[PDF] LA N°2 - PISTES DE CORRECTION (1956) - Hautetfort

David Diop qualifie négativement, d'emblée, par son titre le sujet de son poème : « le renégat » est un Africain qui a quitté sa terre pour l'Occident. En l'appelant de façon répétitive « mon frère », l'auteur souligne leurs origines communes. Mais pour se prétendre « civilisé » (V.
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David Diop qualifie négativement, d'emblée, par son titre le sujet de son poème : « le renégat » est un Africain qui a quitté sa terre pour l'Occident. En l'appelant de façon répétitive « mon frère », l'auteur souligne leurs origines communes. Mais pour se prétendre « civilisé » (V.
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LA N°2 - PISTES DE CORRECTION

David DIOP, Coups de pilon (1956)

Vocabulaire

Un renégat est une personne qui renie ses opinions, sa religion, sa patrie ou son parti. INTRO : Contexte historique / mvt litt / l"auteur / l"oeuvre/ le texte Comme d"autres poètes africains, Diop se rattache au concept de la négritude comme en témoigne son poème "Le Renégat" extrait de Coups de Pilon paru quelques années avant l"indépendance du Sénégal . Dans ce court poème à forme libre, l"auteur s"adresse à un homme qui tourne le dos à ses origines pour prendre l"apparence d"un blanc. On se demandera comment le poète exprime ses reproches

à son destinataire.

Nous verrons qu"un portrait à la fois physique et moral du renégat

offre à l"auteur une remise en question de la société dans laquelle évolue son

personnage.

PISTES D"ETUDE

Le portrait du renégat

o Qui est le renégat ? o Son portrait physique o Un être dénaturé

Un rapport de force entre deux mondes

o L"Opposition de deux mondes o Une mauvaise relation instaurée entre les deux civilisations o Les Blancs vis-à-vis du renégat o Le Noir vis-à-vis des Blancs

La position du narrateur

o Evolution du ton o La prédiction Question possible à l"oral : A qui Diop adresse-t-il sa prière ?

PLAN DETAILLE

Diop adresse sa prière à un renégat dont il dresse le portrait

Le portrait du renégat

1. Qui est le renégat

- Titre = qualification péjorative d"emblée - Mon frère → l"auteur étant africain, le renégat = Africain ayant quitté / renié sa terre natale le soleil de ton pays n"est plus qu"une ombre (antithèse soleil / ombre) → pays oublié - Honte de ses origines : La case de ta grand-mère / Fait rougir un visage... (V.9/10) = le " rouge de la honte sur le visage du renégat, qui se veut civilisé (V.8) = occidentalisé

2. Son portrait physique

- Portrait par métonymies : dents, lunettes, yeux, front, épaules - Insistance sur les signes extérieurs de richesse : lunettes d"or (V.2) ; smoking à revers de soie (V.4) (en relief en fin de vers) => réussite sociale en Occident - Or - soie - dents qui brillent (V.1) => tout ce qui brille ; l"apparence - Faire le beau dans les salons (monde bourgeois) : Piaillant et susurrant et plastronnant dans les salons (V.5) - long vers peu harmonieux (mots longs + assonance en " ant » des participes présents) ; bavardage inutile (piaillant) // mots sonores et vides (V.11) = se faire remarquer sans rien avoir à dire. => Dans ces salons le renégat est un pantin ridicule. Caricature

3. Un être dénaturé

- Des signes extérieurs de richesse appartenant tous aux sociétés occidentales (ex. smoking) ; le mot revers (V.4) suggère le revers de la médaille : la nature du renégat est autre. - Mimétisme stupide (copier les Blancs) au point de vouloir changer de facies : visage blanchi (V.1O) ; yeux rendus bleus (V.3) = se fondre dans le décor - Ou bien un Noir qui rejoue la caricature du Noir : dents qui brillent sous le compliment (V.1) = sourire légendaire de Banania ; correspondre à ce que veulent les Blancs => Un seul but = plaire aux Blancs. → susurrant (V.5) = leur dire des paroles doucereuses, pour s"en faire accepter En oubliant ses racines, le Noir a perdu son âme. Il choisit une culture au détriment d"une autre, valorisée par Diop.

La prière marque ...

II. Un rapport de force entre deux mondes

1. L"Opposition de deux mondes

- A partir du vers 6 → second mouvement dans le poème : confrontation des deux univers - Antithèse : salons (V.5) ≠ case (V.9) - lieux bourgeois ≠ pauvreté ; lieu du paraître ≠ lieu des sentiments vrais (grand-mère), des origines ; lieu qui sonne faux ≠ lieu des vraies valeurs => valorisation de l"Afrique - Autre valorisation de l"Afrique : pays lumineux → soleil (V.7) ; l"ocre rouge des terres (V.13) ≠ ombre (Occident). Hommage à l"Afrique rouge = pays martyr où le sang a souvent coulé - 2 présences humaines : l"Occident = maître (V.3) ≠ l"Afrique = grand-mère (V.9) => rapport de domination (héritage de l"esclavage) ≠ rapport affectif.

2. Une mauvais relation instaurée entre les deux civilisations

- Les Blancs vis-à-vis du renégat : en apparence, acceptation dans leurs Salons (V.5) ; compliment hypocrite (V.6) ; en réalité, mépris (condescendance - V.5) - Le Noir vis-à-vis des Blancs : naïveté / crédulité : yeux rendus bleus par la parole du maître (V.3) ; croire les mensonges des blancs ; manipulation par le langage (faire croire qu"ils sont pareils) - Un visage blanchi par les années d"humiliation et de Mea Culpa (V.10) : inconsciemment, l"humiliation subie (esclavage, colonialisme) marque encore le comportement du Noir - Mea Culpa = il se sent fautif (et non victime) → poids du discours religieux des Blancs (évangélisation de l"Afrique) ; les Noirs sont coupables d"être païens. => Maître = terme connoté à l"esclavage : malgré l"abolition de l"esclavage, le Blanc = dominant ; le Noir accepte de le voir comme tel. Condamnant le racisme des Blancs, Diop fustige tout autant l"attitude servile du renégat qui croit en sa propre infériorité et idéalise le modèle blanc.

La prière manifeste aussi...

III. La position du narrateur

1. Evolution du ton

- Evolution de l"anaphore : mon frère (V.1/2) → mon pauvre frère (V.4) : ton de pitié ? le plaint-il ?

Pauvre

≠ or ; smoking => richesse matérielle / misère morale - Tu nous fais pitié (V.6) = mépris Vers court, cinglant = mis en relief (interruption du bavardage creux des salons - cf. vers précédent)

Passage du " je » (mon

frère) au " nous » => déception de toute la communauté africaine - Condamnation de son attitude servile : moquerie de l"auteur : yeux rendus bleus (mensonge trop gros pour être cru) ; ... fait rougir un visage blanchi.... : mélange du clown auguste (rouge) et du clown blanc - Condamnation de la bonne conscience du renégat : ton front serein de civilisé (V.8) → trahison la paix dans l"âme - Poème = éveil de la conscience : apostrophe (mon frère) + marques de 2

ème

personne (ton pays - ton front - ta grand-mère - tes épaules...) = l"interpeller ;

l"accuser ; lui ouvrir les yeux

2. La prédiction

- Futur : tu fouleras (V.13) - rythmeront (V.14) => prédire le châtiment - Retour fatal au pays : repu de mots sonores et vides (V.11) = lassitude de cette vie fausse ; repu = dimension animale ; âme perdue → prise de conscience trop tardive - Image de l"apatride errant : ta marche : tu fouleras + fardeau de la caisse qui surmonte (ses) épaules (V.12) - Echec : ... vides / comme la caisse qui surmonte tes épaules (V.11/12) = bagage vide ; aucun bien matériel - Souffrance : mots angoissés (V.14) , à la place des mots sonores et vides ; marche inquiète (V.14) Remords ? - Afrique = personnification (allégorie) : terre amère et rouge (V.13) " amère » = elle lui en veut / vengeance - V.15 = finir sur les paroles du renégat => faire entendre son désespoir : Je me sens seul si seul ici ! (ponctuation forte = émotion + adverbe intensif " si » +

répétition de l"adjectif " seul » + allitération en " s ») = cri de souffrance : renié à son

tour par son continent

Conclusion

David Diop s"en prend aux déracinés qui privilégient la réussite sociale, aux Africains qui s"occidentalisent, qui se laissent mépriser par les blancs. Ils perpétuent la servilité de leurs ancêtres esclaves. Le poète apporte une pierre à la décolonisation ; ce qui sera chose faite 4 ans plus tard au Sénégal qui acquiert son indépendance en 1960 et sera dirigé jusqu"en 1980 par le poète Léopold Sédar Senghor.

Rapprochement

possible avec Prévert : 2 poètes pareillement engagés. OU Villon : poèmes en forme de prières, dans les 2 cas.

Exemple de § rédigé

La fin du texte se présente comme une prédiction, voire un avertissement de la part du poète. Les conjonctions "Mais" et "lorsque" du vers 11 marquent un changement temporel. L"auteur envisage le difficile retour au pays du renégat, une fois la lassitude

de l"occident installée, marquée par l"emploi du mot "repu", qui fait penser à un

animal. Le vers 11 "Mais lorsque repu de mots sonores et vides" rappelle le vers 5 sur le plan de la parole artificielle. L"Africain a pris conscience de la vie fausse qu"il a menée et devient alors un homme errant portant un fardeau plus symbolique que concret. Ce bagage vide, cette absence de biens matériels témoignent de l"échec du parcours de cet homme. Puis la souffrance s"installe comme le signalent les mots/adjectifs "angoissés" et "inquiète" du vers 14. La difficulté à revenir au pays s"entend dans l"allitération en [r] du vers 13 "Tu fouleras la terre amère et rouge

d"Afrique". Le continent africain est personnifié par l"allégorie suggérée dans l"adjectif

"amère". Pour finir le poète choisit de faire parler le renégat. Sa douleur, son émotion

transparaissent dans le dernier vers marqué par la répétition de l"adjectif "seul",

intensifié par l"adverbe "si" et l"allitération en [s] : " Je me sens seul si seul ici !". Lequotesdbs_dbs3.pdfusesText_6