[PDF] Mougib Elrahman MOHAMED MOHAMED AHMED ABOAMER

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UNIVERSITÉ GRENOBLE ALPES

Spécialité : Architecture (arrêté ministériel : 25 mai 2016) Présentée par Mougib El Rahman Mohamed Mohamed Ahmed Aboamer

Architecture et évolution sociopolitique

Vers une lecture multiple du centre-ville du Caire (1869-1973)

Thèse dirigée par Catherine Maumi

Préparée au sein du laboratoire Les Métiers de l'Histoire de l'Architecture, édifices-villes-

territoires, ENSA Grenoble - 60 avenue de Constantine, CS 12636, 38036 Grenoble cedex

2. École doctorale 454 ² Science de l'Homme, du Politique et des Territoires.

Cairo is a catMy Cairo

Le livre des jours grenoblois

Remerciements

Système de translittération

Translittérationdes voyelles :

Remarques:

Sommaire

Résumé

Abstract

Introduction

Première Partie : Le conte de deux cités

Chapitre I. 1. Une ville moderne : pourquoi ? Et comment ? Chapitre I. 2. Les deux Caire : fascination et mépris

Anna HorraJe suis libre

Zukâk al-Middak (Passage des miracles)

Les Hommes oubliés de Dieu

Chapitre I. 3. Les deux Caire : une confrontation inévitable

Deuxième Partie : une nouvelle ère

Chapitre II. 2. Les élites et les étrangers dans le centre-ville après 1952 Qalat DohaDoha a dit ..................................................... Chapitre II. 3. Panarabisme et socialisme nassériens Mawwal al Bayat Wal Nawm(La Répétition de devoir trouver un lieu pour dormir

Troisième Partie : Entre deux époques

Chapitre III. 1. Échec et Effondrement

Chapitre III. 2. Le centre-ville, le quartier sombre

Tilka-al-rà'iha (Une certaine odeur)

. Hammam el-Malatily

Chapitre III. 3. Les nouvelles confrontations

Conclusion générale : Les sept facettes du centre-ville du Caire

Bibliographie, iconographie

Annexes

Résumé

Architecture et évolution sociopolitique

Vers une lecture multiple du centre-ville du Caire (1869-1973)

Mots clés

Abstract

Architecture and socio-political evolution

Toward a multiple reading of downtown Cairo (18691973)

Keywords

Introduction

" /HVSOXVJUDQGVSURGXLWVGHO

TXHGHV°XYUHVVRFLDOHVSOXW{WO

HQIDQWHPHQWGHVSHXSOHVHQWUDYDLOTXHOHMHW

des hommes de génie ; le dépôt que laisse une nation ; les entassements que font les siècles ; le résidu des évaporations successives de la société humaine ; en un mot, des espèces de formations ».

Victor Hugo

Aristote

" Chez le voyageur qui la contemplait pour la première fois, la ville du Caire éveillait le désir d'une comparaison, mais il s'apercevait aussitôt que c'était un piège, car elle les rejetait toutes ; elle ne ressemblait en effet à rien ».

Oleg V. Volkoff

Introduction

Caire est née lors de ma participation aux manifestations de la révolution populaire de janvier

2011. Pendant les 18 jours de la révolution, entre le déclenchement des manifestations (25

considéré avant la révolution comme le symbole de la " main de fer » du régime républicain

militaire régnant depuis juillet 1952. cas des autres quartiers cairotes. Lors des occasions politiques au centre-ville auxquelles le

les avenues principales et la place Tahrir du centre-ville sont fermées et le passage des véhicules

et des piétons est interdit. Les policiers, les soldats des forces centrales de sécurité et les agents

passage du président. Le centre-ville devient pendant quelques heures un enfer terrestre pour

puis était totalement bouleversée trois jours plus tard lors des évènements du " Vendredi de la

Colère » le 28 janvier. Ce jour-là, des affrontements sanglants se sont déroulés entre les

manifestants et la police égyptienne, se terminant par le retrait total de cette dernière et une

victoire écrasante des manifestants qui ont mis à feu le siège du parti au pouvoir situé au centre-

se mirent à partager leurs réflexions et leurs mémoires concernant la période du régime de Hosni

le premier est Yawmiat thawret al-sabbar (LeJournal de la révolution du cactus) par Abdel Rahman Youssef, et le deuxième est -ghadad (Trois histoires au sujet de la colère) par Mohamed El Mansy Kandil. Dans le premier de ces ouvrages, Abdel Rahman

représentant la résistance des manifestants, planté sur la place Tahrir. Selon Youssef, la place

Tahrir, pourtant symbole de pouvoir depuis 1952, devient le terreau fertile pour des nouvelles se déroulant au centre-ville du Caire lors de la révolution populaire de 1919 contre

Introduction

comme le quartier des révolutions par la population égyptienne. Les rues, les places et les lieux

siècle, sont les points de ralliement pour les manifestants, ce qui transforme le quartier en un

explorées et des histoires inédites sur les réalités de la ville, ce malgré leur caractère fictionnel.

Nasser ? » (Le Khédive se venge-t-il de Nasser ?). Dans cet article, Fendi explique que

haussmannisée du centre-ville est considérée selon Fendi comme " une urbanisation de la

liberté » dans laquelle la relation entre la classe dirigeante et la population est bien définie car,

versa ».

révolution grâce à leur localisation géographique et leur capacité à accueillir des millions de

manifestants. A cet égard, nous partageons également le point de vue du géographe Eric Verdeil

qui affirme que la concentration des manifestants dans les espaces centraux du Caire pendant

pouvoir constituée des éléments urbains et architecturaux dans le centre-ville. Ceux-ci, étant

Al-Charq al-Awsat

Introduction

des symboles du pouvoir, sont ciblés par les manifestations qui les ont démolis pendant les

évènements de la révolution.

recherches a été un mémoire comptant 130 pages soutenu en 2014 et intitulé itecture du

Caire et les valeurs sociétales à la lumière des bouleversements politiques (1952 2011). Ce

à travers ce travail de recherche que la nature de la production architecturale de la ville est efforts de la société humaine, inscrite dans des contextes sociopolitiques, économiques et

" Elle est le décor fixe de la vie humaine, chargé des sentiments de générations entières, théâtre

d'évènements publics, de tragédies privées, de faits anciens et de faits nouveaux. Le privé et le

collectif, la société et l'individu s'opposent et se confondent dans la ville, qui est faite d'une

foule d'êtres y cherchant leur place et - car c'est la même chose - un environnement à leur mesure

qui soit mieux adapté à l'environnement général ». Le Caire incarne aussi les propos de Marcel Roncayolo qui affirme que la ville " assure avec la

choix de son site et de sa nomination " Al Qahira », signifiant la Ville Victorieuse, sont en effet

des décisions royales prises par les Fatimides, dont les origines sont maghrébines, qui ont capitale une ville " royale » fermée sur eux et sur les grands fonctionnaires et les chefs de ouverte pour les Egyptiens et la plupart des palais et des édifices construits par les Fatimides

Lectures de villes : formes et temps

Ibid. Ibid. op. cit.

Introduction

sont démolis. Les mamlouks, qui succèdent à la dynastie de Saladin, enrichissent le Caire par

de leur carrière, des esclaves combattants adoptés par les Ayyubides. Les origines médiévales

du Caire sont donc politiques par excellence et son architecture monumentale peut être affirme de même que " L'architecture est toujours un reflet politique ».

siècles, ne peut pas être séparée de celle du Caire de telle sorte que la ville et sa morphologie

ville, tout comme les changements politiques. Comprendre cela confirme le point de vue de

Bernardo Secchi dans sa :

croyances et des traditions dans lesquelles les différentes décisions ont pris forme, même si cela

traité plus loin dans cette introduction, il restait encore un chapitre à écrire. Ce chapitre, à mon

Le Crépuscule des idoles

Le Point

Introduction

scientifiquement des données de plusieurs natures, issues de plusieurs sources. Cette ambition La première de ces raisons est que nous vivons maintenant dans le deuxième millénaire de la La deuxième est la contrainte spatiale : la superficie actuelle du Caire est de 3 085 km2, et son

" Définir ses limites ou sa forme se révèle une tâche par avance vouée à l'échec. Depuis

longtemps la ville a échappé au paradigme de l'enceinte. Le Caire contemporain est proprement

inclôturable ». Tenant compte de cela, de la grande diversité urbaine, architecturale et sociale

des quartiers cairotes et des contextes politiques et socio-économiques qui les ont produits, un limité de pages.

que cette métropole est désignée par les Egyptiens par le nom de leur pays : Misr/ Masr, étant

nombreuses études scientifiques, personne ne peut le découvrir complètement ». Pour toutes

ces raisons, mon ancienne ambition de traiter le Caire entièrement dans une simple recherche

travail de recherche consacré à un quartier cairote et sur une période déterminée. En ce qui

motif personnel ; il est aussi fondé sur mes lectures concernant la valeur symbolique du centre-

Le Caire

arabe

Littérature, textes, cultures

ville)

Introduction

El Ela, quatre types de centralité : une centralité spatiale liée à sa localisation entre les différents

quartiers cairotes, une centralité fonctionnelle car le centre-ville regroupe la plupart des services

bancaires et administratifs de la capitale, une centralité politique représentée par la

les palais de justice et les ambassades. Selon Abo El Ela : " La présence de ces symboles politiques et nationaux offre toujours des valeurs qui expriment la domination du centre-

ville ». Quant à la centralité sociale, elle est représentée par " des fêtes, des expositions, des

festivals, des foires commerciales, en relation, le plus souvent, avec des activités ludiques,

économiques ou culturelles ». Le centre-ville du Caire est le lieu préféré de la société

égyptienne pour les promenades, les échanges, les flirts et les manifestations. Grâce à ces

usagers, ces liens sont considérés par Abo El Ela comme des indices mesurant la centralité

ville du Caire comme objet de ce travail de recherche peuvent être résumées par cette citation

" Comme toutes les grandes métropoles, Le Caire présente un système polycentrique. Le

Situé sur la rive est, ce centre recoupe la ville moderne fondée au milieu du 19e siècle. Il se

compose de deux pôles principaux : un pôle administratif puissant au sud qui regroupe tous les

ministères, le parlement, le sénat, le gouvernorat du Caire, les ambassades des grandes

puissances coloniales du vieux continent, celle des Etats-Unis, la cité administrative et la Ligue

Arabe. Ce pôle cumule les figures de la centralité par la présence des succursales des grandes

hôtels qui jalonnent sa façade fluviale. Le second pôle, situé au nord du premier, considéré

caritatives et des grands journaux ». Paysages, fonctions, accessibilité et pratiques des habitants, Ibid Ibid Ibid

Introduction

plupart des historiens dont André Raymond, par la date de l'Expédition Française et le règne de

égyptienne étudiée pendant mon master, en vue de construire de bonnes connaissances sur celle-

politique de cette période et les changements que le régime de la révolution de 1952 a apporté

quelques opérations ponctuelles et transformations légères liées aux changements du régime au

" un secteur en déclassement continu depuis les années 1950 » .

La construction du centre-ville ± nommé la ville moderne et la ville nouvelle, car édifiée en

la modification des modes de vie des cairotes par rapport aux pratiques en cours dans la ville

médiévale. Dans les lectures effectuées sur Le Caire, de nombreuses comparaisons sont faites

montrant souvent le grand écart entre la vieille ville ± ses rues sombres, engorgées et entourées

par les collines et les étangs souillés ± avec le Caire moderne ± ses boulevards, ses vastes jardins

un regard critique sur sa construction, son essor et les impacts de ceux-ci sur la société cairote.

fin de la deuxième phase, qui se termine avec la guerre de Kippour en 1973. Celle-ci constitue

Le Caire - portait de la ville

Introduction

jours.

très peu de recherches sur le Caire évoquent la période entre la défaite de la guerre des Six Jours

(1967) et la guerre du Kippour (1973). Cette période de six ans représente la phase transitoire

arabiste menée par les politiques de Nasser depuis son arrivée au pouvoir (1952), et les

produits sur celle-ci, pour des raisons diverses dont la principale est le contexte de la défaite et

construire de nouvelles connaissances sur le centre-ville de cette époque. Relever un tel défi du Caire.

lectures sur le Caire, qui seront détaillées plus loin dans cette introduction, je me suis concentré

études consiste en une analyse architecturale et urbaine à la lumière des données politiques et

socio-économiques. Certaines se sont concentrées sur les aspects visuels de la ville en se basant

perceptions des habitants. Parmi ces ouvrages, certains se réfèrent parfois au monde de la Kadi utilise dans son ouvrage des citations traduites par elle-même de romanciers égyptiens.

De la même manière, les ouvrages publiés sur le Caire par le théoricien urbaniste Hicham Abo

al- : al tasmim al hadary - Nazareyet al khayal (La septième dimension :

Introduction

souvenirs de la révolution de janvier 2011 et les représentations littéraires de la place Tahrir et

égyptiennes avaient su donner une image sociale, politique et architecturale du Caire, montrant

des dimensions différentes et posant des questions sur la relation entre la ville et ses habitants.

égyptien depuis 2011, dont deux articles, parus sur La relation entre le Caire, la littérature et le

cinéma dans le journal Akhbar al-adab (La littérature) au Caire en 2012, puis par la publication

de mon premier roman, Tajaliat modarrag 3002 (Manifestations dans 3002)

Problématique et cadrage

Le Caire 969-1969 : histoire de la ville des " Mille et une nuits »

Que sais-je ?

Le territoire comme palimpseste et autres essais

Introduction

siècle. Dans la construction de la ville, le rôle de la société égyptienne semble moins présent

des représentations culturelles qui en sont nées. Celles-ci sont visibles dans les représentations

de la ville élaborées, notamment au sein des °XYUHVlittéraires. A partir de ces dernières, nous

chercherons à comprendre comment la société égyptienne a accueilli la construction et les

transformations de cette ville nouvelle, et quel rôle les dimensions socio-politiques ont joué capitale égyptienne dans son ensemble. Nous chercherons à construire une nouvelle connaissance du centre-ville du Caire, partant de

la compréhension de la dimension sociétale, influencée par le contexte politique et représentée

GDQV OHV °XYUHV OLWWpUDLUHV. Les questionnements de la recherche sont donc les suivants :

Comment la relation entre la société cairote et le centre-ville du Caire se traduit-elle sur

littéraires égyptiennes, sont-elles influencées par le contexte politique et comment reflètent-

bouleversements politiques ? Quelles images du centre-ville du Caire sont offertes par ces représentations fictionnelles ? En quoi ces images peuvent-elles nous permettre de construire

différentes facettes du centre-ville Caire, dans ses dimensions politiques et sociales, permettant

en cela une meilleure compréhension du centre de la capitale ?

Hypothèses

politiques. Cela ne peut se faire que par une lecture multiple de ces trois dimensions. Réaliser

une telle lecture consiste à céder à un " médium d'influence », qui sont les représentations

fictionnelles du centre-ville. Ces dernières amènent aux deux hypothèses secondaires de ce travail de recherche. Au cours de notre recherche, nous avons découvert une forme de

juxtaposition entre les représentations littéraires du centre-ville du Caire et les faits urbains

" réels » de celui-ci. On suppose donc que mettre en lumière la confrontation entre les fictions

de mieux la saisir. Quant à la deuxième hypothèse : nous pensons que les °XYUHV littéraires ont

tout en produisant des images de la ville sur lesquelles nous pouvons nous appuyer, en historiques et rapports officiels. Ces deux hypothèses secondaires sont construites sur la base littérature égyptienne moderne et contemporaine

Introduction

constituer une forme alternative de données historiques et une archive des changements de

Méthodologie

Une lecture multiple

des signes et des symboles ancrés dans celle-ci. Barthes considère que les signes et les symboles

de la ville peuvent aider à intégrer différentes dimensions ± la psychologie, la sociologie, la

un discours à lire et à déchiffrer :

" La cité est un discours, et ce discours est véritablement un langage : la ville parle à ses

fourni, je crois, tout au moins au début par la phrase du discours ».

sémantique, sera une certaine ingénuité du lecteur ». La lecture multiple de la ville est un

ensemble de plusieurs lectures. Cette multiplicité de lectures de la ville, servant à élaborer un

langage de celle-ci puis à le déchiffrer, est explicitée ainsi par Barthes :

" Nous devrons être nombreux à essayer de déchiffrer la ville ou nous nous trouvons, en partant,

de lecteurs (car nous avons une gamme complète de lecteurs, du sédentaire à l'étranger), on

tant de multiplier les enquêtes ou les études fonctionnelles de la ville que de multiplier les lectures de la ville. >"@ » Urban Space in Contemporary Egyptian Literature : Portraits of Cairo Ibid Ibid.

Introduction

La synthèse proposée par Barthes considère la ville comme un discours. Le langage de la ville

contenu sémantique. Ce dernier est en opposition, alternance et juxtaposition avec la réalité de

celle-ci, ce qui provoque souvent des conflits entre la signification et la réalité géographique

objective de la ville.

La lecture multiple proposée par Barthes a constitué une sorte de déclic méthodologique. Nous

est basée sur le croisement de données issues de plusieurs sources relatives aux contextes

cairote, au cours de cette même période, et les représentations littéraires du centre-ville du

Caire. Ce croisement nous semble important pour saisir plusieurs dimensions immatérielles,

souvent peu présentes dans les autres documents, comme celles liées à la perception de notre

cadre spatial, les comportements et les appropriations des habitants de celui-ci. Une telle

démarche visant à construire une nouvelle connaissance de la ville pourra être appliquée sur

différences contextuelles et historiques.

La notion de " lecture(s) de la ville » est mobilisée par plusieurs chercheurs dans les domaines

de la lecture de la ville en soulignant que ses formes physiques " portent avant tout sur des considérée comme " un acteur symbolique et donc un partenaire de négociation, une médiatrice entre les intérêts, un porte-parole ». Ibid Ibid

Lectures de villes : formes et tempsop. cit.,

Ibid. Ibid Urban Space in Contemporary Egyptian Literatureop. cit.

Introduction

production de la ville pour ses lecteurs ». En un sens, les représentations de la ville

Jean-Paul Jungmann : " nous vivons les choses et nous vivons simultanément leurs

représentent ». Alors que dans un autre sens, les représentations de la ville donnent une idée

" La prise en considération, en premier lieu, d'un territoire support de représentations, apparaît

déjà comme une légitimation de son existence. Aussi, cette réalité anticipe et valide le

fondement de nos questionnements sur la matérialité et l'organisation de l'espace. Il s'agit là

peut-être d'une réponse à l'interrogation-critique de Bernard Lepetit : ³Comment s'assurer de

l'existence d'une réalité géographique, sauf à opérer le choix préalable de l'échelle qui viendra

en donner l'image ?´ ».

Parmi les représentations de la ville se trouvent celles données par les textes littéraires. Les

descriptions de la ville dans les romans représentent une source de compréhension inspirante. Selon Donald James, " les romans imaginent une sorte de ville vivante >"@FDUODYLOOHH[LVWH dans un complexe système vivant, pas seulement dans son architecture. Les romans sont les

paroles aidant par leur caractère à construire la ville vivante et symbolique ». La relation

entre les romans et la ville renvoie à celle existant entre la littérature et les sciences sociales.

Cette relation est expliquée par Anna Madoeuf comme suit : " La littérature offre aux sciences

sociales une source de récits multiples, pertinents et originaux ainsi que des modalités ». La

physique et sociale. Selon Paul Ricoeur, la ville se donne " à la fois à voir et à lire ». Les

de cette relation unique entre la ville, sa lecture et son écriture particulière que Roland Barthes

perçoit ODYLOOHGDQVVRQHQVHPEOHFRPPHXQH°XYUHH[SRVpHGHYDQWVRQOHFWHXUYLVLWHXURX passant dans la ville : (celui que nous sommes tous), est une sorte de lecteur qui, selon ses obligations et ses

déplacements, prélève des fragments de l'énoncé pour actualiser en secret. Nous sommes tous

Ibid L'image en architecture : de la représentation et de son empreinte utopique ibid. Images et pratiques de la ville ancienne du Caire : les sens de la ville Urban Space in Contemporary Egyptian Literatureop. cit. Lire les villes : panoramas du monde urbain contemporain

Esprit

op. cit.

Introduction

un poème différent en changeant un seul vers ; à notre insu, nous sommes un peu ce lecteur souvent dit et comme Hugo l'a exprimé mieux que quiconque, mais ce n'est pas un poème classique, un poème bien centré sur un sujet ».

Dans un autre passage Barthes affirme que :

" Dominant toutes ces lectures de diverses catégories de lecteurs (car nous avons une gamme

pourquoi que je dirai que le plus important n'est pas tant de multiplier les enquêtes ou les études

fonctionnelles de la ville que de multiplier les lectures de la ville, dont, malheureusement, jusqu'au présent, seuls les écrivains nous ont donné quelques exemples ».

mécanique à habiter, à vivre et à dire le monde, est un objet romanesque universel qui ouvre

La relation entre la ville et la littérature est traitée dans le domaine de la critique littéraire, de

même que celui des sciences humaines et sociales en DQDO\VDQWOHV°XYUHVURPDQHVTXHV

poétiques et théâtrales depuis les années 1950. Parmi les études marquantes dans ce domaine,

(1971). Les deux ouvrages contribuent à expliciter " les rapports entre territoire, perception et compartimentation des savoirs imposés par la science cartésienne ». Nous pensons que les

études analytiques des représentations littéraires de la ville servent principalement à ajouter des

dimensions nouvelles et intéressantes à la compréhension celle-ci. Les descriptions de la ville

Lanot : " Comme la guerre, la ville occupe, dans les textes littéraires, une place très importante.

>"@Il appartient donc aux géographes, aux urbanistes, aux sociologues, etc., de solliciter les textes littéraires pour enrichir leurs analyses sur la ville ». op. cit. Ibid

La ville et

op. cit.

Introduction

des opinions exprimées dans chaque roman cité, et de ne pas porter de jugement, sauf dans le ville et le discours, il y a un rapport ». en en proposant une interprétation qui nous aide à mieux comprendre les enjeux et les motifs pour lesquels ceux-ci sont employés. Nous partons du principe énoncé par Frank Lanot que

distance prise par rapport aux romans analysés est basée sur leur nature fictionnelle. Celle-ci

est considérée par le poète Louis Aragon comme un " mentir-vrai » entre les fictions et les

La dimension sociale est très importante dans notre lecture du centre-ville du Caire. Nous

doit être faite à partir du contenu social ». L'étude de celui-ci, selon Tricart, " doit précéder la

description des facteurs géographiques qui donnent sa signification au paysage urbain. Les faits

sociaux, précisément parce qu'ils sont un contenu, précèdent les formes et les fonctions et, pour

ainsi dire, les englobent ». Dans les analyses que nous effectuons des romans sélectionnés, et le paysage urbain du centre-ville. Les ressentis des personnages de ces romans, présents dans leurs observations et leurs dialogues, apportent encore de nouvelles connaissances de leurs

sociale de la ville ainsi que les contextes politiques et économiques dans lesquels la ville évolue.

Les villes invisibles

op. cit. Ibid Ibid.

Lectures de villes : formes et tempsop. cit.

op. cit.

Introduction

peuvent en retirer. Une page de Rousseau, ou de Dickens, ou de Proust, présentant la description en effet, nous voyons, en arrière-plan du personnage, se déployer un univers urbain, avec ses découvrons ». illustré la nomination de Naguib Mahfouz pour le prix Nobel de littérature en 1988, pour

du roman égyptien, " a fait du Caire le support de la plupart de ses °XYUHV et dépeint le paysage

harmonieuse et diverse, tout cela fait du Caire une ville littéraire par excellence : " Le Caire n'est pas un roman, c'est un conte circulaire qui va dans tous les sens ». La ville du Caire ne

représente pas uniquement un lieu où se déroulent les évènements dans un roman, elle réagit

comme un héros principal mais immobile. Selon le poète et critique littéraire Marc Kober : " Le

Sur un autre plan, depuis le début du XXe siècle, les représentations littéraires du Caire

particulièrement frappante en Egypte où elle se manifeste à deux niveaux : celui du rôle social

des écrivains et celui du contenu de leurs productions romanesques ».

Selon la critique littéraire Ève de Dampierre-Noiray, les représentations littéraires du paysage

La ville et

op.cit. op.cit.

Ibid.,

Introduction

incongru de consacrer une telle quantité de travail de recherche à des analyses politiques et

les représentations littéraires du centre-ville du Caire, reflétant une réalité sociopolitique, sont

des sources primordiales dans la lecture de la ville et par suite dans sa compréhension. Les représentations cinématographiques de la ville sont aussi importantes que celles offertes

par les textes littéraires. La ville et le film cinématographique sont intimement liés : la ville est

finalement des images qui transforment la ville en " une unité symbolique chargée écran, qui donnent une impression de continuité et de mouvement au spectateur. Les espaces

de la ville ressemblent aux espaces cinématographiques : les deux sont appropriés par le

mouvement. Par ceux-ci on perçoit des images de la ville, de sa société habitante, de même que

de ses contextes politiques et économiques. comme un film dont les événements se poursuivent sans cesse. Cette relation confirme la

capacité des représentations à déchiffrer et à comprendre la ville, tout en soulignant

territoire ». Les images cinématographiques ne peuvent pas être considérées uniquement

comme des représentations des réalités citadines, mais aussi des éléments qui " activent les

tissu urbain ».

toute réalité à sa capacité de montrer ou de se montrer et mue les communications en voyages

la ville et, par la suite, celle-ci sera transformée à son tour. En outre, les représentations

cinématographiques, tout comme les représentations littéraires, donnent une idée de la valeur

Ibid

Architecture: Meaning and Place, Selected Essays

Le territoire comme palimpseste et autres essaisop.cit. op. cit.

Introduction

La ville du Caire et son centre sont souvent représentés dans le cinéma. Différentes scènes dans

les films cinématographiques réalisés par les grands réalisateurs égyptiens tel que Salah Abu

Seif, Henry Barakat, Kamal ElSheikh, Youssef Chahine et Tawfiq Saleh, ont montré les rues, les places et les lieux remarquables du centre-ville sans oublier la société qui y habite. Ces °XYUHVFLQpPDWRJUDSKLTXHVUHPDUTXDEOHV adaptant SDUIRLVOHV°XYUHVOLWWpUDLUHVPDUTXent, selon André Raymond le triomphe de la tendance du réalisme. pas les négliger totalement dans ce travail. Par contre, elles seront moins mobilisées que lesquotesdbs_dbs12.pdfusesText_18

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