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tion très nourrie d’écriture de ces manuels, dont les premiers exemples remontent au début du XXe siècle (Niceforo, 1907) L’ouvrage de Niceforo est préfacé par le Dr Lacassagne, l’un des fondateurs de la police scientifique (Kaluszynski, 2002) Il serait fastidieux d’énumérer les principaux manuels sur l’enquête criminelle



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Volume 38, Number 2, Fall 2005La police en pi"ces d€tach€esURI: https://id.erudit.org/iderudit/012661arDOI: https://doi.org/10.7202/012661arSee table of contentsPublisher(s)Les Presses de l'Universit€ de Montr€alISSN0316-0041 (print)1492-1367 (digital)Explore this journalCite this article

Brodeur, J.-P. & Ouellet, G. (2005). L...enqu†te criminelle.

Criminologie

38
(2),

39‡64. https://doi.org/10.7202/012661ar

Article abstract

According to a 2003 survey conducted by Skogan and Frydl, criminal investigation is one of the least studied topics in police research. This article presents some of the findings of an examination of 153 homicide files opened between 1990 and 2001 by a large police force in Quebec. The paper is divided in four parts: (1) First, a brief survey of the writings on criminal investigations is conducted; (2) Our research project is then described and some of the methodological difficulties encountered are discussed; (3) A categorization of the main types of criminal investigation is developed, revealing an unsuspected diversity among investigations; (4) Finally, empirical findings are presented, focusing on the time needed to clear a homicide case, on the main determinants of the clearance process, and on the role of forensics and expertise in solving cases. 39

L'enquête criminelle*

Jean-Paul Brodeur

Directeur, CICC (Centre international de criminologie comparée) École de criminologie, Université de Montréal jean-paul.brodeur@umontreal.ca

RÉSUMÉ •

L'enquête de police judiciaire constitue, d'après une étude récente de Skogan et Frydl (2003), l'un des objets les moins étudiés dans le champ des études sur la police. Cet article énonce certains des résultats d'une étude effectuée dans

153 dossiers d'homicide montés de 1990 à 2001 par un grand corps policier québé-

cois. Le texte est divisé en quatre parties: (1) on propose d'abord un rapide bilan des écrits sur l'enquête de police judiciaire; (2) le projet de recherche est ensuite pré- senté en faisant état de quelques difficultés d'ordre méthodologique; (3) une taxino- mie des principaux types d'enquête de police judiciaire est dressée, qui révèle que les enquêtes recèlent une diversité jusqu'ici relativement inaperçue; (4) finalement des résultats empiriques sont énoncés, en particulier en ce qui a trait au temps consacré par les enquêteurs pour résoudre les affaires, aux facteurs les plus opérants dans la résolution des affaires et au rôle de la police scientifique et de l'expertise. ABSTRACT • According to a 2003 survey conducted by Skogan and Frydl, criminal inves- tigation is one of the least studied topics in police research. This article presents some of the findings of an examination of 153 homicide files opened between 1990 and 2001 by a large police force in Quebec. The paper is divided in four parts: (1) First, a brief survey of the writings on criminal investigations is conducted; (2) Our research project is then described and some of the methodological difficulties encountered are discussed; (3) A categorization of the main types of criminal investigation is devel- oped, revealing an unsuspected diversity among investigations; (4) Finally, empirical findings are presented, focusing on the time needed to clear a homicide case, on the main determinants of the clearance process, and on the role of forensics and expertise in solving cases. * Je tiens à remercier vivement le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada qui m'a accordé une subvention pour la poursuite de ces recherches. 2 D'après un rapport publié en 2003 sous les auspices du Conseil natio- nal de la recherche (National Research Council) des États-Unis, les six sujets qui ont fait l'objet de la plus grande somme de recherches en rapport avec l'activité policière de 1967 à 2002 sont, dans l'ordre: le crime, les drogues, les femmes (par exemple, la violence conjugale), les relations entre la police et la communauté, l'efficacité de la police et l'organisation policière (par exemple, la gestion). Les six sujets qui ont retenu le moins d'attention pendant la même période sont, à partir du sujet ayant le moins fait l'objet d'étude: l'enquête criminelle, les armes à feu et la force létale, la discrétion policière, l'imputabilité de la police, le contrôle des foules et les droits de l'homme (sur tous ces résultats, voir Skogan et Frydl, 2003: chapitre 1). L'équipe dirigée par Skogan et Frydl est parvenue à ce résultat en procédant à un dépouillement de 17 bases de données portant sur les recherches sur l'activité policière. Si elle a trouvé que l'enquête criminelle était, parmi les 22 sujets répertoriés, celui sur lequel il y avait eu le moins de recherches, rien n'indique que cette situation évoluera de façon notable. On remarquera à cet égard que la troisième édition The Oxford Handbook of Criminology (2002) ne com- porte pas encore de chapitre consacré à l'enquête policière, comme telle. Cette situation qui caractérise la recherche contraste de manière sai- sissante avec le contenu de la fiction policière. Tous médias considérés (l'écrit, le cinéma, la télévision), l'enquête criminelle concentre sur elle plus de 90% de la production romanesque sur la police (Brodeur, à paraître). Ce constat peut être précisé: c'est en fait l'investigation de l'homicide qui constitue l'objet presque exclusif de la fiction policière, qui se classe au second rang des oeuvres de fiction publiées (juste der- rière la "fiction générale»). Ce contraste entre la recherche et la fiction englobe presque tous les aspects de l'enquête policière: on pourrait faire un tableau où s'opposent diamétralement les traits de l'enquête policière tels qu'ils apparaissent dans la recherche et dans la fiction. Par exemple, la résolution d'un meurtre prend, en général, l'espace d'un roman ou le temps d'un film. C'est en réalité la situation inverse que découvre la recherche. Plus de 80% des homicides sont résolus en quelques heures. Cet article présente les premiers résultats d'une recherche empirique que j'ai effectuée sur l'enquête policière, de 2002 à aujourd'hui. Bien que cette recherche ne soit pas encore terminée, un certain nombre de constats généraux qui se sont imposés dans un traitement préliminaire des données peuvent être maintenant énoncés. Ce texte est divisé en 41
quatre parties, suivies d'une brève conclusion. Dans la première partie, je procède à une revue de la littérature de recherche sur l'enquête, en me limitant à l'essentiel. Dans une seconde partie, je présente mon pro- jet de recherche, ses objectifs et sa méthodologie. En troisième lieu, je propose une taxinomie de l'enquête, qui est le fruit de mes travaux dans les archives de la police. Dans une dernière partie, je rapporte quel- ques-uns des résultats quantitatifs de mon travail sur les enquêtes. En conclusion, je discute de la signification des résultats de ma recherche et je m'interroge sur les tendances futures de l'enquête policière.

PARTIE 1 - Les travaux de recherche

Il existe quelques ouvrages de référence qui contiennent une recension des travaux sur l'enquête policière. On citera au premier chef le chapi- tre que Mike Maguire consacre à l'enquête criminelle dans le Handbook of Policing (Maguire, 2003: 363-393), de même que le chapitre de Sanders et Young dans The Oxford Handbook of Criminology (Sanders et Young, 2002: 1034-1075). Plusieurs des chapitres de la collection de textes récemment publiés par Tim Newburn sont également utiles (Newburn, 2005). Pour intéressants qu'ils soient, ces textes n'en mani- festent pas moins les limites des recherches sur l'enquête criminelle. Le texte de Maguire (2003) ne porte pas exclusivement sur l'enquête cri- minelle mais couvre tout le champ du contrôle de la criminalité. De façon similaire, Sanders et Young (2002) se penchent sur tout le pro- cessus qui prend en charge un suspect et qui le conduit de façon utile devant le tribunal: les enquêteurs n'ont qu'une part restreinte à ce pro- cessus (voir aussi à ce sujet l'ouvrage classique de René Levy (1987), Du suspect au coupable: le travail de police judiciaire, dont le titre préfigure de façon exacte celui du chapitre de Sanders et Young). Les écrits portant directement sur l'enquête policière peuvent être classés en cinq catégories.

1. Les manuels. La catégorie la plus étendue est celle des manuels qui

sont destinés à la formation des enquêteurs. Il existe en effet une tradi- tion très nourrie d'écriture de ces manuels, dont les premiers exemples remontent au début du XX e siècle (Niceforo, 1907). L'ouvrage de

Niceforo est préfacé par le D

r

Lacassagne, l'un des fondateurs de la

police scientifique (Kaluszynski, 2002). Il serait fastidieux d'énumérer les principaux manuels sur l'enquête criminelle. On se contentera d'en

L'enquête criminelle

2 citer quelques-uns parmi les plus éloquents. On trouve vers le milieu du siècle dernier des manuels qui ont fait l'objet de très nombreuses rééditions (Dienstein, 1952; Kirk et Thornton, 1953; Adam et al.,

1962; Aubry et Caputo, 1965). On trouve parmi les plus récents

manuels Palmiotto (1994); Osterburg et Ward (2000); Bennett et Hess (2001). Ces manuels sont en général des livres de plusieurs centaines de pages, où la police scientifique occupe une place prépondérante à mesure qu'on se rapproche de la fin du second millénaire.

2. Les techniques spécialisées. On trouve en second lieu des manuels ou

des études qui portent sur une technique d'enquête déterminée, comme, par exemple, l'utilisation du polygraphe (National Research Council,

2003). Certaines de ces techniques comme l'interrogatoire policier

(Inbau et Reid, 1967; Deeley, 1971; Ben-Shakhar et Furedy, 1990; Eisen et al., 2002) ou comme l'écoute électronique sont plus anciennes qu'on ne le croit (Greenman, 1938; Dash et al., 1959). On assiste pré- sentement à une multiplication des publications sur les instruments les plus médiatisés, comme les empreintes génétiques (Levy, 1996; Krude,

2004) et le profilage (profilage géographique, Rossmo, 2003; profilage

psychologique, Ainsworth, 2001; Turvey et al., 2002).

3. Les monographies sur l'enquête. On retrouve, en troisième lieu, des travaux

de nature plus académique. Il s'agit d'ouvrages qui portent sur l'enquête policière en général (Sanders, 1977; Ericson, 1981 Forst, 1982; Si- mon, 1991; Eck, 1992; Smith et Flanagan, 2000) ou qui prennent pour objet un type spécialisé d'enquête ou d'enquêteur (Ocqueteau,

2004). Les investigations spécialisées qui ont fait l'objet des travaux les

plus fréquents ont pour objet le trafic de la drogue (Wilson, 1978; Manning, 2004) et l'homicide (Camps, 1966; Riedel et al., 1985, Maxfield, 1989; Simon, 1991, IACP, 1995; Wellford et Cronin, 1999; Innes, 2003; Mucchielli, 2004). Comme on peut s'y attendre, les nou- veaux types de criminalité, en particulier la criminalité informatique, font l'objet de beaucoup d'attention (Clark et Diliberto, 1996). On trouve enfin quelques pages qui sont consacrées à l'enquête dans des ouvrages classiques sur la police (Skolnick, 1966: 169-181).

4. Les études du processus judiciaire. Ces travaux ne sont pas fondamenta-

lement différents de ceux qui précèdent, si ce n'est par leur insistance sur la description de la séquence des étapes que parcourt un suspect avant de passer en jugement et de recevoir éventuellement une sanc- 43
tion. Le prototype francophone de ces études a été fourni par Levy (1987). La contre-partie anglophone de cette étude est The Case for the Prosecution (McConville et al., 1991). On trouve maintenant un assez grand nombre d'ouvrages sur ce sujet, recensés par Sanders et Young (2002). Ces études sont fréquemment conduites dans une perspective constructionniste: elles s'efforcent de montrer comment l'acte et la per- sonnalité d'un délinquant sont reconstruits à partir de son arrestation jusqu'à sa punition (Innes, 2003: 6).

5. Les études d'évaluation. De tous les ouvrages sur l'enquête, le plus célè-

bre, et en même temps, le plus controversé, est sans doute celui de Greenwood et ses collaborateurs (1977; sur Greenwood, voir Chappell et al., 1982). Ce travail, qui constituait initialement un rapport de la Corporation Rand sur l'efficacité de l'enquête criminelle, a été publié ensuite sous d'autres formes. Sa principale conclusion était qu'on pou- vait supprimer la moitié de tout ce que faisaient les enquêteurs sans changer de façon sensible les résultats qu'ils obtenaient dans la résolu- tion des affaires. On comprendra que les milieux policiers aient été choqués par cette conclusion et que de nombreuses tentatives ont été faites pour réfuter les conclusions de Greenwood. Elles continuent de nous interpeller quelque trente ans plus tard et elles ont donné nais- sance à toute une littérature évaluative de l'efficacité de l'enquête de police. Ces études tendent à confirmer les conclusions de Greenwood, y compris dans le champ de l'homicide.

PARTIE 2 - Un projet de recherche

J'ai élaboré un projet de recherche sur l'enquête criminelle en 1999 et je l'ai plus tard soumis à un grand corps de police québécois, qui m'a autorisé à travailler dans ses archives. Voici une description du projet. À cause des limites de cet article, cette description demeure sommaire. Ce projet de recherche vise pour l'essentiel deux objectifs. Le premier de ceux-ci peut s'énoncer sous la forme d'une question: qu'est-ce qui détermine la résolution d'une enquête? Ce terme de résolution étant en- tendu comme l'identification et l'arrestation de l'auteur ou des auteurs d'un crime. Dans la très grande majorité des cas, l'auteur identifié par la police fait l'objet de poursuites judiciaires (il arrive que pour diver- ses raisons les poursuites soient suspendues ou encore que le coupable

L'enquête criminelle

2 présumé ait fui à l'étranger). Le second de mes objectifs est de mettre à l'épreuve la théorie d'Ericson et Haggerty (1997) sur la caractérisation du policier comme travailleur du savoir. L'enquêteur est un type de po- licier auquel cette caractérisation devrait s'appliquer avec le plus de pertinence. Dans son ouvrage sur l'homicide, Innes reprend explicite- ment cette hypothèse (Innes, 2003: ch. 5, p. 27). Dans le cours de cette mise à l'épreuve, j'ai porté une attention particulière au rôle de la po- lice scientifique et à celui du savoir (renseignement criminel et banques de données) dans la résolution des affaires. Voici en bref la méthode que j'ai suivie. J'ai d'abord procédé à une analyse documentaire. Initialement, un échantillon d'environ 25 causes résolues par la police a été constitué pour chacune des cinq infractions suivantes: l'homicide et ses variantes, l'agression sexuelle, le vol à main armée, la fraude, et des infractions dans le domaine des stupéfiants. Ces dossiers ont été choisis parmi les affaires classées par la police comme élucidées de 1990 à 2001, en utilisant une procédure de sélection au hasard, qui assurait la représentativité des données (sur la base de l'année et des divers districts dans lesquels opère le corps de police concerné). J'ai donc recueilli un échantillon de plus de 125 enquêtes résolues. Cependant, je me suis rapidement aperçu que l'homicide laissait dans les archives des traces beaucoup plus considérables que toute autre enquête. Par exemple, un dossier typique d'homicide est constitué d'une douzaine de filières qui sont regroupées dans une caisse de format courant. Le nombre de ces caisses peut s'élever jusqu'à la vingtaine dans des causes non résolues. Par comparaison, le dossier accumulé en rapport avec toutes les autres infractions consiste en général dans une seule filière contenant quelques pages. J'ai donc décidé de concentrer une part importante de mon attention sur l'homicide et j'ai constitué une banque informatisée de données qui contient 153 cas d'homicide, de 1990 à

2001. Les aspects variés de ces causes ont été codifiés selon 163 varia-

bles, regroupées en divers ensembles. Ce travail documentaire a été complété par des entrevues avec des membres de l'escouade des homicides et avec d'autres détectives. J'ai effectué des entretiens semi directifs, dont le but était de vérifier les constats formulés à partir des analyses documentaires et d'ajouter de la matière à ces constats, s'ils s'avéraient insuffisants. L'une des techniques que j'ai utilisées est celle de l'informateur clé: j'ai, à cet égard, passé plus de 10 heures d'entrevue avec l'un des dirigeants de l'escouade des 45
homicides et j'ai passé plusieurs heures avec trois autres membres de cette escouade. Je me contenterai de soulever deux questions pour ce qui est de la méthodologie. La première concerne l'unité que j'ai utilisée pour faire le traitement statistique de mes dossiers. Cette unité est constituée par une affaire (une cause ou encore une enquête, ces termes étant pour nous équivalents) et non, par exemple, par l'auteur d'un homicide. Cette notion d'affaire est cependant complexe. Dans le cas des homicides, on doit distinguer deux types d'affaire: les affaires symétriques et les affaires asymétriques. (1) Les affaires symétriques, les plus nombreuses, ne comportent qu'un agresseur et une victime. D'autres affaires symé- triques, beaucoup plus complexes, comportent plusieurs agresseurs et plusieurs victimes. (2) Le second type d'affaire, l'affaire asymétrique, présente deux cas de figures: plusieurs agresseurs et une seule victime; un seul agresseur et plusieurs victimes. La difficulté en ce qui concerne toutes les affaires, sauf le cas symétrique le plus élémentaire (un agres- seur, une victime), est qu'il faut parfois fractionner l'affaire en sous- enquêtes. Prenons un exemple simple: un seul agresseur réussit à assassiner une victime, alors que sa seconde victime survit à l'agres- sion: on dédoublera cette affaire en une cause d'homicide au premier degré (homicide prémédité) et une cause de tentative d'homicide. Cet exemple, j'y insiste, est parmi les plus simples et je ne peux discuter du problème de l'asymétrie dans le cadre restreint de cet article. Voici maintenant la seconde des questions dont je désire traiter. Il s'agit en fait moins d'une interrogation que d'une certitude qui s'est progressivement confirmée. Il est très problématique de procéder à des entretiens avec des enquêteurs sans avoir préparé longuement ces entretiens par une étude systématique de leurs dossiers. La raison n'en est pas que les enquêteurs manqueraient de véracité dans leurs répon- ses et qu'il faudrait confronter celles-ci à l'analyse documentaire. La raison fondamentale est plutôt que seule l'analyse documentaire peut nous conduire à formuler un protocole de questions suffisamment riche pour véritablement interroger l'expérience des enquêteurs. Sans analyse documentaire préalable, on s'en tient à des généralités dont le contenu est peu informatif.

L'enquête criminelle

2

PARTIE 3 - Une taxinomie des enquêtes

La taxinomie des enquêtes que je présenterai s'est révélée progressive- ment au cours de mon examen des dossiers. Un élément de cette typo- logie a été emprunté à des travaux antérieurs, à savoir, la distinction entre l'instigation et l'investigation (Wilson, 1978). Les autres éléments proviennent de mes propres recherches, qui en recoupent d'autres. Je présenterai cette première esquisse d'une taxinomie de l'enquête sous la forme d'un ensemble de distinctions primordiales. - Une première distinction fondamentale a été initialement formulée par James Q. Wilson dans son travail sur l'escouade des stupéfiants du FBI (Wilson, 1978). Cet auteur distingue l'investigation de l'instigation. L'investigation ne présente pas de mystère: c'est l'enquête qui porte sur un crime qui a déjà été commis. L'instigation, par contre, est une démarche plus complexe: elle consiste à fournir à un criminel notoire les conditions de la perpétration d'un crime sous observation policière, afin de recueillir une preuve contre lui. Le prototype de ces opérations est constitué par les achats ou les ventes de drogue contrôlés, où un policier joue le rôle d'un revendeur de drogue ou d'un client. Ce genre d'opération a été étendu à des enquêtes sur la corruption des élus et on y réfère fréquemment sous l'appellation anglo-saxonne d'opération "sting». La difficulté que présente ces opérations est la suivante: elle risque de mettre en tentation et, éventuellement, de pousser à la délin- quance des personnes qui n'auraient pas commis de délit si la police n'avait pas facilité leur passage à l'acte. Il existe une défense légale contre ces opérations de provocation ou "d'empiègement» (entrapment). La police connaît bien cette défense et s'efforce de respecter les normes légales en prenant pour cible des criminels de carrière ou des personnes dont l'intention de commettre un crime est explicite. Cette distinction entre l'investigation et l'instigation s'est révélée tout à fait pertinente pour traiter mes données sur les enquêtes sur les infractions aux lois sur les stupéfiants. Un cas de figure récurrent dans les affaires de dro- gue que j'ai analysées comporte les éléments suivants. D'abord, quel- qu'un se plaint qu'il y a une piquerie dans son voisinage ou que des petits trafiquants de drogue vendent publiquement leurs produits sur la voie publique dans son quartier. La police procède alors à une opéra- tion d'instigation: un policier, très souvent une policière, rencontre un revendeur de drogue accompagné d'au moins un collègue. Ce policier feint d'être un client et un échange de drogue contre argent est effectué 47
devant des témoins policiers; on dévoile alors la supercherie et on pro- cède à l'arrestation du contrevenant. Il arrive également que les policiers portent sur eux un instrument d'écoute pour affermir la preuve. Ce type d'opération "sting» est le plus fréquent. J'en ai observé un autre. Il arrive en effet qu'une personne fréquentant les milieux interlopes se mette à la recherche d'un tueur à gages et qu'il ait la mauvaise fortune de s'ouvrir de son projet à un policier infiltré. Dans ce cas, la police monte une opération complexe dans laquelle un policier prétend être un tueur à gages. Lorsque ce policier est dûment recruté par celui qui veut se débarrasser d'une personne (par exemple son conjoint), on pro- cède à l'arrestation du demandeur, qui est accusé de tentative de meurtre. - Il est une seconde distinction qui joue également un rôle primor- dial. L'enquête policière consiste, selon le sens commun, à s'efforcer de rattacher un crime dont l'auteur est inconnu à la personne qui l'a effec- tivement commis. Cette démarche qui procède du crime vers son auteur présumé est en réalité la plus fréquente (on dira en France qu'on formule une plainte contre "X», dont il faut trouver l'identité). Toutefois, il arrive que l'enquête procède en sens inverse. On soupçonne une personne d'avoir commis un crime (non encore découvert) ou de s'être livrée à un comportement qui pourrait s'avérer criminel (par exemple, l'administra- tion d'une substance qui pourrait être un poison): le but de l'enquête est alors de vérifier si un individu dont le comportement est suspect a effectivement commis un crime. Ce type d'enquête est relativement fré- quent dans la délinquance économique, dans le blanchiment d'argent et dans la corruption des élus ou des fonctionnaires; il constitue le cas de figure le plus fréquent dans la lutte contre la délinquance politiquement motivée, où la prévention revêt une importance déterminante. Dans ces cas, on le voit, la démarche opère en sens inverse: on part d'un auteur présumé et on tente de le rattacher à la commission d'un crime. Cette démarche comporte deux variantes, comme on vient de le suggérer. Dans un premier cas, tant l'auteur que son comportement sont identifiés: il s'agit, par exemple, de vérifier si une transaction commerciale dont tous les auteurs sont connus est légale. Dans un second cas, fréquent dans la lutte contre le crime organisé, seulement l'auteur nous est connu. Par exemple, on sait de façon générale que tel mafieux est impliqué dans le blanchiment d'argent sans avoir jamais pu recueillir une preuve légale- ment contraignante. On fournira donc à ce mafieux les conditions dans lesquelles il pourra perpétrer un crime sous observation. C'est ainsi, par exemple, que la GRC avait ouvert un faux bureau de change à Montréal,

L'enquête criminelle

2 qui facilitait les opérations de blanchiment d'argent. Cette vaste en- quête a conduit à plusieurs mises en accusation. - Je traiterai maintenant du cas de figure le plus classique dans l'en- quête: il s'agit d'une investigation où l'on tente de trouver quel est l'auteur d'un crime déclaré (un homicide, un vol à main armée, etc.). La plupart des enquêtes que j'ai analysées sont de ce type. Cette catégorie d'enquête comporte trois espèces: • L'enquête d'identification. C'est la première partie du processus. Elle con- siste à identifier l'auteur d'un crime. C'est cette seule variante de l'en- quête qui fait l'objet de presque toute la fiction policière. • L'enquête de localisation. Il arrive que le suspect principal d'un crime prenne la fuite ou qu'on ne sache où il se trouve. On effectuera alors une enquête de localisation pour tenter de le retrouver. Les enquêtes de loca- lisation utilisent des moyens qui diffèrent grandement de l'enquête d'identification. • La structuration de la preuve. Une fois que l'auteur d'un crime a été identi- fié, localisé et mis en état d'arrestation, il est traduit devant les tribu- naux. Intervient alors la troisième phase de l'enquête policière: la structuration et la présentation d'une preuve au-delà de tout doute rai- sonnable, qui conduira à la condamnation du suspect ou qui l'amènera à déposer un plaidoyer de culpabilité. On verra par la suite que cette troi- sième phase est fréquemment celle qui requiert le plus de travail de la part des enquêteurs. Elle est la plus méconnue. - L'enquête de concentration. Elle vise à résoudre plusieurs crimes d'un coup. L'enquête de concentration comporte également deux variantes.quotesdbs_dbs49.pdfusesText_49