[PDF] L’Enchanteur de Barjavel, une réécriture moderne du Conte du



Previous PDF Next PDF







ème 5 Contrôle de lecture : « Ravage », René Barjavel

Contrôle de lecture : « Ravage », René Barjavel A chaque question répondez à l’aide de plusieurs phrases que vous développerez I) Quelles sont les différentes étapes de l’apocalypse évoquée dans ce roman ? Citez-en au moins 4 et expliquez leurs causes et leurs conséquences (4 points)



[MOBI] Ravage  - Playism

Ravage par René Barjavel Résumé Le roman Ravage, publié en 1943, situe son action plus d’un siècle plustard, en 2052 C’est une société à la fois



Read online Ravage - Playism

La Réunion: un incendie ravage plus de 200 hectares du Maïdo Ravage de René Barjavel (Fiche de lecture): Résumé Complet Et Analyse Détaillée De L'oeuvre Claire Cornillon 2,8 étoiles sur 5 6 Broché 9,99 € Le Grand Secret René BARJAVEL 4,4 étoiles sur 5 116 Poche 6,95 € La Nuit des temps René BARJAVEL 4,6 étoiles sur 5 837



L’Enchanteur de Barjavel, une réécriture moderne du Conte du

Barjavel s’est donc plutôt inspiré du Merlin de Boron, racontant la vie de l’enchanteur qui apparaît en filigrane de tous les romans arthuriens Nous allons donc étudier dans cette partie la réécriture de Barjavel, s'appuyant sur la phrase de Jean Frappier : « chacun finit par se faire à son usage personnel, du Graal et du



La Nuit Des Temps Rene Barjavel - Uproxx

Temps Rene Barjavel (Ravage, La Nuit des temps, Le Grand Secret, Une Résumé par The Ice People (Barjavel novel) - Wikipedia La nuit des temps [Rene



La nuit des temps René Barjavel (1968)

René Barjavel (1968) I Les personnages principaux Simon Simon est un médecin français qui participe à une expédition en Antarctique Il tombe amoureux d’Éléa dès qu’il la voit Eléa Éléa est une femme dotée d’une immense beauté Elle vient d’une ancienne civilisation où elle était éprise de Païkan Coban



Vers la seconde - Académie de Lyon

Barjavel, René Ravage Gallimard, Folio Résumé : en 2052, la chute inexorable d'une société ultra-mécanisée, dans laquelle, un jour, l'électricité vient à disparaître et plus aucune machine ne peut fonctionner Les habitants, anéantis par la soudaineté de la catastrophe,



Ressources de français pour la voie professionnelle : L’homme

-Ravage (R Barjavel) : une société mécanisée à l’extrême est brusquement privée d’électricité et sombre dans la violence Un groupe de rescapés fonde une société dans laquelle les machines sont proscrites -Un Animal doué de raison(R Merle) envisage l’utilisation de l’animal par l’homme au service de la guerre

[PDF] créer un album photo

[PDF] créer un album photo en ligne gratuit

[PDF] album photo personnalisé

[PDF] livre photo cewe

[PDF] créer un album photo gratuit

[PDF] livre photo pas cher

[PDF] album photos

[PDF] otto dix les joueurs de skat histoire des arts diaporama

[PDF] exemple de mouvement rectiligne

[PDF] mouvement elliptique

[PDF] 50 activités autour des carnets de voyage ? l'école

[PDF] récit de voyage cm2

[PDF] carnet de voyage imaginaire cycle 3

[PDF] projet carnet de voyage cycle 3

[PDF] mouvement d un projectile dans un champ de pesanteur uniforme exercices

Ariane MANON

Master 1 Littérature

Année 2012-2013

L'Enchanteur de Barjavel,

une réécriture moderne du Conte du Graal

Introduction

Chrétien de Troyes est un très connu auteur du XIIe siècle qui a écrit plusieurs romans concernant la cour du roi Arthur, prônant la chevalerie et l'amour courtois, comme Erec et

Enide ou encore le Chevalier à la charrette.

C'est Chrétien de Troyes qui a également inventé le mythe du Graal. Il l'a d'ailleurs annoncé magistralement en donnant son roman le nom de Conte du Graal, plutôt que de lui donner

le nom du héros comme dans les romans précédents. Jamais l'auteur n'avait fait encore mention du

Graal et celui-ci apparaît presque brutalement à Perceval qui ne le cherchait tout d'abord pas.

Chrétien de Troyes a donc laissé inachevé un conte du graal et non une quête du Graal. En effet,

intrigué par le graal et cette histoire non terminée, de nombreux auteurs continueront le livre, le

transformant en quête du graal. Ainsi, dès les premières continuations de Chrétien de Troyes, le

Graal prend une dimension très symbolique et toute la cour du Roi Arthur part à sa recherche. Selon

les idées de certains auteurs postérieurs à Chrétien de Troyes, le roi Arthur lui-même n'aurait pu

monter sur le trône et régner uniquement parce qu'il avait cette quête à réussir. La fondation de la

Table Ronde est également liée à cette quête, idée totalement absente dans l'oeuvre de Chrétien de

Troyes.

De nombreuses reprises du mythe ont été faites, par des continuateurs succédant directement

à Chrétien de Troyes, puis prenant plus de liberté en apportant leurs propres interprétations.

Ainsi, on peut se demander quelle vision du mythe du Graal peut avoir un auteur du XXème siècle, après près de dix siècles de traditions orales et de littérature. En effet, de Chrétien de Troyes aux continuateurs, de nombreux détails ont changé, ont

évolué. Avec la littérature contemporaine, les auteurs se permettent à leur tour de revisiter le mythe

du graal et les histoires de la table ronde, apportant à leur tour changement, tout en gardant une

certaine identité propre aux récits arthuriens.

Il est donc nécessaire de redéfinir ici ce qu'est ce Graal dont parle les textes médiévaux. Le

graal aurait pour étymologie le mot latin cratella qui signifie le vase. Mais dans ses autres formes

trouvées dans différents textes, on remarque que grial, greal, gradale, désignent plutôt un plat de

service utilisé dans les nobles maisonnées. Le graal est aussi interprétée comme une pierre

incandescente dans certains textes. Quant à son origine mythique, il est parfois rapproché d'une

corne d'abondance ou du chaudron de Dagda grâce à son rôle nourricier auprès du roi méhaigné.

Mais l'origine chrétienne est celle qui prime, transformant ce plat en vase qui a recueilli le sang du

Christ et qui a été emmené par Joseph d'Armimathie en Bretagne.

Ainsi, dans ce travail, nous étudierons l'Enchanteur de Barjavel. Cet auteur est né au début

du XXe siècle et mort dans les années 1980. Il a donc parcouru le siècle, ses guerres et ses

révolutions industrielles, ce qui est extrêmement sensible dans sa littérature. Auteur de grands

romans de science-fiction comme La Nuit des Temps ou Ravage, Barjavel avait dépeint la société du

XXIème siècle avec une incroyable justesse. Passionné par la littérature médiévale, il a également

choisi d'écrire un roman sur la matière arthurienne L'Enchanteur, donnant la parole à Merlin. Nous

nous intéresserons particulièrement à la place du Graal dans cette oeuvre, la comparant avec le

Conte du Graal de Chrétien de Troyes, le Merlin de Robert de Boron, et plusieurs autres passages des continuations. Dans une première partie, nous verrons que Barjavel a gardé une vision très proche de la

littérature médiévale pour rapporter les contes d'antan. Puis, nous étudierons les interprétations qui

diffèrent de Chrétien de Troyes, en recherchant leurs sources dans les continuations plus tardives et

verrons la façon dont Barjavel les a exploitées. Enfin, nous analyserons le but qu'avait l'auteur du

XXème siècle en écrivant ce roman.

I/ Une vision fidèle mais moderne

Dans son roman, Barjavel reste très fidèle aux textes médiévaux. En effet, comme

nous allons le voir, la scène du graal proposée par l'auteur français contemporain est très fidèle à la

scène décrite par Chrétien de Troyes. Mais le nom même de l'oeuvre " L'Enchanteur », montre un

déplacement dans les points de vue, puisque le Conte du Graal se nomme également Perceval et

Gauvain a un rôle important, mais Merlin n'y fait quant à lui aucune apparition. Concernant Merlin,

Barjavel s'est donc plutôt inspiré du Merlin de Boron, racontant la vie de l'enchanteur qui apparaît

en filigrane de tous les romans arthuriens. Nous allons donc étudier dans cette partie la réécriture de

Barjavel, s'appuyant sur la phrase de Jean Frappier : " chacun finit par se faire à son usage personnel, du Graal et du Saint-Graal, un univers ou même une cosmologie, une nébuleuse à l'occasion »1

A/ Une Réécriture fidèle

1/ Une Ambiance en accord avec les attentes des lecteurs

Ce qui est frappant dans le roman de Barjavel, c'est que les thèmes, les personnalités

des personnages et leurs actions sont très semblables aux descriptions faites par Chrétien de Troyes,

alors même que l'écriture est beaucoup plus enlevée. En effet, Barjavel écrit au XXème siècle et

comme l'enchanteur, il a pu voir ce que l'avenir réservait aux personnages, plongés dans leur

temps. Ainsi, des références anachroniques sont faites, jouant sur le fait que Merlin peut connaître

l'avenir, pas forcément le sien ou celui de ses proches, mais en tout cas celui de l'humanité. La première description de Perceval dans le Conte du Graal montre un jeune homme naïf et avec un grand coeur, vers 83 : " Ensi en la forest s'en entre.

Tot maintenant li cuers do ventre

Por lo dous tanz li resjoï

Et por lo chant que il oï

Des oisiaus qui joie faisoient.

Totes ces choses li plaisoient. »2

Dans l'Enchanteur de Barjavel, on a une description assez semblable, mais le personnage est observé au travers des yeux de Merlin : " Merlin souriait en pensant à lui. Il le voyait, pressé d'arriver, pressant son cheval dans la campagne couverte de neige, riant d'excitation, mordant le vent de ses dents éclatantes, naïf, ignorant de tout, tout neuf... Il arrivait juste à temps. »3

La même joie, la même naïveté se dégage des deux descriptions, l'effet d'attente est néanmoins plus

accentué dans la réécriture. En effet, Chrétien de Troyes présente à ses lecteurs un nouveau

personnage. Si celui-ci n'est pas encore chevalier, son public attend qu'il le devienne, pensant

trouver un autre chevalier courtois, un peu comme Lancelot, Yvain ou Erec qui étaient les héros des

romans précédents. Mais justement, Chrétien de Troyes créé la surprise avec ce personnage qui sera

1Jean FRAPPIER, Autour du Graal, Genève (Suisse), Droz, 1977, 405p.

2Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

3L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

mis en contraste avec Gauvain. Au Moyen-âge, il y a un vrai effet de surprise. Mais à l'époque

contemporaine, Perceval est connu pour être un jeune homme naïf, tous les lecteurs contemporains

ont en mémoire sa rencontre avec les chevaliers qu'il prend pour des anges, la façon dont il arrache

l'anneau à la jeune fille en essayant de suivre les conseils de sa mère ou de se taire au château du

Graal. Barjavel assume donc l'effet d'attente que les lecteurs ont sur le personnage, le mettant à la

fois en valeur avec la répétition du verbe " presser ». La phrase " Il arrivait juste à temps » place la

quête du Graal dans une temporalité. La quête a commencé dès la naissance de Merlin. Celui-ci, en

tant que fils du diable, ne pouvait évidemment pas trouver le graal, mais c'était sa mission de

trouver et d'aider les chevaliers qui peuvent réussir la quête.

Dans le Conte du Graal, il n'y a pas cette idée de fin qui clôt la quête du graal, l'idée de cette fin du

monde arthurien lorsque quelqu'un trouvera le graal. Cette idée a été amenée avec les continuations

de Chrétien de Troyes. Reprise par Barjavel, il sait que ses lecteurs attendent une fin. L'auteur

propose donc une origine au Graal, le début d'une quête, les recherches des chevaliers jusqu'à la fin

de la quête avec la découverte du Graal et la mort des personnages.

2/ Une Translatio moderne

Au Moyen-âge, la conception d'invention était proscrite, puisque le seul créateur est

Dieu. Les clercs s'attachait à traduire des textes latins, parfois en rajoutant leurs commentaires,

comme dans l'Ovide moralisé, repris des Métamorphoses d'Ovide. Les contes de la table ronde sont

donc repris de la matière de Bretagne. Devenue matière arthurienne de nos jours, elle est toujours

une grande source d'inspiration, en particulier grâce à Chrétien de Troyes, qui en laissant inachevé

le Conte du Graal a donné involontairement une grande place au mystère et à l'imagination. Le texte de Barjavel s'inscrit dans cette tradition et pourrait s'apparenter lui aussi à une

translatio. En effet, les événements sont repris de façon très fidèle, parfois presque littérale, mais

adaptés aux lecteurs modernes. Barjavel n'hésite pas à rajouter sa personnalité d'auteur, créant un

roman fidèle, mais légèrement modifié comme cela pouvait être fait au moyen-âge. En choisissant Merlin comme narrateur, un personnage qui traverse le temps sans vieillir,

Barjavel ne réécrit pas simplement le Conte du Graal, mais prend en compte les autres textes qui

ont suivi ce conte et qui l'entoure temporellement. Ainsi, il y a de nombreuses références au Joseph

d'Arimathie, qui donne une légitimité au Graal, le Merlin, évidemment, mais également les autres

continuations, qui clôt la quête du Graal et la Mort du Roi Arthur qui finit le cycle arthurien. Ces

nombreux textes médiévaux sont donc à prendre en compte en lisant l'Enchanteur de Barjavel. Ainsi, la conception de Merlin reprend le Merlin de Robert de Boron qui s'ouvre sur ces phrases : " Mout fu iriezli annemis quant Nostre Sire ot esté en Enfer et il en ot gité Adan et Eve et des autres tant com il plot. » De la même manière, Barjavel commence l'un de ces premiers chapitres par ces mots : " Furieux, le Diable l'était de plus en plus, car malgré l'aide des moines et des prêtres qui allongeaient chaque jour la liste des fautes impardonnables, son enfer restait vide. Totalement vide. Jésus pardonnait !... »4

On retrouve donc quasiment la même phrase, même si les prêtres ne sont évidemment accusés de

rien, ce qui serait un contre-sens anachronique pour l'époque. Une fois Merlin conçu, Dieu vient lui parler. Dans le Merlin médiévale, se serait particulièrement étrange d'avoir une vraie conversation, mais Barjavel explique l'enjeu de la discussion en y amenant de l'humour : " Dieu l'appela :

Tu m'entends, petit.

4L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

Oui, Dieu.

Tu sais qui t'a fait ?

Oui, Dieu.

On se rend compte, par ce dialogue, que le futur enfant ne disposait pas encore d'un grand vocabulaire. Mais le lendemain il savait le latin, le grec, l'araméen et le chaldéen, et le jour d'après tous les mots du chinois. Aucun chinois n'en sait autant. »5 On voit donc ici un jeu entre un dialogue minimaliste de Dieu avec Merlin, puis la somme des connaissances que l'enfant va bientôt apprendre, avec encore une touche humoristique en parlant

des chinois dont les écrivains médiévaux ne connaissaient pas l'existence et une accentuation,

montrant ici que la langue la plus difficile de toutes, mais que le foetus la connaissait parfaitement à

son troisième jour inter-utérin.

Par la suite, Barjavel reprend toutes les péripéties qui arrivent à Merlin dans le texte de Robert de

Boron jusqu'à ce que l'enchanteur devienne le personnage puissant et mythique qui aide les chevaliers à trouver le graal.

3 / L'arrivée au château graal et la figure du roi pêcheur

La cérémonie du graal dans Chrétien de Troyes semble survenir par hasard. En effet,

au détour d'un chemin, alors qu'il ne recherche rien de précis, Perceval rencontre le roi pêcheur et

suivant ses indications découvre un château qui semble avoir jailli du sol. " C'est ainsi qu'il n'y a pas encore de " quête du graal » chez Chrétien, car le héros ignore jusqu'à l'existence de cete objet; il le rencontre par hasard. »6 Au contraire, comme dans les continuations, on voit chez Barjavel un glissement du conte

du graal devenant une quête du graal. Perceval sait déjà ce qu'il doit chercher, ainsi que le souligne

Barjavel :

" Enfin ! s'écria Perceval. Je le cherche depuis des années ! C'est bien ici que se garde le... »

Le Roi pêcheur a donc un rôle important dans la quête du graal. Présenté par Chrétien de Troyes

comme un vieil homme, blessé, qui ne peut plus se servir de ses jambes, il pêche sur une barque,

sans ne jamais rien attrapé. Il guide également les chevaliers perdus jusqu'au château du graal,

faisant ici référence au passeur de la mythologie gréco-romaine, Charron, qui menait les morts dans

l'autre monde. Dans le Conte du Graal, on comprend par la suite les liens de parenté qu'il y a entre Perceval et le roi pêcheur, le lien entre la forêt gaste et le château du graal vers 6339 : " Cil cui l'an en sert est mes frere,

Ma suer et soe fu ta mere,

Et del Riche Pescheor croi

Que del graal servir se fet. »7

5L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p6 P. WALTER, Chrétien de Troyes, chap VIII-Conte du graal, II-Le Graal, p 106-107, Que sais-je ? PUF, Paris, 1997,

127p

7Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

B/ La Cérémonie du Graal

1/ Le Déroulement de la cérémonie...

a/ ... dans Chrétien de Troyes Dans le Conte du Graal, deux personnages voyagent parallèlement, Perceval et

Gauvain. Pourtant, le conte ayant été laissé inachevé, la partie concernant Perceval est plus

importante, avec un point culminant au château du graal. La cérémonie est en effet très décrite et il

y en a plusieurs références dans toute la suite du roman. À notre époque, la partie concernant

Gauvain est plutôt oubliée, d'autant plus qu'il n'arrive pas au château du graal, contrairement aux

continuations.

Le déroulement de la cérémonie est très important, les choix faits proposent une symbolique

différente selon les auteurs. Il est donc intéressant d'étudier la première scène du Graal, présente

chez Chrétien de Troyes pour en comprendre les grands thèmes et les influences qu'elle a pu donné

par la suite.

Perceval est donc convié à un repas et lors de celui-ci, ils assistent à une étrange cérémonie.

Plusieurs jeunes gens passent devant lui, portant des objets merveilleux dans leurs mains, avant de

disparaître dans la pièce d'à côté. Le premier porte une lance dont coule une goutte de sang, vers

3136 :

" Anpoigniee par lo milieu

La lance blanche et lo fer blanc,

s'an ist une goute de sanc

Do fer de la lance an somet,

Et jusqu'à la main au vallet

Corroit cele goute vermoille. »8

Puis, plusieurs autres jeunes hommes passent devant Perceval, portant quant à lui des chandeliers,

vers 3151 : " Atant dui autre vallet vinrent,

Qui chandeliers en lor mains tindrent

De fin or, ovrez a neel.

Li vallet estoient molt bel

Qui les chandeliers aportoient.

En chascun chandelier ardoient

Dis chandoilles a tot lo meins. »9

C'est ensuite au tour d'une demoiselle d'apporter ce qui est devenu par la suite le plus important

objet de la cérémonie, le graal, objet d'orfévrerie associé à la lumière, vers 3158 :

" Un graal entre ses II meins

Une damoisele tenoit,

Qui aviau les venoit,

Et bele et gente et bien senee,

Quant ele fu leianz antree

Atot lo graal qu'ele tient,

Une si grant clartez i vint

Qu'ausin perdirent les chandoilles

Lor clarté comme les estoilles

8Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

9Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

Qant li solaux luist o la lune. »10

Et enfin une dernière demoiselle clôt le cortège avec un objet qui sera souvent oublié des

continuateurs, le tailloir d'argent, vers 3168 : " Après celi en revint une

Qui tint un tailleor d'argent. »11

Ces objets ont donc une grande importance. Certains seront repris dans les continuations, d'autres

seront enlevés de la scène du Graal, mais seront gardés dans la quête, comme la lance qui saigne. Le

tailloir d'argent sera quant à lui généralement oublié. Durant le passage du cortège, Perceval se pose des questions, mais n'ose les formuler à voix haute, vers 3140 à 3149 et une seconde fois un peu plus tard 3181 : " Et li vallez les vit passer,

Si n'osa mie demander

Do graal cui l'an en servoit,

Que toz jorz an son cuer avoit

La parole au prodome saige. »12

Pourtant, l'auteur explique qu'il aurait dû prendre la parole, vers 3186 : " Si crient qu'il n'i ait domaige

Po ce qu'il l'a oï retraire,

Ansin bien se puet en trop traire

Con trop parler a la foiee.

O bien li praigne o mal li siee,

Ne lor anquiert ne ne demande. »

Et vers 3228 :

" Et li graaux andemantiers

Par devantes retrespasa,

Ne li vallez ne demanda

Do graal cui l'en an servoit. »13

En effet, les habitants du château semblent faire de leur mieux pour susciter l'attention et la curiosité de Perceval, amenant devant lui des objets extraordinaires, tandis que le graal repasse devant le jeune chevalier, lui donnant une nouvelle chance de prendre la parole.

Plusieurs éléments sont importants dans cette scène de cortège, puisqu'ils ont été parfois

repris par les continuateurs ou au contraire tombé dans l'oubli. On peut donc noter ce qu'il sera

nécessaire de rechercher dans les textes plus récents jusqu'à celui qui nous intéresse, l'Enchanteur

de Barjavel : les quatre objets qui passent dans le cortège, en s'attardant bien évidemment plus sur

la lance qui saigne et le graal ; la présence de la lumière et de l'éclat des pierres précieuses ; et le

fait que Perceval ne prenne pas la parole. b/ ... dans le Lancelot en prose La cérémonie vécue par Gauvain dans le Lancelot en prose propose quelques

différences. On peut tout d'abord noter l'apparition d'un autre objet qui précède le cortège : un

encensoir qui remplit la salle d'odeurs délicieuses. On voit donc bien que la cérémonie a été

christianisée. Ce même encensoir, porté par un pigeon blanc (référence à la colombe blanche,

symbole de l'Esprit Saint) se retrouvera dans chacune des cérémonies de l'Enchanteur.

Puis le cortège passe, mais il n'est composé que d'une seule demoiselle qui porte le graal. Comme

dans le Conte du Graal, Gauvain est plus captivé par la jeune fille que par l'objet qu'elle porte, ce

qui l'empêchera de trouver le graal :

10Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

11Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

12Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

13Chrétien de Troyes, Le Conte du Graal, trad C. Méla, Lettres Gothiques, Librairie Générale Française, 1990, 640p

" messire Gauvain vit issir de la chambre ou li colons estoit entrés une damoisele, la plus bele qu'il onques mes eust veue jor de sa vie, et sans faille c'estoit la plus bele qui lors fust ne qui puis nasquist. » c/ Un Cortège qui sollicite les sens

Dans l'Enchanteur, la cérémonie que voit Perceval se déroule en plusieurs étapes, s'attardant

sur les différents sens un à un :

Tout d'abord c'est la vue qui est sollicitée avec la description d'une pièce très éclairée (p 208) :

" Et Perceval se trouva tout à coup assis à une table ronde, dans une pièce brillamment éclairée, bien qu'il n'y eût d'allumé qu'une seule chandelle posée au milieu de la table »14

C'est ensuite le sens de l'odorat qui est sollicité, reprenant comme dans le Lancelot l'apparition

d'un encensoir : " Il tenait dans son bec un chaînette d'argent à laquelle était suspendue une cassolette d'où se répandait un parfum qui gonflait le coeur et le soulageait de ses peines. »15

Le cortège arrive, composé de nombreuses demoiselles, mais au lieu de porter des objets sacrés,

hormis la septième et dernière qui porte le graal, elles jouent de la musique, sollicitant l'ouïe de

Perceval :

" six jeunes filles vêtues de blanc jouant du luth, de la harpe et de la flûte »16 Le graal passe et la table se remplit de mets dont l'odeur est alléchante, comme dans le Conte du Graal. Néanmoins, Perceval est privé du sens du goût puisqu'il n'a pas posé de question.

On voit ici qu'une christianisation du motif a été effectuée. En effet, la scène semble éthérée ( une

grande présence du blanc, une odeur pure et délicieuse, de la musique) et fait donc penser au

paradis. Dans l'iconographie religieuse, les anges sont souvent vêtus de blancs et jouent de la harpe.

Dans cette scène, on a donc plus l'impression d'être dans un château mystérieux où vivent des rois

blessés, mais dans un paradis qui attend son élu. Il n'en va pas de même pour la cérémonie de Gauvain. En effet celui-ci est amené au

château du graal, mais s'il peut assister à la cérémonie, le roi pêcheur connaissait son identité et

savait qu'il ne pourrait réussir. Il lui laisse donc voir toute la beauté de la cérémonie, insistant sur

les odeurs suaves " une cassolette qui répandait un parfum suave » et la luminosité très pâle de la

scène " un linge blanc le recouvrait, d'une blancheur si blanche qu'il semblait tissé de lumière ».

Contrairement au Conte du Graal et au Lancelot, le graal flotte dans l'air, Gauvain ne peut donc être

distrait par une belle demoiselle, mais ses pêchés de luxure antérieur le feront tout de même

échouer : " Toi le chevalier plus couvert de péchés qu'un pestiféré de pustules ! ». A partir de cette

phrase, l'ambiance change. On a l'impression de voir l'horrible réalité qui se cachait sous cette

apparence de paradis. Le décors devient plus horrifique, déjà annoncé par " l'odeur horrible de la

blessure du mehaigné » qui avait contrasté avec la pureté de l'avancée du graal. Mais cette fois, il

n'y a nul point positif puisque Gauvain " recula avec un hoquet de dégoût » devant le plat de

" crapaud pourri » qui lui est servi. De nombreux termes sont négatifs dans la suite du texte, alors

que le château a disparu : " galeuse », " demi écroulées », " haillonneux », " l'insultait »,

" trognons de choux, de carottes pourries » etc... Contrairement à Eriu, la souveraineté d'Irlande,

on ne passe pas d'une apparence hideuse à une belle demoiselle, le chemin effectué ici est l'inverse.

Il représente également Gauvain, qui paraît être le chevalier valeureux et courtois en apparence,

mais qui aux yeux de la religion n'est que péchés et luxure, l'empêchant de pouvoir être l'élu.

14L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

15L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

16L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

Mais une nouvelle fois la scène s'efface puisqu'il se retrouve près de son écuyer endormi.

Ici, le monde féérique s'apparent au rêve, qui comme souvent, tourne rapidement au cauchemar,

ajoutant une multitude de détails déplaisants. Ainsi que nous pouvons le voir dans le tableau récapitulatif qui suit, seul le Graal est une

constante dans les cérémonies. La lance qui saigne est souvent dissociée de la cérémonie et se

retrouve plus tard dans les romans. Le cortège se compose lui aussi de manière différente. Si le plus

souvent des jeunes filles portent le Graal, il a parfois le pouvoir de léviter. Le nombre des

participants au cortège varie également, même au sein d'un même roman comme dans l'Enchanteur,

puisqu'il y a sept jeunes filles pour Perceval, aucune pour Gauvain, et douze pour Lancelot et

Galaad.

C/ Les Personnages et le Graal

Dans le Conte du Graal, Perceval échoue à cette épreuve du Graal. Différents

personnages, ermite ou jeune fille, lui donne peu à peu des indices sur la cérémonie et ce qu'il fallait

faire. Perceval comprend alors son erreur et tente de la réparer. Même si on ne peut pas en être sûr,

on sent que dans le roman de Chrétien Troyes le personnage qui s'est repenti pourrait accéder à une

nouvelle chance. Au contraire, dans toutes les continuations, il n'est possible de voir le Graal qu'une

fois et celui qui ne correspond pas aux attentes sera définitivement chassé, ne pouvant obtenir une

seconde chance, puisqu'un seul élu est attendu. Comme dans les continuations, Barjavel fait passer

l'épreuve du graal à plusieurs chevaliers, jusqu'à Galaad, personnage inventé tardivement, qui est

l'Elu attendu. Ainsi, on peut reprendre le schéma de XXX qui explique les manières différentes dont les héros échouent à trouver le graal et où il se trouve par rapport à eux : Dans le texte de Barjavel, un lecteur averti comprend que Perceval va échouer et la cause de

son échec dès la rencontre avec le roi pêcheur. En effet, la première question qui est posée amène

une réponse évidente de la part du roi pêcheur, faisant regretter à Perceval d'avoir parlé :

" Et il regretta d'avoir posé une question de pure curiosité, alors que sa mère lui avait bien recommandé de n'en rien faire. »17

Il se permet néanmoins une autre question, pour demander son chemin. Le roi lui ayant répondu, il

veut alors poser une autre question, mais ce retient, jugeant qu'il s'agit là de " pure curiosité ».

Perceval se retrouve alors directement dans la salle du graal où le roi pêcheur l'attend depuis " une

semaine ». La temporalité est ici distendue, en tout cas, le roi infirme est allé bien plus vite que

Perceval qui a été déplacé instantanément, montrant qu'il appartient à l'autre monde. C'est ensuite

le roi Pêcheur en personne qui lui dit la raison de son échec " Il fallait demander ! Il fallait demander !... »18 Le château disparait ensuite aussi vite qu'il est apparu.

17L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

18L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

Gauvain, quant à lui, demande aussi l'aide du roi pêcheur pour trouver son chemin, mais se

permet plus de questions, offrant un jeu de questions réponses avec le roi. C'est également celui-ci

qui lui révèlera la cause de son échec tandis que le château disparaîtra. Pour Lancelot, cela sera encore une fois très semblable (la rencontre avec le roi pêcheur, le

début de la cérémonie), mais également différent. En effet, chaque personnage est présenté comme

un potentiel élu (Arthur le premier, nous y reviendrons), mais leurs différents péchés, à chaque fois

parfaitement identifié, les feront faillir. Ainsi, alors que le roi Arthur ne semble pas avoir un grand

rôle dans la quête du graal alors qu'il la commande lui-même à ses chevaliers, est envisagé par

Barjavel, révélant ce qu'il en est de lui : en ayant couché (même par erreur) avec sa demie-soeur, il

est devenu impur pour cette tâche et ne pourrait jamais trouvé le château. Dans cette partie, nous avons vu que Barjavel s'inscrivait dans la lignée des auteurs médiévaux, à qui il dédie en effet ce roman : " aux bardes, conteurs, troubadours, trouvères, poètes, écrivains, qui depuis deux mille ans ont chanté, raconté, écrit l'histoire des grands guerriers brutaux et naïfs et de leurs Dames qui étaient les plus belles du monde, et célébré les exploits, les amours et les sortilèges. »19

Nous verrons dans la partie suivante la manière dont cet auteur réinterprète donc la scène du Graal.

19L'Enchanteur, Barjavel, Collection Folio, Denoël, 1984, 471p

II/ Le Graal et ses interprétations

Même si Barjavel reprend fidèlement le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, il

n'oublie pas qu'il est un auteur du XXème siècle réécrivant un texte vieux de plusieurs siècles. Il ne

fait donc pas une simple réécriture, ce qui n'est plus à la mode de nos jours contrairement au

moyen-âge et ses lecteurs attendant de la nouveauté, il donne donc une interprétation personnelle de

ces légendes.

A/ L'origine du Graal

L'une des questions qu'aurait dû poser Perceval concernait la nature du Graal.

Malgré les réponses données par les ermites et se cousine, on ne peut se faire qu'une idée très vague

de ce qu'est réellement le graal et d'où il vient. Les continuateurs proposent donc différentes explications et les auteurs contemporains feront de même, chercheurs ou romanciers.

Néanmoins, à partir de la première continuation, il semble acquis que le Graal soit la coupe

qui ait recueilli le sang de Jésus. Le nom de Joseph d'Arimathie apparaissant dans les textes religieux prend alors une place importante dans la littérature. Dans la première continuation, on trouve donc l'explication de ce qu'est le graal, vers 7497 : " Bien en doit avoir le pooir, car c'est icil Graaus por voir

Que nostre Sire tant ama

Que il de son sanc l'onora

Au jor que il fu en crois mis »

Et vers 7510 :

" Josep qui tant fist a loër,

Otot le Graal c'ot fait faire

Vint errant el mont [d]e Cauvaire

La u Dex ert crucefiiés. »

Dans le Joseph d'Arimathie attribué à Robert de Boron, on retrouve cette explication, ainsi que

toutes les pérégrinations du graal, qui devra être trouvé en Bretagne, par " le troisième homme »

après Joseph d'Arimathie. Dans les réécritures modernes et les recherches contemporaines, le graal reste donc la coupe

qui a recueilli le sang du graal. Pour certains, le graal est également un objet mythologique celtique,

représentant la corne ou le chaudron d'abondance, car le graal a le pouvoir de nourrir une multitude

de personnes sans jamais se vider. Mais d'autres voient également dans ce cortège une cérémonie

liée à la fécondité (le graal nourricier allant lui aussi dans ce sens) avec une opposition des genres

masculins et féminins. La lance devient alors un objet phallique (d'autant plus qu'elle a blessé le roi

méhaigné entre les hanches) et le graal un objet féminin. Cette théorie est par exemple exploitée

dans le célèbre Da Vinci Code.

Barjavel consacre lui aussi deux pages entières à la création du graal, non lorsque les héros ont

trouvé le château du graal, mais bien avant, alors qu'Arthur se bat encore pour le trône. Il retrace donc l'histoire de l'objet, lui donnant directement des origines divines puisque c'est Eve, se réveillant au paradis qui la crée avec de la terre glaise afin de soigner Adam : " Eve confectionna une coupe avec une poignée de glaise, et y recueillit le sang d'Adam. La glaise but le sang du blessé, et la blessure se ferma. »20

Par la suite, la coupe sera utilisée pour cueillir des fruits. Elle a donc le même rôle qu'elle tiendra

par la suite dans le monde des humains : recueillir le sang du Christ : " C'est dans la même coupe que Joseph d'Arimathie recueillit le sang de Jésus blessé d'un coup de lance pendant son agonie en croix ».21 Le voyage de la coupe est lié au merveilleux. Lorsqu'elle arrive dans le monde humain, une fois

Adam et Eve chassés du paradis, elle est brisée, avant d'être ressoudée (comme devra l'être l'épée

brisée) et est liée au sang et aux blessures. Le voyage de Joseph d'Arimathie, ainsi qu'il est décrit

par Barjavel est également intéressant puisqu' " il étendit sur l'eau sa chemise qui flotta. Il invita son père à yquotesdbs_dbs7.pdfusesText_13