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Sophie Germain, une mathématicienne

face aux préjugés de son temps

Anne Boyé

Ç?Il faut en faire l"aveu pŽnible. Tandis que tant de femmes ont trouvŽ la cŽlŽbritŽ dans les Žcrits frivoles, la seule femme franaise qui ait rŽussi dans de son gŽnie Žchappe, est ˆ peine connue du public. S de celles dont la science et la philosophie ont tirŽ profit et honneur, et son l"esprit humain.È

Hippolyte Stupuy, 1879(1)

Le 18 mars 2016, ˆ l"Institut Henri PoincarŽ, l"Žmission par La Poste d"un timbre ˆ l"effigie de Sophie Germain Žtait l"occasion de cŽlŽbrer cette mathŽmaticienne, nŽe il y a 240 ans, le 1er prix de l"AcadŽmie des sciences, il y a 200 ans, en 1816. Raconter le parcours peu commun de Sophie Germain, prendre la mesure de l"audace insolite dont elle fit preuve pour se faire une place dans ce monde des les interdits la croyance en une rŽpartition Ç?naturelle?È de certaines qualitŽs entre les sexes finit par faire partie, inconsciemment, du moi profond de chacun et chacune, encore en notre XXIe parfois permettent des dŽbats dans nos classes et une prise de conscience. Jusqu"ˆ une pŽriode relativement rŽcente, nous connaissions peu de choses au

correspondance avait ŽtŽ publiŽe, ainsi que ses papiers philosophiques, gr‰ce ˆ

l"intervention de son neveu Armand-Jacques Lherbette (1791-1864). Adrien Marie Legendre (1753-1833) avait mentionnŽ sa contribution sur la rŽsolution du dernier premiers. Enfin la notice nŽcrologique que fit Guglielmo Libri (1803-1869) sur Sophie, en 1832, nous faisait revivre les Žpisodes marquants de sa vie dont elle lui avait fait la con fidence. Le prix de l"acadŽmie qui Žtait la seule reconnaissance officielle de ses talents, de son vivant, Žtait presque oubliŽ.Pour chercher et approfondir231 APMEP n o 523
l"association Femmes et mathŽmatiques. anne boye@neuf.fr Îuvres philosophiques denSophie Germain, Librairie de Fimin-Didot et Cie, 1) Žd. 1879 2e Žd. 1896.Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page231 Mais un hasard heureux de l"histoire a permis la redŽcouverte d"un grand nombre de ses papiers manuscrits, ˆ la fin du XX e et montrent que les recherches de Sophie Germain sur ce que l"on nomme le grand C"Žtait vraiment une grande mathŽmaticienne. Je me propose ici d"Žclairer quelques moments de sa vie, et ne ferai qu"Žvoquer la teneur de ses derniers travaux, qui sont quelques articles que je donne en rŽfŽrence. proclament combattre l"ignorance, lutter contre les oppressions religieuses, ont eu la chance de bŽnŽficier, gr‰ce ˆ leur situation sociale, de l"enseignement de prŽcepteurs, par exemple. Elles sont de fait peu nombreuses, et si ces salons sont des lieux de diffusion de la culture, en particulier scientifique, la place naturelle de la du Ch‰telet (1706-1749) se rŽvoltait en 1735, au nom de ses compagnes?: physique n"est sorti des mains d"une femme ? Pourquoi ces crŽatures, dont l"entendement para"t en tout si semblable ˆ celui des hommes, semblent pourtant arrtŽes par une force invincible, et qu"on en donne la raison si l"on peut (...) Je suis persuadŽe que bien des femmes ou ignorent leurs talents, par le vice de l"Žducation, ou les enfouissent par prŽjugŽ et faute de courage dans l"esprit. (2) Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), dont les idŽes devaient influencer longtemps les rŽformateurs de l"Žducation, rŽpondait dans l"ƒmile: Ç?Ainsi toute l"Žducation des femmes doit tre relative aux hommes. Leur plaire, leur tre utiles, se faire aimer et honorer d"eux, les Žlever jeunes, les soigner grands, les conseiller, les consoler, leur rendre la vie agrŽable et douce, voilˆ les devoirs des Ajoutant?: Ç?La recherche des vŽritŽs abstraites et spŽculatives, des principes, des axiomes dans les sciences, tout ce qui tend ˆ gŽnŽraliser les idŽes n"est point du ressort des femmes. (...) Elles n"ont pas non plus assez de justesse et d"attention pour rŽussir aux sciences exactes. (3) Si un peu plus tard, certains estiment que finalement des femmes instruites sont qu"elles reoivent la mme Žducation que les garons. C"est ce que souligne Camille SŽe (1847-1919), le fondateur d"un enseignement secondaire public pour les filles en

232Pour chercher et approfondir

APMEP n o 523
(2) PrŽface de la traduction de la Fable des abeilles, 1735, (de Bernard Mandeville (1670-

1733).

(3) ƒmile ou l"Žducation,1762 Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page232 1880
(4) :?Ç?Il ne s"agit pas de prŽparer les jeunes filles ˆ tre savantes. Leur mission de bonnes ma"tresses de maison, sachant ˆ la fois plaire ˆ leur mari, instruire leurs enfants, gouverner leur maison avec Žconomie et rŽpandre autour d"elles le bien

tre.È

C"est ce que rŽaffirmera Ferdinand Buisson (1841-1932), un des grands pŽdagogues du dŽbut du XX e Ç?Les femmes, dit-il, ont autant d"intelligence que les hommes. Mais il oublie qu"elles n"ont pas les mmes devoirs, la mme destination. Il oublie qu"ayant un autre but ˆ atteindre, elles doivent y tre prŽparŽes par d"autres moyens. (5) n"est pas fait pour l"abstraction et les sciences exactes, mais les mathŽmatiques les Žloigneraient peut-tre de leur r™le Ç?naturel?È de prendre soin de leur foyer. C"est dans ce contexte qu"est nŽe Sophie Germain, le 1 er avril 1776 dans une famille de soie en bottes?È (6) . Il appartient, semble-t-il, ˆ la bourgeoisie libŽrale instruite. On Žducation a-t-elle reue? ? Ce qui suivra permet cependant d"imaginer que la philosophiques rŽcents, probablement l"encyclopŽdie dite Ç? de Diderot et

Saint Hilaire.

En 1789, elle a 13 ans, c"est lˆ que dŽbutent les confidences qu"elle fera beaucoup plus tard ˆ son ami Guglielmo Libri, qui les livrera dans son hommage posthume ˆ

Sophie.

filles sont confinŽes ˆ la maison, mais les bruits du dehors leur parviennent. M.

Germain a en effet ŽtŽ Žlu dŽputŽ du Tiers ƒtat, et des rŽunions ont lieu ˆ son

domicile. Libri nous rapporte que Ç?cherchant une occupation assez sŽrieuse pour Elle semble lire tout ce qui se prŽsente, et ouvre un jour par hasard l"Histoire des mathŽmatiques de Jean-ƒtienne Montucla (1725-1799), qui comprend alors les deux

Sophie Germain233

APMEP n o 523
(4) Cf. Julien Moreau, Bulletin dde l"APMEP, N¡ 519, p/342-352. Ç Fallait-il ebnvoyer les filles au LycŽe ? È (5) Ferdinand Buisson sera prix Nobel de la paix en 1927. Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page233 premiers tomes (7) mŽditation sur une figure de gŽomŽtrie ne se serait aperu ni de la prise de Syracuse, ni du saccage de la ville, ni du glaive qu"un soldat romain avait levŽ sur lui. Un sujet capable d"absorber ˆ ce point quelqu"un la fascine. Elle prŽtend que c"est ce qui l"a dŽcidŽe ˆ se consacrer aux mathŽmatiques. J"oserai ajouter que l"histoire des mathŽmatiques racontŽe par Montucla est elle-mme passionnante et peut constituer (8) fait un programme d"Žtude mathŽmatique. Elle dit avoir commencŽ par le cours de mathŽmatiques d"ƒtienne BŽzout (1730-1783) (9) . Or le niveau de ce cours n"est pas dŽtourner de cette passion. On lui confisque ses chandelles, ses vtements, on lui retire tout chauffage. Elle n"est pas dŽcouragŽe, cache des bougies, travaille dans le froid, jusqu"ˆ ce qu"on la dŽcouvre le matin, enveloppŽe dans des couvertures, l"encre gelŽe dans l"encrier (10)

Cette volontŽ illimitŽe et cette Žnergie ˆ rŽaliser son projet, qui la suivront tout au

Elle se remet avec ardeur au travail et se rend compte que des ouvrages incontournables sont en latin. Elle l"apprend donc ! Et peut alors lire par exemple certains textes d"Euler (1707-1783) ou de Newton (1643-1727), non encore traduits.

Nous atteignons 1794, elle a 18 ans.

L"agitation rŽvolutionnaire s"est un peu apaisŽe, et mme si, au printemps de cette annŽe, Lavoisier a ŽtŽ guillotinŽ et Condorcet s"est probablement suicidŽ en prison, la RŽpublique a ˆ nouveau besoin de savants et d"ingŽnieurs. La France est en effet en guerre contre la Prusse. Le 28 septembre 1794 est crŽŽe l"ƒcole centrale des travaux publics, qui deviendra en 1795 l"ƒcole polytechnique, sous la houlette des plus grands savants et mathŽmaticiens. Sophie sent qu"elle doit poursuivre son instruction et s"initier aux thŽories les plus

234Pour chercher et approfondir

APMEP n o 523

1801 par les soins de JŽr™me Lalande comporte deux volumes supplŽmentaires.

(8) En ligne sur le site gallica.bnf.fr

(9) Le Cours complet de mathŽmatiques ˆ l"usage des gardes de la marine et de l"artillerie, par

ƒtienne BŽzout, servira de rŽfŽrence pour les candidats au concours d"entrŽe ˆ l"ƒcole

nombreuses rŽŽditions et des traductions dans plusieurs langues.

(10) La mathŽmaticienne Žcossaise, Mary Somerville (1780-1872), raconte qu"il lui est arrivŽ

Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page234 rŽcentes. Mais la RŽvolution a apportŽ peu de changements ˆ la situation sociale des femmes, en particulier sur le plan de l"instruction. L"ƒcole polytechnique, qui se veut ouverte ˆ des jeunes gens de toute condition, est Žvidemment fermŽe aux jeunes filles. Elle le restera jusqu"en 1972?! On la dit timide, se mlant peu au monde, mais elle est dŽterminŽe. On ne sait trop le fin mot de l"histoire, mais il semble qu"elle ait appris par hasard qu"un certain Auguste Leblanc Žtait dŽmissionnaire de l"ƒcole polytechnique. Elle dŽcide d"emprunter son nom pour se procurer certains cours, ceux de chimie de Fourcroy, et surtout celui d"analyse de Lagrange. Les Žtudiants Žtant encouragŽs ˆ communiquer leurs remarques aux enseignants, elle Žcrit au cŽlŽbrissime Lagrange, sous le Lagrange (1736-1813) est surnommŽ l"illustrissime. Il est un des plus prestigieux savants de l"Žpoque. Leblanc et veut le rencontrer. Elle doit dŽvoiler son identitŽ. Lagrange est bien sžr absolument rencontrer cette femme prodigieuse. Elle apprŽcie peu ce genre de ne veut pas tenir salon. Son espoir le plus profond est de devenir MATHƒMATICIEN, au sens plein du terme. Ce qui implique de refuser les sortes d"hommages que l"on fait ˆ certaines dames. Par exemple, Jean-Baptiste Gaspard pour ses frais?: P. S. - Vous m"avouerez, Mademoiselle, que si vous tes la seule demoiselle qui (11) Elle avait aussi repoussŽ, avec dŽdain et hauteur semble-t-il, l"astronome JŽr™me Lalande (1732-1807) qui lui offrait un de ses ouvrages, l"Astronomie des Dames (12) ˆ elle qui avait lu Newton dans le texte?! Cette attitude qui semble ˆ certains peu aimable est tout ce qu"elle peut trouver pour sauver son projet. Elle se prend de passion pour la thŽorie des nombres en lisant le dernier ouvrage du mathŽmaticien Legendre, Essai sur la thŽorie des nombres, paru en 1798. Sophie commence ˆ Žchanger avec lui. Il deviendra son guide privilŽgiŽ en mathŽmatiques.

Sophie Germain235

APMEP n o 523
(11) Lettre D"Ansse de Villoison ˆ Sophie Germain, le 14 juillet 1802 donner une Žducation gŽnŽrale, facilement disponible, aux femmes d"une certaine classe pour leur Žpargner du travail, et leur fournir des connaissances utiles et agrŽables. È Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page235

Fermat.

Lisant la traduction des ArithmŽtiquesde Diophante, faite en 1621 par Bachet de MŽziriac (1581-1638), Pierre de Fermat (?? - 1665) avait Žcrit dans la marge?: Ç Au contraire, il est impossible de partager soit un cube en deux cubes, soit un bicarrŽ en deux bicarrŽs, soit en gŽnŽral une puissance quelconque supŽrieure au carrŽ en deux puissances de mme degrŽ?: j"en ai dŽcouvert une dŽmonstration vŽritablement merveilleuse que cette marge est trop Žtroite pour contenirÈ

Autrement dit?: l"Žquation x

n y n z n n"admet pas de solution en nombres entiers non l"impossibilitŽ de son Žquation pour n4, et que le grand Euler l"a dŽmontrŽ pour n3. Elle ne peut Žvidemment se douter que la preuve gŽnŽrale ne sera apportŽe En 1801 paraissent les Disquisitiones arithmeticae(Recherches arithmŽtiques) de introduit en particulier la notion de congruence. Il ne sera traduit en franais qu"en parmi les mathŽmaticiens, ˆ les comprendre et ˆ utiliser les nouvelles notations. Au auxquels elle essaie de donner des rŽponses. Elle a besoin d"avis et de conseils. Qui mieux que Gauss peut les lui offrir??

236Pour chercher et approfondir

APMEP n o 523
Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page236

1804. Elle veut cependant tre jugŽe sans condescendance, sans tre considŽrŽe, au

mieux, comme une Ç? femme savante? È. Elle use donc une nouvelle fois du pseudonyme de M. Leblanc. Et Gauss est Ç? stupŽfiŽ? È par la ma"trise de ses Disquisitionesdont fait preuve ce M. Leblanc, et par les dŽmonstrations Ç?si fines?È de certains rŽsultats sur les nombres premiers. Ainsi commence une correspondance relativement assidue, qui va constituer longtemps la seule trace des travaux de

Sophie en thŽorie des nombres

(13) habituellement avare de ses compliments, ce qui en indique le niveau. En 1806 NapolŽon envahit la Prusse, et la ville de Brunswick o demeure Gauss est assiŽgŽe. Sophie prend soudain peur et veut Žviter ˆ cette gloire des mathŽmatiques veiller sur lui. Ce faisant l"identitŽ de M. Leblanc sera dŽvoilŽe. La correspondance

ŽchangŽe entre le gŽnŽral, Sophie, puis Gauss, conte des pŽripŽties savoureuses qui

feraient presque sourire, s"il n"y avait ce sentiment que M elle

Germain joue ici tout

encore plus d"admiration pour les talents de M. Leblanc devenu Sophie Germain. Ç Comment vous dŽcrire mon admiration et mon Žtonnement de voir mon estimŽ correspondant Monsieur Le Blanc se transformer en ce fameux personnage qui me donne un brillant exemple de ce que j"aurais du mal ˆ croire. Le gožt des sciences ont le courage de l"explorer en profondeur. Mais quand une personne du sexe qui, du fait de nos coutumes et prŽjugŽs, doit surmonter plus de difficultŽs que les hommes pour se familiariser avec ces Žpineuses questions, rŽussit nŽanmoins ˆ dŽpasser ces obstacles et ˆ apprŽhender leur partie la plus obscure, alors elle doit sans aucun doute possŽder un noble courage, des talents extraordinaires et un esprit supŽrieur.È (Lettre du 30 avril 1807) Ë la grande dŽception de Sophie, Gauss, pris par d"autres prŽoccupations et d"autres L"estime de savants, mme des plus grands, ne peut lui suffire. Il lui faudrait une reconnaissance institutionnelle, ce qui est quasi inaccessible pour une femme ˆ son Žpoque. Une occasion va se prŽsenter qu"elle va saisir, non sans audace une fois de plus.

En 1808, Ernst Chladni

(14) , de passage ˆ Paris, prŽsente une partie de ses expŽriences sur la vibration des surfaces Žlastiques, et ses Ç?figures sonores?È. Une surface, par

Sophie Germain237

APMEP n o 523
(13) Une partie de cette correspondance est publiŽe dans l"ouvrage d"Hippolyte Stupuy citŽ plus haut. (14) Ernst Chladni (1756-1827), physicien allemand considŽrŽ comme le fondateur de l"acoustique moderne. A publiŽ en 1802 : Die Akustik. Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page237 exemple mŽtallique, recouverte d"une mince pellicule de sable, vibre lorsqu"un de ses c™tŽs est frottŽ par un archet, et des sons sont Žmis, comme le ferait une corde de qui apparaissent presque magiquement dans le sable (15) L"Institut de France (crŽŽ en 1795 et qui remplace les AcadŽmies supprimŽes par la RŽvolution en 1793) lance un concours ˆ l"instigation de NapolŽon, pour Ç?que ces vibrations soient soumises au calcul, formuler une thŽorie mathŽmatique des surfaces Žlastiques et montrer qu"elle est en accord avec les rŽsultats expŽrimentaux?È. Louis Lagrange, renoncent. Sophie se prŽsentera seule au concours. Sa formation d"autodidacte comporte beaucoup de lacunes, en analyse en particulier. Elle a lu tout d"un autre ordre. pour 1813. Elle a conscience de ses faiblesses et demande ˆ certains de ses amis, comme Legendre, de l"aider. Mais elle a aussi gagnŽ des ennemis farouches, comme SimŽon Denis Poisson (1781-1840), qui a des relations parmi les membres de l"Institut. Ce monde n"est pas exempt de rivalitŽs et de batailles d"influences, mais honorable. L"inimitiŽ de Poisson ne fait que cro"tre. Il critique en particulier les (16) . L"histoire montrera que c"est plut™t Sophie qui a raison. Quoi qu"il en soit, mme si ses justifications mathŽmatiques sont parfois faibles, tout le monde s"accorde sur la justesse de l"Žquation ˆ laquelle elle aboutit. de l"Institut de France?! Le public venu nombreux le 8 janvier 1816 pour voir Ç?cette virtuose d"un genre nouveau?È fut cependant dŽu. Elle ne vint pas. Peut-tre parce que J-B. Delambre, le secrŽtaire de l"Institut, avait Ç?oubliŽ?È de lui envoyer des billets pour qu"elle et ses proches puissent venir?? De fait les dames bien sžr ne

238Pour chercher et approfondir

APMEP n o 523
(15) Ces expŽriences sont toujours rŽalisŽes au Palais de la dŽcouverte. t‰tonnements, et la faon dont Poisson en particulier a essayŽ de la dŽconsidŽrer. Boyé.qxp_Mise en page 1 08/04/2017 08:24 Page238 pouvaient tre acadŽmiciennes ni membre de l"Institut (17) , et les seules qui

jusqu"alors pouvaient assister aux sŽances Žtaient les Ç? Žpouses de? È. Il faudra

attendre 1823 pour que Sophie soit admise de plein droit ˆ assister aux sŽances de l"AcadŽmie des sciences, gr‰ce ˆ son ami Joseph Fourier (1768-1830) qui en est A-t-elle gagnŽ la reconnaissance de ceux qu"elle voudrait considŽrer comme ses j"habitais un autre pays. (...) Vous ne croiriez peut-tre pas qu"Žtant au milieu de Paris je ne puisse rŽussir ˆ voir un Monsieur Savart (18) qui a fait mille expŽriences curieuses. Il les montre ˆ des gens qui n"en peuvent tirer aucun parti. Ces faits sont dames, elles obtiennent des compliments et aucun avantage rŽelÈ se plaindra-t-elle

ˆ son ami Guglielmo Libri en 1826.

En effet, elle a continuŽ de travailler sur les surfaces Žlastiques, publiant ˆ son compte un mŽmoire en 1821 (19) . Elle a refait elle-mme une grande partie des musicale. En dŽcembre 1815, ˆ la session mme o Sophie Germain Žtait dŽsignŽe comme gagnante du concours sur les surfaces Žlastiques, l"Institut de France, Žtablissait un travaux sur les surfaces Žlastiques occupent alors largement l"esprit de notre hŽroïne, mais on dŽcouvrira que finalement Ç?elle n"a jamais cessŽ de penser ˆ la thŽorie des nombresÈ, dans une lettre ˆ Gauss de 1819, longtemps mŽconnue. Faute de rŽponses satisfaisantes, l"AcadŽmie des sciences (20) a remis le sujet au concours deux fois, puis l"a retirŽ en 1821. Il semble, sans certitude, que Sophie Germain ne soumit pas de mŽmoire, mme si l"Žtude de ses papiers retrouvŽs tardivement montre qu"elle avait mis en ordre nombre de ses recherches sur l"impossibilitŽ de l"Žquation de Fermat. Cherchant probablement un avis sur ce travail, elle a Žcrit ˆ Gauss, et a chargŽ un de ses amis, rencontrŽ ˆ Paris, de lui transmettre cette missive. C"est la fameuse lettre Fermat. C"est une nouvelle audace de Sophie, car elle n"a plus eu de nouvelle de Gauss depuis 1809. Et hŽlas Gauss ne lui rŽpondra pas. Le destin est ainsi fait que laquotesdbs_dbs47.pdfusesText_47