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SE SOIGNER AU MALI

Collection A: Hommes et Sociétés B

Consed scientifique : Jean-François BAYART (CERI-CNRS), Jean-Pierre CHRÉTIEN (CRA-CNRS), Jean COPANS (EHESS),

Georges COURADE (MSA, ORSTOM),

Henry TOURNEUX (LACITO-CNRS, ORSTOM).

Couverture : Terre cuite de Djenné (m-m siècle). Collection particulière.

O Éditions KARTHAL,A et ORSTOM, 1993

ISBN : 2-86537-419-X (KARTHALA)

ISBN : 2-7099-1133-7 (ORSTOM)

SOUS LA DIRECTION DE

Joseph Brunet-Jailly

Se soigner au Mali

Une contribution des sciences sociales :

douze expériences de terrain

Hommage à Clamle, PuìrauZt

Éditions KAR'IHALA

75013 Paris 22-24,

bd Arago

Éditions de ORSTO TOM

213, rue La Fayette

75010 Paris

Cet ouvrage a été publié avec le concours du ministère français de la Coopération et du Développement ont participé à la rédaction de ce livre : Joseph BRUNET-JAILLY, économiste, doyen honoraire de la Faculté des sciences économiques d'Aix-en-Provence, directeur de recher- ches l'Institut Français de Recherche Scientifique pour le Déve- loppement en Coopération (O.R.S.T.O.M.), en poste

à l'Institut

National de Recherche en Santé Publique (I.N.R.S.P., Bamako, Mali)

Seydou

COULIBALY, économiste (Ecole nationale d'Administration, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du Projet d'appui à la recherche en santé publique (I.N.R.S.P., Bamako, Mali), après' avoir étudié à Paris (diplôme d'études supérieures (( Économie et gestion des systèmes de santé )), Université de Paris I)

Birama Djan

DIAKITÉ, économiste (Ecole nationale d'Administration, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du Projet d'appui àla recherche en santé publique (I.N.R.S.P.,

Bamako, Mali), actuel-

lement étudiant à l'université Senghor d'Alexandrie (Egypte)

Djigui

DIAKITÉ, docteur en médecine (Ecole nationale de Médecine et de Pharmacie, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du

Projet d'appui

à la recherche en santé publique (I.N.R.S.P.,

Bamako, Mali), actuellement étudiant

à 1'Ecole des Hautes Etu-

des en Sciences Sociales (Marseille) Kafiig DIARRA, économiste (Ecole nationale d'Administration, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du Projet d'appui à la recher- che en santé publique (I.N.R.S.P., Bamako, Mali), après avoir

étudié

à Paris (diplôme d'études supérieures x Économie et gestion des systèmes de santé n, Université de Paris I)

Tiéman

DIARRA, sociologue, chef du département de sociologie et eth- nologie de l'Institut des Sciences Humaines (Bamako, Mali)

Mamadou

MARIKO, économiste (Ecole nationale d'Administration, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du Projet d'appui à la recherche en santé publique (I.N.R.S.P., Bamako, Mali), actuel- lement étudiant à l'université Senghor d'Alexandrie (Egypte)

6 SE SOIGNER AU MALI

Claude PAIRAULT, anthropologue, professeur émérite à l'université

François-Rabelais (Tours)

Sara C. RANDALL, démographe, "lecturer" en anthropologie à Univer- sity College, Londres

Myriam

ROGER, juriste (Faculté de Droit d'Aix-en-Provence), diplôme de recherche de l'Institut Universitaire d'Etudes du Développe- ment (Université de Genève) Ruth SCHUMACHER, médecin (Faculté de Médecine de Cologne), thèse d'anthropologie médicale en cours auprès de l'université de

Heidelberg

Sidiki

TINTA, juriste (Ecole nationale d'Administration, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du Projet d'appui

à la recherche

en santé publique (I.N.R.S.P., Bamako, Mali), actuellement étu- diant à l'ÉCole des Hautes Études en Sciences Sociales (Marseille) Sidy TRAORÉ, docteur en médecine (Ecole nationale de Médecine te de Pharmacie, Bamako, Mali), chercheur en formation au sein du

Projet d'appui

à la recherche en santé publique (I.N.R.S.P.,

Bamako, Mali)

Robert

VUARIN, sociologue, maître de conférences à l'université d'Aix-

Marseille, détaché jusqu'en juillet

1992 auprès de 1'O.R.S.T.O.M.

à Bamako

PRÉSENTATION

a Bien que maintenant nous lisions dans notre langue fran- çaise, tant en vers qu'en prose, plusieurs excellents écrits et qu'il reste peu de traces du temps des cafards et du siècle des Goths, j'ai néanmoins choisi de gazouiller et de siffler telle une oie parmi les cygnes, comme dit le proverbe, plut& que d'être estimé complètement muet au milieu de tant de gen- tils poètes et d'éloquents orateurs. J'ai choisi aussi de jouer le villageois parmi tant d'acteurs diserts de cette noble pièce, plutôt que d'être l'ombre d'un autre et de faire le nombre, ne fysant que bailler aux mouches, chauvant des oreilles comme un âne d'Arcadie au chant des musiciens, et qui par signes, en silence, signifient qu'ils font chorus. Ayant choisi cette attitude, j'ai pensé ne pas faire oeuvre indigne en remuant mon tonneau diogénique ; de la sorte vous ne direz pas que je vis sans modèle.

François

RABELAIS, docteur en médecine,

Le cinquiesme et dernier livre des faicts et dits héroi'ques de

Pantagruel,

MDLXIV, Prologue.

Bien avant l'émergence de la biomédecine, les sociétés humaines savaient transmettre la vie et prenaient en charge, aussi bien qu'elles le pouvaient, la santé des leurs. Même dans les contrées du monde oÙ prévaut aujourd'hui une gestion techno-scientifique de la maladie, les modalités de prévention et de soins débordent de beaucoup le domaine des strictes connaissances et des performances médicales. Un constat aussi élémentaire n'a pourtant pas fiii de retenir toute l'attention qu'il mérite. Cependant, pour ne parler que de littérature francophone, la der- nière décennie a vu paraître les résultats d'une abondante variété de recherches (1) portant sur des situations, conduites et représentations culturelles liées à l'expérience de la maladie et à la quête des soins. Le présent ouvrage participe au mouvement qui traduit l'intérêt des sciences sociales pour ce domaine, et présente quelques acquis d'un travail d'équipe qui a pris forme depuis

1987 dans le cadre de 1'Insti-

tut National de Recherches en Santé Publique de Bamako (Mali). Au début de juillet

1991, un colloque organisé par cet Institut et l'Institut

français de recherche scientifique pour le développement en coopération (ORSTOM), avec le concours du Ministère français de la

Coopération, réunissait

à Bamako une cinquantaine de chercheurs.

Durant trois jours, médecins et non-médecins, Africains et Européens, jeunes apprentis timides ou vieux routiers, anthropologues, démogra- phes, économistes, épidémiologistes, géographes, linguistes, psycho- logues, sociologues, ont eu l'occasion d'échanger observations et com- mentaires, et de confronter leurs expériences de chercheurs en scien- ces sociales de la santé en Afrique de l'Ouest. (1) Voir cette note à la page suivante.

10 SE SOIGNER AU MALI

Réunis dans leur intégralité, les documents du colloque consti- tuaient un volume trop important pour que leur publication fût envi- sageable. En revanche les études intéressant directement le Mali repré- sentaient un ensemble original, qui fait la matière de ce livre.

Sauf l'épilogue de

C. Pairault, qui porte sur les conditions d'une

efficacité médicale en Afrique, les douze chapitres ici rassemblés pré- sentent autant d'études de cas, distribuées en trois séries. La première partie propose quelques exemples de maux et symptô- mes à comprendre plutôt qu'à traduire (Djigui Diakité, Ruth Schuma- cher, Myriam Roger, en pays bambara, Sara

C. Randall chez les Kel tama-

cheq). A partir de telles analyses, on entrevoit le large champ d'inves- tigations qui reste ouvert aux recherches de terrain. Par exemple, les nombreuses informations recueillies par Djigui Diakité dans le Bèlè- dougou n'ont ensuite été explicitées qu'à propos de mara et de sumaya. En outre,.le Mali compte une dizaine de grands groupes culturels, dont trois seulement (Bambara-Malinké, Kel tamacheq, Dogon) sont abor- dés avec quelque détail dans ce livre. C'est dans des situations locales extrêmement diverses qu'inter- viennent, avec leurs manières lourdement administratives, des services (1) Les titres ci-dessous en donnent un aperçu partiel : N. SINDZINGRE, A. ZEMPLÉNI : a Anthropologie de la maladie D, in M. GODELIER : Les sciences de l'homme et de la société en France, analyses et propositions pour une politique nou- velle, vol. I, Paris, La Documentation Française, 1982, p. 163-174.

COLLECTIF

: Médecines et santé, Paris, Cahiers ORSTOM, série Sciences Humaines, vol. XVIII, no 4, 1981-1982, p. 401-592.

M. AuGÉ, C. HEFULICH et al.

: Le sens du mal, Anthropologie, histoire, sociologie de la maladie, Paris, Editions des Archives Contemporaines, @ 1984, 282 pages.

COLLECTIF

: Causes, origines et agents de la maladie chez les peuples sans écriture, Paris, l'Ethnographie, tome

LXXXI, numéro 96/97, 1985, 218 pages.

B. HOURS, L 'Etat sorcier. Santépublique et société au Cameroun, Paris, L'Harmattan, 1986,

164 pages.

F. LAPLANTINE, Anthropologie de la maladie, Paris, Payot, 1986, 412 pages.

A. RETEL-LAURENTIN

(sous la direction de) : Etiologie etperception de la maladie dans les sociétés modernes et traditionnelles,

Paris, L'Harmattan, 1987, 496 pages.

D. BONNET : Corps biologique, corps social, Paris, Editions de I'ORSTOM, 1988, 140 pages. A. ROUGEMONT & J. BRUNET-JAILLY (sous la direction de) : Planifier, gérer, évaluer la santé en pays tropicaux, Paris, Doin éditeurs, 1989, 752 pages.

D. FASSM &Y. JAPFRÉ (sous la direction de) : Sociétés, développement et santé, Paris, Ellipses/

AUPELF, 1990, 288 pages.

F. LOUX : Traditions et soins d'aujourd'hui, Paris, InterEditions, 2e édition, 1990,312 pages.

COLLECTIF

: OC en est l'anthropologie médicale ?Toulouse, A.M.A.D.E.S., 1992, 136 pages. ?. FASSM : Pouvoir et maladie en Afrique, Paris, PUF, 1992, 362 pages. E. DE ROSNY : L'Afrique des guérisons, Paris, Karthala, 1992, 224 pages.

C. BLANC-PAMARD

(sous la direction de) : La santé en société, regards et remèdes, Paris, E&- tions de I'ORSTOM, 1992, 304 pages.

M.-E. GRUÉNAIS

& J.P. DOZON : Anthropologies et santépublique, Paris, ORSTOM, Cahiers des sciences humaines, vol. 28, no 1, 1992, 156 pages.

COLLECTIF

: L 'homme et la santé, Paris, coedition Seuil/La Cité, La Villette, 1992, 320 pages.

PRÉSENTATION 11

de santé dont l'origine remonte à l'époque coloniale et auxquels l'indé- pendance n'a rien appris. Ils sont inégalement répartis sur l'ensemble du territoire, très diversement fréquentés selon qu'ils se trouvent dans les villes ou dans les zones rurales. Dans la seconde partie de l'ouvrage, Sidy Traoré, Birarna Djan Diakité et Tiéman Diarra examinent comment ces services sont utilisés par la population de Bankoni, important quar- tier populaire de Bamako, tandis que Sidiki Tinta nous conduit en pays dogon et Birama Djan Diakité chez les pasteurs du Gourma. La troisième série d'études décrit d'abord I'économie de l'actuel système de santé, tant au niveau national (Seydou Coulibaly et Kafing Diarra) qu'à propos d'expériences de recouvrement des coûts récem- ment mises en oeuvre dans le cercle de Bandiagara et dans la région de Koulikoro (Mamadou Mariko). Les deux derniers chapitres posent l'un et l'autre à ce même système de santé une question prospective : la définition d'une stratégie sanitaire peut-elle bénéficier du concours des sciences sociales (Sara C. Randall) ? Peut-elle utiliser une conver- sion de certaines formes de solidarité coutumière

à de nouvelles activités

(Robert Vuarin) I1 convient de préciser que les contributions ici réunies forment un assemblage de pièces distinctes, et non un tableau d'ensemble des maux, des conduites en cas de maladie, des représentations relatives à la santé, à la maladie, aux thérapies offertes, ou encore des problè- mes du système de santé du Mali. Tout au plus espère-t-on que la jux- taposition des chapitres peut s'organiser, dans l'esprit du lecteur, en une multitude de figures kaléidoscopiques, capables d'attirer l'atten- tion et de susciter la réflexion, puis peut-être de donner l'impulsion à de nouvelles investigations originales. Pour user d'une image (c cou- chée sur le papier i) par le grand Amadou Hampâté Bâ (2), disons qu'en menant leurs tâches d'enquête et de rédaction, sur ces sujets largement nouveaux, les auteurs de ce livre avaient tous présente

à l'esprit la fon-

cière ambiguïté du regard de la chauve-souris c Au sens diurne, la chauve-souris est l'image de la perspicacité. C'est

l 'être qui voit même dans l 'obscurité, alors que tout le monde estplongé dans une grande nuit. C'est une indication

de l'unité des

êtres, et la suppression de leurs limites grâce à leur alliance. En nocturne, la chauve-souris figure l'ennemi de la lumière,

l 'extravagant qui fait tout h rebours et voit tout à l 'envers comme un homme pendu par les pieds. P Avec constance, avec prudence, avec persévérance, malgré l'énor- mité de l'écart entre les apparences ou les discours officiels et la réalité (2) Kayduvu, Abidjan-Dakar, Les Nouvelles Editions Africaines, 1978, p. 96.

12 SE SOIGNER AU MALI

des faits et des conduites, ils ont essayé de poursuivre le sens diurne, et tenté de procurer au lecteur une vision perspicace, sinon panora- mique, des maux étudiés et des mots qui

I[,:, (lisent.

Car, il faut bien le reconnaître, la situation de la santé dans les pays pauvres, et notamment en Afrique, constitue un échec - encore ina- voué, et qui le restera sans doute encore un certain temps, tant il est retentissant, dramatique -, un échec d'une ampleur sans précédent pour la profession médicale. Celle-ci, disposant de pouvoirs exception- nels auprès de chaque malade et donc auprès de tout un chacun dès que la santé peut être dite mise en jeu, jouissant par conséquent d'un poids politique considérable partout appuyé par une forte organisa- tion en groupe de pression sur la haute Administration, a réussiquotesdbs_dbs28.pdfusesText_34