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Édouard Glissant, soleil de la conscience
Né en 1928 en Martinique, à Sainte-Marie, ce " poète humaniste oeuvrant pour l'avènement d'un monde où tous respecteraient leurs différences. Mais pas un doux rêveur : un homme chaleureusement engagé.
48Textes : Christophe Riedel
Agis dans ton lieu,
pense avec le monde.
Théoricien d'un métissage tissant une "
mondialité
», père des
idées fotes de " créolisation
» et de "
Tout monde
», il lègue une
oeuvre passionnante, dense, complexe. Revendiquant d'ailleurs récemment, non sans humour, un droit à l'opacité. Tant il est vrai que rien n'est simple, sauf à réduire fâcheusement. Plon geons dans ce poème qui est, lui, limpide.
Beauté des routes multicolores
Dans la savane que rumine
L'autan plein de mots à éclore
Je vous mène à votre seuil
Écoutant ruisseler mes tambours
Attendant l'éclat brusque des lames
L'éveil sur l'eau des danseurs
Et des chiens qui entre les jambes regardent
Dans ce bruit de fraternité
La pierre et son lichen ma parole
Juste mais vive demain pour vous
Telle fureur dans la douceur marine,
Je me fais mer où l'enfant va rêver.
De toutes parts, les hommages abondent depuis que, le 3 février
2011, la vie a mené Edouard Glissant, l'un des plus grands
poètes vivants, à son seuil. Le faisant peut-être devenir " mer où l'enfant va rêver
». Gageons qu'il aurait pu y aspirer, car "
c'est d'abord par la poésie que les humains disent ce qu'ils endurent et c'est aussi par elle que la voix des mondes perdure. Il se dé pose dans les réserves du temps, au fond de leurs mystères, des fragments oubliés de la parole des grands poètes, qui sont en core et toujours à découvrir.
» C'est ainsi qu'il s'exprimait à New
York en 2008 pour commenter la disparition d'Aimé Césaire, un autre grand poète, son aîné de quinze ans, qui fut son pro fesseur au lycée Schoelcher de Fort-de-France, en Martinique.
Une poétique politique
Roman, poésie, théâtre, philosophie ou arts plastiques sont autant de territoires traversés par ce défricheur à l'infatigable curiosité. Dans les sédiments du temps, dans la mémoire des hommes, dans le chant muet des archipels, son oeuvre, une poé tique inscrite dans le champ du politique, restera inclassable. Édouard Glissant est à l'origine des concepts d'antillanité , de créolisation et de Tout-monde, idéaux pour retracer ici son par- cours.
A comme Antillanité
Poète, romancier, dramaturge, philosophe et idéaliste, il était aussi aux antipodes d'un doux rêveur coupé du réel et de l' ac tion ! Son enfance, dans une Martinique rurale où la domina tion des descendants des maîtres blancs (Békés) sur ceux des esclaves et des migrants indiens demeurait une réalité dou loureuse et vivace, a été marquée par des manifestations de l'injustice et du racisme. Très jeune, il s'est aussi interrogé sur le statut de son île Natale, une colonie - la départementalisa tion n'aura lieu qu'en 1946 - cantonnée à la périphé rie de sa Métropole, la France. Ces réalités déterminent son engagement
politique. Dans le Paris d'après-guerre, quand s'enclenche le processus de décolonisation, devenu étudiant en ethnographie au Musée de l'Homme, en histoire et en philosophie à la Sor-
bonne, il rejoint le camp anticolonialiste. En 1959, il fonde avec le guadeloupéen Paul Niger le Front an tillo-guyanais, un mouvement indépendantiste. Il est signataire en 1960 du "
Manifeste des 121
» conduit par Jean-Paul Sartre
pour soutenir l'insoumission en Algérie. Un engagement qui lui vaudra d'être interdit de séjour sur son île natale, assigné
à rési
dence dans l'Hexagone de 1959 à 1965 pour " séparatisme De retour en Martinique en 1965, il cofonde l'Institut martini quais d'études. Se consacrant de plus en plus à la réflexi on et à l'écriture, il livre dans son essai Le Discours antillais, pa ru en 1981, les raisons profondes de son engagement politique. Au-delà du discours anticolonialiste et indépendantiste (qu'il délaissera par la suite au profit d'une posture d'écrivain mili tant), y émerge l'idée d'" antillanité
». Elle repose sur la notion
d'une identité dite rhizome, c'est-à-dire fondée sur la dive rsité et l'interpénétration, ouverte sur le monde et la mise en relation des cultures, plutôt que sur une identité racine, qu'il ressent comme un enfermement, donc sans issue.
C comme Créolisation
Très tôt, il a su mettre en lumière le formidable processus de métissage - culturel, ethnique, linguistique - dans lequel l'humanité est engagée depuis les années soixante-dix, le no m mant créolisation. Un processus qui a connu plusieurs périodes d'accélération, dont celles que nous vivons aujourd'hui, grâ ce à la démocratisation des transports et des moyens de commu nication.
T comme Tout-Monde
Il voulait substituer aux concepts de " globalisation » et de " mondialisation », celui de " mondialité
» qui placerait les
hommes, plutôt que l'économie, au centre du monde actuel, métissé, interconnecté et interdépendant qu'il appelle le " Tout- Monde ». À cette fin, il a le plaisir d'inaugurer en 2007, ap rès bien des efforts en ce sens, un Institut du Tout-monde. Son objectif ? " Contribuer à diffuser l'extraordinaire diversité des imaginaires des peuples ». Glissant, parti de Martinique, est un produit du Tout Monde. Une extraction qu'il utilise pour réen chanter les origines et dire sa vision internationaliste : " Mettre en apposition les diverses conceptions des humanités - ce que j'appelle une Poétique de la relation - serait beaucoup plus pro fitable à tous. » Ou comment exister non pas à partir de ses racines, mais de ses liens, en une sorte de métissage orienté vers l'autre. Il s'agit de tisser et d'attiser les possibles en une incantation poétique engagée. Semblable en cela à de nombreux autres poètes, il ressent le monde, qu'il qualifie de " divers », comme une toi le magique où la "
Philosophie de la relation
» est le lien primor-
dial de l'humanité.
Négritude et Créolité
Il a aussi transcendé la notion de Négritude, popularisée par Aimé Césaire, d'une identité antillaise renvoyant à une Afrique des origines. Une question de génération. Il lui préférait e n effet une identité multiple, alliant les divers héritages légué s par les migrants successifs (Amérindiens, Européens, Africains,
Indiens, Chinois, Syro-libanais). hommage
515051
Une filiation que ses héritiers littéraires, tenants de la Créolité, au premier rang desquels les romanciers Raphaël Confiant et Patrick Chamoiseau, revendiquent. Ce dernier, lors de la veillée culturelle organisée en son honneur au Diamant, le 8 février, lui a rendu un émouvant hommage en lisant une "
L'affectueuse révérence, Récitation pour
Edouard Glissant,
» Outre les ministres de la Culture et de
l'Outre-Mer, 3000 Martiniquais y ont assisté avec ferveur, dans la grande tradition des veillées antillaises.
L'intraitable beauté du monde
Directeur du Courrier de l'Unesco de 1982 à 1988, puis professeur de littérature à l'Université d'Etat de Louisi ane et à la City University de New York, créateur d'une oeuvre étudiée à travers le monde, il a mené jusqu'au bout son combat contre l'intolérance et le racisme. En écrivant en
2007, avec Patrick Chamoiseau, le manifeste "
Quand les
murs tombent. L'identité nationale hors-la-loi ? » (éditions Galaade & Institut du Tout-Monde). En 2009, il apporte son soutien au mouvement social en Guadeloupe avec d'autres intellectuels antillais, par le biais du Manifeste pour les produits de haute nécessité (même éditeur). Et en
2010, toujours avec Patrick Chamoiseau, il publie L'intrai
table beauté du monde. Sous ce superbe titre, une lettre ouverte s'adressant à Barack Obama, premier Afro-améri cain à accéder à la Maison-Blanche. Elle appelle "
à une
réflexion entre poétique et politique sur ce que pourrait
être demain son action. »
L'ampleur d'une pensée
La journaliste Audrey Pulvar, dont il était l'oncle par al liance, a déclaré (à l'AFP) : "
Je suis profondément touchée
par sa mort, d'autant plus qu'il a été un compagnon de lutte de mon père, Marc Pulvar. Ils avaient longtemps com battu ensemble pour l'éveil des consciences.
» Notamment
en cofondant en 1967 - l'Institut martiniquais d'études de Fort-de-France, ville qui ne comptait alors que trois lycées, un nombre insuffisant. Soulignant " sa hauteur de vue et l'ampleur de sa pensée
», elle ajoute
Il avait été fata
lement dans l'ombre d'Aimé Césaire pendant des années. Du moins en métropole, car à l'étranger, il était connu et reconnu, notamment aux Etats-Unis, où la littérature cari béenne est très appréciée. En métropole, il était parf ois considéré comme un écrivain martiniquais écrivant pour des Martiniquais
Or, se souvient-elle, "
Edouard me
racontait souvent comment au Japon, dans les pays scandi naves, il faisait salle comble, à sa grande surprise.
». Ceci
n'a rien d'étonnant, tant ses écrits auscultaient la baroque palpitation du monde. À travers la profondeur - parfois déroutante - d'une de ses paroles : " Rien n'est vrai, tout est vivant. » * Extrait d'Un champ d'îles, éditions du Seuil, 1965
L'eau d'ici
L'eau qui tout simplement coule, dlo koulé dlo, l'eau qui s'évapore, l'eau de minuit, l'eau dans les mains offerte, l'eau des morts de soif, l'eau de la toi lette de nos défunts, l'eau qui ne stagne jamais, l'eau tarie de la rivière Lézarde, l'eau de la rosée du soir, l'eau que nous buvons en cercle, l'eau à vau l'eau, l'eau qui tout bas frissonne, l'eau de boue, l'eau des peuples sans eau, dlo monté monn, l'eau des sables rouges, l'eau douce mêlée d'eau de mer aux embou chures des fleuves, l'eau des égouts du monde, l'eau de ceux dont la gorge est en feu et dont la parole s'efface ; l'eau des 100 000 morts.
Extrait des
Carnets inédits
d'Edouard Glissant (New
York, mai 2008)
L'ampleur d'une pensée
La journaliste Audrey Pulvar, dont il était l'oncle par alliance, a déclaré (à l'AFP) : "
Je suis profon
dément touchée par sa mort, d'autant plus qu'il a été un compagnon de lutte de mon père, Marc Pul var. Ils avaient longtemps combattu ensemble pour l'éveil des consciences.
» Notamment en cofondant
en 1967 - l'Institut martiniquais d'études de Fort-de- France, ville qui ne comptait alors que trois lycées, un nombre insuffisant. Soulignant " sa hauteur de vue et l'ampleur de sa pensée
», elle ajoute
Il avait été
fatalement dans l'ombre d'Aimé Césaire pendant des années. Du moins en métropole, car à l'étranger, il était connu et reconnu, notamment aux Etats-Unis, où la littérature caribéenne est très appréciée. En mé tropole, il était parfois considéré comme un écrivain martiniquais écrivant pour des Martiniquais
». Or, se
souvient-elle, "
Edouard me racontait souvent com
ment au Japon, dans les pays scandinaves, il faisait salle comble, à sa grande surprise.
». Ceci n'a rien
d'étonnant, tant ses écrits auscultaient la baroque palpitation du monde. À travers la profondeur - par- fois déroutante - d'une de ses paroles : " Rien n'est vrai, tout est vivant. » * Extrait d'Un champ d'îles, éditions du Seuil, 1965
Son credo
Je peux changer en échangeant
avec l'autre, sans me perdre ni me dénaturer.
Récitation Pour Ed
l'affectueuse révérence Cher Maître, la Lézarde du pays réel a traversé la contré e des rocailles, notre vieille vallée des larmes, notre allée des soupirs, elle a connu sans rémission le delta des ravages, l'océan des douleurs, puis de l'autre connaissance du pays des sans chapeau... Mais la lézarde du pays rêvé n'a jamais quitté les mornes, elle n'a jamais cessé d'arpenter les hauteurs où l'ombre et la lumière dont d'une même intention, et jamais déserté la vigilance des cimes -- c'est par cette exigence qu'il lui a été donné d'irriguer le pays, en fondocs et racines, de fréquenter le long secret des acacias, l'éternité des très vieux acomat s, les soifs de la rocaille du côté des Salines, et cette angoisse qui sert d'humus aux bois sans chaînes des nègres marrons. Et c'est au vif de cette topographie devenue éminente, ces cannes à sucre et ces vieilles cases, la ruine des grandes usines, squelettes de Bitation, qu'elle a tramé une claire vision du monde, qu'elle a ramené le monde à l'alchimie du lieu, qu'elle a versé le monde aux circulations souterraines de l'igname et des bleutés de la dachine, si bien que pas une seule poussière de ce petit pays, pas une maille de ses misères ou de ses tragédies, n'a pu nourrir le moindre enfer- mement, un quelconque renoncement, toujours l'espérance la plus haute, toujours le soleil même fragile de la plus haute conscience, et c'est parce que son eau était de poésie, ses doums et ses bassins, de poésie toute pure, qu'elle a su faire vision, dégager des futurs, confier aux pupilles en alerte le scintillements des avenirs. La lézarde a aussi enfanté des poètes - t'a distingué poète de Sainte Marie à Lamentin, des Salines au Diamant, elle a laissé des souvenirs et toutes ces traces dont la fragilité forge la résistance, et dont la brièveté éternise la durée, je vois, je vois l'émotion dans les hauteurs de Bezaudin là où la case o ri ginelle a disparu, je vois cet amour du Lamentin au coeur des flèches violettes, dans les panaches maintenant invisibles des longues cheminées, je vois cette écoute attentive des usines (jadis féroces) avalées par la rouille, je vois aussi la plage ardente qu'il fallait chaque matin déchiffrer, et la confession du sable noir qui filtrait des volcans oubliés pour renverser la blancheur des coraux, je vois les bains avec la chaussure bleue, et le punch à préserver des mouches, le carême qui asphyxie le vieux ventilateur, le poisson rouge à écailler pour le bon court-bouillon, et j'entends encore cette célébration renouvelée du tinen et du djol polius, cette justice tou jours rendue aux bonda-man-jacques jaunes, et les colères, les mauvaises foi, et l'amitié, et les indignations, et encore les colères, et toujours l'amitié, et surtout cette tendresse exigeante, flagellante et toute pleine d'oxygène, qui forçait le gibier à conserver le cap, sans une flatterie ni un seul compli ment, avec juste la manière du commandeur sublime. Maintenant, cher Maître, j'ai l'impression qu'un acomat de cent mille ans s'est effondré, qu'à Sainte-Marie, qu'a u Lamentin, et qu'ici au Diamant, et même dans chaque par- celle de cette fixe tragédie qu'est le pays réel, un pan de paysage s'est laissé envahir par cette brume des déroutes que craignent les pêcheurs, et qu'il y a une solitude irrémé diable qui accable le guerrier -, mais je sais aussi que wè e crivain majeur de la littérature caribéenne, Patrick Chamoiseau, n
é en
1953 à Fort-de-France, est aussi un compagnon de route et d'écr
iture d' e douard g lissant, proche de la pensée de la créolisation élaborée par ce dernier. Comme lui, il aime adosser le politique au poétique, ce qu'ils o nt fait dans trois pamphlets publiés en collaboration : Quand les murs t ombent g alaade, 2007) consacré à la question de l'identité national e, L'intraitable beauté du monde - a dresse à Barack o bama, relatif à l'élection du premierquotesdbs_dbs12.pdfusesText_18