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Mémoire master 1_ " Histoire de l'art »
Université Pierre Mendès-France
Grenoble II
Année universitaire 2006-2007
TuÜtvtwtuÜArt !
Une approche originale de l"art contemporain et de ses problèmes à travers la magie fantasmagorique.Présenté par : Sabrina MEGANI
Sous la direction de : M. Stéphane SAUZEDDE
2 3A Candide, magicien informaticien
devenu conseiller d'une historienne de l'art.Merci à mon directeur de mémoire
de m'avoir laissé descendre la pente de ce sujet glissant...Un merci tout spécial à ceux qui m'ont aidé, soutenu, répondu, conseillé : les artistes (Gianni
Motti, Jérôme Helfenstein, Jean Merlin...); les institutions (Le Musée de la Magie à Paris, le
Mamco...); et tous mes proches pour leur soutien malgré mon caractère en période de travail!
A ceux que ce mémoire amusera...
4Introduction
Marcel Duchamp disait que " c'est le regardeur qui fait le tableau », comme en écho à l'anthropologue Marcel Mauss1 lorsqu'il pense que c'est le public qui donne au magicien ses
pouvoirs en y croyant... Facile me direz-vous de commencer un mémoire avec peut-être la plus célèbre citation de l'histoire de l'art moderne et de son meilleur représentant. Néanmoins le parallèle qui s'engage à travers ces simples opinions laisse supposer qu'une convergence de principes dansdeux domaines généralement très distincts est possible. Sans jamais s'être entretenus sur le
sujet, deux personnalités de disciplines éloignées parviennent à révéler un phénomène
commun, sorte de concept récurrent. Bien sûr cela n'a pas d'intérêt pris comme une
information brute et il serait d'ailleurs aisé de tirer des conclusions maladroites en se
contentant d'une assimilation trop cavalière. Toutefois cela signifie qu'il est envisageable
d'approfondir une analyse sûre en partant d'un aspect commun à deux champ étrangers dansle but d'établir des théories sur des thèmes satellites, c'est-à-dire des problématiques qui
gravitent autour des disciplines étudiées. Bien entendu il n'est pas question ici de faire des raccourcis douteux où de sombrerdans des écueils grossiers en mettant simplement côte à côte des disciplines aussi antagonistes
que l'art contemporain et la magie fantasmagorique et de tenter de prouver leurs ressemblances par tous les moyens. Il s'agit bien d'user de la magie et des problèmes qu'elle soulève comme instrument à l'exploration de concepts majeurs de l'art. Le thème de ce mémoire peut donc sembler étrange, atypique ou même pleinement farfelu. Il est certain qu'une telle association a de quoi dérouter, l'art contemporain n'ayant que peu d'affinités évidentes avec la magie fantasmagorique. Néanmoins ce texte se veut1 Marcel MAUSS, " Esquisse d'une théorie générale de la magie », in L'Année Sociologique, 1902-1903.
5 sérieux et d'une rigueur scientifique suffisante afin de satisfaire aux exigences d'une étude universitaire et d'atteindre ainsi la considération d'un lectorat rigoureux. Avant tout il convient de donner quelques définitions afin que le sujet soit parfaitement clair. Il est ici question de magie fantasmagorique, il faut entendre par là le sens théâtral du terme. Cela inclus donc uniquement une magie de scène et/ou de grande illusion réalisée par des professionnels ou des amateurs ayant appris les manipulations et trucagesnécessaires à leur art ; de magie ésotérique ou occulte il ne sera pas question, à l'exception de
quelques références ponctuelles. La langue française manquant d'un terme spécifique pourfaire la différence entre ce que l'anglo-saxon nomme " conjurer » et le " magician » tout au
long de ce texte c'est l'expression " fantasmagorique » qui sera régulièrement utilisée ainsi
que quelques autres termes comme " prestidigitation » ou " illusionnisme ». Toutefois il sera uniquement question d'une forme de magie performative qui exclut certaines autres catégories ordinaires et conventionnelles de la magie (cartes à jouer, cordes, pièces, close-up...) dont l'intérêt s'avérait trop limité dans cette étude. Les sources se sont donc dirigées vers un ensemble de magiciens représentatif de ladiscipline et servant au mieux le propos de ce mémoire. Tout d'abord les références de
rigueurs aux " anciens » tels Harry Houdini ou Robert-Houdin, le classique et incontournable David Copperfield mais aussi la jeune génération adeptes de outils technologiques comme lejeune français Jérôme Helfenstein où encore Abdul Alafrez et surtout les héritiers des
magiciens performers avec David Blaine ou Criss Angel 2.Du côté de l'art contemporain le panel est vaste et diversifié. Comme il n'existe
évidemment pas de corpus prédéfini concernant l'art contemporain et la magiefantasmagorique, il a été nécessaire de le construire à partir d'éléments divers mais néanmoins
significatifs de la production contemporaine. Chaque problématique globale abordée faisantappel à un ou un ensemble d'artiste, il est plus simple pour les énumérer de les rassembler par
catégorie de problème.A la base de la réflexion sur la psychologie motrice et la phénoménologie se trouve une partie
de la production de Peter Campus, ainsi qu'une de celle de Dan Graham ; la dimension esthétique est fondée sur les oeuvres de Philippe Ramette et Leandro Erlich mais aussi sur les rapports de forme de quelques pièces de Trisha Brown et Tony Oursler ; les considérations sur2 Cf. biographies du magicien.
6les mélanges stylistiques et les références concrètes reposent sur certains travaux de Gianni
Motti, Matthew Barney, Philippe Decouflé, Chris Burden et Steve McQueen. Bien entendu ces catégories ne sont pas absolues et certaines productions recoupent plusieursaspects. En outre, les réflexions sont menées sur une partie, voire une unité, de la production
de chaque artiste De même d'autres artistes, références artistiques secondaires ou sous-
catégories peuvent venir compléter les sources majeures- toutefois il serait fastidieux de lesciter tous ici. Enfin, afin que l'étude s'appuie sur des fondements scientifiques, elle fait appel
à différentes sciences humaines et sociales pour compléter son propos, tels que diverses
branches de la sociologie (sociologie des publics, sociologie du goût, pratiques culturelles...),des notions en psychomotricité et psychologie cognitive ainsi que des éléments d'économie
relative au marché culturel.Cette étude a donc pour volonté et objectif d'offrir au lecteur une vision de l'art
contemporain passant à travers le prisme original de la magie fantasmagorique.D'abord objet d'une simple observation des deux mondes, ce mémoire a été destiné à creuser
une intuition d'un possible rapprochement entre les deux disciplines. Le choix d'une problématique trop vaste comme " la magie en tant qu'art » ou au contraire trop précise tel" la magie dans l'art » se serait avéré délicat et surtout sans intérêt quant aux thématiques
qu'elles auraient soulevées, l'étude s'est naturellement portée sur une exploration du champ
de l'art contemporain avec la magie comme " outil » à cette plongée dans les questionnements
internes de la production du début du XXème siècle à nos jours. Afin de respecter l'approche initiale, ce mémoire se devait de se construire sur plus qu'une simple juxtaposition formelle entre les disciplines artistiques, attitude qui n'aurait eu pour but que de plaquer des caractéristiques d'un médium sur un autre et n'aurait donc pasabouti à des conclusions remarquables, voire aurait provoqué une véritable confusion du
propos et du statut offert aux deux disciplines étudiées. Ce texte devait permettre avant tout d'aller à la rencontre d'une production contemporainediversifiée, reliée par la magie et leurs problématiques communes. La volonté majeure étant
de mettre en exergue des problèmes divers en rapport avec le domaine de la culture. Les thèmes sont ainsi variés et abordés avec toute la circonspection due à un sujetaussi singulier. Le propos étant aussi d'explorer les limites d'un tel sujet en établissant s'il
s'agit d'un rapprochement des genres ou d'une véritable fusion entre les deux disciplines. 7 Pour cela la structure du texte s'articule en premier lieu sur l'antagonisme flagrant de l'art contemporain et de la magie pour peu à peu se resserrer vers des convergences, qui sielles restent tout d'abord formelles n'en sont pas moins des " prétextes » à l'analyse de
problématiques inhérentes à la sphère culturelle, pour afin aborder des similitudes pour le
moins remarquables méritant l'attention et un examen approfondi. 8I. Des mondes parallèles qui s'ignorent
1/. De la difficulté d'approche
Le monde de l'art et en particulier celui de l'art contemporain n'a a priori aucun point commun avec le domaine de la prestidigitation. Les différences se situent aussi bien au niveau de la production, que dans les démarches intellectuelles ou encore l'iconographie. De même leurs objectifs et leurs publics sont éminemment distincts.La difficulté majeure lors de l'évocation d'une étude sur le rapport entre les deux disciplines
réside justement dans l'incompréhension immédiate des sujets interrogés quand aux
interactions possibles dans des domaines aussi apparemment étrangers. Le premier problème est posé par le peu de connaissances de l'autre discipline. L'artcontemporain ne regarde que rarement du côté des activités liées à une industrie du
divertissement, voire du loisir, destinée plus généralement au grand public. Tandis que le monde de la prestidigitation rencontre en premier lieu une difficulté concernant la conceptualisation de certaines formes de l'art contemporain, notamment la performance.En effet, le terme français de " performance » pour désigner le performance art qui signifie
" exécuter » contribue à une certaine confusion des esprits. La référence de la traduction
littérale française à la notion d'effort et de réussite d'une action au niveau technique
d'exception induit plutôt en magie l'idée d'une capacité de manipulation extraordinaire et n'évoque pas dans l'immédiat le concept de la performance que l'on pourrait résumer parl'idée d'une action artistique incarnée et orchestrée par l'artiste lui-même. Il est donc
nécessaire d'éliminer certains genres de l'art magique qui n'ont de fait aucun rapport avecl'art contemporain et relèvent uniquement du domaine la technicité, d'un savoir-faire
dépourvu d'artifices et de fantasmagorie (routines de cartes, de cordes, de pièces, close-up...)
et qui donc appartiennent de manière unilatérale au cadre de la prestidigitation. Ce manque de référence concernant les activités et productions de l'autre domaine laisse les acteurs de deux milieux dans une sorte de dubitation interrogative qui se transforme progressivement en curiosité étonnée.La barrière de la sémantique et du cloisonnement des genres passée, les sujets restent quelque
peu indécis quand aux informations qu'ils sont censés donner pour faire avancer le propos. 9 Cependant, même en occultant la discipline inconnue, l'entretien avec ces spécialistes de leurdomaine respectif dessine très clairement les aspects principaux de l'étude à mener. Des
questions plus précises sur certaines notions ou certains problèmes majeurs permettent de resserrer le propos vers des problématiques récurrentes. Les correspondances n'apparaissent pas spontanément aux acteurs de l'artcontemporain ni à ceux de la prestidigitation du fait de leur antagonisme évident. En effet, les
univers en présence représentent une opposition de critères marquée qui les empêche de se
considérer liés de manière évidente.Cependant, si le départ de cette étude repose sur la volonté d'éprouver la validité d'une
intuition, il s'avère que nombre de notions communes se dégagent des recherches menéesauprès des deux disciplines. Du simple rapprochement stylistique à de véritables productions
jumelées, cette singulière comparaison soulève des questionnements variés liés au champ de
l'art, à la société du spectacle mais aussi à des thématiques auxiliaires telles que l'esthétique,
la phénoménologie de l'oeuvre, la sociologie des publics... Un sujet atypique qui au final nous oblige à envisager des problèmes récurrents de l'histoire de l'art d'un angle inattendu et ainsi mettre en exergue la contemporanéité de ces problématiques. 102/. Un public distinct
Rien n'associe donc la prestidigitation et l'art contemporain. Cette séparationstylistique apparemment évidente soulève cependant une multitude de problématiques établies
et rarement remises en cause compte tenu de la légitimité irréfutable d'une telle constatation.
Au risque d'édicter quelques truismes, le concept ancestral d'art promène avec lui bon
nombre de valeurs fortement admises, consciemment ou non par tous les acteurs du monde del'art. Les hiérarchies et l'ordre des choses incitent à valider certaines choses pour ce qu'elles
sont ou comme elles ont été définies en raison de leur caractère acquis et admis. En effet,
même dans un domaine aussi considérable et indéfini que l'art, il existe cependant quelques axiomes rarement reconsidérés du fait de plusieurs facteurs, notamment celui de latemporalité (ancienneté d'une valeur) mais aussi de l'appartenance d'un genre de production à
une catégorie qu'il est difficilement envisageable de mélanger car ne correspondant en aucun lieu (public, espaces, objectifs, média...). C'est bien entendu à première vue le cas de la prestidigitation et de l'art contemporain qui ne partagent aucun critère commun, à commencer par le type de public visé et demandeur 3. Le facteur de non association de ces deux domaines se trouve dans l'impossibilité de se figurer l'entremêlement des deux catégories auxquelles ils appartiennent initialement.Si l'on se base sur les écrits des sociologues au sujet de la classification des genres et
notamment des pratiques culturelles, comme la plupart des activités, l'art fait partie de ce que la sociologie bourdieusienne à définit comme des champs. On peut voir dans les champs des sphères de la vie sociale ayant acquis une autonomie relative au fil du temps. Ce sont enquelque sorte les institutions mais au sens d'un réseau de relations tissé avec les agents
individuels ou collectifs. L'art contemporain fait donc partie du champ artistique tandis que la prestidigitation intègre le champ du divertissement. Or pour Bourdieu, chaque activité se classe dans deux types de rapport : le légitime et le peulégitime. La sociologie du goût, à l'origine de nombreuses enquêtes sur les pratiques
culturelles françaises, révèle que la consommation de biens culturels est influencée par la
catégorie sociale du consommateur4. En effet, les classes dominantes (milieu social favorisé,
diplômes élevés, professions supérieures...) bénéficiaire du plus fort " capital culturel »
3 Pierre BOURDIEU, La Distinction, Critique sociale du jugement, Paris, Ed. Minuit, 1979. 4 Cf. annexe n°1. Espace social de Pierre Bourdieu, schéma simplifié extrait de Raisons pratiques, Seuil, coll.
Points, 1996, p. 21
11privilégient des activités culturellement éminentes dans le rang des valeurs de respectabilité
du champ artistique, tandis que les dominés, inconscients de cet état de fait, sollicitent leschoix des dominants, devenant ainsi eux-mêmes responsables de la pérennisation de ce
schéma.Sans tomber dans les poncifs lénifiants et le débat médiocre sur la nature de l'art et de ce qui
n'en fait pas partie, cette théorie des pratiques culturelles légitimes par catégorie sociale et
une des première raison de penser que art contemporain et prestidigitation n'ont rien à voirl'un avec l'autre. Compte tenu de leur écart de champ et de légitimité, les acteurs auxquelles
ces deux disciplines s'adressent sont relativement opposés. De plus, il est clairement établidepuis de nombreuses années qu'il est nécessaire de parler " des » publics et non plus " du »
public afin de supprimer le point de vue généraliste du sujet et ainsi " raisonner en terme de publics socialement différenciés, stratifiés par milieux sociaux » 5. Le public de l'art contemporain, s'il fait partie de l'upper-class est bien plus armé culturellement que celui du divertissement dont fait partie la prestidigitation, communément plus issu des classes moyennes. En effet, les publics de l'art contemporain sont majoritairement avertis et pourvus d'un bagage culturel leur permettant de s'intégrer à ce milieu aux codes spécifiques. La prestidigitation en raison de son statut de divertissement ne comprend que peu d'adeptes mais beaucoup de spectateurs. En 1904, un chroniqueur parisienfaisait cette réflexion à propos du numéro de Nelson Downs : " ce dernier truc, qui a nos yeux
est loin de valoir les prodiges d'adresse accomplis par Nelson Downs, est cependant ce qui, de son programme plaît davantage au public. Ce qui prouve une fois de plus qu'il y a plus de spectateurs que de connaisseurs6... ».
En effet, la magie ne détient pas un public averti, ou cela n'est pas le schéma majoritaire, car
il ne vient pas chargé d'un intérêt culturel particulier. La satisfaction de ce (grand) public se
fait donc par l'intervention des " classiques» du genre, aujourd'hui légèrement surannés. Un
jeune magicien professionnel me confiait qu'il se voit fréquemment réclamer le numéro " dulapin qui sort du chapeau » en dépit des efforts de la nouvelle génération d'illusionnistes
d'offrir de nouvelles propositions. Or ce public de la magie, majoritairement plus consommateur de divertissement que véritable amateur, engendre par ses attentes conventionnelles la qualité moyenne de certaines prestations.5 Nathalie HEINICH, La sociologie de l'art, Paris, Ed. La découverte, 2004 [2001].
6 Max DIF, Histoire illustrée de la prestidigitation, Editeur Maloine, Paris, 1986, p.250
12 Ces constatations expliquent en partie le caractère majoritairement élitaire des expositionsd'art contemporain et la qualité parfois médiocre de certains spectacles de prestidigitation et
la réputation populiste qui en découle.Cette dernière déclaration, qui elle semble être une idée toute faite, est cependant loin
d'être édictée à la légère et amène à effectuer une comparaison pratique entre ces deux
activités culturelles afin de confirmer le caractère éminemment antagoniste de ces deux
domaines. Les deux exemples employés appartiennent bien entendu à un registre radical maisceci afin de mettre en évidence le clivage à première vue indiscutable qui semble exister entre
les deux disciplines.Le modèle retenu pour la prestidigitation relève des clichés du genre et de l'idée caricaturale
que d'aucun peuvent se faire de cette pratique culturelle sans connaissances plus approfondies. " Le plus grand Cabaret du Monde » sera donc cet exemple.Emission télévisée du samedi soir sur une chaine française hertzienne, elle est présentée par
Patrick Sébastien, désigné dans le jargon comme grand habitué du PAF 7.Il est déjà très net, dans cette simple description, que le modèle appartient au domaine du très
grand public, notamment par le fait qu'il s'agit d'une émission télévisée de divertissement qui
passe aux heures de très grande écoute sur une chaine accessible au plus grand nombre. Laprésence de la figure de l'animateur renvoie très distinctement à la volonté de fédération et
d'accompagnement d'un public sur le registre du divertissement. Rien que le nom de cet animateur représente une certaine banalité et l'intention manifeste de créer un personnage" proche du monde », une figure de " monsieur-tout-le-monde » accessible, policée et pour le
coup rassurante du fait de sa ressemblance avec tout un chacun. Une véritable icône
populaire...De plus, il est intéressant de noter le titre même de l'émission : usage de superlatif aisé
(le plus grand) et effet global quelque peu enfantin avec l'emploi d'un qualificatif quantitatif aux arômes de cours de récréation (du monde). Bien entendu l'effet recherché n'est pas celui-ci mais bien l'aspect sensationnel etimpressionnant d'une émission qui se veut unique en son genre. De même, le caractère
télévisuel tente d'être gommé par l'emploi du mot " cabaret », terme qui évoque
instantanément tout un imaginaire lié à une imagerie populaire empreinte d'une certaine aura,
7 Paysage Audiovisuel Français, terme du jargon télévisuel et qui désigne l'aspect général des médias
audiovisuels français à une période donnée. 13à des lieux mythiques (Moulin-Rouge, Folies Bergères...), à un milieu régit par des codes
chargés de mystères, à une utopie de la culture à la fois underground et populaire... Le tout à
destination de nombreux pays, le terme " cabaret » étant connu à l'étranger et évoquant
généralement la un patrimoine appartenant en priorité à la France.Néanmoins le Cabaret reste une émission de télévision, malgré son décor aux tables rondes et
ambiance feutrée, qui empêche de réellement adhérer au principe de salle de spectacle
intimiste. La technique télévisuelle y est omniprésente avec les plans répétitifs des cameramen
sur le visage " émerveillé » des invités (entendre par là artiste en promotion dans l'émission,
bouche grande ouverte et yeux écarquillés) qui finissent par sortir le téléspectateur de
l'atmosphère dans laquelle on voulait le propulser initialement. Ajouter à cela un animateur visiblement peu habitué à porter son beau costume sur mesure, avec une expression oralesaturée par le champ lexical de l'extraordinaire et des interférences politiques récurrentes sur
la paix-dans-le-monde et plus-d'enfants-qui-meurent-de-faim, vous obtenez là l'exemple des stéréotypes populistes du monde du spectacle et notamment de la prestidigitation.Non que l'aspect populaire soit un défaut en soi, mais il est ici poussé à une extrémité
qui tend à la caricature délibérée (presque blessante pour la véritable classe moyenne), car il
est certain que les directeurs de chaîne et autres décideurs économiques voient là une manière
de toucher une cible large en jouant justement sur les poncifs du genre, ce qui leur permet derépondre aux attentes d'un public spectateur mais pas adepte, qui apprécie parce qu'il a
l'impression d'y retrouver l'idée sommaire qu'il se fait de cette discipline. En majorité doncun public peu exigeant, ne possédant pas une expérience culturelle forte, généralement issu
des couches médianes de la société avec des attentes simples, presque stéréotypées afin
d'avoir le sentiment d'une structure qui lui offre la possibilité de références auxquelles se
raccrocher. C'est ce que Bourriaud8 définit comme le " cadre » : " Le cadre est à la fois, un
marqueur, un doigt qui désigne ce qu'il faut regarder et une limite qui empêche l'objet
encadré de verser dans l'instabilité, dans l'informel, c'est-à-dire le vertige du non-référencé,
de la culture "sauvage" ».L'utilisation de présentations archétypes permet donc de fédérer un large spectre de catégories
sociales médianes autour d'un objet référencé par le biais d'un système de formes qui lui
apporte satisfaction de part son caractère circonscrit. Le public de la prestidigitation fait donc
plus amplement partie de ce groupe.8 Nicolas BOURRIAUD, Postproduction, Dijon-Quetigny, Les presses du réel, 2003, p 37.
14 Le public de l'art contemporain est quant à lui majoritairement issu des classes sociales dominantes, dispose d'un fort " capital culturel » et, de ce fait possède le principe d'habitus qui lui permet de s'adapter à son environnement. Cette catégorisation sociale despratiques culturelles fut édictée en particulier par Pierre Bourdieu et permet ainsi une
approche généraliste des types de public de l'art dont nous nous servirons afin d'observer la disparité présente entre les deux disciplines étudiées. Le capital culturel est l'ensemble des qualifications intellectuelles produites chez un individupar différents facteurs tels que l'éducation, l'environnement familial ou le système scolaire.
Ce capital se présente sous trois formes distinctes : une forme institutionnalisée (les diplômes
et titres scolaires à valeur du marché du travail), une forme objectivée (appropriation de biens
culturels) et enfin une forme incorporée qu'il nomme l'habitus qui représente une capacité d'adaptation sociale à un milieu par des socialisations successives.Le public de l'art contemporain est donc en grande majorité doté de ces éléments ce qui lui
permet d'appréhender avec aisance un " monde » ou une pratique légitime, qui n'en ait pas moins régi par des codes. En effet, comme le dit Bourriaud, " La Haute culture repose sur une idéologie du socle et de l'encadrement9 [...] ». Cependant, l'habitus conféré au public de
l'art contemporain lui permet de réagir spontanément et sans réflexion consciente aux
situations qui lui sont proposées. Le public averti remarque et intègre donc de façon quasisubliminale les repères qui lui sont destinés, là où le public des classes moyennes rencontre
plus de difficultés, en raison des " obstacles invisibles » qui jalonnent son insertion dans les
pratiques légitimes.En effet, la culture muséale repose bel et bien sur des " codes de présentation » : chromatisme
neutre, espaces vastes et étendus, signalétique et indications réduites mais aussi rituels
sociaux, autant de facteurs avec lesquels un public averti sait réagir - presqueinconsciemment - et se sent une certaine légitimité d'être, une appropriation immédiate des
lieux, le public des classes moyennes prend toute la mesure de son manque d'intégration à l'environnement présent. Pour exemple on pourrait citer quelques pratiques courantes des institutions de l'art comme levernissage qui se fait généralement sur invitation, premier signe d'officialité qui engendre une
certaine distinction, ensuite le vernissage répond à un ensemble de rituels sociaux (accueil discours, présence d'officiels...) et incite à des comportements convenus (retenue,9 Loc.cit
15émerveillement...) déterminés par les facteurs environnementaux (lieu, l'assemblée, la
fonction des membres...). Les échanges entre convives se font aussi généralement sur le
registre de la conversation intellectuelle, comme l'implique l'institution et le fait de s'y
quotesdbs_dbs9.pdfusesText_15