimenté;celui à qui la poésie ouvre ses

voies sera lepasseurde ceux qui les cherchent. Parce qu'unpasest encore un degré, une marche d'escalier, le passage peut désigner un changement de niveau:unrite de passageimplique le franchissement d'unpalier;le mouvement n'est plus alors avancée horizontale, mais progression verticale. Passer poétiquement "à travers un verger», ne serait-ce donc pas tout à la fois franchir un seuil et s'élever dans un autre espace? Le passage peut être enfin non plus changement de lieu, mais d'état ou de forme:on

passe de la tristesse à la joie, et l'on parlera du passage d'un corps liquide àl'état solide

ou gazeux. C'est là une acception privilégiée de Jaccottet, lui qui cherche à"concevoir plus clairement [...] le passage du printemps à l'été dans le jardin»26,qui aime le crépuscule parce qu'il s'y sent"à un moment de passage »27,lui encore qui voit la montagne se transformer de roche en buée. Mais plutôt que celui depassage, Jaccottet en ces cas emploie souvent le terme demétamorphose, qui suggère-se ferait-elle dans la douceur d'une continuité-une trans-formation plus profonde.Or, pour Jaccottet, la

22"Au col de Larche»,Après beaucoup d'années, p.87.

23Cahier de verdure, Gallimard, 1990, 85p.Ici, "Le cerisier», p.12.

24"La rivière échappée»,La Promenade sous les arbres, p.89.

25"Violettes»,Et, néanmoins, p.23.

26La Semaison, p.49.

27"Lecerisier»,Cahier de verdure, p.15.

11 poésie métamorphose le monde:quelque chose alors "se passe», par quoi la poésie est de l'ordrede l'événement ou plutôt, puisqu'elle est éclosion, de l'avènement. Toutes ces nuances sur lesquelles joue le poète s'articulent en une très cohérente conception du monde et de la poésie qu'il conviendra d'analyser;elles ont en commun d'inscrire le passage, au propre ou au figuré, dans une dimension spatiale conforme aux sens qu'en latin classique a le verbepandere28:de même racine sanscrite (*pet-)que

paterequidésigne un état, il signifie "étendre», "déployer», "ouvrir en écartant» et

même"découvrir», "dévoiler»;c'est ainsi qu'Epicure "a surévélertoute la nature des choses», dit Lucrèce dans leDe Rerum natura(V, 54). Le lien ainsi établi entre passage et ouverture, voire connaissance et révélation se retrouvera à l'horizon constant de la pensée de Jaccottet. En revanche, dès son apparition, le verbepassera vu son sens spatial se doubler d'une valeur temporelle qu'il semble plus difficile de retrouver sous la plume de Jaccottet. Alors que la fugacité des choses, des êtres le hante incessamment, profondément, des euphémismes, périphrases ou métaphores écartent de l'expression d'une telle angoisse le lexique du passage ou bien celui-ci allège sa menace par une valeur spatiale préservée:les expressions "en passant», "au passage» ne mènent pas seulement au "trépas», mot, semble-t-il, ignoré de Jaccottet;si les motstempsoumort fraient avec celui depassage,c'est que le pouvoir-magique?-de celui-ci aura neutralisé, voire résorbé ce que ceux-là pouvaient avoir de maléfique. La notion de passage a donc chez Jaccottet une connotation heureuse. Et la poésie lui est fête où se révèle la "vraie vie». Quelquefois je me vois pareil, dans mon incertitude, [...] à ces oiseaux qui, moitié

obéissant au vent, moitié jouant aveclui, offrent à la vue une aile tantôt noire comme la

nuit, tantôt miroitante et renvoyant on ne sait quelle lumière.29 Le passage est l'aile lumineuse de l'uvre de Jaccottet;il en est, pour reprendre une comparaison particulièrement bien venue deJean-ClaudeMathieu, l'adret, qui toutefois

ne va pas sans ubac. L'accès à la lumière, toujours menacé par la finitude inhérenteà la

condition humaine, l'est aussi, désormais, par ce qui résulte d'une évolution historique. Si la neutralité suisse a protégé Jaccottet d'une confrontation directe avec la seconde guerre mondiale, c'est-il faut le rappeler-d'"une violente réaction d'horreur et de révolte» à la vue de photographies montrant "des cadavres de jeunes otages ou de jeunes maquisards du Vercors torturés puis abattus par les Allemands» qu'est né, "en

1945 ou 1946»30, le long poème deRequiem. Et, des décennies plus tard, dansIsraël,

cahier bleu,Jaccottet constate que " laguerren'a jamais cessé de se rallumer ici oulà sur le globe»et que nous sommes "à un moment de l'histoire où il y a plus de plaies ouvertes que de fil pour lesrecoudre»31. L'expansion et la violence de "ce mal

28Rappelons que le lexique du passage en français est issu du second supin de ce verbepando,is,ere,

pandi,pansumoupassum.

29"Eclaircies»,Paysages avec figures absentes, pp.181-182.

30Requiem (1946)suivi deRemarques (1990), Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 1991,51p.Ici,

pp.35 et 36.31Israël, cahier bleu, Saint-Clément-de-Rivière, Fata Morgana, 2004,85p.Ici, p.51.

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