28 jan 2012 · Méditations Métaphysiques - Réponses aux Secondes Objections ou telle thèse défendue par Descartes (comme l'existence de Dieu,
Previous PDF | Next PDF |
[PDF] Lecture des Méditations métaphysiques de Descartes, par Patrick
Pourquoi entreprendre la lecture des Méditations Métaphysiques en classe de Telle devrait être notre lecture des textes de Descartes et peut-être tout rassemble l'ordre mécanique de l'explication et l'ordre final du sens c'est donc la thèse
[PDF] Thèse recto verso - Thèses
28 jan 2012 · Méditations Métaphysiques - Réponses aux Secondes Objections ou telle thèse défendue par Descartes (comme l'existence de Dieu,
[PDF] Introduction aux Méditations Métaphysiques de Descartes
Or la métaphysique est une théologie rationnelle, par opposition à la thèse scolastique où la raison n'était pas le seul accès à Dieu puisqu'il existait la voie
[PDF] Méditations métaphysiques
René Descartes Méditations métaphysiques (1641) PhiloSophie soient propres pour les spéculations métaphysiques, que pour celles de géométrie
[PDF] Préparation à la lecture des Méditations de Descartes - Corpus UL
de la thèse qu'il avait soutenue dans L'Histoire de la folie ; et pour la réfutation de L'intérêt de Foucault pour la forme de la métaphysique de Descartes le
[PDF] Étude des deux premières Méditations métaphysiques de Descartes
de 1647 est Les méditations métaphysiques de René Descartes touchant la première philosophie, dans lesquelles l'existence de Dieu, et la distinction réelle
[PDF] Méditations Métaphysiques, Descartes Première - Philosophie
Méditations Métaphysiques, Réponses aux cinquièmes objections, Descartes, thèse suivante : « Si l'être humain est un être faillible, cette faillibilité ne peut
[PDF] Les Méditations Métaphysiques 2016 - Philocourscom
Descartes démontrera ainsi l'existence de Dieu par la raison (Méditations 3 et 5) Thèse : Dieu et l'âme sont plus faciles à connaître que les choses sensibles
[PDF] facebook inscription
[PDF] facebook messenger
[PDF] terminale stmg rhc matières
[PDF] facebook fr
[PDF] facebook mobile
[PDF] facebook recherche
[PDF] facebook connection
[PDF] méthode facile ? lire et ? comprendre
[PDF] facile ? lire bibliothèque
[PDF] gestion finance stmg formule
[PDF] gestion finance stmg exercice
[PDF] terminale stmg gestion et finance débouchés
[PDF] terminale stmg gestion et finance matieres
[PDF] bac gestion finance 2016 corrigé
UNIVERSITÉ DE BOURGOGNE
École doctorale Langages Idées Sociétés Institutions TerritoiresTHÈSE
Pour obtenir le grade de
Docteur de l"Université de Bourgogne
Discipline : Philosophie
Soutenue le
28 janvier 2012
ParJEAN-DANIEL LALLEMAND
L"éthique cartésienne de
la penséeDirecteur de thèse
PIERRE GUENANCIA
Professeur à l"Université de Bourgogne
Jury : Frédéric BRAHAMI, Professeur à l"Université de Franche Comté Michaël FOESSEL, Maître de conférences à l"Université de BourgognePierre G
UENANCIA, Professeur à l"Université de BourgogneDenis K
AMBOUCHNER, Professeur à l"Université de Paris IL"éthique cartésienne de la pensée 3
REMERCIEMENTS
À l"université de Bourgogne, et tout particulièrement au Département de philosophie, de m"avoir accueilli en leur seinÀ Pierre Guenancia, non seulement d"avoir accepté d"être mon directeur de thèse,
mais surtout pour son enseignement qui, au-delà d"un contenu d"une richesse exceptionnelle, fait comprendre en acte ce qu"est l"intelligence d"une philosophie et ce qu"est proprement philosopher À Aline Tarrago, qui a bien voulu me faire part de ses précieuses réflexions ; mes travaux doivent beaucoup à son intelligence et à sa sensibilité.4 L"éthique cartésienne de la pensée
RÉSUMÉ
L"oeuvre de Descartes est une oeuvre de pensée, qu"il a voulue et qu"il a bâtie avec méthode, rigueur et constance tout au long de sa vie. À travers cette oeuvre, ce n"estpas tant la vérité des choses que l"on découvre, que la manière dont on peut
construire sa pensée et son propre système de certitudes. Et la manière que nous
propose Descartes et qu"il a lui-même mise en oeuvre repose sur le souci de la cohérence. Penser avec vérité le monde est alors le moyen le plus sûr de penser de manière cohérente. L"étude a pour objet de mettre en lumière les règles qui constituent, de fait, ce que l"on peut appeler la maxime cartésienne de la pensée. Pour ce faire, on commence par décrire ce qu"est, pour Descartes, d"une part la pensée, et d"autre part ce monde qu"il s"agit justement de penser. On est ainsi conduit à examiner et à critiquer en particulier la place que tient l"existence de Dieu dans le dispositif cartésien qui vise à garantir la cohérence de sa propre pensée. Malgré l"application qu"il fit de sa maxime, Descartes n"évita pourtant pas une erreur qui allait fragiliser son système de certitudes : il s"agit de sa conception de la matière comme pure étendue. Le "roman de la nature" qu"il imagina alors sur cette baseerronée a beau être très cohérent, il ne représente malheureusement pas la réalité du
monde.C"est en introduisant l"intersubjectivité dans l"éthique de la pensée, c"est-à-dire en
acceptant de frotter son propre système de certitudes à celui d"un Autre, dont on reconnaît l"existence et la valeur, que l"on peut sans doute éviter ce type de dérive. On constate alors que l"idée de l"Homme, qui est à la fois l" ego cartésien et cet Autre, remplace avec profit l"idée de Dieu dans la perspective d"une garantie de la vérité.MOTS CLÉS
: Action, Autre, certitude, clarté et distinction, causalité, cohérence, conception, conscience, corps, croyance, Dieu, doute, ego, essence, Fait, étendue, éthique, Homme, idée, imagination, matière, objet géométrique, passion, pensée, réflexion, substance, vérité.L"éthique cartésienne de la pensée 5
The Cartesian ethics of the thought
ABSTRACT
Descartes" work is a work of thought, which he wanted and built with method, strictness and constancy his whole life through. Thanks to this work, we do not discover as much the truth of the things as the way we can build our own thought and system of convictions. And the method Descartes is suggesting and applying in the mean time is aimed at coherence. To think truly the world is consequently the most reliable way to think with coherence. The subject of the study is to highlight the rules that indeed make up what we may call the Cartesian maxim of the thought. With this aim in view, we start with the description of what is for Descartes the thought on one hand, and on the other hand, this world which is precisely to be thought. We are then led to examining and criticizing the role of God"s existence in the Descartes" system, which aims to guarantee the coherence of his own thought. However, in spite of the application of his maxim, Descartes did not avoid an error which was to weaken his system of convictions, that is to say his conception of the matter as pure expanse. Even if the "novel of nature" he then imagined on this erroneous basis is coherent, it unfortunately does not represent the reality of the world. By introducing inter-subjectivity in the ethics of the thought, i.e. by accepting to rub our own system of convictions to the one of the "Other", whose existence and value we recognise, we no doubt can avoid this kind of drift. So we establish that the idea ofMan, who is both the Cartesian
ego and this Other one, takes with great benefit the place of the idea of God, in the prospect of guaranteeing the truth.KEYWORDS
: Action, Fact, body, causality, certainty, clarity and distinction, coherence, conception, conscience, doubt, ego, essence, ethics, expanse, faith, geometrical object, God, idea, imagination, Man, matter, Other, passion, reflexion, substance, thought, truth.6 L"éthique cartésienne de la pensée
" Ce que j"en opine, c"est aussi pour déclarer la mesure de ma vue, non la mesure des choses. »Michel de Montaigne
L"éthique cartésienne de la pensée 7
SOMMAIRE
RÉSUMÉ ---------------------------------------------------------------------- 4 SOMMAIRE ------------------------------------------------------------------ 7 Introduction ----------------------------------------------------------------- 9Une philosophie pratique........................................................................... 11
Une philosophie à pratiquer par chacun....................................................17 Le sujet de la philosophie cartésienne est la pensée ................................. 22 Approche suivie dans cette étude.............................................................. 26 La pensée --------------------------------------------------------------------29 L"être de la pensée------------------------------------------------------------------31Qu"est-ce que "penser" ? .............................................................................31
Action et passion ....................................................................................... 46
Prises de position....................................................................................... 64
Les idées et les images ------------------------------------------------------------ 93La conception ............................................................................................ 93
L"imagination............................................................................................ 113
La mémoire...............................................................................................124
Remarque sur l"union de l"âme et du corps..............................................133 La structure du monde intelligible---------------------------------------------- 137Le monde donné .......................................................................................137
Les essences..............................................................................................145
Les substances..........................................................................................158
Le tout, l"union .........................................................................................170
La cause et l"effet ......................................................................................179
Les idées et les choses------------------------------------------------------------ 189Les idées dans le monde donné................................................................189
La vérité des idées ...................................................................................209
Clarté et distinction, intuition................................................................. 230
L"éthique de la pensée-------------------------------------------------- 241 Le temps et la persistance -------------------------------------------------------2438 L"éthique cartésienne de la pensée
Le temps cartésien................................................................................... 243
La persistance...........................................................................................251
L"esprit et le temps ..................................................................................259
L"ego et sa créance................................................................................... 268
Le choix de la cohérence--------------------------------------------------------- 273L"éthique cartésienne de la pensée...........................................................273
Dieu, garant de la cohérence ....................................................................279
Examen critique de la solution de Descartes........................................... 298L"efficacité de la maxime cartésienne...................................................... 306
Relativité de la cohérence----------------------------------------------319 La matière et l"étendue -----------------------------------------------------------321L"étendue cartésienne...............................................................................321
Les objets géométriques .......................................................................... 329
Les images cérébrales...............................................................................337
L"existence des corps ............................................................................... 344
La nature des corps...................................................................................353
Divergences par rapport à la vision cartésienne ..................................... 362L"existence de l"Autre................................................................................377
Une nouvelle éthique............................................................................... 387
Conclusion ---------------------------------------------------------------- 397 Retour sur l"approche suivie.................................................................... 399Une autre cohérence................................................................................ 402
Appendice ------------------------------------------------------------------431 Divergences avec quelques grands commentateurs de Descartes----------- 433 Notes : Citations --------------------------------------------------------- 449 Index------------------------------------------------------------------------ 485 Bibliographie------------------------------------------------------------- 493René DESCARTES................................................................................... 495
Commentateurs de Descartes.................................................................. 499Autres auteurs .........................................................................................500
L"éthique cartésienne de la pensée 9
Introduction
Introduction
10 L"éthique cartésienne de la pensée
Introduction
Introduction
L"éthique cartésienne de la pensée 11
Une philosophie pratique
Introduction
La célébrité de Descartes repose, essentiellement, sur ses Méditations métaphysiques . Et en effet, il s"agit là d"un immense chef-d"oeuvre, dont l"importance fut et reste capitale dans l"histoire de la pensée. C"est aussi le texte central de toutel"oeuvre de Descartes, car c"est lui qui donne son véritable sens à cette oeuvre. Et
cependant, non seulement l"oeuvre de Descartes ne saurait se réduire aux seules Méditations métaphysiques, mais il est légitime de dire d"elle qu"elle n"est pas une métaphysique, ou du moins qu"elle ne l"est pas essentiellement. Descartes lui-même estimait qu"il ne convenait pas de consacrer trop de temps à la métaphysique1. Cette discipline est, pour lui, un point de passage obligé, et
certainement pas un but. Un point de passage obligé dans un double sens : tout d"abord pour trouver des fondations sur lesquelles il sera ensuite possible de construire ; et ensuite pour libérer de manière définitive l"esprit de préoccupations qui, sinon, l"empêcheraient, par l"attention qu"elles requièrent, de mobiliser ses ressources sur d"autres tâches, qui sont celles qui comptent in fine. C"est ainsi qu"il reprochera gentiment à la Princesse Élisabeth, qui était une de ses lectrices les plus passionnées et les plus intelligentes (c"est à la pertinence de son questionnement que nous sommes redevables des lettres dans lesquelles Descartes fut conduit à développer ses idées sur l"union de l"âme et du corps, notamment), de s"intéresser un peu trop aux questions métaphysiques : " Enfin, comme je crois qu"il est très nécessaire d"avoir bien compris, une fois en sa vie, les principes de la Métaphysique, à cause que ce sont eux qui nous donnent la connaissance de Dieu & de notre âme, je crois aussi qu"il serait très nuisible d"occuper souvent son entendement à les méditer, à cause qu"il ne pourrait si bien vaquer aux fonctions de l"imagination & des sens ; mais que le meilleur est de se contenter de retenir en sa mémoire & en sa créance les conclusions qu"on en a une fois tirées, puis employer le reste du temps qu"on a pour l"étude, aux pensées où l"entendement agit avec l"imagination & les sens. »Lettre à la Princesse
Élisabeth du 28 juin 1643
. Adam et Tannery, Vol. III - page 695. La philosophie qui intéressait Descartes, celle " où l"entendement agit avec l"imagination & les sens », et qui est celle qu"il ne cessa de développer toute sa vie, était en réalité une philosophie pratique. Dont les buts étaient pratiques, en tout cas.Descartes était en particulier intéressé au plus haut point par la médecine, car il était
Introduction Une philosophie pratique
12 L"éthique cartésienne de la pensée convaincu qu"il y avait là une possibilité d"accroître sensiblement l"espérance de vie
des humains : " Je n"ai jamais eu tant de soin à me conserver que maintenant, & au lieu que je pensais autrefois que la mort ne me pût ôter que trente ou quarante ans tout au plus, elle ne saurait désormais me surprendre, qu"elle ne m"ôte l"espérance de plus d"un siècle : car il me semble voir très évidemment, que si nous nous gardions seulement de certaines fautes que nous avons coutume de commettre au régime de notre vie, nous pourrions sans autres inventions parvenir à une vieillesse beaucoup plus longue & plus heureuse que nous ne faisons ; mais pource que j"ai besoin de beaucoup de temps & d"expériences pour examiner tout ce qui sert à ce sujet, je travaille maintenant à composer un abrégé de Médecine, que je tire en partie des livres, & en partie de mes raisonnements, duquel j"espère me pouvoir servir par provision à obtenir quelque délai de la nature, & ainsi poursuivre mieux ci-après en mon dessein. »Lettre à Huygens du 25
janvier 1638 . Adam et Tannery, Vol. I - page 507.Une philosophie pratique
Il annonce clairement, dans le Discours de la Méthode, avoir décidé de ne plus se consacrer qu"à la seule étude de la médecine2. Certes, les Méditations métaphysiques,
ainsi que d"autres grandes oeuvres philosophiques de Descartes, commeLes Principes
de la Philosophie et Les Passions de l"Âme, sont postérieures au Discours de laMéthode
. Mais il écrira, quelques années avant sa mort, que, quelle que soit lamatière sur laquelle il avait travaillé, le principal but qu"il poursuivait était la
conservation de la santé »3. Au-delà de son intérêt proclamé pour la médecine,
attesté au demeurant par les importants travaux qu"il conduisit dans cette discipline Traités de l"Homme et de la Description du Corps Humain), il est certain que les préoccupations de Descartes étaient essentiellement, et profondément, de nature pratique. Pour lui, la science a pour horizon naturel la technique. Il conduisit ses recherches théoriques en optique en même temps qu"il s"évertuait à faire fabriquer par des artisans suffisamment habiles des verres de la forme qu"il préconisait et selon des méthodes qu"il avait imaginées lui-même (il dessinait même les plans des machines-outils nécessaires à l"exécution de ses instructions). Le début du texte de son traité d"optique illustre parfaitement la perspective qui est celle de Descartes en matière scientifique : " Toute la conduite de notre vie dépend de nos sens, entre lesquels celui de la vue étant le plus universel & le plus noble, il n"y a point de doute que les inventions qui servent à augmenter sa puissance, ne soient des plus utiles qui puissent être. »La Dioptrique - Discours premier. De la
lumière.Adam et Tannery, Vol. VI - page 81.
Et il poursuit :
Introduction Une philosophie pratique
L"éthique cartésienne de la pensée 13
" C"est pourquoi je commencerai par l"explication de la lumière & de ses rayons ; puis, ayant fait une brève description des parties de l"oeil, je dirai particulièrement en quelle sorte se fait la vision ; & ensuite, ayant remarqué toutes les choses qui sont capables de la rendre plus parfaite, j"enseignerai comment elles y peuvent être ajoutées par les inventions que je décrirai. »Ibid. - page 83.
Et c"est ainsi aussi qu"il faut comprendre la (trop) fameuse expression extraite du Discours de la Méthode : " comme maîtres et possesseurs de la Nature », que l"on veut trop souvent, aujourd"hui, présenter comme annonciatrice de l" ubris de l"homme moderne qui a conduit à l"épuisement des ressources de la terre. Sans même parler de son caractère totalement anachronique, cette lecture ne correspond pas au texte lui- même duquel est extraite cette expression * : Descartes exprime clairement que lascience a pour finalité la technique, qui elle-même vise le bien-être général des
hommes, et donc la " maîtrise » et la " possession » de la nature sont à comprendreau sens où un artisan maîtrise et possède son art. On retrouve là le parallèle que
faisait déjà Aristote entre la nature et l"art : connaître la nature, c"est connaître l"art
de la nature, en somme, c"est-à-dire la manière dont elle s"y prend, son savoir-faire, et ce, afin de l"utiliser à notre service, exactement comme on utilise les services d"un artisan. La connaissance de la nature, c"est aussi rendre plus efficaces les arts eux- mêmes : dans son traité d"optique4, Descartes explique ainsi qu"il est arrivé que des
lunettes soient plus performantes, parce qu"en voulant tailler des verres à surface sphérique on leur a donné en réalité, par hasard, une surface hyperboliquemaintenant qu"il a démontré que c"est cette forme qui doit être visée, les lunettes
seront toutes plus efficaces. On objectera peut-être que ce qui vient d"être dit relève en réalité uniquement des sciences, et non pas de la philosophie proprement dite, au sens où nous l"entendons* " [...] j"ai cru que je ne pouvais les [les premières notions de physique qu"il avait acquises] tenir
cachées, sans pécher grandement contre la loi qui nous oblige à procurer, autant qu"il est en nous,
le bien général de tous les hommes. Car elles m"ont fait voir qu"il est possible de parvenir à des
connaissances qui soient fort utiles à la vie, & qu"au lieu de cette Philosophie spéculative, qu"on
enseigne dans les Écoles, on en peut trouver une pratique, par laquelle connaissant la force & les
actions du feu, de l"eau, de l"air, des astres, des cieux, & de tous les autres corps qui nous
environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les
pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, & ainsi nous
rendre comme maîtres & possesseurs de la Nature. Ce qui n"est pas seulement à désirer pour
l"invention d"une infinité d"artifices, qui seraient qu"on jouirait, sans aucune peine, des fruits de la
terre & de toutes les commodités qui s"y trouvent, mais principalement aussi pour la conservationde la santé, laquelle est sans doute le premier bien, & le fondement de tous les autres biens de cette
vie ; [...] » Discours de la Méthode - Sixième Partie. Adam et Tannery, Vol. VI - pages 61-62.Introduction Une philosophie pratique
14 L"éthique cartésienne de la pensée aujourd"hui. Mais il n"en est rien. Pour Descartes, la philosophie englobe les sciences,
et en tout état de cause c"est le même esprit pratique qui l"anime dans toutes les
disciplines qu"il a pratiquées. Car Descartes est, tout simplement, un esprit pratique. Et on le constate même dans les questions les plus métaphysiques qui soient. On le sait, l"homme cartésien se caractérise avant tout par sa liberté. Bien sûr, on trouve des textes de Descartes très philosophiques sur ce qu"il entend par "liberté", et pourquoi cette liberté occupe une place si centrale dans la vision qu"il a de l"homme. Mais il ne faut pas se tromper : Descartes n"a pas découvert la liberté de l"homme au travers de réflexions métaphysiques ; il l"a d"abord, et essentiellement, éprouvée dans la vie pratique : " Je n"ai rien supposé ou avancé, touchant la liberté, que ce que nous ressentons tous les jours en nous-mêmes, & qui est très connu par la lumière naturelle ; [...] » Méditations Métaphysiques - Réponses aux troisièmes objections . Adam et Tannery, Vol. IX - page 148.Sa réponse à Gassendi sur la question de la liberté, dans laquelle il finit par dire à ce
dernier " Ne soyez donc pas libre, si bon vous semble ; pour moi, je jouirai de ma liberté »5 est particulièrement éclairante de l"approche philosophique de Descartes : les discussions théoriques visant à remettre en cause ce qui est communément éprouvé lui paraissent parfaitement vaines, et on sent bien que son irritation ne vient pas de ce qu"il serait mis en difficulté pour répondre sur un tel plan, mais de ce qu"à ses yeux c"est faire un mauvais usage de la philosophie.La liberté de l"homme est un
fait. Et cette liberté est une liberté d"action. L"hommeest fait pour agir, et le choix de ses actions est libre. Il " jouit » de cette liberté, certes,
mais cette liberté fait de lui le premier responsable de sa vie. L"homme est donc, d"un certain point de vue, et nonobstant que tout a été créé par Dieu, l"auteur, plus encore que l"acteur, de sa propre vie. Et toute la philosophie, pour Descartes, a pour but de voir clair en [ses] actions, & marcher avec assurance en cette vie. »6 On connaît la très belle image que donne Descartes de la philosophie, dansLes Principes, à savoir
celle d"un arbre dont les racines sont la métaphysique et dont la branche ultime est la morale, " qui, présupposant une entière connaissance des autres sciences, est le dernier degré de la Sagesse »*. Mais la morale, si elle doit être, dans l"esprit de* " Ainsi toute la Philosophie est comme un arbre, dont les racines sont la Métaphysique, le tronc est
la Physique, & les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences, qui se réduisent
à trois principales, à savoir la Médecine, la Mécanique & la Morale, j"entends la plus haute & la
plus parfaite Morale, qui, présupposant une entière connaissance des autres sciences, est le
Introduction Une philosophie pratique
L"éthique cartésienne de la pensée 15 Descartes, l"aboutissement de toute la philosophie (entendue au sens large, c"est-à-
dire y compris les sciences), ne saurait attendre. Vivre, pour l"homme, c"est agir, et agir librement. L"homme est toujours déjà " embarqué », comme le dira Pascal, et il ne lui est pas loisible d"attendre d"avoir étudié toute la philosophie pour se choisir une morale. Car agir suppose une morale, bien sûr. Juste avant le passage précédent des