26 sept. 2011 · Généralement, un enfant est pauvre, car il naît dans la pauvreté. La pauvreté engendre la pauvreté et crée un cercle vicieux.(3) Un enfant vit ...ImagesTout afficher![]()
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CONSEIL DE L'EMPLOI,DES REVENUS ET DE LA COHÉSION SOCIALE
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CONSEIL DE L'EMPLOI,DES REVENUS ET DE LA COHÉSION SOCIALE
LES ENFANTS
PAUVRES
EN FRANCE
RAPPORT N° 4
Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale est composé de :Président
JacquesDELORS
Membres :
PaulCHAMPSAUR
Président de l'Autorité de Régulation des TélécommunicationsXavierEMMANUELLI
Président du Samu Social International
Jean-MarcESPALIOUX
Président du Directoire du Groupe Accor
Marie-ThérèseJOIN-LAMBERT
Inspectrice générale honoraire des Affaires socialesJeanLAPEYRE
Conseiller social auprès de l'ambassade de France en ItalieJeanne-MariePARLY
Conseillère d'Etat
Le conseil est assisté par :
Rapporteur général
Michel Dollé
Rapporteurs
Olivier Bontout, Cécile Brousse, Christine Bruniaux, Denis Clerc, Véronique Delarue,Bénédicte Galtier et Laurence Rioux
Documentalistes
Patricia Routier et Marie-Christine Thomas
Secrétaires
Michèle Fataccioli et Françoise Leveleux
ISBN : 2-11-005551-0
En application de la loi du 11 mars 1957 (art. 41) et du code de la propriété intellectuelle du
1 erjuillet 1992, toute reproduction partielle ou totale à usage collectif de la présente publication
est strictement interdite sans autorisation expresse de l'éditeur. Il est rappelé à cet égard que
l'usage abusif et collectif de la photocopie met en danger l'équilibre économique des circuits du
livre. Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale113, rue de Grenelle 75007 Paris
Tél. : 01 53 85 15 00
E-mail : cerc@cerc.gouv.fr
www.cerc.gouv.fr 3SOMMAIRE
Synthèse - Lutter contre la pauvreté des enfants 5 Chapitre I - La pauvreté des enfants : un champ peu exploré 23 Chapitre II-Pauvreté, structures familiales et transferts 39 Chapitre III -Pauvreté des enfants et emploi des parents 61 Chapitre IV - Conditions de vie des enfants pauvres 79 Chapitre V-Pauvreté, école, devenir scolaire 93Chapitre VI- La pauvreté monétaire :
les enseignements d'une comparaison européenne 117Bibliographie145
Glossaire151
4 Pour élaborer ce rapport, le Cerc s'est appuyé sur un groupe de travail réunissant des membres de l'Insee, de l'Ined, du Cgp, de la Drees, de la Dep, de la Cnaf et des universitaires qui a organisé, en mars 2003, un colloque sur " Les enfants pauvres en France ». Les services de l'Insee, de la Drees, de la Cnaf ont, par ailleurs, réalisé des travaux statistiques complémentaires aux communications présentées à ce colloque. Le Cerc a bénéficié des remarques et commentaires de Mmes M.T. Espinasse (Observatoire national de la pauvreté), N. Legendre (Insee), F. Maurel (Insee), F. Oeuvrard (Dep), S. Ponthieux (Insee), F. Rosenwald (Dep), N. Roth (Drees) et de MM. C. Afsa (Insee), M. Castellan (CR Ile-de-France), J. Damon (Cnaf), Ph. Laffon (Dp), A. Jacquot (Insee), J.M. Hourriez (Insee), M. Glaude (Insee),P. Ralle (Insee), C. Rizk (Insee).
Le Conseil a approuvé le présent rapport le 21 janvier 2004LUTTER CONTRE LA PAUVRETÉ DES ENFANTS
5 Jusqu'à présent en France, la pauvreté des enfants n'a pas fait l'objet d'un examen attentif. L'observation, au travers de la statistique publique, est loin d'être systématique et les résultats sont très dispersés. L'analyse des causes ou des conséquences des situations de pauvreté des enfants est encore plus lacunaire. Enfin, l'objectif de réduction de la pauvreté des enfants n'est guère présent à l'agenda politique. Serait-ce que la pauvreté touche très peu les enfants dans notre pays ? À l'évidence non, puisque le taux de pauvreté 1 des enfants est, en France, plus élevé que le taux de pauvreté de l'ensemble de la population. Il est, par ailleurs, dans la moyenne communautaire. Mais on est loin de la situation des pays scandinaves qui concilient un faible taux de pauvreté dans l'ensemble de la population et un taux de pauvreté des enfants encore plus faible. Or, la question de la pauvreté des enfants devrait être considérée comme particulièrement importante pour deux ensembles de raisons. La plupart des courants de philosophie politique s'accordent pour dire qu'en matière de justice sociale, il est du devoir de la société de compenser ou de corriger les inégalités subies, à tout le moins, par les personnes qui ne portent aucune responsabilité dans la situation qu'elles connaissent. Ceci s'applique aux enfants plus qu'à toute autre personne. La seconde raison tient aux conséquences de la pauvreté éprouvée dans l'enfance sur les devenirs à l'âge adulte. Si le thème est encore peu étudié en France, un nombre impressionnant de travaux étrangers souligne que la pauvreté éprouvée dans l'enfance accroît les risques de la connaître à l'âge adulte. Il s'agit bien d'une augmentation des risques et non, heureusement, d'un déterminisme absolu, mais elle est suffisamment significative pour justifier sa prise en considération dans les politiques publiques. Un exemple : sortir de l'école à 17 ans, sans diplôme, est, nul n'en disconvient, un lourd handicap pour trouver une insertion professionnelle durable et de qualité. Dans l'ensemble du pays, chaque année, 4 % d'une classe d'âge sont dans ce cas. Mais près d'un tiers de ces jeunes, 30 %, se trouvent dans le dixième des ménages ayant le plus faible niveau de vie. Ce qui signifie que, dans ce dixième, la probabilité de sortir de l'école à 17 ans sans diplôme est trois fois plus forte que dans l'ensemble de la population. La moitié des jeunes sortis de l'école à 17 ans sans diplôme vit dans le cinquième des ménages les plus pauvres. L'objectif républicain de l'égalité des chances n'est manifestement pas atteint. De plus, l'incapacité à résoudre l'échec scolaire va d'autant plus peser, à terme, sur l'efficacité économique de l'ensemble de la société, que celle-ci s'oriente vers une " économie de la connaissance ». Le Conseil, dans ses précédents rapports, a déjà souligné le double risque quegénère l'échec scolaire : facteur d'inégalité des revenus et facteur d'inefficacité
économique globale. En soulignant ici qu'il se concentre sur les enfants pauvres, le Conseil met l'accent sur la dynamique de reproduction des inégalités, d'une génération à l'autre. (1) Proportion des enfants qui vivent dans des familles où le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté.LUTTER CONTRE LA PAUVRETÉ DES ENFANTS
6LE CONSTAT
Diverses facettes
de la pauvreté des enfantsAinsi, l'objectif de justice sociale rejoint l'objectif d'efficacité pour souligner l'importance de la lutte contre la pauvreté des enfants dans ses conséquences sur leur devenir. Si les pouvoirs publics, comme la société dans son ensemble, décidaient de mettre à leur agenda la réduction de la pauvreté des enfants, il faudrait répondre à trois questions : xQue savons-nous des situations d'enfance pauvre dans la société française contemporaine et de leurs conséquences sur le devenir de ces enfants ? xQuelles orientations donner aux politiques publiques ? xQuelles sont les améliorations de l'observation et de l'analyse à engager rapidement ? C'est à partir de ces trois questions que s'organise la synthèse de ce rapport dont les chapitres suivants détaillent les éléments. "Des personnes vivent dans des situations de pauvreté si leur revenu et leurs ressources (matérielles, culturelles et sociales) sont à ce point insuffisantes qu'elles les empêchent d'avoir des conditions de vie considérées comme acceptables dans le pays membre où ils vivent. » Cette définition, donnée par le Conseil européen en 1984, souligne tout d'abord que la pauvreté est un phénomène relatif : on est pauvre au sein d'une société donnée. Elle met en évidence aussi que la pauvreté est un phénomène ayant à voir avec l'exclusion : la pauvreté peut couper ceux qui en souffrent du reste de la société, en les empêchant d'accéder aux normes de consommation, en engendrant un phénomène de " honte », en les incitant à demeurer dans un " entre-soi » aux effets démobilisateurs. À cette définition il faudrait ajouter, s'agissant des enfants, que l'insuffisance des ressources à leur disposition peut les empêcher d'espérer atteindre, à l'âge adulte, les conditions de vie qui seront acceptables dans la société où ils vivront plus tard : la pauvreté des enfants doit aussi être analysée dans ses effets dynamiques.On peut mesurer la pauvreté des enfants
2 de bien des manières : faiblesse des revenus familiaux (on parlera alors de " pauvreté monétaire »), conditions de vie dégradées, handicaps sanitaires, échec scolaire lié à la situation familiale ou aux conditions matérielles de travail, illettrisme, pauvreté du réseau de relations sociales, etc. Mais, dans tous les cas, ces situations ne sont pas rares en France. Lorsque la grande pauvreté conduit ceux qui la subissent à vivre sans domicile, dans des habitations précaires, etc., ils échappent à l'observation statistique courante et donc à la plupart des analyses qui seront développées ici. (2) La limite d'âge retenue de manière privilégiée dans ce rapport est " moins de18 ans ».
LUTTER CONTRE LA PAUVRETÉ DES ENFANTS
7 RevenusOr, ce sont justement dans ces situations " marginales » que l'on trouve les cas de pauvreté les plus extrêmes, entraînant pour les enfants les conséquences les plus durables (en termes de santé ou d'accès à l'enseignement). Ceci étant, il convient de souligner que ces situations omises sont nettement moins fréquentes que celles décrites ici et qu'elles relèvent probablement de politiques de prise en charge plus intensives et fort différentes (même si, ici comme en tout domaine du social, il n'existe pas de frontière étanche). Environ un million d'enfants de moins de 18 ans, soit près de 8 % de l'ensemble, vivaient en 1999 en dessous du seuil de pauvreté monétaire 3 de 560 euros.Parmi eux, 0,7 million d'enfants vivaient dans des familles dont le niveau de vie était compris entre 450 euros 4 et le seuil de 560 euros (chapitre II). Avec le seuil de pauvreté retenu par les statisticiens européens (60 % du niveau de vie médian) soit, pour 1999, 670 euros, ce sont près de deux millions d'enfants de moins de 18 ans qui seraient concernés (près de 16 % de l'ensemble des moins de 18 ans). Ceci souligne l'assez forte concentration des situations de pauvreté (1,7 million d'enfants dont le niveau de vie était compris entre 450 et 670 euros mensuels). Pour illustrer les revenus correspondants au seuil de pauvreté de 560 euros en 1999, on peut d'abord essayer d'estimer sa valeur en 2003 ; compte tenu de l'évolution moyenne des revenus, on obtient environ 650 euros. A ce seuil correspond, par exemple, un revenu disponible mensuel après impôt de 1 170 euros pour un couple avec un enfant de moins de 14 ans ou de 1 365 euros pour un couple avec deux enfants de moins de14 ans.
Une autre façon d'approcher la question des enfants en situation de pauvreté est de s'intéresser aux familles percevant des minima sociaux, notamment le RMI (revenu minimum d'insertion) et l'API (allocation parent isolé). Bien que le dispositif du RMI concerne le plus souvent des isolés ou des couples sans enfants (environ 60 % des allocataires), il concerne néanmoins un nombre important de familles, parmi lesquelles on dénombre plus de 600 000 enfants de moins de 18 ans. Quant à l'allocation de " parent isolé », les familles monoparentales qui la perçoivent comptent environ 295 000 enfants de moins de 18 ans. Dans ce cas, les familles concernées ont des revenus légèrement supérieurs au seuil de pauvreté (dans sa définition française, mais ils sont inférieurs au seuil dans sa définition européenne). Au total, il convient de souligner la précarité des ressources familiales de ces familles monoparentales, ainsi que la proportion élevée de familles qui, au sortir de cette allocation (versée jusqu'à ce que le dernier enfant ait plus de trois ans), deviennent allocataires du RMI, faute de trouver un emploi suffisamment rémunérateur. (3) Ce seuil est calculé en évaluant le niveau de vie des ménages (leur revenu disponibleaprès impôt direct divisé par la taille du ménage en unités de consommation (chapitre I)
mesuré dans les enquêtes " Revenus fiscaux », Insee-DGI. Le seuil de pauvreté retenu ici est égal à 50 % du niveau de vie médian, soit le niveau de vie tel que la moitié des ménages a un niveau de vie plus élevé et la moitié a un niveau de vie moins élevé.(4)En utilisant un seuil de pauvreté plus " profonde », situé à 40 % du revenu médian,
soit 450 euros, on recense moins de 300 000 enfants (taux de pauvreté de 2,2 %).