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marocaine – qui constitue une question centrale pour le présent et sur- tout pour nombre de footballeurs ces dernières années, et c'est se qui risque de se qui a réalisé sa biographie,«l'îlot misérable dans le quartier Cuba ressemble à tout devant la Yougoslavie par 0 à 1 et victoire sur le Mexique par 3 à 2, acquise



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LeMondeJob: WIV0799--0001-0 WAS LIV0799-1 Op.: XX Rev.: 18-02-99 T.: 06:45 S.: 111,06-Cmp.:18,08, Base : LMQPAG 37Fap:100 N

o :0073 Lcp: 700 CMYKVENDREDI 19 FÉVRIER 1999Walser, la volonté d'impuissance

Romans ou petites

proses, les livres de l'•crivain suisse de langue allemande sont autant de voyages dans un monde f•erique aux contours d'une inqui•tante candeur. Un univers aux pouvoirs •trangement enchanteurs

Si l'on devait quali®er le

monde de Robert Walser, il faudrait avoir recours aux cat•gories •l•men- taires et paradoxales dont il use lui- m-me “ sati•t•, fondant sur elles, comme sans y penser, une esth•tique et une morale existentielles : le petit et le grand, le bon et le m•chant, le doux et le violent, le puissant et le fragile, le riche et le pauvre... Tous les livres de l'•crivain suisse de langue allemande, romans ou petites proses, sont des voyages, ou plus exactement des pro- menades dans ce monde de contrastes myst•rieusement r•concili•s. Monde f•erique et pourtant naturel, dont l'in- qui•tante candeur, au lieu de nous pro- jeter dans un au-del“ inconsistant, nous ram˜ne incessamment ici-bas,dans les rues des villes, et, avec plus d'insistance, sur les chemins de traverse d'une campagne trans®gur•e.

D˜s lors, comment peut-il se faire

que le charme •trange consign• et d•- ploy• dans toutes ces pages agisse tou- jours ? Quelle est cette voix inimitable qui, tout en modulant le m-me air sans prestige apparent, parvient “ maintenir le lecteur sous un tel enchantement qu'il en redemande, ravi, ne se lassant jamais ?

Les trois livres qui paraissent au-

jourd'hui rassemblent des courtes proses ± d'une page “ une dizaine ± de

Walser. Le premier, Les R•dactions de

Fritz Kocher, r•unit trois ensembles

compos•s et publi•s par l'•crivain en 1904
(Les R•dactions), 1913 (Petits Essais) et 1914 (Histoires). Certains des textes de ce volume, comme l'admirable " Kleist “ Thoune », avaient d•j“ •t• traduits par Jean-Claude Schneider (Sur quel- ques-uns et sur lui-m-me, Gallimard, " Arcades », 1993). Les vingt-cinq tex- tes regroup•s sous le titre de l'un d'eux,Retour dans la neige, constituent le pre- mier volume des proses publi•es entre

1899 (Walser avait alors vingt et un ans)

et 1929 (date de son internement dans un •tablissement psychiatrique, qui ne prendra ®n qu'“ sa mort, le jour de

No—l 1956), dans des journaux et revues

et dont seule une partie fut reprise en volumes par l'•crivain. En association avec les Archives Walser de Zurich, les •ditions Zo• projettent ainsi de tra- duire l'ensemble de ces textes. Marie, en®n, est un bref r•cit datant de mai 1916.

Yaurait-il deux Walser ? L'auteur des

romans, qui publia entre 1906 et 1909 trois livres r•pondant “ cette appella- tion ± Les Enfants Tanner, Le Commiset

L'Institut Benjamenta, traduit par

Marthe Robert d˜s 1960, chez Grasset

±, auxquels il faut ajouter Le Brigand,

•crit en 1925, mais publi• de mani˜re posthume (1). Au moins trois autres ro- mans furent d•truits par l'•crivain. Le second Walser serait celui des quelque mille cinq cents courtes proses command•es ou accept•es par les jour- naux berlinois et suisses, puis parfois rassembl•es en recueils : contes, fables, histoires, r-ves •veill•s, fantaisies auto- biographiques, " essais » ± mais il ne faut pas se laisser troubler par ce mot, l'essayiste n'•tant pas moins fantaisiste que l'•crivain. A l'exception des R•dac- tions de Fritz Kocher, qui sont juste ant•- rieures aux romans, les autres livres de proses ont •t• publi•s ± jusqu'en 1925 ± apr˜s la p•riode romanesque.

Cette s•paration est pour une bonne

part arti®cielle. Si l'on prend les ro- mans, on peut ais•ment d•tacher des pages qui ressembleraient alors, comme des súurs, aux proses. A l'in- verse, il n'est pas dif®cile d'imaginer les courtes histoires de Walser d•velop- p•es jusqu'“ devenir des romans. En fait, l'•crivain semble n'avoir aucun souci de la forme, encore moins du ro- man en tant que tel ; plus pr•cis•ment, il n•glige d'y penser. En ce d•but de si˜cle oŸ l'esth•tique romanesque va reste “ l'•cart. Robert Musil, l'un des te- nants de cette " r•volution », avait per- Øu cette marginalit• ; il •crivait en 1914 que, au " jeu litt•raire », Walser substi- tuait un " jeu humain, plein de souplesse, de r-verie, de libert• et qui offre toute la richesse morale de ces journ•es d'oisivet•, inutiles en apparence, oŸ nos convictions les plus fermes se d•font en une agr•able indiff•rence ». N•gligence. Indiff•rence. Oisivet•. injonctions d'une existence livr•e “ elle- m-me, abandonn•e “ " un indicible quelque chose ». L'ob•issance est d'ail- leurs la plus constante de ses tenta- tions : ce qui donne “ l'existence wals•- rienne une bien singuli˜re ®gure...

Pourtant, derri˜re cette paresse, ce va-

gabondage permanent qui ne veut souffrir aucune contrainte, sinon celle qu'il a librement consentie, une voix se compose, un style s'•labore, savam- ment a•rien, un monde vient au jour.

Monde inqui•tant disions-nous, “ force

de frþler la folie, de d•raisonner avec entrain et enthousiasme. Les autopor- traits abondent, qui montrent " le fou ». Celui-ci, dans Marie: "Je me tiens moi-m-me pour un type plutþt bon, b-te, honn-te que mauvais, malin et dou-teux, pour candide plutþt que compl˜te- ment retors, pour plutþt droit que courbe et pour malheureusement plutþt insigni-

®ant qu'important et consid•rable. »

Toujours les oppositions...

Univers enchant• aussi, r•dim• par

la volont• d'impuissance, que la m•- chancet• et la malignit• ont d•sert•.

Chez Walser, le " prince du

monde » est charmant, prime- sautier. Il tient son pouvoir de d•nier tous les pouvoirs. Mais il reste un prince, comme Walser lui-m-me auquel la litt•rature donne des ailes !

Walter Benjamin notait, en 1929, que

" la guirlande est le mod˜le de ses phrases ». " L'id•e qui les traverse en va- cillant est un fain•ant, un gueux et un g•- nie, comme les h•ros des proses de Wal- ser. Il ne sait du reste montrer que des ªh•rosº, incapable de se d•tacher du personnage principal, et s'en est tenu “ ses trois romans pr•coces pour ne vivre d•sormais que dans la fraternit• de ses

LES R...DACTIONS

DE FRITZ KOCHER

suivi de

HISTOIRES

et de PETITS ESSAIS (Fritz Kochers Aufsðtze.

Geschichten. Aufsðtze)

de Robert Walser.

Traduit de l'allemand

(Suisse) par Jean Launay.

Gallimard,

" Du monde entier »,

342 p., 130 F (19,81¨). Patrick K•chichian

EDUARDO MANET

le Feuilleton de Pierre Lepape page IIJEAN RISTAT page IIILEONARDO SCIASCIA pages IV et VGABRIEL TARDE page IXLA BIOGRAPHIE

Historique, typologie, problèmes

juridiques, Salon... Enquête sur un genre qui ne cesse de susciter l'engouement pages X et XILITTERATURES ESSAIS b

RETOUR DANS LA NEIGE

Proses br˜ves, I

de Robert Walser.

Traduit par Golnaz Houchidar,

pr•face de Bernhard Echte.

Ed. Zo• (Gen˜ve, diff. Harmonia

Mundi), 144 p., 98 F (14,94¨).

MARIE de Robert Walser.

Traduit par Jean Launay

(bilingue). Ed. du Rocher 96 p., 34 F (5,18¨).cent gueux pr•f•r•s », ajoutait Benja- min. Rappelons •galement que Kafka prisait beaucoup l'•crivain suisse, qu'il lisait en •clatant de rire.

Ces guirlandes et ce rire ne doivent

cependant pas faire oublier le caract˜re path•tique des •crits de Robert Walser, et singuli˜rement de toutes ces pages de prose qui semblent jet•es au vent, comme un appel." Dans un certain sens, nous sommes tous meurtris, nous ne faisons que nous habituer “ passer outre cette r•alit• trop d•licate, qui au quoti- dien ne peut -tre tol•r•e et qui, par cons•quent, ne doit pas exister. » Le lecteur, s•duit, se surprend “ r•- pondre “ cet appel. Walser, et ses " gueux », devient son semblable, son prochain. " Le fou » n'est plus un •tranger, mais un fr˜re. Avec son pro®l bas, son humilit• d•®nitivement or- gueilleuse, Walser touche “ l'universel. (1) Tous chez Gallimard.

ROBERT WALSER ARCHIV

PRÉHISTOIRE

La Chronique de

Roger-Pol Droit

page VII

LeMondeJob: WIV0799--0002-0 WAS LIV0799-2 Op.: XX Rev.: 18-02-99 T.: 08:14 S.: 111,06-Cmp.:18,08, Base : LMQPAG 37Fap:100 N

o :0074 Lcp: 700 CMYK L e castrat Zambinella, la plus intrigante des cr•atures de Balzac, n'est pas un de ses fa- meux " doubles ». Il est son G•- nie m-me, celui qui va tout en- fanter. " Ah ! c'•tait bien la mort et la vie, ma pens•e, une ara- besque imaginaire, une chim˜re hideuse “ moiti•, divinement fe- melle par le corsage. »Zambinel- la est “ la fois un •lixir de longue vie et une peau de chagrin.

D'abord centenaire, il devient

jeune femme puis se red•cr•pit “ la ®n.

Zambinella est l'art

fait homme-femme.

Vieillard •nigma-

tique, ses rides sont " aussi press•es que les feuillets dans la tranche d'un livre ».

Jeune diva, " c'•tait

plus qu'une femme, c'•tait un chef- d'úuvre ! ».

Zambinella s˜me le

trouble et essaime les doubles. Sa nature hybride impr˜gne tout, tout est scind• par son Z cinglant : vie et mort, chaud et froid, deuil et joie, jusqu'“ Paris, " la ville la plus amusante du monde et la plus phi- losophique ». Les doubles m-mes se d•- doublent : Sarrasine est Balzac jeune, le narrateur Balzac adulte. Le " spectre »Zambinel- la, lui, rassemble des traits de

Balzac p˜re, mort un an avant la

r•daction de la nouvelle. Pour que la Com•die fžt, ce p˜re de- vait -tre castr• comme lui-m-me avait tranch• d'un Z le nom du sien (Balssa). Ce n'est pas Freud qui le dit, c'est H•siode ! En •masculant son p˜re Ouranos,

Cronos prend les r-nes de l'uni-

vers, il d•livre les Titans et lance le r˜gne du Temps. Zambinella devient d˜s lors l'" Esprit », quisouf¯e oŸ il veut et gon¯e comme une voile la panse g•- niale de son cr•ateur. " Cette voix d'ange, cette voix d•licate ežt •t• un contresens, si elle fžt sortie d'un corps autre que le tien. »

Zambinella est l'inspiration

prodigieuse de Balzac qui roule au gr• des pages ses milliers d'un timbre argent•, souple comme un ®l auquel le moindre souf¯e d'air donne une forme, qu'il roule et d•roule, d•veloppe et disperse ». Principe pneumatique de la

Com•die, Zambi-

nella, " cr•ation ar- ti®cielle »et " tr•sor intrins˜que », en condense l'•ter- " Elle avait tout “ la fois cent ans et vingt-deux ans. »

L'harmonie par-

faite : " Il admirait en ce moment la beaut• id•ale de la- quelle il avait jus- qu'alors cherch• ؓ et l“ les perfections dans la nature. »

L'in®nie richesse :

" Jamais mine plus f•conde ne s'•tait ouverte aux cher- cheurs de mys- t˜res. »L'universali- t• interlope : " Tous les membres de cette famille parlaient l'italien, le franØais, l'espagnol, l'anglais et l'allemand, avec assez de perfection pour faire supposer qu'ils avaient dž long- temps s•journer parmi ces diff•- rents peuples. »En®n, bien sžr, la garantie de post•rit• : " Il voyait la Zambinella, lui parlait, la sup- pliait, •puisait mille ann•es de vie et de bonheur avec elle, en la pla-

Øant dans toutes les situations

imaginables, en essayant, pour ainsi dire, l'avenir avec elle. »

St•phane Zagdanski

II/ LE MONDE / VENDREDI 19 FÉVRIER 1999

le feuilleton b de Pierre Lepape

La Havane

mon amour G rand th•ologien du XII e si˜cle, salu• comme le nouvel Augustin, originaire, on ne sait trop, de Saxe, de Lorraine ou de Flandres, mais install• “ Paris, Hugues de Saint-Victor •crivait : " Raf®n• est l'homme pour qui la patrie est douce, courageux celui pour qui tout sol est une patrie, mais parfait est celui pour qui le monde entier est un exil. » Saint-Victor aurait pu pr•facer le dernier roman d'Eduardo Manet.

Manet distingue en effet tr˜s justement trois

mani˜res d'-tre exil• qu'on a trop tendance “ confondre. Il y a ceux qui ont •t• jet•s hors de leur patrie par la f•rocit• d'un r•gime politique auquel ils s'opposaient. Ceux-l“ ont emport• leur pays dans leurs bagages ; ils sont entre parenth˜ses, leur exil est une quarantaine, m-me si la quarantaine doit durer quarante ans. Intacts, ils attendent que les temps changent pour rentrer “ la maison. Le p˜re Hugo sur son rocher de Guernesey guettant la chute de Napo- l•on le petit, Soljenitsyne dans sa Russie am•ricaine du

Vermont, mais aussi les malfrats cubains de Miami

guettant le signal de la chute de Fidel pour retrouver “ La Havane leurs lucratives activit•s ant•rieures. Il y a la masse, souvent anonyme, de ces exil•s qu'on nomme aussi immigr•s. Des ouvriers, des paysans, des employ•s qui cherchent simplement sur la terre un endroit “ eux. Parce qu'ils sont de trop “ l'endroit oŸ ils sont n•s. De trop pour vivre, pour travailler, pour nourrir leur famille. Ils abandonnent peu et ne demandent pas grand-chose : un coin de la plan˜te pour subsister ; et c'est souvent encore trop. Et puis il y a le cas plus •trange des " vrais » exil•s, ceux qu'Hugues de Saint-Victor quali®e de " parfaits »: ceux qui ont choisi l'exil quand rien ne les obligeait “ le faire, sinon une imp•rieuse et int•rieure n•cessit•. C'est le cas de Leonardo Esteban, le h•ros du roman d'Eduardo Manet. C'est le cas de Manet lui-m-me, qui a quitt• Cuba et sa langue maternelle il y a trente ans pour vivre en France et •crire en franØais. Le plus souvent sur Cuba. Leonardo Esteban n'a aucun ennui politique avec le r•gime castriste. C'est un fonctionnaire z•l• et ef®cace, employ• dans les d•licates n•gociations internationales du commerce ext•rieur cubain. Il voyage beaucoup et plutþt librement. Il entretient depuis onze ans une tropicale liaison amoureuse avec Berta, une de ses coll˜gues, mari•e, m˜re de deux enfants, militante irr•- prochable et súur du puissant responsable de l'espion- nage cubain. Leonardo a •t• envoy• en France, au Pays basque, “ l'automne 1998, pour n•gocier un contrat avec un investisseur. Mais les n•gociations durent plus longtemps qu'il n'est permis. A La Havane, les autorit•s soupØonnent Leonardo de s'-tre laiss• s•duire, comme tant d'autres avant lui, par les sir˜nes du capitalisme. Pour le convaincre de rentrer “ Cuba et de reprendre sa place dans ce qu'il est convenu d'appeler la " r•volu-

tion », elles lui envoient Berta. Tr˜s vite, la jeunefemme se rend compte qu'elle ne repartira pas avec

son amant. La partie change de sens : est-ce que l'amour sera assez fort pour que Berta, “ son tour, d•cide d'abandonner sa famille, son id•al politique et L e roman d'Eduardo Manet tranche avec la litt•rature courante de l'exil. Il tranche •gale- ment avec la mode id•ologique. Les exil•s cubains, et nul ne le leur reprochera, nous ont habitu•s aux diatribes contre le r•gime castriste et contre son Lider maximo trans®gur• en p˜re Ubu barbu, r•gnant par la terreur polici˜re et l'embrigade- ment sur un pays d•truit, en proie “ l'incomp•tence, “ la corruption et “ l'application aveugle d'une version cara'be du marxisme-l•ninisme militaris•. Rien de tout cela chez Manet. D'avoir choisi l'exil lui •vite les r˜gle- ments de comptes sommaires. Il ne fait pas l'impasse sur la privation des libert•s, mais pas davantage sur le combat pour la justice. Il •vite les caricatures. Il pr•f˜re la r•alit• qu'il a choisi de vivre dans la distance de l'•criture, dans l'•loignement d'une autre langue.

La r•alit•, c'est le slogan simple et terrible de Castro :" Avec la r•volution, tout ; contre la r•volution, rien. »

Cela permet tous les ridicules, toutes les hypocrisies et tous les cynismes du militantisme r•volutionnaire. Cela permet d'impensables m•langes de rigorisme et d'exub•rance, de pauvret• et de g•n•rosit•, de dogma- tisme et d'invention. Et des rencontres inattendues, comme celle de l'immense croix dress•e sur la place de la R•volution lors de la visite de Jean Paul II, avec, en pendant, non moins immense, le portrait de Che

Guevara.

D'amour et d'exil n'a pas pour but de juger. Comme l'indique le titre, il s'agit d'amour. C'est par amour de l'exil. Enfant, il a connu un Basque, Anton, un ancien combattant de la R•publique espagnole qui a dž fuir Anton est devenu un p˜re pour Leonardo, ensemble ils se sont battus contre l'effroyable dictature de Batista. Avant de mourir des tortures qu'il a subies, Anton a r•v•l• au jeune garØon l'existence d'une valise de docu- ments demeur•e au Pays basque. Leonardo part “ la recherche de cette vieille relique, t•moin d'un p˜re d'adoption qui avait adopt• Cuba.

Nous sommes donc aux antipodes du traditionnel

voyage initiatique “ la recherche des racines et de l'identit•. Il ne s'agit pas de savoir d'oŸ l'on vient mais ce que l'on quitte : les racines de l'exil. Leonardo accomplit le voyage de retour qu'Anton a choisi de ne pas faire. Par l'exil, il rompt l'exil de l'autre, il rentre au pays qui n'est pas le sien. Il boucle un pass•. Il devient aussi ce qu'il •tait sans en avoir conscience : un Cubain, c'est-“-dire un exil•, venu d'Europe, d'Afrique, d'Am•rique ou d'Asie, de son gr• ou par la force, pour se m-ler “ d'autres exil•s et former, malgr• tout, malgr• les pr•dateurs, une nation. Leonardo parie sur le pass•, il s'y r•fugie, comme ces Cubains sans illusion qui continuent “ soutenir Castro par ®d•lit• aux esp•rances quarantenaires de la Sierra Maestra. Berta, la belle espionne, regarde vers l'avenir, vers ses enfants, quitte “ sacri®er son bonheur pr•sent.

Leonardo boucle l'histoire, Berta n'en a pas ®ni avecelle, la nostalgie n'est pas son fort : elle esp˜re. Esp•rer,

c'est aussi savoir que le pire peut arriver. Le triomphe du cynisme, le d•layage de la r•volution dans le tourisme et la prostitution et m-me le retour en arri˜re, au temps oŸ Cuba •tait le bordel de luxe des Etats- Unis, surveill• par des maquereaux galonn•s et sangui- naires. Berta prend ce risque-l“, celui du futur, ins•pa- rable de tout projet. Elle s'y sacri®e. Et Manet est aussi avec elle, comme il est avec Leonardo. L'exil, c'est aussi ce va-et-vient de la conscience et du cúur et l'impossi- bilit• de faire cesser ce mouvement. Eduardo Manet est un excellent auteur de th•"tre.

Les soixante-huitards et leurs vieux parents se

souviennent encore du grand succ˜s de sa pi˜ce Les Nonnes (Las Monjas), mise en sc˜ne par Roger Blin en

1969. Plus r•cemment, Un balcon sur les Andes,

Mendoza en Argentine et Ma'dea ont effectu• une trou- blante jonction entre la moderne tradition europ•enne de l'absurde et l'atmosph˜re sc•nique des Cara'bes marqu•e par le rythme et les rites, le c•r•monial vaudou et les jeux de marionnettes. Pas •tonnant donc si les dialogues d'Amour et d'exil sont si percutants, si ef®caces, sans cesser d'-tre sobres alors que les h•ros du livre, tant pour d•lier leur langue que par gožt de la f-te, boivent beaucoup. O n est en revanche assez •poustou¯• par la construction du roman. Pour les besoins de sa cause, Eduardo Manet a conØu une de ces mirobolantes architectures en continu comme en •laboraient dans leurs ateliers les exp•ri-quotesdbs_dbs25.pdfusesText_31