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JUILLET
2016
N¡49
L"e?et de l"automatisation
sur l"emploi : ce qu"on sait et ce qu"on ignore
LA NOTE D"ANALYSE
Combien d"emplois sont menacs par l"automatisation ? L"analyse du pass rcent montre que les
emplois a prioripeu automatisables - parce qu"ils ncessitent des interactions sociales, de l"adaptabilit,
15% des salaris occupent de tels emplois en France. Le recentrage des mtiers sur les tches les plus
l"essentiel de ces volutions.
Toutefois, la comparaison du degr de robotisation de l"industrie dans d"Europe ou l"exemple du dploie-
ment des caisses automatiques dans la grande distribution montrent que l"automatisation des emplois
ne se rsume pas qu" une question technologique:un emploi n"est pas ncessairement remplac par
automates comme le mode d"organisation du travail, l"acceptabilit sociale et la rentabilit conomique.
La rvolution numrique tant la fois source de destruction, de transformation et de cration d"emplois,
la seule analyse des emplois potentiellement remplaables par des machines ou des logiciels ne permet
pas de conclure sur l"e?et global de l"automatisation sur l"emploi.
Emplois salaris, selon leur rythme de travail
et l"application stricte de consignes entre 1998 et 2013 (en million)
Lecture : Les emplois salaris dont le rythme de travail est impos par la satisfaction immdiate de la demande des clients et qui ne consistent pas appliquer
strictement des consignes ont augment de 1,04 million entre 1998 et 2005 - passant de 6,9 millions 7,9 millions - puis de 1,14 million entre 2005 et 2013,
passant de 7,9 millions 9,1millions entre 2005 et 2013.
6,9 9,1
3,6 7,9
10,4
3,9 9,1
10,5 3,4
Emplois dont le rythme de travail est imposé
par une demande extérieure exigeant une réponse immédiate et qui ne consistent pas toujours à appliquer
strictement des consignesAutres types d"emplois Emplois dont le rythme de travail n"est pas imposé
par une demande extérieure exigeant une réponse immédiate et qui consistent à appliquer strictement des consignes
1998 2005 2013
Emplois peu automatisables Emplois davantage automatisables
La Note d"analyse
est publie sous la responsabilit ditoriale du commissaire gnral de France Stratgie.
Les opinions exprimes
engagent leurs auteurs et n"ont pas vocation
reflter la position
du gouvernement.
Nicolas Le Ru
Dpartement Travail Emploi
Comptences
France Stratgie
FRANCE STRATGIE
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LA NOTE D"ANALYSE
JUILLET 2016 - N¡49
INTRODUCTION
Les innovations numriques seront-elles sources d"oppor- tunits et de cration d"emplois ou, au contraire, les dtrui- r rement t peru comme une menace pour l"emploi. Au dbut du XIX e ser a t considr comme un danger pour l"emploi par les ouvriers du textile 1 . Aujourd"hui, ce sont les avances du numrique -et leurs applications travers la robotisation, l"automatisation et l"intelligence artificielle - qui menace- raient de nombreux mtiers, y compris les plus qualifis. Les rcentes publications de recherche qui visent identi- rique ont raviv les craintes d"un chmage technologique. Toutefois, ces tudes ne s"accordent pas sur le nombre des emplois potentiellement automatisables 2 tudes et prcis les raisons pour lesquelles leurs rsul- tats divergent, nous utilisons les dclarations des salaris sur leurs conditions de travail pour estimer l"ampleur du risque d"automatisation des emplois en France. Une der- l"emploi, soulignant que cet e?et est plus complexe que ne pourrait le laisser entendre l"analyse des seules destruc-
EMPLOIS AUTOMATISABLES :
UN SUR DEUX OU UN SUR DIX ?
l"automatisation a t fortement influenc par la publica- tion en 2013 d"une tude ralise par Carl Benedikt Frey et Michael A. Osborne, deux chercheurs de l"universit d"Oxford, et intitule Future of employment: how suscep-
47% des emplois aux tats-Unis et 35% au Royaume-Uni
prsenteraient un risque lev d"tre automatiss au cours des dix ou vingt prochaines annes. De nombreuses tudes, transposant les rsultats de ces recherches d"au- tres pays, aboutissent un ordre de grandeur similaire :
42% des emplois seraient ainsi menacs en France
3 , 49% au Japon 4 et 54% dans l"Union europenne 5 .Pour aboutir ces chi?res, les deux chercheurs britan- l istes en Ç apprentissage automatique È - 70 professions p our lesquelles ils estiment savoir avec certitude si elles peuvent, ou non, tre automatises. Par ailleurs, disposant d"une liste des caractristiques associes l"ensemble des p rofessions, ils tablissent une correspondance entre le neuf de ces caractristiques, ayant trait au besoin du mtier en crativit, en intelligence interpersonnelle et en dextrit manuelle. Pour finir, ils appliquent cette corres- pondance plus de 630 autres professions et en concluent que 320 professions ont un risque lev (sup- rieur 70%) d"tre automatises au cours des deux pro- chaines dcennies. Ce sont ces 320 professions qui regroupent 47% des emplois aux États-Unis, 42% en
France, etc.
Une quipe de recherche allemande ayant travaill pour l"OCDE (Melanie Arntz et al.) 6 pointe deux limites cette analyse, limites qui, selon elle, conduisent surestimer le nombre d"emplois automatisables : (1) les professions identifies comme menaces par l"automatisation compor- tent souvent de nombreuses tches di?cilement automa- tisables ; (2) toutes les personnes qui exercent une mme profession ne ralisent pas exactement les mmes tches 7 . C"est pourquoi ces chercheurs proposent de ne pas mesurer le risque d"automatisation par profession mais, un niveau plus fin, celui des tches. Leur mthode leur permet alors de mesurer le risque d"automatisation de chaque emploi selon les tches qui le composent. Par cette mthode, ces chercheurs estiment que Ç seuls È 9% des emplois aux tats-Unis ont un risque lev (suprieur
70%) d"tre automatiss. Cette proportion serait de 10%
au Royaume-Uni, 9% en France et 7% au Japon. Comment expliquer ces proportions d"emplois menacs quatre cinq fois plus faibles que celles obtenues par les deux chercheurs britanniques ? Essentiellement parce que les premiers travaux considraient comme automatisables des mtiers qui pourtant ncessitent frquemment de tra- vailler en quipe ou en relation directe avec les clients, tches qui - ce jour - ne peuvent tre aisment confies des robots. C"est le cas des mtiers de vendeur ou de de 5% des emplois aux tats-Unis 8 ordinateurs, comme des robots ou des automates, ou e?ectues par des logiciels.
3. Roland Berger Strategy Consultants (2014), Ç Les classes moyennes face la transformation digitale. Comment anticiper ? Comment accompagner ? È.
4. La publication du Nomura Research Instituteconclut 49 % d"emplois prsentant un haut risque d"automatisation au Japon.
50% pour la France.
6. Arntz M., Gregory T. et Zierahn U. (2016), Ç The Risk of Automation for Jobs in OECD Countries: A Comparative AnalysisÈ, OECD Social, Employment and Migration,
Working Papers, n¡ 189.
8. Ces deux professions reprsentent 5,8 millions d"emplois aux tats-Unis en 2010, soit 4,6 % de l"emploi amricain. Source : Bureau of labor statistics.
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LES INFORMATIONS DISPONIBLES
SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL
DES SALARIS FRANAIS CONFORTENT
LES RSULTATS DE L"OCDE
s ont exercs, les enqutes sur les conditions de travail ra- lises par l"Insee et la Dares peuvent apporter, sans avoir recours une mthodologie aussi sophistique que celles des quipes de chercheurs britannique et allemande, un clairage utile sur le risque d"automatisation des emplois. l"autre cherche identifier la prsence de tches actuelle- ment considres comme di?cilement ralisables par des automates sans perte substantielle de qualit.
Des emplois automatisables moins nombreux
qu"il n"y paraît s"est transforme, consacrant une part de plus en plus grande aux emplois qualifis (ingnieurs et cadres de techniques de l"industrie, de l"informatique et des tl- coms, personnels d"tudes et de recherche...) et certains mtiers peu qualifis de services (aides domicile, assis- tantes maternelles...). Malgr cette plus forte prsence de mtiers qualifis 9 , de plus en plus de travailleurs estiment exercer un mtier rptitif 10 . C"est le cas de 40% des sala- ris en 2013, contre 20% en 1984. Cette hausse des emplois considrs comme rptitifs, dont l"essentiel a soient cadres ou ouvriers, jeunes ou non, hommes ou femmes 11 tion haute (40%) de la part des emplois potentiellement automatisables, proche de celle tablie par Carl Benedikt Frey et Michael A. Osborne. Ces emplois rptitifs sont de
tre plus ou moins marqu
12 et recouvrir des ralits di?- rentes. Parce qu"ils sont dclaratifs, ces chi?res peuvent aussi reflter le point de vue des salaris sur leur environ- n ement de travail : leur emploi peut leur para"tre rptitif p o u encore parce qu"ils estiment que leur travail pourrait tre ralis autrement pour limiter cette pnibilit. C"est tous ces emplois rptitifs seraient automatisables. Dans Ç Why there are still so many jobs? È, un article publi en 2015, David Autor, un chercheur amricain, sou- ligne que les travailleurs disposent encore d"un avantage comparatif sur les machines en termes d"interactions sociales, d"adaptabilit, de flexibilit et de capacit 13 . Deux questions poses dans les enqutes sur les conditions de travail permettent selon nous d"approcher le nombre de salaris qui mobilisent ou non ces quatre comptences : (1) les salaris doivent-ils rpondre immdiatement une demande extrieure (clients, public) ? 14 (2) doivent-ils ou non appliquer stricte- ment des consignes pour raliser leur travail correcte- ment? 15 . Schmatiquement, le fait d"avoir un rythme de travail impos par une demande extrieure obligeant une rponse immdiate claire la fois sur les interactions sociales, l"adaptabilit et la flexibilit du salari ; ne pas devoir appliquer strictement des consignes pour faire son travail correctement informe sur l"adaptabilit du salari et 16 . Dans la suite de cette analyse, nous nous concentrons sur les deux cas polaires, savoir les mtiers qui, au regard de ces deux questions, apparaissent a prioriautomatisables ou au contraire peu automatisables. ncessite de rpondre immdiatement une demande extrieure et, pour ce faire, ne doivent pas toujours appli-
19. On compte aujourd"hui dans l"emploi deux fois plus de cadres et de professions intellectuelles qu"au milieu des annes 1980. Source : Insee (2015), March du
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[PDF] Leffet de lautomatisation sur lemploi - France Stratégie