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Tous droits r€serv€s INRS-UCS, 2012

Ce document est prot€g€ par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des d'utilisation que vous pouvez consulter en ligne. l'Universit€ de Montr€al, l'Universit€ Laval et l'Universit€ du Qu€bec " Montr€al. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.

Num€ro 16, printemps 2012

L'€ducation familiale visant " soutenir les parents et les enfants vivant dans des contextes de risque URI Saint-Jacques, M.-C., Turcotte, D. & Oubrayrie-Roussel, N. (2012). L'€ducation familiale " l'heure des comp€tences parentales.

Enfances, Familles,

G€n€rations

, (16), 1...16. https://doi.org/10.7202/1012798ar

R€sum€ de l'article

Cet article vise " introduire ce num€ro sp€cial traitant de l'€ducation familiale, une forme d'intervention qui repose sur le principe que pour assurer le bien-†tre des enfants, il faut soutenir leurs parents en d€veloppant leurs

comp€tences et donc, intervenir aupr‡s d'eux. Apr‡s avoir retrac€ bri‡vement

ses origines, son champ d'action est illustr€ permettant d'observer au passage la diversit€ des acteurs, des secteurs et des domaines concern€s. L'analyse des articles qui composent ce num€ro fait ressortir l'importance accord€e au d€veloppement des comp€tences des parents et aux repr€sentations des acteurs (parents comme intervenants). Diff€rents enjeux sont aussi soulev€s et traitent de l'efficacit€ des programmes d'€ducation familiale et des conditions qui y contribuent, dont la formation des intervenants, leur implantation dans des contextes organisationnels permettant un r€el travail avec les parents et leur application dans un contexte qui n'est pas trop restrictif. L'examen de l'efficacit€ des programmes d'€ducation familiale fait ressortir que la vuln€rabilit€ des familles n'est pas uniquement li€e " la pr€carit€ socio-€conomique, mais aussi " l'€volution des formes familiales elles-m†mes et " la fragilisation des liens sociaux.

No. 16, 2012, p. 1-16

Efg.inrs.ca

L'éducation familiale à l'heure des compétences parentales Marie-Christine Saint-Jacques École de service social, Université Laval Centre de recherche sur l'adaptation des jeunes et des familles à risque (JEFAR) marie -christine.saint-jacques@svs.ulaval.ca Daniel Turcotte École de service social, Université Laval Centre de recherche sur l'adaptation des jeunes et des familles à risque (JEFAR) daniel.turcotte@svs.ulaval.ca

Nathalie Oubrayrie-Roussel

Laboratoire Psychologie du développement et Processus de Socialisation

Université de Toulouse, France

oubrayri@univ-tlse2.fr

Résumé

Cet article vise à introduire ce numéro spécial traitant de l'éducation familiale, une forme

d'intervention qui repose sur le principe que pour assurer le bien-être des enfants, il faut soutenir leurs parents en développant leurs compétences et donc, intervenir auprès d'eux. Après avoir retracé brièvement ses origines, son champ d'action est illustré permettant d'observer au passage la diversité des acteurs, des secteurs et des domaines concernés. L'analyse des articles qui composent ce numéro fait ressortir l'importance accordée au développement des compétences des parents et aux représentations des acteurs (parents comme intervenants). Différents enjeux sont aussi soulevés et traitent de l'efficacité des programmes d'éducation familiale et des conditions qui y contribuent, dont la formation des intervenants, leur implantation dans des contextes organisationnels permettant un réel travail avec les parents et leur application dans un contexte qui n'est pas trop restrictif. L'examen de l'efficacité des programmes d'éducation familiale fait ressortir que

la vulnérabilité des familles n'est pas uniquement liée à la précarité socio-économique,

mais aussi à l'évolution des formes familiales elles-mêmes et à la fragilisation des liens

sociaux. Mots clés : Éducation, familiale, représentations, compétences parentales, engagement parental, intervention éducative, précarité familiale 2 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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Abstract

This article is intended to introduce the present special edition dealing with family education, a form of intervention motivated by the principle that in order to ensure children's welfare, one needs to assist parents in developing their own skills, or in other words to provide them with active societal supporters. After a brief reminder of the origins of this strategy, its field of action is exemplified, introducing us to the wide range of players, areas and domains involved. An analysis of the articles published in this edition brings out the importance attached to the development of parental skills and the players' representational role (i.e. the parents' intervention). Various issues are also raised, such as the efficiency of family education programs and their contributory basics, for example the training of the societal supporters, their introduction within organizational contexts that allow for real work with the parents, and the application of such programs within a context that is not too restrictive. An examination of the efficiency of family education programs indicates that family vulnerability is not linked solely to socio-economic insecurity, but also to developments in family structures themselves and the weakening of social ties. Keywords: Family, education, representational role, parental skills, parental commitment, educational intervention, family vulnerability Le champ de l'éducation familiale comprend en son essence une dualité dans la mesure

où il renvoie à la fois à l'action éducative exercée par la famille envers ses enfants et à

des interventions socio-éducatives visant à soutenir les parents dans certains aspects de l'éducation de leur progéniture. D'ailleurs, selon les pays, le déploiement des

programmes d'éducation familiale relève de départements tantôt dédiés à l'éducation,

comme c'est le cas au Royaume -Uni, tantôt à la santé et aux services sociaux, notamment au Canada et en Finlande (Shulruf et al., 2009). Une étude internationale menée dans 50 pays sur 6 continents révèle que les programmes d'éducation familiale sont très répandus et qu'en tant qu'objet, ils intéressent beaucoup le grand public (Darling et Turkki, 2009).

Origines de l'éducation familiale

L'éducation familiale repose sur l'idée que pour assurer le bien-être des enfants, il faut soutenir leurs parents en développant leurs compétences, et donc intervenir auprès d'eux. D'un point de vue historique, cette forme d'intervention émane du travail des organisations chargées de donner des services aux familles qui sont apparues au

Québec dans les années 1930 (Turcotte

et al., 2012). À cette époque, différents facteurs

amènent la société à prendre conscience des conditions très difficiles dans lesquelles

vivent les familles et la nécessité de développer des actions afin d'y remédier (Child Welfare League of Canada, 2007). L'industrialisation et les mouvements de population qu'elle entraîne viennent modifier les réseaux de soutien naturels. La crise économique rendra saillantes les différences économiques et les conséquences de la pauvreté sur les familles. Parallèlement, les connaissances scientifiques concernant le

développement des enfants font prendre conscience à la société de leur fragilité et de

le urs besoins spécifiques. Ceci s'accompagne d'un changement de valeurs et d'attitudes vis-à-vis des enfants et de la manière dont il faut s'en occuper (Child Welfare League of 3 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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Canada, 2007). De nouvelles pratiques parentales voient le jour avec la reconnaissance de la fragilité de l'enfance et de la responsabilité éducative des parents; l'organisation familiale passe alors d'un modèle patricentré à un modèle centré sur l'enfant (Laurendeau, 1985; Neyrand, 2003; Pouliot, Turcotte et Monette, 2009). Un ensemble d'actions seront posées, dont la formation de professionnels chargés de s'occuper des enfants et la création de lois visant à les protéger (Child Welfare League of Canada,

2007).

S'il se dégage un consensus sur le fait qu'il faut faire quelque chose pour soutenir les

enfants en difficulté, la " meilleure » façon de répondre à leurs besoins fera l'objet de

débats pendant un bon moment. Essentiellement, il s'agissait de déterminer qui est en meilleure posture pour aider un enfant vulnérable. On retrouve le s premières traces de ce débat dans les annales de la Commission des assurances sociales (1930) alors que les tenants de l'aide institutionnelle (impliquant le retrait de l'enfant de sa famille) s'opposaient à ceux qui affirmaient que le fait de tout miser sur les institutions

désorganisait la famille et que l'enfant a le droit d'être protégé par sa famille et dans sa

famille (D'Amours, 1986). Avec le temps, cette dernière conception prendra le dessus et sera affirmée très clairement par la communauté internationale lors de la signature de la Convention relative aux droits de l'enfant en 1989. Les valeurs et surtout les connaissances actuelles en la matière abondent en arguments fondés empiriquement voulant que la famille d'origine de l'enfant demeure, dans la grande majorité des situations, le milieu le plus propice à son développement et que toute interruption dans cette relation lui soit négative (Leung, Monit Cheung et Stevenson, 1994; Whittaker, 1990). La reconnaissance de la participation active des pa rents comme facteur d'efficacité de l'intervention a fait ressortir la nécessité d'impliquer tous les acteurs susceptibles de pouvoir contribuer au mieux-être de l'enfant (Atkins-Burnett et Allen-Meares, 2000; Beaudoin et al., 2000; Campbell, 2002; Leung, Caruso-Whitney, 1997; Hurth et Goff, 2002; James et Chard, 2010; Mahoney et Wiggers, 2007; Pandit, 2008; Terrisse et Brynczka, 1990). On a ainsi assisté au passage d'une pratique sociale " paternaliste » à une pratique misant davantage sur les ressources et capacités des clients de contrôler leur situation (Berg, 1996; Hegar et Hunzeker, 1988). Cette nouvelle vision de ce qui est " dans le meilleur intérêt de l'enfant » est venue changer radicalement le paysage des services à l'enfance offerts par les établissements publics au Québec, comme ailleurs. Depuis la fin des années 1990, la notion de développement des compétences se situe aussi au coeur des interventions offertes dans le milieu communautaire qui offre des services aux familles (Ouellette,

2005). Les pratiques sont fortement influencées par l'approche centrée sur la famille,

approche soutenant que la famille naturelle est le milieu de vie le plus susceptible

d'assurer le développement harmonieux de l'enfant, d'où la nécessité de reconnaître et

de soutenir les compétences de la famille (Pouliot et al., 2009)

Les champs d'action de l'éducation familiale

Sur le continuum de l'intervention, l'éducation familiale est utilisée tout autant dans une perspective de promotion, en préparant, par exemple, les familles à traverser les moments charnières de leur vie, que dans une orientation thérapeutique et éducative, en soutenant l'action de parents qui rencontrent des difficultés dans l'exercice de leurs rôles parentaux (Turcotte et al., 2012). La grande étendue des activités regroupées

sous le parapluie de l'éducation familiale n'est pas étrangère à la diversité des acteurs

qui sont engagés dans ce champ d'action. L'analyse des besoins des familles émane bien souvent des observations menées par les associations familiales qui ont pour 4 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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vocation de faire des propositions auprès de diverses institutions et de renseigner les pouvoirs publics sur les réalités quotidiennes des familles (UNAF-UDAF, 2008). Néanmoins, on constate, dans les faits, que les gouvernements ont généralement tendance à cibler les familles vulnérables, celles qui sont désavantagées; on peut mentionner à cet égard le Programme d'action communautaire (PACE) du gouvernement canadien (Beaudoin, Simard, Turcotte et Turgeon, 2000; Shulruf et al.,

2009; Agence de la santé publique du Canada, 2012). À côté du travail des associations

familiales, qui fournissent un éclairage sur les besoins des familles, les pratiques sont

aussi façonnées par les législations visant à protéger la sécurité ou le développement

des jeunes. À cet égard, toutes les lois en matière de la protection de la jeunesse, qu'elles proviennent de l'Angleterre, de l'Australie, de la Belgique, de la France, de l'Italie, du Canada ou des États-Unis reconnaissent le rôle central des parents dans l'éducation de leur enfant (Healy, 1998, Serbati, ce numéro). Par exemple, les récentes modifications apportées à la Loi sur la protection de la jeunesse au Québec insistent particulièrement sur l'importance d'impliquer les parents dans l'intervention et de leur offrir tous les services disponibles afin de mettre un terme à la situation compromettante (Goubau, ce numéro; Saint -Jacques et al., 2011). En Italie, l'éducation familiale a pris son essor sous l'impulsion de la loi 285 qui concerne les Dispositions en matière de promotion des droits et perspectives pour l'enfance et l'adolescence. En voulant se conformer à l'esprit de la Convention relative aux droits de l'enfant (Organisation des Nations-Unies, 1989), le législateur italien reconnaît l'importance que les enfants puissent grandir auprès de leurs parents et qu'en cas de difficulté, il faut soutenir les parents plutôt que de s'y substituer (Serbati et al., ce numéro).

Par ailleurs, si l'éducation familiale se déploie dans des contextes de difficultés sévères,

elle est aussi très présente dans le domaine de l'intervention précoce et de l'éducation

(Asdih, ce numéro). Dès lors, le champ de l'éducation familiale s'est élargi en rejoignant

une population beaucoup plus large et en intégrant des activités développées en réponse à un problème spécifique ou en fonction d'une clientèle cible. Ses assises

théoriques se sont également diversifiées; elles peuvent aussi bien faire référence à des

cadres d'inspiration behavioriste, humaniste, écosystémique, neurobiologique ou psychodéveloppementale (Turcotte et al., 2012). L'idée d'impliquer les parents dans l'intervention est une conception qui transcende les secteurs d'intervention, les disciplines et les pays. Depuis la Seconde Guerre mondiale, les recherches en éducation familiale ont pris un essor considérable en psychologie, service social, sociologie et pédagogie, notamment en raison de l'impact reconnu de l'éducation sur la personnalité et les aptitudes de l'enfant (ASPC, 2010; Durning, 1995; Pourtois et Desmet, 1997; Pourtois et Fontaine,

1998; Singly, 1993).

La famille en tant qu'instance éducative représente le lieu privilégié des premières interactions et des premiers apprentissages relationnels, sociaux et cognitifs de l'enfant. Elle est ainsi la premiè re instance éducative et socialisatrice de l'enfant. Au-

delà de l'importance accordée aux caractéristiques structurelles des familles, les études

plus récentes explorent le lien entre les pratiques éducatives et les aspects interactionnels du fonctionnement de la famille. Ces études s'intéressent à " l'ensemble du fonctionnement familial en rapport avec l'éducation : particulièrement, elles décrivent et analysent les attitudes, pratiques, comportements éducatifs, attentes, rôles, besoins, motivations, projets des parents » et tentent de déterminer leurs effets sur le développement de l'enfant (Pourtois, 1989, p. 70). L'éducation parentale, est " une activité volontaire de la part des parents qui s'efforcent de changer les interactions qu'ils établissent avec leurs enfants en vue d'encourager chez ceux-ci, l'émergence de comportements jugés positifs et de réduire la production de comportements jugés 5 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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négatifs » (Pourtois, 1979, p. 71). Toutefois, " si la famille contribue pour une part importante au développeme nt cognitif, affectif et social de l'enfant, ce dernier peut lui aussi avoir une influence sur les adultes » (Bardou, 2011, p.44). L'éducation recouvrerait ainsi l'ensemble des actions favorables à l'intégration de l'enfant à la vie sociale par le développ ement de ses potentialités valorisées par le groupe social auquel il appartient. Actuellement, plusieurs changements affectent l'éducation, ses fonctions, ses moyens et ses objectifs relativement aux multiples transformations et évolutions démographiques, économiques et sociales. Ainsi, les travaux actuels en éducation familiale se doivent de tenir compte de l'évolution de la famille occidentale actuelle tant en ce qui concerne sa place dans la société que sa structure et sa composition; les modifications liées au statut de l'enfant et de la structure familiale affectent

particulièrement les rôles éducatifs et induisent des difficultés et des préoccupations

nouvelles. En l'espace d'une quarantaine d'années, la conception de la famille a évolué. " Si dans le

s années 70, époque où l'on croyait que tout était possible et où le désir d'une plus

grande liberté occupait les esprits, la famille étant perçue comme une entité répressive

et frustrante, depuis les années 90, elle représente davantage le symbole de la sécurité,

un milieu où l'on se sent protégé, à l'abri des difficultés économiques et sociales de

notre époque » (Bardou, 2011, p.44).

De nombreux facteurs et processus sous

-jacents aux changements familiaux de ces dernières décennies (évolutions des valeurs sociales, nouveaux comportements démographiques, accès de plein droit des femmes au marché du travail) ont entraîné des modifications autour de la cellule familiale remettant en cause le mode de vie intime du couple et de la famille, les concepts de pate rnité, de procréation, de fidélité. Dès lors, l'éducation familiale a subi des changements considérables, suscitant de nouvelles thématiques de recherches : compréhension d'une nouvelle répartition des rôles parentaux (Lecamus, 1997), des familles monoparentales et homoparentales, des problèmes de violence familiale, des relations famille -école comme facteur de réussite/échec scolaire de l'enfant, pour ne citer que celles-là (Deslandes, 2004; 2005; Oubrayrie et Lescarret, 1997; Oubrayrie et Safont, 2011). La famille constitue en cela une microsociété dans laquelle l'enfant et l'adolescent vont se situer, se définir, en accord ou en opposition. Elle demeure le champ privilégié de l'apprentissage de la vie et du développement de la personnalité de l'enfant et de l'adolescent leur permettant de se construire à partir de modèles affectifs et sociaux (Baumrid, 1991; Steinberg, 1992) en vue d'une socialisation et d'une personnalisation réussies (Wallon, 1959).

Regards croisés sur l'éducation familiale

Ce numéro traduit bien la diversité et la complexité de ce champ d'action. L'éducation familiale y est abordée sous l'angle des pratiques mises en oeuvre par des intervenants en direction des parents et des enfants qui vivent dans des contextes présentant des risques d'adaptation. Les familles sont considérées ici à risque lorsque des facteurs d'ordre individuel, familial ou environnemental les exposent à une plus grande probabilité de développer des problèmes d'adaptation. Les articles font particulièrement référence aux familles rendues vulnérables en raison de leur parcours migratoire, de leur faible scolarisation et de leur précarité socioéconomique, quand il ne s'agit pas de parents recevant des services parce que leurs enfants vivent dans des 6 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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conditions qui compromettent leur sécurité ou leur développement. Ce numéro d'Enfances, Familles, Générations examine ces questions dans une perspective internationale et multidisciplinaire. Les auteurs discutent des représentations et des pratiques d'acteurs provenant de France, d'Italie et du Québec. L'éducation familiale est examinée telle qu'elle se déploie dans le domaine des services sociaux, de l'éducation, de la santé et de l'intervention communautaire. Ce regard croisé est d'autant plus riche que les auteurs y ayant contribué appartiennent à différentes disciplines que sont la psychologie, le service social l'éducation et le droit. Bien que l'appréhension de l'éducation familiale à travers six textes ne permette pas de tirer des conclusions sur les similitudes et les différences selon les disciplines, les champs ou les pays dans lesquels celle -ci se déploie, il convient de relever les nombreux points de convergence qui se dégagent de l'ensemble des articles. On constate d'abord que l'éducation familiale s'appuie sur la croyance que les enfants, pour se développer adéquatement, ont besoin d'être accompagnés par des parents compétents. Elle entraîne dans son sillage toute une démarche visant à impliquer les parents dans l'intervention et à reconnaître leurs compétences (De slandes, 2001; Larivée et al., 2006), ce qui se traduit par un changement de paradigme sur le plan de la relation parents-professionnel (Brousseau, ce numéro). Plutôt que de se positionner en expert, l'intervenant cherchera à partager le pouvoir, puisqu'il considère que les compétences se développent par la reconnaissance des forces et des potentiels des parents et par l'augmentation du pouvoir qu'ils peuvent exercer sur leur vie (De Montigny et Lacharité, ce numéro; Le Bossé et al., 2002; Saint-Jacques et al., 2009;

Serbati et al., ce numéro). Ainsi, l'éducation familiale est étroitement associée à la

collaboration avec les parents, à leur implication dans l'intervention, à la reconnaissance de leurs forces et au développement de leur potentiel d'action. Cette plus grande implication des parents soulève, par ailleurs, un enjeu concernant le partage du pouvoir entre les parents et les intervenants (Jésu, 2007) et une remise en cause des rôles traditionnels de l'aidant et de l'aidé (De Montigny et Lacharité, ce numéro; Le Bossé et al., 2002; Saleebey, 2006;). Cette transformation rend très pertinente l'étude des représentations qu'ont les intervenants de l'implication parentale, ce que n'ont pas manqué de faire plusieurs auteurs de ce numéro. Une analyse transversale des articles de ce numéro montre aussi l'importance accordée aux représentations des acteurs. Dans la mesure où la relation entre parents et professionnel est teintée par les représentations qu'ils se font d'eux-mêmes, de l'autre et de leur situation (Lessard et Turcotte, 2000), la façon dont les parents se perçoivent eux-mêmes et la façon dont les professionnels se représentent les parents sont des

éléments clés de l'éducation familiale (Kettani et Euillet, ce numéro). Des liens étroits

se tissent entre, d'une part, les représentations que se font les intervenants des parents, l'importance qu'ils accordent à les impliquer et, d'autre part, les pratiques réelles qui sont mises de l'avant (Asdih; De Montigny et Lacharité; Serbati et al., ce numéro). Un autre enjeu majeur dans le domaine de l'éducation familiale concerne l'efficacité, voire la raison d'être de cette forme d'intervention (Moran et Ghate, 2005). Les programmes d'éducation familiale sont-ils efficaces? Quels sont les facteurs qui favorisent l'atteinte des objectifs? Quelles sont les limites, inconvénients et risques associés à ces pratiques? Les articles de Brousseau et de Serbati, Gioga et Milani sont particulièrement consacrés à ces questions. Enfin, l'éducation familiale peut être offerte dans un contexte prescrit qui comporte des dilemmes éthiques. Quels enjeux sont soulevés lorsque l'éducation familiale est offerte à des parents qui reçoivent des services sur une base non volontaire et que le résultat compte autant (sinon plus) que le processus? (Goubau, ce numéro) 7 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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Ce numéro comprend un premier texte de Kettani et Euillet qui traite de l'engagement paternel. Dans un contexte où la précarité touche un nombre croissant de familles, les auteurs estiment essentiel de s'interroger sur l'expérience paternelle des hommes qui connaissent des difficultés socio-économiques, puisqu'une meilleure compréhension de leurs spécificités est nécessaire à l'élaboration de moyens de prévention et d'accompagnement socio-éducatif appropriés. D'autant plus que les travaux sur le sujet sont encore parcellaires et débouchent sur des résultats contradictoires. À l'aide d'une méthodologie quantitative basée sur échantillon de 187 pères, ayant au moins un enfant âgé de 2 à 6 ans, elles ont étudié la façon dont les pè res en situation de

précarité socio-économique vivent leur paternité et s'engagent auprès de leurs enfants.

En comparant les réponses de 82 pères en situation de précarité socio-économique à celles d'un groupe de comparaison de 105 pères, elles ont relevé peu de différences entre les deux groupes de pères en ce qui a trait à l'engagement paternel. Par contre,

les pères en situation de précarité socio-économique se sentent plus stressés et moins

compétents dans leur rôle de père. Ce résultat les amène à la conclusion que la perception de la contrainte financière joue un rôle plus central sur le bien-être des familles et les processus familiaux que les mesures plus objectives de pauvreté. D'où la pertinence de privilégier, tant en recherche qu'en intervention, une approche de la précarité socio-économique qui intègre l'aspect psychologique. Leurs résultats les amènent également à suggérer plusieurs pistes d'intervention, notamment : la mise sur pied de services d'écoute et de soutien dans le vécu de la paternité, le développement de services de soutien à domicile, la création d'espaces et d'activités dans lesquelles les pères peuvent se reconnaître et se réaliser, l'aménagement de temps de rencontre leur permettant d'échanger en groupe avec d'autres pères, la mise en valeur de leurs compétences et la remise en question des

représentations à l'égard des pères en situation de précarité, représentations qui

peuvent constituer des messages implicites de disqualification. Centrée sur l'étude des représentations des e nseignants, Asdih nous propose de discuter de la collaboration école -famille, élément essentiel à la réussite scolaire de l'élève. Cette collaboration, se voulant fondée sur un engagement réciproque des parents et des enseignants dans l'accompagnement à la scolarité de l'enfant, sur le respect mutuel et l'établissement d'un lien de confiance entre eux, s'avère constamment repensée au regard des changements institutionnels de l'école et du réaménagement de la formation des enseignants en France. Selon une approche compréhensive, l'auteure s'est centrée sur le discours d'enseignants d'école primaire à propos de leurs interventions et interactions collaboratives auprès de familles confrontées à des situations où les facteurs de précarité socio-économique, de migration et de faible scolarisation sont combinés. Elle vise à identifier sur quoi s'étaye l'aide apportée par les enseignants, quels sont les obstacles rencontrés au regard de l'engagement des parents et quelles en sont les résonances sur la qualité et la pertinence de leurs interventions. Ses entretiens semi-directifs explorent plusieurs dimensions : la représentation de l'école et la conception du métier d'enseignant, la conception et le fonctionnement éducatif de la famille, les difficultés éducatives re pérées, l'implication à l'école, le sens

accordé à l'éducation parentale, les attentes à leur égard, les représentations des

familles, les relations avec elles. L'analyse de discours révèle que les enseignants communiquent avec justesse et pertinence, sont conscients du rôle et des compétences des parents et innovent au-delà de la demande institutionnelle, convaincus de

l'importance de la collaboration, mais désenchantés ou " opérationnellement » épuisés.

Cependant, la motivation des enseignants ne suffit pas à elle seule pour que la 8 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

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collaboration réussisse, la participation des parents à la vie de l'école est essentielle, de même qu'une orientation et une adéquation des activités d'apprentissage. Une nécessaire connaissance des publics scolaires intégrant les parents s'impose à la formation des enseignants afin d'affiner l'orientation et l'adéquation des actions de l'enseignant selon ses objectifs et en faveur de cette collaboration avec les parents et notamment avec les familles populaires ou les familles immigrées Cette étude met aussi l'accent sur le malaise des enseignants et l'enjeu d'une reconnaissance institutionnelle du métier d'enseignant par les parents et l'institution elle -même. Elle illustre enfin les processus en jeu dans la collaboration avec les parents et rappelle la nécessité d'explorer plus avant les représentations des parents, l'historique des situations de rencontre parents-enseignants selon les milieux étudiés et le fonctionnement même des dispositifs de collaboration. Le prochain article traite aussi des représentations et des pratiques des intervenants du domaine de l'éducation, mais examine de plus d'autres secteurs d'activités, soit la santé, la réadaptation et le communautaire. Il documente leurs perceptions, croyances et pratiques déployées auprès de parents présentant des risques psychosociaux. Ces dimensions de l'éducation familiale sont examinées par De Montigny et Lacharité en tentant de voir dans quelle mesure elles dénotent une adhésion au modèle de l'empowerment sur le plan de l'idéologie, des pratiques et des indicateurs du pouvoir d'agir. Il s'agit d'une étude quantitative réalisée auprès de 203 intervenants (dont 20 hommes) provenant de divers secteurs (santé, communautaire, éducation, réadaptation) et appartenant à des disciplines diverses. Dans un premier temps, elle examine la perception qu'ont les intervenants des parents de jeunes enfants de même que les croyances et les principes sur lesquels ils pensent que leur pratique s'appuie. Dans un second temps, ces dimensions sont mises en relation afin de cerner la cohérence qui existe entre leurs croyances, leur perception des parents et les pratiques qu'ils adoptent. Les résultats montrent que, globalement, la représentation que les intervenants ont des parents est positive. Les mères sont perçues plus positivement que les pères, et ce, quel que soit le genre du répondant. Par contre, les répondants masculins perçoivent plus négativement les pères que les répondantes. Cette perception plus négative serait peut-être attribuable aux conditions de participation des pères : les intervenants auraient moins d'habiletés pour intervenir auprès des pères, et auraient plus de difficultés à tenir compte de leurs compétences. L'étude montre aussi que les intervenants plus expérimentés ont une perception plus négative des parents. Enfin, la perception varie selon le secteur dans lequel oeuvre l'intervenant. Les auteurs ont observé une grande cohérence intersectorielle et interprofessionnelle dans les croyances des intervenants et leurs capacités à appliquer les principes d'une intervention fondée sur l'empowerment. Par ailleurs, ils ont remarqué que les intervenants plus âgés sont davantage orientés vers des pratiques où ils se positionnent en expert. Cette différence selon l'âge pourrait refléter la formation initiale des intervenants. Une majorité d'intervenants se disent en accord avec les 12 principes décrivant une pratique basée sur l'empowerment. La donne semble quelque peu différente quand il s'agit de juger de l'applicabilité de ces principes. Certains de ces principes sont considérés comme difficiles d'application par plus du tiers des répondants. Ils portent sur l'implication des réseaux naturels, le recours aux forces pour l'obtention d'un

résultat à court terme et l'établissement d'une relation de réciprocité avec le parent.

9 M.-C. St-Jacques, D. Turcotte et N. Oubrayrie-Roussel, L'éducation familiale

Enfances, Familles, Générations, n

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Une analyse multifactorielle fait ressortir le rôle central des croyances en regard de la cause des problèmes. Les intervenants qui considèrent que les problèmes proviennent du contexte de développement des personnes et de leurs conditions de vie sont portés à développer des pratiques de soutien qualifiantes se situant dans l'esprit de l'empowerment. De Montigny et Lacharité observent, par ailleurs, une dichotomie entre les croyances

véhiculées à propos des forces des parents et la difficulté des intervenants à utiliser ces

mêmes forces, ce qui dénote d'un écart entre le dire et le faire. Ils mettent aussi en question le rôle des environnements dans lesquels oeuvrent les intervenants : jusqu'à quel point contribuent-ils à valoriser et faciliter le développement de services centrés sur la famille? Les prochains articles examinent la question de l'éducation familiale auprès de familles rencontrant des difficultés sévères qui compromettent le développement de leurs enfants. Ainsi, Serbati, Gioga et Milani ont mené une étude auprès d'éducateurs familiaux italiens oeuvrant auprès de parents négligents. Elles rappellent que certaines familles sont considérées comme plus vulnérables en raison de leur histoire et du contexte difficile dans lequel elles vivent. L'État doit protéger les enfants et cette aide doit soutenir les parents dans le développement de leurs compétences plutôt que de se substituer à eux. Nécessairement, une telle philosophie suppose de ne pas limiter l'intervention aux enfants, mais de viser l'inclusion des parents. En Italie, cette forme d'action est qualifiée d'intervention éducative et vise le développement des ressourcesquotesdbs_dbs17.pdfusesText_23