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21 Annales des Sciences de la Santé, ISSN: 2421-8936

Données épidémiologiques sur le cancer dans le monde et au Maroc

Revue bibliographique

Abdellatif MAAMRI

Institut Supérieur des Professions Infirmières et Techniques de santé, Oujda, Email. abdellatifm@hotmail.com

Résumé

Toute politique de prévention ne peut être mise en place sans des études épidémiologiques et des analyses statistiques très poussées. Sans surveillance épidémiologique, il est impossible de mettre en place un plan national ou même régional de lutte contre les cancers adaptés à notre région. Ce travail empli de statistiques, de constats et de recommandations organisationnelles s"inscrit donc dans cette optique. Il a pour objet de décrire une pathologie cancéreuse à incidence en augmentation constante et qui devient un grave problème de santé publique. C"est l"une des préoccupations de la population, des professionnels et des décideurs à l"échelle locale, régional, national et du globe. Ainsi, dans cette revue bibliographique, nous nous sommes penchés particulièrement sur certains thèmes, entre autres, l"épidémiologie du cancer et les principaux facteurs de risque ou déterminants de cette pathologie. Ainsi, cette étude épidémiologique montre que les cancers ne sont plus aujourd"hui des maladies de sociétés riches puisque déjà 50 % des cancers surviennent dans les pays en développement (OMS, 2005). D"après le même rapport de l"OMS, en 2020, 75 % des morts du cancer surviendront dans les pays qui, à eux tous, ne représentent pas 5% du PIB mondial. L"Afrique à elle seule a totalisé, en 2002, 582 000 personnes atteintes de cancer et 412 300 décès durant la même période (OMS, 2005).

Introduction Le cancer est un enjeu de santé publique à l"échelle planétaire. Il touche toutes les catégories de la population mondiale quels que soient leurs âges, leurs sexes ou encore leurs niveaux socioéconomiques. En 2000, 5,3 millions d"hommes et 4,7 millions de femmes à travers le monde ont développé un cancer et 6,2 millions d"êtres humains en sont morts soit 12% de la population mondiale (CIRC, 2003). Dans les pays industrialisés, ce pourcentage dépasse les 25% (CIRC, 2003). La fréquence de ces

cancers pourrait encore augmenter de 50 % dans les vingt prochaines années, avec 20 millions de nouveaux cas par an en 2020 et 10 millions de morts compte-tenu des tendances actuelles de la prévalence du tabagisme et de l"adoption de modes de vie malsains (INCa 2009). Selon le rapport du CIRC (2005), l"Europe totalisait 2,9 millions de nouveaux cas de cancer et plus de 1,7 millions de décès par cancer en 2004 (dont respectivement 2 millions et 1,2 million dans les

25 États membres de l"Union Européenne). En

Europe, les hommes représentaient 54 % de ces

nouveaux cas (1 534 700) et 56 % des décès (962 600). En France par exemple, la fréquence du cancer a été multipliée par 4 en 10 ans chez les femmes de 35 à 45 ans, dont le cancer du sein et celui du col de l"utérus représentent successivement le premier et le deuxième cancer meurtrier des femmes (INCa, 2009). Plus de 1

050 000 nouveaux cas de cancer du sein

surviennent chaque année, dont plus de 580 000 dans les pays développés (Europe de l"ouest et Amérique du nord) où il est plus fréquent qu"en Afrique ou en Asie. Il est responsable chaque année de plus de 400 000 décès de femmes. De même, selon les données épidémiologiques sur le cancer du col de l"utérus de l"Institut de Veille Sanitaire en 2008, le cancer du col de l"utérus est le 2ème cancer féminin dans le monde en termes d"incidence avec 493 000 nouveaux cas et de

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mortalité avec 274 000 décès estimés en 2003. Il représente 10% des décès féminins par cancer et atteint essentiellement la femme non ménopausée (40 à 50 ans) (InVS, 2008). Au Maroc, le cancer constitue un problème majeur de santé publique. D"après les données du Registre des Cancers de la Région du grand

Casablanca (RCRC), l"incidence annuelle

nationale du cancer est estimée à 101,7 nouveaux cas pour 100 000 habitants, ce qui correspondrait à 30 500 nouveaux cas de cancer chaque année. Ce registre précise un pourcentage de 36,12% pour le cancer du sein et de 12,82% pour le cancer du col utérin, par rapport au total des cancers (RCRC, 2004), les femmes étant plus touchées que les hommes. Ces derniers sont plus affectés par des cancers du poumon et de lymphome non hodgkinien (RCRC, 2004).

Méthodologie

Afin de réaliser cette revue bibliographique, nous avons procédé à une lecture critique de différents documents contenant de l"information sur la thématique du cancer. Les sites des organismes internationaux s"intéressant au cancer ont été également consultés (IARC, OMS,

INCa..). Ainsi plus de 200 articles et plus de 30

sites internationaux ont été consultés en vue d"exploiter et explorer les données scientifiques les plus pertinentes pour la mise en place de cette synthèse bibliographique.

Résultats et discussion

A- Données épidémiologiques à travers le monde

Le cancer est une maladie qui, de par le monde,

pèse énormément tant du point de vue souffrance humaine que du point de vue économie de la santé. Il est une cause majeure de décès dans le monde, dont plus de 70% surviennent dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire (OMS, 2006). Il est à l"origine de 7,4 millions de décès en 2004, soit 13% de la mortalité mondiale. Ce nombre devrait augmenter pour atteindre, 12 millions en 2030 à l"échelle

mondiale (OMS, 2009) ; 27 millions de nouveaux cas, et 17,5 millions de décès en 2050 (Sasco, 2007). De même, selon le rapport Globocan 2008, l"incidence des pathologies cancéreuses sur le globe pour l"an 2008 est estimée à 12,7 millions de nouveaux cas, et une mortalité mondiale de 7,6 millions (IARC, 2010). Le tableau I donne des exemples d"incidence et de mortalité en Afrique.

Plusieurs facteurs de risque sont incriminés dans cette augmentation de cancers dans plusieurs pays du globe (Tab. II). Le tabac, l"alcool et les agents infectieux se trouvent en première position.

1. Ampleur des cancers dans les pays

développés Aux Etats Unis d"Amérique, l"incidence des pathologies cancéreuses est estimée selon Globocan (2008) à 1 437 200 annuellement, subséquemment 565 600 décès en découlent par an (IARC, 2010). Les cancers les plus répandus chez l"homme sont le cancer de la prostate (25%), suivi du cancer des poumons (15,4%) qui est à l"origine du taux de mortalité par cancer le plus important, soit 30,9%, puis le cancer

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colorectal (10,6%) (IARC, 2010). Quant au sexe féminin, on trouve en premier lieu le cancer du sein (26,4%), puis du poumon 14,5%, et qui à l"instar du sexe masculin est responsable du taux de mortalité le plus haut 26,2%, puis le cancer colorectal avec une occurrence de 10,8%.

Au Canada en 2008, les études estiment un taux

d"incidence des cancers aux alentours de

166 100, et un taux de mortalité de 72 500

(IARC, 2010). Le cancer masculin est plus répandu (86 300 versus 79 800). Les cancers de la prostate, du colorectum et du poumon sont les plus fréquents chez l"homme, soit respectivement 31,6%, 14,5% et 13% (IARC,

2010). Chez la femme, on trouve le cancer du

sein (28,8%), le cancer colorectal (13,4%), puis le cancer du poumon à égalité avec l"homme soit

13% (IARC, 2010). Le cancer du poumon

engendre le plus grand taux de mortalité aussi bien chez l"homme (27%) que chez la femme (24%). De même, dans la région du Québec, le cancer constitue depuis l"an 2000, la principale cause de mortalité (ISQ, 2010). Celui de la prostate vient en première ligne pour les cancers de l"homme avec 34,4%, et le cancer du sein, presque exclusivement féminin avec 48,8% des cancers enregistrés chez la population féminine. Après ces deux types de cancers se trouvent les personnes atteintes d"un cancer colorectal (12 %), qui comptent un peu plus d"une personne sur

10 de sexe masculin (15 % pour les hommes

contre 9 % pour les femmes) (ISQ, 2010). De même, en Europe, le cancer constitue un sérieux problème de santé publique (Ferlay et al,

2007). Le taux de décès annuel en 2006 était de

1,7 million (56% pour les hommes, 44% pour les

femmes) : le décès par cancer du poumon constituait la principale cause de mortalité par cancer (334 800 décès soit 19.7% du total), suivi par le cancer colorectal (207 400 décès), le cancer du sein (131 900 décès) et le cancer de l"estomac (118 200 décès) (Ferlay et al. 2007). Quant au nombre total des nouveaux cas, il a atteint 3,2 millions en 2006 (soit 53% chez le sexe masculin et 47% chez le sexe féminin), le cancer du sein étant dominant (42900 cas soit

13,5% de la totalité des cancers), suivi par le

cancer colorectal (412 900, soit 12,9%) puis le cancer des poumons (386 300, 12.1%) selon les mêmes auteurs. Actuellement, le cancer représente la première cause de décès devant la mortalité cardiovasculaire, et 37% des décès prématurés (avant 65 ans) (INSERM, 2005). En France, le cancer constitue la première cause de mortalité chez les hommes et la deuxième cause chez les femmes (après les maladies cardiovasculaires) (INSERM, 2008). En 2005, le nombre de nouveaux cas a été estimé à 180 000 chez les hommes et 140 000 chez les femmes. Selon les estimations de l"INSERM (2008), l"augmentation du taux d"incidence des cancers depuis 1980 est estimée à +35 % chez l"homme et à +43% chez la femme (tenant compte des changements démographiques de la population).

2. Ampleur du fardeau des cancers dans les pays en développement Pour les pays en développement, la situation est accentuée : 7,1 millions sur les 12,7 millions de nouveaux cas de cancer sur le globe, soit (56%) ; et 4,8 millions sur l"ensemble des 7,6 millions de décès associés au cancer dans le monde (soit 63%), sont survenus dans les pays en développement comme illustré dans les figures 1 et 2 (IARC 2010). Ainsi, en Afrique, en 2002, 582 000 personnes ont été atteintes de cancer, la mortalité a été de 412 300 durant la même période, et les études épidémiologiques prévoient entre 800000 et 1 million de nouveaux cas de cancer d"ici 2020, avec plus de 500 000 décès si des mesures adéquates de prévention ne sont pas prises rapidement. A souligner que 25 à 30% des cas cancers en Afrique sont consécutifs à des infections chroniques (Ly & Khayat, 2007). Selon le rapport Globocan (2008), le nombre de nouveaux cas en Afrique est estimé à 681 100 dont 378 300 chez le sexe féminin contre 302 800 chez le sexe masculin, et un taux de mortalité pour les 2 sexes de 512 400 dont 264 300 décès pour le sexe féminin (IARC, 2010). Les cancers les plus fréquents chez la femme sont le cancer du sein (24,5%), puis le cancer du col (21,3%) (Fig. 3). La mortalité par cancer suit le même schéma que celui des fréquences (Fig. 4), alors que chez

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l"homme on trouve principalement le cancer de la prostate (13%) 1 er responsable des décès masculins suivi du cancer du foie (11,4%) (Fig.

5).A titre d"exemple, la Tunisie connaît un taux

d"incidence annuel de 11 900 nouveaux cas avec une prédominance chez le sexe masculin, soit

6700 contre 5200 chez les femmes, pouvant

engendrer un taux de décès de l"ordre de 8400 par an pour les deux sexes (IARC, 2010). Le cancer du poumon est le plus répandu chez l"homme (27,5%), suivi du cancer de la vessie (8,4%) puis de la prostate (7,8%), tandis que chez la femme on trouve d"abord le cancer du sein (22,3%) puis le colorectal (10,7%), et en troisième position le cancer du col utérin (4,5%) (IARC, 2010).

B. Ampleur des cancers au Maroc

Au Maroc, le cancer occupe une place de plus en

plus importante dans les préoccupations sanitaires. Il est la deuxième cause de mortalité dans notre pays après les maladies cardio- vasculaires soit 11,3% (MS, 2008). On estime le nombre de nouveaux cas entre 30 000 et 40000 par an dont seulement 7 500 sont pris en charge 1 soit 18 % à 25 % des cas. Cette prise en charge est généralement faite tardivement, car lequotesdbs_dbs50.pdfusesText_50

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