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ANDRÉE CHEDID
Le Message
Présentation, chronologie, notes et dossier par L
AUREHUMEAU-SERMAGE,
professeur de lettres
Avec la participation deL
AURENTJULLIER,
professeur en études de cinématographie, pour "Un livre, un film»
FlammarionRetrouver ce titre sur Numilog.com
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L"Enfant des manèges et autres nouvelles
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D
ELCASTILLO(Michel),Tanguy
F
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G
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La guerre de Troie n"aura pas lieu
G
RUMBERG(Jean-Claude),L"Atelier
Zone libre
J
ONQUET(Thierry),La Vigie
K
ESSEL(Joseph),L"Équipage
K RESSMANTAYLOR(Kathrine),Inconnu à cette adresse L
EROY(Gilles),Zola Jackson
Paroles de la Shoah
R UFIN(Jean-Christophe),Les Naufragés et autres histoires qui reviennent de loin S
AUMONT(Annie),La Guerre
© Éditions Flammarion, 2007.
Édition révisée en 2016.
ISBN : 978-2-0813-9062-1
ISSN : 1269-8822Retrouver ce titre sur Numilog.com
SOMMAIRE
Andrée Chedid, poète et romancière5
La genèse d"un récit7
Dénoncer la guerre et le chaos9
La dimension universelle de l"histoire12
Optimisme ou pessimisme : le "message» du récit13
Le Message
Vingt questions surLe Message128
Les personnages duMessage: un jeu de miroir129
Microlectures130
Quatre poèmes d"amour et de guerre135
La littérature engagée : écrire contre la guerre144
Éducation aux nouveaux médias151
Histoire des arts152
Un livre, un film153
Pour poursuivre votre lecture156Retrouver ce titre sur Numilog.com
QAndrée Chedid.
© Collection Andrée Chedid
Message2.indd 42/08/11 11:13:46Retrouver ce titre sur Numilog.com vie. Andrée Chedid décrit les soubresauts du corps de Marie, qui tantôt résiste tantôt cède aux assauts de la mort : "Par moments, ce corps se disloque : les genoux cèdent, le torse se courbe, la nuque ploie. Le sol l"aimante tout entier vers une chute inexorable, un puits sans fin» (p. 24). Devenu le confident de Marie qui livre ses douleurs et angoisses au sein de mono- logues intérieurs, le lecteur assiste, avec Anton et Anya, puis avec Steph, aux derniers moments de la vie de la jeune femme. Sa mort et celle de Gorgio sont intimement liées à la guerre et
à la folie meurtrière des hommes.
Peinture saisissante des effets ravageurs de la guerre,Le Mes- sagedécrit un pays "exigu qui ne compt[e] que trois millions d"habitants» (p. 72), dévasté par des conflits civils qu"aucune trêve ne semble pouvoir interrompre. Marie se souvient des mots de Steph décrivant la situation : "Ici, la destruction, la violence, la haine ont pris tous les masques. [...] Les voisins de la veille vous égorgent. Les amis de toujours vous poignardent. Les uns comme les autres n"ont plus ni compassion, ni réflexion, ni amour. L"horreur est partout. Le goût du sang les rend ivres» (p. 36). Un désordre terrifiant règne, fruit d"un conflit absurde où "les ordres fluctu[ent], vacill[ent], les groupes se divis[ent], se réconcili[ent]; tous les cas de figure d"alliance ou d"hostilité se suiv[ent] à un rythme hallucinant» (p. 72). Dans ce contexte, seuls semblent pouvoir survivre les francs-tireurs armés tel Gorgio. Confrontée à ce chaos, la population fuit, comme Anton et Anya, comme Steph et la foule qui avancent en direction du pont, cherchant le salut dans un autocar en partance. L"espace urbain porte la trace des conflits : Gorgio habite un immeuble à l"abandon, "dévasté, criblé de balles» (p. 77), et Marie se meurt dans une rue déserte où "les arbres déracinés, la chaussée 10
Le MessageRetrouver ce titre sur Numilog.com
défoncée, les taches de sang rouillées sur le macadam, les rec- tangles béants et carbonisés des immeubles, prouv[ent] claire- ment que les combats [ont] été rudes» (p. 21). En dressant un décor en ruines, Andrée Chedid souligne la violence de la guerre, dont elle révèle aussi l"ampleur en évoquant les victimes - "les massacrés, réfugiés, fusillés, suppliciés» -, et les pertes humaines - "hémorragies d"hommes, de femmes, d"enfants» (p. 31). Folie absurde, destruction apocalyptique, la guerre appa- raît comme un fléau sanglant. Mais l"histoire particulière de Marie, "atteinte d"une décharge dont elle était ou n"était pas la cible» (p. 21) et la description du pays ravagé semblent ne pas suffire à dénoncer la guerre et la cruauté des hommes : l"auteur, rompant le fil narratif, laisse entendre sa voix et intervient directement (et à plusieurs reprises) pour exprimer son dégoût et son incompré- hension face aux luttes incessantes et barbares. Elle s"adresse ainsi au lecteur, l"incite à réfléchir et à partager son indignation devant le constat effrayant d"une Histoire qui bégaie : "Sur cette parcelle du vaste monde, sur ce minuscule îlot de bitume, sur cette scène se joue, une fois de plus, une fois de trop, le théâtre barbare de nos haines et de nos combats» (p. 66); "Ici, comme en d"autres régions, chacun retrouve des raisons de haïr, de châ- tier, de massacrer. Avec ses bottes gigantesques aux semelles de plomb, l"Histoire rabâche, broyant sur son passage les hommes et leurs lieux» (p. 24). Se dessine alors la leçon implicite du paci- fisme, seule valeur capable de sauver l"homme et le monde.
Présentation
11Retrouver ce titre sur Numilog.com
La dimension universelle
de l"histoire Bien qu"il repose sur une intrigue précise et réunisse des pro- tagonistes fictifs, identifiés par leur prénom, un passé et un pré- sent,Le Messagecomporte une dimension universelle. À travers cette histoire singulière, Andrée Chedid parle de l"humanité tout entière et convie le lecteur à s"identifier au récit, car "dans chaque corps torturé tous les corps gémissent» (p. 31). Si ce dernier possède quelques informations relatives à la biographie de l"auteur et à la genèse du roman, il pourra être tenté d"y voir des clés de lecture et rapprocher le contexte duMessagedes conflits du Liban ou de l"ex-Yougoslavie. Pourtant, la guerre évo- quée par le récit est avant tout un symbole qui sert à stigmati- ser 1 efficacement toutes les autres : "Qu"importe le lieu! Partout l"humanité est en cause, et ce sombre cortège n"a pas de fin» (p. 31). Ainsi, Andrée Chedid se garde de circonscrire son intrigue à un lieu et à un temps précis. Aucun endroit ou monument signi- ficatif ne renseigne le lecteur sur le cadre spatial; l"époque semble contemporaine mais l"uvre n"offre aucun repère. Cette absence délibérée d"indications spatiotemporelles permet, peut- être, d"impliquer davantage le lecteur : l"histoire qu"il lit pourrait être la sienne. Le choix des noms des personnages est à cet égard significatif : "Marie», "Steph» - abréviation probable de "Stéphane» - sont des prénoms français familiers. "Marie» est par ailleurs commun à l"ensemble du monde judéo-chrétien.
1.Stigmatiser: condamner, dénoncer.
12
Le MessageRetrouver ce titre sur Numilog.com
"Anton», "Anya», "Gorgio», "Fodl», "Taras», "Brako» ont eux une consonance étrangère, sans qu"il soit possible de les ratta- cher d"emblée à une nationalité précise. Ils n"offrent donc aucun indice sur la situation géographique de l"intrigue. L"auteur s"emploie en effet à saisir dans ses personnages non pas ce qui les différencie les uns des autres mais ce qui les rapproche. Anya ne peut manquer de retrouver celle qu"elle a été dans la figure de Marie et de comparer son histoire avec Anton à celle du jeune couple; Gorgio voit dans Anton un double positif de son père et lit dans le visage de Marie la douceur de sa propre mère. De même, le lecteur pourra être amené à s"identifier à chacun des personnages:àtraversl"exemplarité de leurs caractères et de leur situation, l"histoire tend à l"universel.
Optimisme ou pessimisme :
le "message» du récit "Les sujets que je choisis, affirme Andrée Chedid, sont en général marqués par la tragédie et par l"espérance. Je veux garder les yeux ouverts sur les souffrances, le malheur, la cruauté du monde; mais aussi sur la lumière, sur la beauté, sur tout ce qui nous aide à nous dépasser, à mieux vivre, à parier sur l"avenir 1 .» On retrouve cette double tension évoquée par l"écrivain dansLe Message. Dénonciation de la guerre et de sa barbarie à travers l"histoire particulière de Marie et Steph,
1.Andrée Chedid,L"Enfant multiple, Flammarion, 1991, notice de l"auteur.
Présentation
13Retrouver ce titre sur Numilog.com
Le Messagepeut être rapproché du genre de l"apologue, récit à visée argumentative dont la fiction est au service d"une idée.
L"auteur fustige
1 le fléau que constituent les conflits civils et présente une vision réaliste et pessimiste de la marche du monde : l"homme ne tire aucune leçon de l"Histoire - "Depuis l"aube des temps, les violences ne cessent de se chevaucher, la terreur de régner, l"horreur de recouvrir l"horreur» (p. 31). Ce constat traduit une forme de désespoir : l"autodestruction de l"homme par la guerre est fatale et irrémédiable, et l"humanité n"est qu"un "monde pervers, [un] monde exterminateur, qui consume ses propres entrailles, qui se déchire et se décime sans répit» (p. 32). La fin du récit confirme ce pessimisme. Le geste de Steph est terrible : le jeune homme pacifiste, qui avait accepté malgré lui le pistolet de son collègue Taras, précisant que jamais il ne s"en servirait, cède à la vengeance. Il semble contaminé par la violence, sans même savoir si celui qu"il tue est responsable de la mort de Marie; il se plie ainsi au "cérémonial légendaire des meurtres» (p. 44) en temps de guerre. Cette ten- tation du désespoir, distillée dans l"uvre, s"accompagne d"une incompréhension : comment concevoir que l"homme soit l"auteur de sa propre destruction? Anya "se demand[e] comment et pourquoi ces peuples d"une minuscule et même planète, ces humains d"une dérisoire longévité, irrémédiable- ment voués à la même mort, [peuvent] répéter, multiplier, ces jeux macabres et s"en glorifier» (p. 53). Tout espoir en l"homme pour changer l"ordre du monde semble impossible : "Comment croire, comment prier, comment espérer en ce monde» (p. 32), s"interroge le narrateur, se faisant l"écho de Steph - "En qui, à quoi croire désormais?» (p. 36).
1.Fustige: combat, critique violemment.
14
Le MessageRetrouver ce titre sur Numilog.com
DOSSIER
parents, un frère et une sur feignent la mort pour échapper aux sections d"exécution qui quadrillent la ville.] G RIMBERT, Philippe,Un secret, Grasset, 2004, rééd. Le Livre de Poche,
2006. [Le narrateur découvre la tragique histoire de sa famille
livrée aux horreurs de la Seconde Guerre mondiale et au géno- cide juif.] J APRISOT, Sébastien,Un long dimanche de fiançailles, Denoël, 1991, rééd Folio, 1993. [Une jeune femme enquête sur la mort de son fiancé condamné à mort lors de la Première Guerre mondiale.] R ADIGUET, Raymond,Le Diable au corps, Grasset, 1923, rééd. Flam- marion, coll. "Étonnants Classiques», 2013. [Alors que la Pre- mière Guerre mondiale fait rage, un adolescent de quinze ans vit une liaison passionnée avec une femme de trois ans son aînée, fiancée à un soldat parti au front.] R UFIN, Jean-Christophe,Le Collier rouge, Gallimard, 2014, rééd. Folio,
2015. [En 1919, un juge militaire mène l"enquête sur ce qui a
mené un héros de la guerre à être emprisonné dans une caserne déserte.] V ERCORS,Le Silence de la mer, Les Éditions de Minuit, 1942, rééd. Le Livre de Poche, 1967. [Lors de l"Occupation nazie, un vieil homme et sa nièce sont contraints de loger chez eux un officier allemand épris de culture française.]Retrouver ce titre sur Numilog.com
Mise en page par
Pixellence/Meta-systems
59100 Roubaix
N o d"édition : L.01EHRN000519.N001
Dépôt légal : septembre 2016
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