Discours prononcé par Aimé Césaire à Dakar le 6 avril 1966
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Discours sur le colonialisme - Présence Africaine
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Discours sur le colonialisme / Aimé Césaire - BNFA
Ce discours est un acte d'accusation et de libération Le Discours sur le colonialisme est suivi du Discours sur la Négritude qu'Aimé Césaire a
Négritude » dAimé Césaire ou léveil à un humanisme identitaire et
écrits : le poème La Négritude le Discours sur le colonialisme et le Discours sur The baobab tree in search of roots: the “Negritude” of Aimé Césaire
Discours sur la négritude / Aimé Cesaire - Détail - E-médiathèque SQY
Discours sur le colonialisme [suivi de ] : Discours sur la négritude / Aimé Cesaire Dans ce pamphlet publié en 1955 Aimé Césaire poète dramaturge et homme
Quelle est la thèse du Discours sur le colonialisme ?
Ce texte a pour objectif de dénoncer la soumission physique et morale du colonisé. c'est l'argument principale : la colonisation est une oppression et une déshumanisation. Après la violence, Aimé Césaire résume cela dans une formule choc : « À mon tour de poser une équation : colonisation = chosification. »Qui est l'auteur du Discours sur le colonialisme ?
Aimé CésaireDiscours sur le colonialisme / AuteurQuelle thèse défend Aimé Césaire dans son discours ?
Pour défendre sa thèse, Césaire montre d'abord que la colonisation repose sur le mensonge des colons qui prétendent agir pour le bien des peuples qu'ils oppriment et que ce mensonge est relativement récent ; il est pour lui nécessaire d'admettre que l'entreprise coloniale repose sur des motifs économiques et qu'elle- C'est un excellent petit livre, qui dénonce avec justesse les rapports entre colonisateurs et colonisés, et résume à lui seul toute la morgue que constituait la colonisation. Brève et éclatante, une énorme claque imparable sur cinquante-deux pages. Ce discours dit tout, et le dit bien.
Gradhiva
Revue d'anthropologie et d'histoire des arts
10 | 2009
Présence
africaine Discours prononcé par Aimé Césaire à Dakar le 6 avril 1966 dans le cadre du Colloque sur l'art dans la vie du peuple qui marqua l'ouverture du Premier Festival mondial des arts nègres (30 mars - 21avril 1966)
Édition
électronique
URL : http://journals.openedition.org/gradhiva/1604DOI : 10.4000/gradhiva.1604
ISSN : 1760-849X
Éditeur
Musée du quai Branly Jacques Chirac
Édition
impriméeDate de publication : 4 novembre 2009
Pagination : 208-215
ISBN : 978-2-35744-012-8
ISSN : 0764-8928
Référence
électronique
Discours prononcé par Aimé Césaire à Dakar le 6 avril 1966Gradhiva
[En ligne], 102009, mis en
ligne le 05 février 2010, consulté le 10 décembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/gradhiva/ 1604; DOI : https://doi.org/10.4000/gradhiva.1604
© musée du quai Branly
208DOCUMENTS ET MATÉRIAUX
Monsieur le Prsident,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais d"abord vous faire part des hsitations que j"ai eues prendre la parole dans ce colloque. Je ne suis aucun degr un homme de science, aucun degr un expert, et j"ai conscience que dans une telle assemble, j"ai beaucoup plus apprendre qu" enseigner. Aussi bien vous demanderai-je de ne voir dans cette intervention que la manifestationdu dsir que j"ai vous dire quel point j"ai t intress par vos travaux et de vous soumet-
tre titre de contribution quelques rfl exions qui sont nes de mon exprience d"homme cain dans la vie du peuple et par le peuple È. Je crois que pour rpondre cette questionrpondre et cette question serait celle-ci : Ç Fonction et signifi cation de l"art dans le monde
moderne È. Autrement dit, avant de parler de l"art africain et de sa signifi cation pour l"Afri- que moderne, le mieux m"appara"t de parler de l"art tout court et de sa fonction dans le monde tout court. Pourquoi, dans le monde comme il va, il est apparu essentiel aux organisateurs de ce col- loque, pourquoi il nous appara"t essentiel nous autres, hommes de culture, de valoriser lafonction de l"art ? Car enfi n l"art n"est pas toute la culture, il n"en est qu"un aspect. Alors pour-
quoi privilgier cet aspect au dtriment des autres aspects de la culture ? Je rpondrai que c"est
un signe des temps et que si nous avons, d"un propos dlibr, choisi de privilgier l"art, c"est
que nous estimons que jamais comme aujourd"hui le monde n"a eu autant besoin de l"art. Qu"on le veuille ou non, il y a l"heure actuelle une civilisation minente et tentaculaire. C"est la civilisation europo-amricaine, la civilisation industrielle qui couvre le monde de son rseau, et atteint dsormais - car il est clair que maintenant, nous sommes entrs dans de cette civilisation europenne. Ils sont nombreux et clatants. Mais, pour comprendre lerle de l"art, notre besoin d"art et de posie, c"est plutt son ct ngatif qu"il faut rappeler.
pense qui lui a permis de vaincre et de dominer la nature. Mais il est arriv notre conqu-
devenu le prisonnier et la victime des concepts et des catgories qu"il avait invents pour apprhender le monde. Mieux, avec la pense europenne moderne (je dis bien moderne carl"Europe n"a pas toujours t ce qu"elle est) est n un processus nouveau, celui que certains
penseurs ont appel un processus de rifi cation, c"est--dire de chosifi cation du monde.De quoi s"agit-il ? Il s"agit de la substitution la totalit dialectique qu"est le monde, de la
209Discours prononc par Aim Csaire Dakar le 6 avril 1966
d"abstractions homognises et dissocies reprsentant un abrg du monde, commode,
sans doute, mais correspondant un appauvrissement et un succdan du monde. Les consquences, vous les connaissez, c"est l"apparition du monde mcanis, du monde de l"ef- fi cience, mais aussi du monde o l"homme devient chose lui-mme, du monde o le temps naturellement sur l"apparition d"un univers inhumain sur la trajectoire duquel se trouvent le mpris, la guerre, l"exploitation de l"homme par l"homme. C"est cela, cette invasion du mondeet de l"homme par les choses, c"est ce processus de rifi cation du monde install par la culture
europenne dans la socit, qui explique que le besoin d"art et de posie soit aujourd"hui un
besoin vritablement vital, dans le sens o on dit que l"art est vital pour l"homme. en effet, au contraire de la pense conceptuelle, au contraire de l"idologie, que l"art et laposie rtablissent la dialectique de l"homme et du monde. Par l"art, le monde rifi rede-
vient le monde humain, le monde des ralits vivantes, le monde de la communication et de la participation. D"une collection de choses, la posie est jeunesse. Elle est cette forceveilleux en la replaant dans la totalit originelle. Si bien que sauver la posie, sauver l"art,
c"est en dfi nitive sauver l"homme moderne en personnalisant et en revitalisant la nature. Si on avait besoin d"une preuve, je dirais qu"il n"est que de constater que jamais le besoinpotique ne se fait autant sentir, que jamais l"homme ne s"accorde, ne s"accroche la posie
ques pleines de bruit et de fureur qui s"appellent la guerre, que cette guerre soit chaude oufroide, prcisment au sortir de ces poques o la non-communication et la chosifi cation se
sont exacerbes un degr proprement intolrable. Et, ici, je pense au surralisme europen
potique dit de la ngritude. Mes chers amis, je dois vous dire tout de suite qu"aucun mot ne m"irrite davantage que lemot Ç ngritude È - je n"aime pas du tout ce mot-l, mais puisqu"on l"a employ et puisqu"on
l"a tellement attaqu, je crois vraiment que ce serait manquer de courage que d"avoir l"aird"abandonner cette notion. Je n"aime pas du tout le mot Ç ngritude È et je dois vous dire que
cela m"irrite toujours lorsque, dans les confrences internationales o il y a des anglophones et francophones, on introduit cette notion qui m"appara"t comme une notion de division. Langritude est ce qu"elle est, elle a ses qualits, elle a ses dfauts, mais au moment o on la
vilipende, o on la dnature, je voudrais quand mme que l"on fasse rfl exion sur ce qu"tait
comme spontanment, tellement elle rpondait un besoin. Bien sr, l"heure actuelle, les
jeunes peuvent faire autre chose, mais, croyez-moi, ils ne pourraient pas faire autre chose l"heure actuelle si, un certain moment, entre 1930 et 1940, il n"y avait pas eu des hommes qui avaient pris le risque de mettre sur pied ce mouvement dit de la ngritude. Ce mouve-ment de la ngritude tellement attaqu, et tellement dfi gur, il ne faut pas oublier le rle
comme celle que Saint-John Perse a prononce lorsqu"il a reu le prix Nobel, quand il a crit
ceci : Ç Quand la mythologie s"effondre, c"est dans la posie que trouve refuge le divin. Peut-
tre mme son relais et jusque dans l"ordre social et l"immdiat humain, quand la porteusepotique que s"allume encore la haute passion des peuples en qute de clart. È Si la ngri-
tude a bien mrit de l"Afrique, c"est que prcisment, dans l"tendue de l"abomination et de
210DOCUMENTS ET MATÉRIAUX
Cette notion de la ngritude, on s"est demand si ce n"tait pas un racisme. Je crois queles textes sont l. Il suffi t de les lire et n"importe quel lecteur de bonne foi s"apercevra que,
si la ngritude est un enracinement particulier, la ngritude est galement dpassement et
panouissement dans l"universel.
Pour en revenir mon propos, je dirai, propos de la ngritude, que, dans la perspectiveL"homme noir n"tait plus apprhend par l"homme blanc qu" travers le prix d"une dfor-
mation, de strotypes, car c"est toujours de strotypes que vivent les prjugs. Et c"est cela
ou du Juif ; la substitution l"autre de la caricature de l"autre, une caricature laquelle on
donne valeur d"absolu. L"apparition de la littrature de la ngritude et de la posie de la ngritude n"a produit un tel choc que parce qu"elles ont drang l"image que l"homme blancse faisait de l"homme noir, qu"elles ont marqu avec ses qualits, avec ses dfauts, donc avec
sa charge d"homme, dans le monde des abstractions et des strotypes que l"homme blanc Et c"est bien cela, je crois, le service que la ngritude a rendu au monde. C"tait par lcontribuer l"difi cation d"un vritable humanisme, de l"humanisme universel, car enfi n il
n"y a pas d"humanisme s"il n"est pas universel, et il n"y a pas d"humanisme sans dialogue, et il ne peut y avoir de dialogue entre un homme et une caricature. En restituant l"homme noir dans sa stature humaine, dans sa dimension humaine, pourque la littrature de la ngritude a t une littrature de combat, une littrature de choc et
c"est l son honneur ; une machine de guerre contre le colonialisme et le racisme, et c"est l sa justifi cation. Mais ce n"est l qu"un aspect de la ngritude, son aspect ngatif. Si nous avons tellement haï le colonialisme, si nous l"avons tellement combattu, c"est sans doute parce que nous avions conscience qu"il nous mutilait, qu"il nous humiliait, qu"il noussparait de nous-mmes et que cette sparation tait intolrable : mais c"est aussi parce que
nous savions qu"elle nous sparait du monde, qu"elle nous sparait de l"homme, de tous les ne me laisserais pas dsorienter par ses cris, ses revendications, ses maldictions. Ses cris, ses revendications, je ne les dfi nirais que comme une postulation, irrite sans doute, une postulation impatiente, mais en tout cas une postulation de fraternit.Et j"en arrive l"objet mme de ce colloque, le sens et la signifi cation de l"art dans l"Afri-
que d"aujourd"hui. On peut l"affi rmer sans crainte, jamais l"Afrique n"a eu autant besoin de l"art. Jamais elle n"a eu autant besoin de son art, de son propre art. Cela est vrai bien sr pour les raisonsgnrales que j"voquais tout l"heure et qui sont valables pour le monde entier. Mais il
de dire cela pour que l"on comprenne quel point l"Afrique est menace. Menace cause de l"impact de la civilisation industrielle. Menace par le dynamisme interne de l"Europe et de l"Amrique. On me dira : pourquoi parler de menace, puisqu"il n"y a pas de prsence euro- penne en Afrique, puisque le colonialisme a disparu et que l"Afrique est indpendante ? Malheureusement, l"Afrique ne s"en tirera pas si bon compte. Bien sr, la colonisation, le colonialisme offraient le cadre rv pour que cet impact puisse agir dans les conditions211d"effi cacit optima. Mais ce n"est pas parce que le colonialisme a disparu que le danger de
dsintgration de la culture africaine a disparu. Le danger est l et tout y concourt, avec ou sans les Europens : le dveloppement politique, la scolarisation plus pousse, l"ensei- gnement, l"urbanisation, l"insertion du monde africain dans le rseau des relations mon- diales, et j"en passe. Bref, au moment o l"Afrique na"t vritablement au monde, elle risque comme jamais de mourir elle-mme. Cela signifi e qu"il faut s"ouvrir au monde avec les yeux grands ouverts sur le pril et qu"en tout cas le bouclier d"une indpendance qui ne serait que politique, d"une indpendance politique qui ne serait pas assortie et compltepar une indpendance culturelle, serait en dfi nitive le plus illusoire des boucliers et la plus
fallacieuse des garanties. L"histoire est toujours dangereuse. Le monde de l"histoire, c"est le monde du risque, maisc"est nous qu"il appartient chaque moment d"tablir et de rajuster la hirarchie des
prils. Je dis qu" l"heure actuelle le pril pour l"Afrique, ce n"est pas le refus du monde ext-
rieur, ce n"est pas le refus d"ouverture, ce n"est pas le chauvinisme, ce n"est pas le racisme noir, c"est bien au contraire l"oubli d"elle-mme, c"est l"acculturation et la dpersonnalisation. Pour en revenir mon propos du dbut, je dirai que le danger pour l"Afrique c"est d"entrer son tour dans la rifi cation. Et, cette fois, la rifi cation ne jouera pas dans les relations avec
l"autre. Dans le cas de l"Afrique, et c"est le comble du drame, la rifi cation jouera dans les relations de l"Afrique avec elle-mme. Si l"on n"y prend garde, l"Afrique risque de ne plus se voir que par les yeux des autres et de jeter sur elle-mme un regard ptrifi ant. Je ne voudrais pas que l"on croie une vue arbitraire. Je n"en veux pour preuve que ladiscussion qui s"est instaure hier la Commission des arts entre les minents spcialis-
tes venus d"Europe et d"Amrique : M. Goldwater, M. Laude, Michel Leiris. Au cours de ces discussions, M. Goldwater, parlant de l"infl uence de l"art africain sur l"art occidental, nousa dit qu"en ralit le mot Ç infl uence È tait impropre, qu"il n"y a pas eu d"infl uence propre-
moment donn de l"histoire de l"art occidental l"art africain, rencontr par hasard, a servi de
catalyseur l"art occidental. Et cela est vrai. M. Laude a prcis et il a montr en particulier
si Picasso a contest l"art occidental c"est l"intrieur et non en dehors de l"art occidental. La
question que je pose est celle-ci : est-ce que cela est vrai pour la majorit des artistes afri-cains contemporains ? Quand, duqus par l"Europe et forms dans les coles europennes,
ils contestent, et c"est le droit, quand ils contestent l"art africain traditionnel, le contestent-ils l"intrieur de l"africanit ou en dehors de l"africanit ? La rponse est malheureusement
ngative et M. Fagg a raison de dire que si l"art africain traditionnel a fi ni, a cess d"tre
l"heure actuelle le catalyseur de l"art occidental, il n"a pas encore commenc tre le cataly-
seur de l"art africain contemporain. Voil, n"est-il pas vrai, une remarque qui va loin et qui est signifi cative des dangers que courent l"heure actuelle l"homme d"Afrique, la culture de l"Afrique, l"art africain. M. Bastide l"a dit : ne viendra-t-il pas un moment o il n"y aura plus d"art africain et o il n"y aura plus qu"un art semblable tous les autres arts du monde, avec cette seule diff-rence - mais absolument secondaire, insignifi ante, ngligeable - qu"il aura t fait par des
Africains et non par des Europens ou des Amricains ? Nul d"entre nous bien sr ici n"est dans les secrets de l"histoire et nul ne peut donner de rponse l"interrogation angoisse de M. Bastide. Tout ce que nous pouvons dire, nous, hommes d"Afrique, nous, hommes de ce colloque, nous, hommes de culture, est que nous ne considrons pas comme souhaitable et commeun idal rechercher la substitution l"art africain d"un art, les uns diront laudativement
universel, les autres diront pjorativement cosmopolite, en tout cas non spcifi que, fait par les Africains.Discours prononc par Aim Csaire Dakar le 6 avril 1966 212DOCUMENTS ET MATÉRIAUX
Ici, j"entends l"objection d"Andr Malraux, qui nous dira et nous a dit : mille regrets, lesncessaire. On nous a dit : essayons de retrouver l"me africaine qui conut les masques :
travers elle, nous atteindrons le peuple africain. Je n"en crois rien. C"est Andr Malraux quiparle : Ç Ce qui a fait jadis les masques comme ce qui a fait jadis les cathdrales est jamais
ne s"agit pas de refaire les masques, pas plus que pour l"Europe il ne peut s"agir de refaire les cathdrales. Mais alors, me dira-t-on, que faut-il faire pour assurer l"art africain - et non pas l"art des Africains - une survie et une vitalit nouvelles dans un monde moderne pour lequel il n"a pas t fait et dont tous les lments conspirent sa disparition ? C"est l pour nous une question essentielle. Cette survie et cette vitalit nouvelles sont- elles possibles ou sont-elles seulement envisageables ? Ë cet gard, je suis, tout comme M. Bastide, beaucoup moins pessimiste qu"Andr Malraux. Plus exactement, je ne dirai pas que je suis optimiste, je dirai que la partie n"est pas joue et qu"il dpend de nous, de nous tous, qu"elle soit gagne. Je crois que, lorsqu"on parle des chances de survie de l"art africain, l"erreur est de poser compte, ce n"est pas l"art, c"est d"abord l"artiste, donc l"homme. En Afrique, l"art n"a jamaist savoir-faire technique, car il n"a jamais t copie du rel, copie de l"objet ou copie de ce
qu"il est convenu d"appeler le rel. Cela est vrai pour le meilleur de l"art europen moderne,mais cela a toujours t vrai pour l"art africain. Dans le cas africain, il s"agit pour l"homme
de recomposer la nature selon un rythme profondment senti et vcu, pour lui impo- ser une valeur et une signifi cation pour animer l"objet, le vivifi er et en faire symbole et mtalangage.Senghor.
Si cela est vrai, on comprend le double chec auquel nous assistons souvent : l"chec deseuropens. Mais aussi l"chec esthtique des artistes africains qui se mettent copier du
nous a parl M. Bastide et qui, pendant un certain temps, pendant une certaine priodeashantis. Il est clair que ces tentatives ne peuvent qu"chouer, car elles sont prcisment
contre-sens de l"art africain. L"art africain n"est pas copie. Il n"est jamais copie, ft-ce de soi-
mme, il n"est jamais reproduction, rptition, reduplication, mais au contraire inspiration,
c"est--dire agression de l"objet, investissement de l"objet par l"homme qui a assez de force intrieure pour le transformer en une forme de totale communication (et non pas cette forme de communication appauvrie que constitue le langage). L"art africain, comme tout grand art, me dira-t-on, en tout cas plus que tout autre, et depuis si longtemps si ce n"est depuis toujours, est d"abord dans l"homme, dans l"motion de l"homme transmise aux choses par l"homme et sa socit. C"est la raison pour laquelle on ne c"est--dire en dfi nitive du sort de l"Afrique elle-mme. L"art africain de demain vaudra ce que vaudront l"Afrique de demain et l"Africain dedemain. Si l"homme africain s"appauvrit, s"il s"tiole, s"il se coupe de ses racines, s"il se prive
213Discours prononc par Aim Csaire Dakar le 6 avril 1966
de ses sucs nourriciers, s"il se coupe de ses rserves millnaires, s"il devient le voyageur sans
de masse, s"il se dbarrasse de ses lgendes, de sa sagesse, de sa culture propre, ou bien tout
assurance historique ou s"il ne la retrouve pas, rien n"y fera malgr les festivals, malgr les
cain s"tiolera, s"appauvrira et dispara"tra. Si, au contraire, l"homme africain conserve et prserve sa vitalit, son assurance, sa pour s"isoler ou pour bouder, mais au contraire pour accueillir le monde, alors l"art africain continuera. Bien sr, il aura volu, et mieux. Il se sera transform, mais c"est tant mieux, comme se transforme d"poque en poque le contenu des rves et de l"imagination de l"humanit. Mais cette volution mme et cette mutation seront le signe que l"art africain sera vivant et bien vivant. Aussi bien est-ce en nos mains, en nos mains tous et non pas seulement entre les mains des hommes de culture, car la sparation est absolument artifi cielle, c"est entre nos mains tous que se trouve l"avenir de l"art africain. C"est pourquoi, aux hommes d"tat africains qui nous disent : Messieurs les artistes africains, travaillez sauver l"art africain, nous rpondons : Hommes d"Afrique et vous d"abord, politiques africains, parce que c"est vous qui tes les plus responsables, faites-nous de la bonne politique africaine, fai- tes-nous une bonne Afrique, faites-nous une Afrique o il y a encore des raisons d"esprer,des moyens de s"accomplir, des raisons d"tre fi ers, refaites l"Afrique une dignit et une
sant, et l"art africain sera sauv 1.Double page suivante
Old landline exchange, Post Offi ce, Lubumbashi, Rpublique Dmocratique du Congo, 2007 © Guy Tillim. Avec la
permission de Extraspazio, Rome & Michael Stevenson, Cape Town.1. Source :
Aimé Césaire,
pour regarder le siècle en face, sous la direction deA. Thebia-Melsan,
Paris, Maisonneuve
et Larose, 2000 :20-26.
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