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10Revue ABB 2/2009
Une industrie durable
Les infrastructures de transport et de distribution d'électricité génèrent de grandes quantités de déchets contenant des résines époxy, de la silicone et de la porcelaine, notamment lors du renouvellement des produits hors d'usage. Dans un avenir proche, si l'avènement des réseaux électriques intelligents améliorera l'efficacité énergétique, il rendra inévitablement plus aiguë la ques- tion de l'élimination des appareils remplacés. Il n'existe actuellement aucune technologie éprouvée pour recycler les matériaux isolants arrivés en fin vie ; ils finissent donc le plus souvent en décharge. Afin de réduire l'impact environnemental de ses pro- pres produits et d'aider ses clients à respecter une réglementation toujours plus stricte, ABB a étudié et expérimenté plusieurs procédés de recyclage. Cela a permis d'identifier des perspectives de recyclage ou de valorisation des matériaux isolants, dont le développement pourrait renforcer l'éco-compatibilité des produits destinés aux réseaux de transport et de distribution d'électricité.
Les déchets ont de l'avenir
Recyclage et valorisation des matériaux isolants en fin de vie Robert Sekula, Till Ruemenapp, Marlene Ljuslinder, Bernhard Doser
11Revue ABB 2/2009
Les déchets ont de l'avenir
Une industrie durable
tion et le recyclage en limitant la mise en décharge. Exemples :
Autriche : durcissement des restrictions
à la mise en décharge (2004)
Danemark : interdiction de mise en
décharge des déchets combustibles aptes à l'incinération (1997)
France : interdiction de mise en
décharge des rejets non résiduaires (2002)
Allemagne : interdiction de mise en
décharge des déchets non traités (1993) et inflammables (2001)
Pays-Bas : interdiction de mise en
décharge de tous les déchets pouvant être réutilisés ou récupérés (1995)
Suède : interdiction de mise en décharge
des résidus urbains solides non traités (1996), des déchets inflamma- bles (2002) et des polluants organi- ques (2005).
Dans le même esprit, la directive
2002/96/CE relative aux déchets
d'équipements électriques et électro- niques (DEEE) [2] précise que tous les
équipements électriques et électroni-
ques (EEE) 2) doivent être recyclés et (valorisation énergétique) constituent les méthodes de traitement les plus efficaces. La mise en décharge est à
éviter car elle ne permet de récupérer
ni matériaux ni énergie. Si le déchet est " propre » et sa composition bien définie, il peut facilement être collecté, démonté et traité pour être incorporé dans de nouveaux produits. Dans le cas contraire, son incinération avec valorisation énergétique est probable- ment la meilleure solution. En effet, la plupart des polymères ont un fort contenu énergétique et constituent un bon combustible pour produire de la chaleur ou de l'électricité. Pour autant, l'incinération doit être parfaite- ment maîtrisée avec des dispositifs efficaces pour limiter les rejets atmos- phériques. Les polymères contiennent souvent du chlore, du fluor, du brome, du soufre ou d'autres additifs dont la combustion est susceptible de dégager des émissions polluantes. Leur inciné- ration doit permettre de détruire et d'éliminer ces polluants organiques.
Recycler ou incinérer un produit ou
un composant est une décision com- plexe qui doit être prise au cas par cas.
Les thermodurcissables de nombreux
produits électrotechniques renferment des métaux susceptibles d'être encap- sulés dans l'époxy ou la silicone 1
Des travaux sont actuellement réalisés
en laboratoire pour tenter de récupé- rer les matériaux à valeur marchande de ces isolants polymères.
Des directives européennes de gestion
des déchets privilégient la récupéra- L es caoutchoucs de silicone 1) et autres matériaux thermodurcissa- bles sont très utilisés dans l'appa- reillage électrique pour leurs excellen- tes propriétés diélectriques et leur robustesse. Tant les fabricants que les compagnies d'électricité rejettent, chaque année, d'énormes quantités de déchets contenant des matériaux isolants. Une politique adéquate de gestion des déchets s'impose donc pour favoriser leur recyclage ou leur valorisation en lieu et place de leur mise en décharge.
Des analyses de cycle de
vie indiquent que le recy- clage et l"incinération avec valorisation énergétique constituent les méthodes de traitement les plus efficaces des déchets polymériques.
Selon une estimation récente, la
consommation annuelle de produits en matières plastiques de l'Europe occidentale pèse 40 millions de ton- nes [1], dont 20 % de thermodurcissa- bles. Cette consommation massive génère inévitablement une quantité impressionnante de déchets, estimée à environ 22 millions de tonnes par an, dont moins de 40 % sont réutilisés. Les déchets polymériques peuvent être recyclés, incinérés ou mis en décharge.
Plusieurs analyses de cycle de vie
indiquent que le recyclage et l'inciné- ration avec récupération d'énergie Notes 1) Polymères dérivés du silicium et renfermant d"autres éléments chimiques comme du carbone, de l"hydrogène, de l"oxygène et des charges. Les caoutchoucs de silicone liquides (LSR) sont une catégorie de silicones. 2) Equipements fonctionnant grâce à des courants électriques ou à des champs électromagnétiques, et équipements de production, de transfert et de mesure de ces courants et champs, relevant des catégories mentionnées à l"annexe I A, et conçus pour être utilisés à une tension ne dépassant pas
1 000 volts en courant alternatif et 1 500 volts en
courant continu. 1 Déchets de produits en matériaux thermodurcissables
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Les déchets ont de l'avenir
Une industrie durable
fique inférieur (PCI) compris entre 10 et 20 MJ/kg selon la composition de la charge, ce qui en fait un combustible aux propriétés calorifiques et
énergétiques intéressantes.
Leur combustion a l'inconvé-
nient de générer de grandes quantités de matières non organiques (produits d'apport ou charges) qui doivent être
éliminées de manière écono-
mique avec un minimum d'impact sur l'environnement. Point positif : la combustion des thermodur- cissables génère relativement peu de polluants atmosphériques, voire pas du tout si elle est bien gérée [3].
Une solution simple
consiste à incorporer les déchets à base d"époxy
à des matériaux de
construction (béton ou bitume).
La dégradation des plastiques en
molécules plus légères par dégrada- tion lumineuse, chimique ou biologi- que est également une solution pro- metteuse pour le recyclage des poly- mères thermodurcissables. La pyrolyse est une technique particulière de dégradation chimique, très intéres- sante tant d'un point de vue environ- nemental que financier ; de plus, la séparation préalable des constituants n'est pas nécessaire pour récupérer les matériaux et l'énergie. les pièces métalliques (circuits magné- tiques, bobinages) doivent être extrai- tes avant réutilisation. Certaines entre- prises utilisent la cryogénisation pour recycler les pièces intégrées, même si celles-ci sont de piètre qualité.
Le recyclage des caoutchoucs, y com-
pris les caoutchoucs de silicone liqui- des, se borne actuellement à des tech- niques de séparation mécanique comme le broyage. Les caoutchoucs sont des polymères très élastiques vulcanisés (réticulés) ; cette vulcanisation interdit de les fondre et de les retraiter. Leur réutilisation se limite donc à la fabri- cation de bitume et de revêtements de pistes d'athlétisme. Cependant, des techniques de dévulcanisation des caoutchoucs actuellement en dévelop- pement pourraient, si elles font leurs preuves, élargir considérablement le domaine d'utilisation des caoutchoucs recyclés.
La valorisation énergétique des ther-
modurcissables offre une alternative intéressante au recyclage. Ceux-ci affi- chent généralement un contenu éner- gétique élevé avec un pouvoir calori-valorisés. Le durcissement actuel et futur de la régle- mentation sur les déchets
électriques signifie que les
fabricants et utilisateurs d'ap- pareillage haute tension doi- vent identifier d'autres méthodes de gestion de leurs déchets.
Etat des lieux
Les thermodurcissables,
déchets non dangereux, peu- vent être mis en décharge, ce qui se fait dans plus de 90 % des cas [1]. Or le volume croissant de déchets et le nombre limité de terrains pour la mise en décharge poussent à développer des technologies perfectionnées et durables pour réutiliser ces matériaux.
Plusieurs voies sont actuellement
explorées comme alternative à la mise en décharge : valorisation matière (réemploi dans les matériaux de construction) ; recyclage mécanique ; valorisation énergétique ; dégradation.
Une solution simple consiste à incor-
porer les déchets à base d"époxy à des matériaux de construction (béton ou bitume). Pour autant, le volume de déchets généré, très réduit par rapport
à la quantité de matériaux de
construction nécessaires, et la forte dispersion géographique sont de fai- bles incitations économiques à la valorisation matière. De plus, les rési- nes époxy sont fréquemment utilisées pour isoler le matériel électrique dont b 2 Produits issus de la pyrolyse de composants en époxy
SolidesGazLiquides
3 a installation expérimentale de pyrolyse et b installation thermique pyrolytique pilote
Système de régulation
automatique
Gaz de pyrolyse
Réacteur à
pyrolyseCondenseur
Dévési-
culeur
Récupération
du condensatRécupération du condensatChambre de combustion
AirGaz de
combustionAnalyseur des gaz de combustion vers analyse chromatographique
Thermomètre
Débitmètre à flotteur
Cyclone
a
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Les déchets ont de l'avenir
Une industrie durable
Valorisation en cimenterie :
une approche innovante
Autre solution pour valoriser
les déchets contenant de l'époxy : les brûler pour chauffer les fours à ciment. Le contenu énergétique relative- ment élevé de l'époxy permet de l'utiliser comme source de chaleur supplémentaire dans le processus de cuisson du clinker. De plus, la charge non organique (SiO 2 ou Al 2 O 3 dans la plupart des formules) peut être incorporée directe- ment au clinker. La poudre
époxy, finement broyée, est injectée
dans la flamme (de préférence mélan- gée au charbon pulvérisé) du four rotatif 5 . En fonctionnement normal, le four dégage des oxydes d'azote (NO x ), gaz polluants produits par l'oxydation de l'azote chimiquement lié dans le combustible (NO x combus- tibles) et par la fixation thermique de cet azote dans l'air (NO x thermiques).
Ces NO
x pourraient être réduits par l'ajout de poudre d'époxy vulcanisée au combustible. Le type de combusti- ble utilisé influence la quantité et le type de NO x générés, tout comme la température de combustion (hausse significative des émissions au-delà de
1 400 °C). Lors de la fabrication du
ciment, la température de la zone de cuisson du four et du précalcinateur peut dépasser 1 500 °C, favorisant la Au total, 3 expériences différentes furent menées. Pour un résultat opti- mal, les matières organiques doivent
être correctement décomposées (mini-
misation de la teneur en carbone des résidus solides) alors que les pièces métalliques récupérées doivent être de bonne qualité pour leur recyclage 4
La pyrolyse peut servir à
dégrader thermiquement les déchets à base de résine en récupérant les pièces métalliques pour les recycler.
Ces expériences ont démontré que la
pyrolyse peut servir à dégrader ther- miquement les déchets à base de résine en récupérant les pièces métalliques pour les recycler. Le gaz et l'huile issus de la pyrolyse peuvent être réutilisés comme combustibles pour exploiter le gisement d'énergie des produits rejetés.
Solutions examinées par ABB
ABB étudie actuellement
plusieurs possibilités de valorisation des thermodur- cissables.
Pyrolyse
La pyrolyse, technique aux
nombreux atouts pour la valorisation matière des thermodurcissables, est un procédé de dégradation thermique en l'absence d'oxygène. Elle donne lieu à la formation 2 de gaz de pyrolyse ; de liquides ; de solides (résidus charbonneux, charges minérales, métaux).
Lors d"expériences en laboratoire, un
réacteur à pyrolyse constitué pour l"essentiel de radiateurs électriques et d"un thermocouple a été développé et conçu pour une large plage de tempé- ratures 3
Le gaz issu de la pyrolyse des thermo-
durcissables doit être purifié avant d'être brûlé dans la chambre de combustion. Cette purification met en oeuvre un dévésiculeur 3) et un cyclone 4) qui condensent les impuretés du gaz en produits liquides.
En laboratoire, la dégradation par
pyrolyse des déchets contenant de l'époxy nécessita entre 3 et 5 heures selon la quantité de déchets traitée et la température de pyrolyse. La pyrolyse à basse température s'effectua à 450 °C, celle à haute température à 750 ou
850 °C.
Notes 3) Appareil séparant les particules liquides en suspen- sion dans un courant gazeux. 4) Appareil séparant, sous l"effet des forces centrifu- ges créées par une arrivée tangentielle, les particu- les solides en suspension dans un fluide. 4 Expériences de pyrolyse à diverses températures
ProcédéPyrolyse à basse
températurePyrolyse à haute températurePyrolyse à haute température
Thermodurcissables 1 820 g 4 390 g 1 270 g
Temps de pyrolyse 3 h 3 h 5,5 h
Température 450 °C 750 °C 850 °C
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