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{ 85 }La tentationd u féminind ans le roman noira fricain francophonefr ancofonía16 (2007)85-

99berna

rd de meyer &Sc hool of LanguageLiter ature and Linguistics,Univer sity of KwaZulu-NatalP/B X

01 - Scottsville 3201(Afr

ique du Sud)Tél. +2

7 332605543Fax

+27 332605836. <
demeyerb@ukzn.ac.za>kare n meyers-ferreiraDepar tment of Modern Languages:French Uni versity of SwazilandP/B 4 - Kwaluseni (Swaziland)T

él. +268 5184747 (ext. 2112)Fax

+268 5185276<
ferreira@realnet.co.sz>r

ésumé Cet article analyse l'émergence d'une voix féminine dans le roman noir provenantd'

Afrique francophone. Après avoir contextualisé ce genre, l'article commente deuxm anifestations de cette tentation, d'abord avec Yasmina Khadra, auteur algérien qui utilise unpse udonyme féminin, et ensuite avec Aïda Mady Diallo, originaire du Mali et la premièrer

omancière africaine a être publiée dans la "Série noire" de Gallimard. Phénomène d'édition,c

ette nouvelle voie enrichit le genre, grâce entre autres à l'héritage littéraire fémininf

rancophone.m

ots-clés Roman noir. Littérature féminine. Afrique francophone. Yasmina Khadra. AïdaM

ady Diallo."La tentac ión femenina en la novela policíaca del África francófona"resumen Este artículo analiza la aparición de una voz femenina en la novela policíaca de Áfricaf

rancófona. Después de haber situado el género en su contexto, el artículo analiza dos ejemplosd

e esta tentación, primero el de Yasmina Khadra, autor argelino que utiliza un seudónimof

emenino, y entonces el de Aïda Mady Diallo, la primera novelista africana, del origen maliano,cuyas

obras se han publicado por Gallimard en su "Série noire". Fenómeno de publicación, esta voznueva

enriquece el género gracias (inter alia) a la tradición literaria femenina en África francófona.pa

labras clave Novela policíaca. Literatura femenina. África francófona.Yasmina Khadra.Aïda M

ady Diallo. " Temptation and Temptress: Feminine Voice in Francophone African Crime Writing"a bstract The emergence of a truly feminine voice in Francophone African crime writing isana

lysed in this article. Two particular instances of this attraction will be discussed after a briefcont

extualisation of the crime writing genre: firstly, Yasmina Khadra, Algerian author using af

eminine pseudonym and secondly, Aïda Mady Diallo, from Mali, the first African female novelisthavi

ng published in Gallimard's "Série noire". Editorial phenomenon, this new direction enrichesthe gen

re, thanks to, among others, the Francophone feminine literary heritage. key w ords Crime writing. Women's writing. Francophone Africa. Yasmina Khadra. Aïda MadyDi

allo.COREMetadata, citation and similar papers at core.ac.ukProvided by Repositorio de Objetos de Docencia e Investigación de la Universidad de Cádiz

{ 86 }L a tentation du féminind ans le roman noir bernard de meyer &af ricain francophone karen meyers-ferreiraD ans cet article nous essaierons de délimiter le champ littéraire del a paralittérature policière africaine, francophone et féminine.I l est clair que le champ du roman policier et du roman noir, enA frique et ailleurs, a toujours été dominé par des hommes. Néanmoins,c es dernières années, une tendance authentiquement féminineco mmence à se dessiner sur le continent et elle prend une forme toutep articulière. Il serait intéressant d'analyser quelques aspects de cetten ouvelle tendance, de comprendre la tentation du féminin dans le romannoi r, et pour cela nous utiliserons les cas de Yasmina Khadra et d'AïdaM ady Diallo.1

Manifestations du polar en AfriqueEn gu

ise d'introduction, il est nécessaire de présenter une brèvedé finition et analyse du concept de "roman policier", telles que nousl 'entendons, car elles nous permettront de mieux cerner les ouvragesé tudiés. La paralittérature est généralement définie comme unelit térature en marge de la littérature établie et comprend des genres telsqu e la science-fiction, le fantastique, le roman policier, etc. Souventencor e, les chercheurs utilisent l'expression "littérature de masse"( Todorov, 1971 : 10) ou "littérature populaire" pour parler du genrepo licier. Chevrel classe les romans noirs dans la littérature populairepar ce qu'elle "renvoie à une littérature en contact étroit avec le peuple- que celui-ci soit l'auteur (collectif), le destinataire, le sujet (dont traitec ette littérature) ou qu'il s'agisse d'une littérature qui se définit commea u service du peuple" (Chevrel, 1997 : 81). Cette littérature, quel que soitl e nom que nous lui donnions, recouvre diverses sous-catégories ; alorsque roman policier et roman noir expriment une transgressionc riminelle, dans le roman noir la transgression est liée à l'expression d'unm alaise, social le plus souvent, exprimé par la violence, ce qui entraîneu ne vision pessimiste, voire désespérée du monde. Le focalisateur en ests ouvent un héros faisant figure de perdant, en marge de la société, quidé voile une problématique politique ou sociale. Traditionnellement Fr ancofonía16 (2007)85-

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}r éunis sous le terme générique de 'roman policier', le roman noir, lerom an d'énigme et le roman à suspense, ces différentes sous-catégoriesdé signent toutes, depuis la fin du dix-neuvième siècle, ce que pouvonsnom mer le 'roman de la criminalité', et c'est sous cette désignation quen ous retrouvons les cas littéraires étudiés ci-dessous. Le récit de la criminalité a accès libre aux différents problèmes etper spectives de développement de la société et peut poursuivre sesp ersonnages tout en les insérant dans le milieu social où ils agissent. Ildev ient ainsi plus roman sociologique que beaucoup de romans àvo cation sociologique ; le roman noir, en l'occurrence, témoigne del 'univers social en exhibant fréquemment les bas-fonds d'un cadreg éographique, historique et social. Voilà clairement pourquoi les choixde K hadra et de Diallo sont tellement importants, en utilisant 'la femme'p our livrer un discours sociologique et même politique, puisque lem onde nous est montré d'une autre façon, à travers d'autres yeux. Ceciré pond d'ailleurs à la vocation profonde de la littérature féminine enA frique francophone. Depuis ses débuts dans les années 1950, lesr omancières n'ont cessé de dénoncer les tares sociales, les abus depou voir dans les sociétés patriarcales dont elles sont issues. Alors que lespr emiers récits se limitaient à dénoncer le manque d'accès à l'éducation,p our ensuite critiquer l'institution matrimoniale, comme la polygamieet les mariages forcés, on assiste depuis une bonne vingtaine d'années àun e explosion de thèmes abordés, allant de la prostitution à l'inceste,ai nsi qu'à une diversification de genres, par l'abandon progressif desf ormes personnelles, comme le journal intime ou la forme épistolaire,q ui furent généralement utilisées par les premières romancières. Le roman de la criminalité, avec la science fiction, semble être unede s dernières formes classiques abordées par les femmes africaines. Nouss avons que cette littérature a toujours été l'apanage de l'homme, hommeé crivain d'un côté et homme personnage principal de l'autre. A partir del 'entrée sur scène de Sherlock Holmes en 1887 jusqu'aux écrivains les plusrécents du vingt et unième siècle, la plupart des romans ont été écrits pardes hommes, mis à part quelques exceptions assez spectaculaires, enpa rticulier dans le monde anglophone comme Agatha Christie et, plusréc emment, P. D. James. Le monde masculin de la police a toujours étépe rçu comme un monde dominé par un certain type d'homme : souventà la fois marginal et macho, son intelligence hors du commun luiper mettait de résoudre tous les crimes. Les policiers sont les b ernard de meyer & karen meyers-ferreiraLa tentation du fémininda ns le roman noir africain francophone1 Les années mentionnées sont celles des publications des traductions en français.{ 88 }r eprésentants idéaux de l'ordre social et il est très difficile pour la femmeé crivain et même le personnage féminin de se retrouver dans ce mondem asculin. Quelques exemples existent néanmoins, tels les romans dePa tricia Cornwell qui s'attachent à une protagoniste du sexe féminin,K ay Scarpetta. Dans son oeuvre, on rencontre un grand nombrede femmes fortes : de femmes qui résistent à la violence des psychopathes,a ux femmes meurtrières qui n'aiment ni la justice, ni le FBI, en passantp ar Kay Scarpetta même (Hinton, 2002). Deux exemples tirés d'autres aires linguistiques sur le continenta fricain servent d'entrée en matière et illustrent la place précaire dur oman noir féminin en Afrique. Le premier est la femme détective MmaR amotswe, du romancier écossais, ayant longuement vécu au Botswana,A lexander McCall Smith. L'agent privé féminin est certainement unpe rsonnage atypique, l'exemple de Mma Ramotswe étant assez uniqued ans la littérature policière africaine et même mondiale. Dans tous lesvol umes écrits autour du personnage principal Mma Ramotswe (MmeR amotswe Détective (2003), Les Larmes de la girafe (2003), Vague à l'âme auBot swana (2004), Les Mots perdus du Kalahari (2004), La Vie comme elle va(20

05), En charmante compagnie (2006) et 1 Cobra, 2 souliers et beaucoupd

'ennuis (2007), l'héroïne principale, Mma Precious Ramotswe, détective1de l a seule agence privée féminine du Botswana, croit aux valeursm orales traditionnelles de ce pays d'Afrique Australe. La trame du polarest quasi inexistante, et le fait que Mma Ramotswe soit agent privé n'estgu ère plus qu'un détail, elle est surtout un personnage marqué par la vie,depui s l'abandon par son premier mari trompettiste et alcoolique.L 'enquête n'est un prétexte qui ne prend que quelques pages du livre. Parc ontre, l'auteur profite de cette scène et de ces personnages pourm ontrer quelques instantanées de la vie dans ce pays d'Afrique. Plus unel eçon de morale qu'une analyse critique de la société botswanaise,f éminisme, humour et exaltation des valeurs africaines ponctuent lesav entures de Mma Ramotswe à travers les sept volumes de la série; celle-ci s ert à dessiner un portrait d'un pays démocratique, moderne, maise ncore pétri de traditions. On y trouve toute la générosité et la fierté dupeupl e botswanais mais en même temps l'auteur n'hésite pas à décrire lesd ifférents maux de la société, comme le sida et la sorcellerie -ou même Fr ancofonía16 (2007)85-

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}le fé minisme, comme dans le dernier roman-, bien que toujours à demi-m ot. Le lecteur constate que les hommes sont en général plutôtcons idérés comme des êtres veules et pas très fins, tandis que les femmesson t débrouillardes, pragmatiques et manipulatrices. Malgré plusieursc lichés machistes, on note quand même un fonctionnement social quirepo se en grande partie sur le matriarcat. Tout cela est présenté aut ravers de saynètes très africaines où les femmes bavardent, palabrent etj acassent, les hommes draguent, défilent et réparent de vieux tacots ; etM ma Ramotswe, fine connaisseuse du genre humain, joue lesps ychologues pour arriver à ses fins tout en respectant la bonne et sagem orale du Botswana. Sous l'apparente naïveté se dévoilent un profondb on sens et une transmission intergénérationnelle de savoir-vivree xistentiel. Dans le monde policier lusophone africain, Pepetela (avec sespol ars ayant comme personnage principal Jaime Bunda, référence àpe ine voilée à James Bond) reste roi, mais l'oeuvre de la mozambicaineP auline Chiziane, O Sétimo Juramento (2000) semble avoir beaucoup decara ctéristiques du roman de la criminalité, bien que la critique littérairesem ble s'intéresser presque uniquement au thème de la sorcellerie. Cettefe mme écrivain offre une ouverture féminine au monde du roman noirm asculin, et la caractérisation de cet ouvrage souligne peut-être larési stance de la part de la critique d'inclure les femmes dans ce genreé minemment masculin.2

Yasmina Khadra: subterfuge féminin?L'

Algérie a été un des premiers pays africains qui a vu l'émergence durom an policier, et le genre a maintenu son importance au cours desdéc ennies. Il constitue indéniablement dans le paysage littéraire actuelde l 'Algérie "un mode d'expression qui formule tout à la fois desin vestissements thématiques aussi originaux que ceux du reste de lal ittérature romanesque et révèle à sa manière les conditions deco nstitution et d'évolution de la sphère littéraire" (Miliani, 1999 : 115-116).U n nombre encore assez restreint a pu percer dans l'Hexagone, etMo hammed Moulessehoul, qui publie ses fictions sous le nom de plumed e Yasmina Khadra, a pu bénéficier de l'ambiguïté homme/femmepu isque la France n'a prêté attention à cet auteur que quand il s'est b ernard de meyer & karen meyers-ferreiraLa tentation du fémininda ns le roman noir africain francophone{ 90 }pr ésenté comme femme, la critique française croyant avoir trouvé unevo ix authentique de femme arabe. Son nom de plume reflète les deuxp rénoms de sa femme (Yamina et Khadra, le 's' de Yasmina fut ajoutépl us tard par son premier éditeur français) qui lui donna l'idée d'utiliserce pseudonyme au moment où son travail d'écrivain en Algérie étaitde venu impossible : il était officier de l'armée algérienne et à partir de1

988 l'armée l'obligea à soumettre ses manuscrits à la censure avant de lespu

blier. L'utilisation d'un pseudonyme féminin aurait pu introduire unel ongue série de romans à héroïne, de personnages-clés féminins, dem ondes de femmes. Contrairement à cela, les héros khadriens sontm asculins, et machistes. Dès la première trilogie, autour de l'inspecteurLl ob (Morituri, Double Blanc et L'Automne des Chimères), la narration esta ssumée par un personnage masculin qui incorpore trois facettes : lepol icier, l'idéaliste déçu et l'écrivain. Monde masculin donc, oùl 'apparition de la femme est souvent vue comme une intrusion. L'épousedu Com missaire Llob, Mina, est la première manifestation depe rsonnage féminin d'une certaine importance au sein de l'oeuvre deYas mina Khadra. Maleski voit Mina, qui n'occupe que quelques lignesdan s chaque roman de la trilogie, d'une part comme "la mère de[s]en fants [de Llob], une femme lettrée, douce, belle et attentionnée ; et,d' autre part, dans le cadre de l'Algérie contemporaine où elle n'est dèsl ors plus que l'ombre d'elle-même, terrorisée, défraîchie et amère"( Maleski, 2003 : 150). Après une analyse approfondie des trois volets del a trilogie, Maleski conclut qu'à "la douceur, la sensualité et la dévotions uccède alors la noirceur se voulant représentative de la conditionfé minine algérienne dans son ensemble" (ibid.). Le thème du terrorisme est engrainé dans toute l'oeuvrek hadrienne et la femme est utilisée comme point de départ, pointfo calisateur à partir de l'Automne des Chimères (1998), où Malika,per sonnage féminin, est présentée comme victime du terrorisme, vuc omme complètement opposé au fatalisme, la forme extrême der ésolution du malheur. Mais c'est dans l'Attentat (2005, Prix des Libraires2

006 et Prix des Tropiques 2006 ; ce roman fait partie d'une deuxièmetr

ilogie : Les Hirondelles de Kabul (2002), L'Attentat (2005) et Les Sirènes deBagdad (2006)) que Khadra met en scène une toute autre femme, et cettep résence souligne l'évolution chez cet auteur du roman policier vers lerom an noir. Apparemment douce et généreuse -comme tous les autres Fr ancofonía16 (2007)85-

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}pers onnages féminins présents dans les romans de Khadra- Sihem, sem ue en terroriste aveugle, en soldate de l'Intifada. Traditionnellement,le te rroriste est un homme, et c'est en tant qu'homme kamikaze qu'ilavai t déjà été décrit par Khadra dans Les Agneaux du Seigneur (1999) et Àq uoi rêvent les loups (1999). Khadra renonce à cette tradition de par savo lonté de faire connaître le vrai monde israélo-palestinien, où rien nes emble être tel qu'il est décrit, surtout par les journalistes de l'Ouest. Etv oilà que les hommes terroristes deviennent des femmes kamikazes. Narré du point de vue du mari, le chirurgien Amine, un Israéliend' origine arabe, ce roman introduit une kamikaze féroce. Aux extrémitésd u genre policier, une mystérieuse quête à travers divers niveaux de las ociété israélienne s'opère dans ce roman. Dans sa façon d'entamerl 'histoire -le roman commence par un meurtre, bien que sous la formed 'un suicide- le récit se présente comme un polar ; la quête-enquêtet outefois devient plus psychologique que policière. C'est là où se trouvel e dépassement du genre policier en tant que tel : ce dépassement, quis 'opère doucement dans l'oeuvre de Yasmina Khadra -ce pseudonymeé tant à l'origine un moyen de contourner la censure, est devenu uneco ndition même de la production de cet auteur-, annonce une vraiehybr idation du genre, typique de la littérature criminelle fémininea fricaine. L'enquêteur -dans ce cas le mari de la martyre- va remonter let emps pour reconstituer ce qui s'est passé avant l'acte criminel, lem assacre et le suicide considéré héroïque. Les yeux et l'intellect duper sonnage principal cherchent constamment à comprendre sa femme,u ne femme qui en dissimulant une bombe sous sa robe de grossesse ests ymbole d'un monde largement observé comme masculin, un mondevi olent, meurtrier et tragiquement déchiré. En faisant exploser la bombed ans un restaurant bondé de Tel Aviv, Sihem bouscule la vie paisibled' Amine et le destin du chirurgien suit la trame tragique de l'histoiret urbulente de deux peuples, le peuple palestinien et le peuple israélien,con damnés à vivre ensemble sans vraiment le vouloir. Le fosséém otionnel au sein du couple (Amine n'a pas pu comprendre que safe mme était devenue 'une autre', étrangère par rapport à celle qu'il avaitépo usée) est à la base d'un épisode sanglant et forme le point de départd' une quête existentielle de la part d'Amine qui se terminera avec sam ort. Construit autour d'un symbole récurrent de la modernité le récitc ommence par l'idéal populaire d'un couple étroitement uni dans b ernard de meyer & karen meyers-ferreiraLa tentation du fémininda ns le roman noir africain francophone{ 92 }l'a mour et dans le bonheur. Amine, le narrateur du récit, est un modèled' intégration dans la société israélienne, non seulement à cause de saré ussite matérielle et professionnelle mais aussi à cause du fait que, bienque vi vant à Tel Aviv, en Israël, il demeure conscient de ses originesbé douines. La mort de Sihem constituera le raté définitif de l'intégrations ociale, elle symbolise la trahison et la profanation dans le sanctuaire dec e qu'il y a de plus sacré : le respect de la vie, puisqu'elle provoquera larupt ure au plus profond de l'intime dans l'amour et l'unité des esprits etdes corps. Comme le dit Florent Cosandey, "Sihem [a basculé]pr ogressivement dans une forme d'adultère, en épousant, à l'insu de sonc onjoint, les thèses des ultras de la résistance palestinienne. En se faisantexp loser au milieu d'enfants, c'est ainsi son couple qu'elle fait exploser"(C osandey, 2005). Bien qu'elle ne soit pas narratrice, Sihem devient sous la plume deKha dra la femme instigatrice, le déclic d'un bouleversement profond,t andis que l'homme devient victime, un homme qui a toujours refusé depren dre parti, qui a consacré sa vie à son métier et à sa femme. Par cerenv ersement des rôles traditionnels, l'auteur ne chercherait pas ài nculquer une vérité, son idée principale semblerait plutôt d'introduireu ne réflexion, une prise de conscience; sûrement, ceci ne pouvait êtref ait qu'à partir d'un personnage féminin fort. En somme, le fait d'utiliserun ps eudonyme féminin a fait évoluer l'écriture de Khadra dans unece rtaine direction, comme le montre L'Attentat (2005). Il s'agit toutefoisd' une oeuvre foncièrement masculine dans ses enjeux et dans son pointde v ue. Le mâle domine le monde décrit par Khadra qui, pour présenterc e monde, évite soigneusement les facilités de l'omniscience et ducré ateur-démiurge. Il nous faudra lire Diallo pour rencontrer une réalitépl us féminine dans la littérature policière africaine.3

Kouty et Diallo: même combatQ

uand Gallimard fit publier le roman d'Aïda Mady Diallo dans sac ollection Série noire, le prestigieux éditeur a trouvé important de notere n quatrième de couverture que "Kouty, mémoire de sang est surtout lep remier roman noir écrit par une jeune femme africaine" (Diallo, 2002).D éclaration pour le moins extrême et catégorique, et qui souligne enpa rticulier l'institutionnalisation du phénomène littéraire : le récit de Fr ancofonía16 (2007)85- 99{
93 }D
iallo est considéré comme un 'roman noir' par le fait même qu'il estpu blié dans l'illustre collection de Gallimard. Diallo avait d'abordpr ésenté son manuscrit en 1998 aux Éditions du Figuier, la maisoné tablie par l'écrivain malien Moussa Konaté à Bamako, capitale de sonpays . Celui-ci en a farouchement gardé les droits sans publier l'ouvrage,ju squ'à ce qu'en 2001, Patrick Raynal, qui à l'époque dirigeait lacol lection Série noire, de passage au Mali pour le Festival Étonnantsvo yageurs, entendit la jeune romancière réciter un extrait de l'ouvrage.I l fut immédiatement charmé et c'est probablement par les éditeursin terposés que Diallo est 'entrée' chez Gallimard ; en effet, quelques moisa près la publication du roman de sa compatriote, Konaté lui-mêmepub liera dans la même collection de la maison parisienne, en un volume,d eux enquêtes du commissaire Habib, L'Assassin du Banconi (2002) etL' Honneur des Keïta (2002). Raynal s'est évertué à trouver une romancièrequ i pouvait remplir cette lacune, l'absence d'une africaine, dans sac ollection. Son choix est tombé sur la jeune malienne, peut-être moinsà cause de l'intrigue elle-même -qui, au sens strict, n'est pas unvé ritablement un roman noir; Diallo elle-même fut surprise de cettei nclusion, déclarant que c'est "un hasard qui [lui] plaît beaucoup"(pro pos recueillis par Siddick, 2003)-, mais plutôt en raison du contextes ocial, du décor quotidien : l'Afrique, qui a une connotation de zonei ncontrôlée, où les passions et les actions extrêmes demeurent possibles,se t rouve en effet dans la diégèse d'un grand nombre de romans de sac ollection. Toujours est-il que "le premier roman noir écrit par une jeunefe mme africaine" était un scoop publicitaire que Raynal ne pouvaitm anquer. Du point de vue de l'écrivaine elle-même, il y a clairement uneém ancipation par rapport à l'écriture de ses aînées. Née dans un contexted' émergence bien particulier, combinant l'accès à l'éducation et lesr evendications féministes, la littérature féminine africaine a maintenu,p resque tout au long de la seconde moitié du vingtième siècle -lepr emier récit féminin africain en français date de 1956 quand Marie-C laire Matip fit publier Ngonda à Yaoundé- une forme et un contenuévol uant fort peu. Beaucoup de romans en effet, nous l'avons signalé,ut ilisaient la forme personnelle, journal intime ou lettre amicale, pourc onter l'histoire d'une narratrice, réflexion de l'auteur elle-même -ce queR enée Larrier nomme la "double auteur(ité)" (Larrier, 2000 : 1)- face àu ne situation progressivement plus pernicieuse. Alors que le contexte b ernard de meyer & karen meyers-ferreiraLa tentation du fémininda ns le roman noir africain francophone{ 94 }d 'écriture tend à disparaître, le récit demeure souvent un témoignaged 'une victime de certains méfaits. Cette évolution est nettement visibleà l'intérieur même de l'oeuvre de certaines romancières, comme CalixtheB eyala. De plus en plus cependant, l'héroïne prend en mains son propredesti n. Ceci est évident dans Kouty, mémoire de sang (2002) ; l'héroïneé ponyme, témoin horrifié du massacre de sa famille quand elle avait dixa ns à peine, se vengera plus de six ans plus tard en assassinants ystématiquement les quatre tueurs et leur commanditaire, ses cinq' proies', tous des hommes. La sophistication augmente avec chaquec rime : la première victime est tuée par balle dans une embuscade, lad euxième est poignardée par Kouty, après que la jeune fille l'eut séduitet l 'eut invité à un rendez-vous romantique sur une plage déserte. Koutypro fite des émeutes à Bamako, les bien réelles 'journées folles' de mars1

991, pour exciter la foule et faire brûler vif la troisième personner

esponsable du massacre de ses parents. Mais ce n'est qu'avec les deuxd erniers que la jeune tueuse élabore un plan machiavélique. Cettes ophistication grandissante reflète la liberté accrue de la romancière,ma is une liberté qui trouve son fondement sur la connaissance du champl ittéraire existant. Comme le souligne Pierre Bourdieu, "dans le champa rtistique parvenu à un stade avancé de son évolution, il n'y a pas depl ace pour ceux qui ignorent l'histoire du champ et tout ce qu'elle ae ngendré" (Bourdieu, 1992 : 400). Diallo a une parfaite connaissance dece champ, des premières grandes romancières des années 1970 et 1980aux écrivaines plus récentes. De plus, cette position vis-à-vis de cec hamp peut se lire à l'intérieur même du roman, qui serait ainsi uneaut ofiction d'un genre bien particulier : les événements narréscor respondent à la conception même de la littérature chez son auteur. Enef fet, le désarroi de la petite Kouty face aux horreurs commises par lesm ercenaires serait à l'image de celui de la jeune Aïda Mady Diallo facea ux excès de la nouvelle littérature féminine où tout semble permis. S'yaj oute aussi la bande dessinée ; l'on sait, grâce à ses proprest émoignages, que la malienne a fait ses premiers pas en littérature, nonen te nant un journal intime, mais en effaçant les textes dans les bullesde s BD, pour les remplacer avec des dialogues de son propre cru.Com ment alors trouver sa voie dans cette surabondance de styles, des ituations ? Suit pour Kouty -et pour Diallo- une période deva gabondage qui lui permet de ramasser quelques miettes, mais qui nel a satisfait certainement pas. Un moment important dans le roman est Fr ancofonía16 (2007)85-

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}l e jour où la petite fille délaissée est recueillie par deux femmes mûres,O dile et Marceline. La première a épousé son bien-aimé qu'elle a connuà l'université; celui-ci prendra par la suite deux autres épouses et Odile"a fui le harem pour se réfugier chez Marceline" (Diallo, 2002 : 25). Celle-c i est une ancienne prostituée, ayant été mariée avec un coopérantf rançais qui l'a abandonnée par la suite. Ces deux personnages semblents ortis directement d'Une si longue lettre (1979) de Mariama Bâ et du Baobabf ou de Ken Bugul (1982) respectivement, les deux romans qui ont marquédepui s leur sortie la littérature féminine africaine. Ce retour aux sourcesa permis à Kouty (et à Diallo -on peut facilement interposer les deux) dere trouver un certain équilibre. Le mélange de cet équilibre et du souvenirde s horreurs passées a conduit l'héroïne à exécuter ses actes deve ngeance. Ainsi en va-t-il avec Diallo : la "mémoire du sang" quir emplissait les pages de son premier contact avec l'écrit littéraire, et lar encontre des ouvrages canonisés de la littérature féminine africaine, luia perm is de trouver sa propre voie, son propre style, ses propres sujets.I l est intéressant de noter qu'à un certain moment du roman, après lest rois premières vengeances et avant la dernière, la plus exploitée, la plusdé veloppée, la narratrice fait disparaître Odile et Marceline dans unacci dent de voiture. Plus que les autres meurtres commis par Kouty, cedoubl e matricide souligne l'émancipation de Diallo. Enfin libérée detou te influence, elle se lance dans une voie qui lui est propre. Aussidéc lare-t-elle dans une entrevue que son approche est différente : Je pense que les femmes qui m'ont précédée, notamment les grandesAm inata Sow Fall, Ken Bugul, Mariama Bâ... avaient un combat à mener.P arce que c'était l'époque. Elles ont déjà fait le travail de combattantes,de militantes. Nous autres, nous avons de la chance. On peutmaintena nt écrire pour le plaisir d'écrire. (Propos recueillis par Siddick,200 3) Le résultat serait donc "écrire pour le plaisir d'écrire". Ou commeKout y le déclare à un personnage du roman : "Tu vois, en réalité, toutcela s' explique en un mot : liberté. Je suis quelqu'un de très indépendant"( Diallo, 2002 : 77). Cette réplique, plus que tout autres, illustrepa rfaitement l'écriture de Diallo. A partir d'une certaine réalité, d'und estin imprimé dans sa chair même, un écrivain possède aujourd'hui led roit de poser toutes les questions et d'y répondre. Diallo illustre le b ernard de meyer & karen meyers-ferreiraLa tentation du fémininda ns le roman noir africain francophone{ 96 }ca ractère paradoxal de la littérature féminine africaine contemporaine.Li ttérature de combat, elle se détache des déterminismes (en particulierr aciaux et sexuels, mais aussi littéraires) et le roman jusqu'à présentuni que de la romancière malienne montre par excellence la situationd 'hybridité, d'altérité et de marginalité qui caractérise une partiei mportante de la production littéraire récente ; entre littératurepo pulaire et belles lettres, entre engagement et distraction, entrehi stoire et imagination, Kouty, Mémoire de sang (2002) répondpa rfaitement à la nouvelle disposition du champ littéraire en Afriquefquotesdbs_dbs16.pdfusesText_22