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Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de FranceLes documents du PCMLM
Table des matières
1. Introduction......................................................................................................................................2
2. Jan van Eyck et le réalisme face à l'âge gothique.............................................................................3
3. Vers la complexité et l'esprit de synthèse.........................................................................................4
4. Saint Luc dessinant la Vierge, La Vierge du chancelier Rolin.........................................................4
5. La Descente de Croix, Le changeur et sa femme.............................................................................5
6. Pieter Aertsen....................................................................................................................................6
7. Pieter Brueghel.................................................................................................................................7
8. Les Proverbes flamands, Les Jeux d'enfants....................................................................................8
9. Jheronimus Bosch et la morale.......................................................................................................14
10. Erasme et l'Eloge de la folie.........................................................................................................16
11. Karl Marx sur la Hollande comme nation capitaliste...................................................................20
12. l'Utopie commence à Anvers........................................................................................................22
13. Anvers, coeur des Pays-Bas et du capitalisme..............................................................................23
14. Rembrandt ou le triomphe de la bourgeoisie................................................................................25
1. Introduction
La peinture lflamande représente un art d'une
très grande valeur historique. Elle est le fruit du mouvement qui donne naissance à la bourgeoisie ; elle est un aboutissement culturel et idéologique de grande importance. C'est en efffet dans ce qui sera l'Italie, en Flandre et dans le Brabant, ainsi qu'en Bohême, que se développe pour la première fois un tissu urbain très prononcé. Cependant, l'Italie restait marquée par le féodalisme et surtout le poids de l'Église, tandis que la Bohême, une grande puissance européenne alors, basculait dans une guerre civile d'une importance historique capitale (la " tempête hussite »). Telle n'était pas la situation en Hollande, car la peinture lflamande est en fait la peinture hollandaise. Au XVe siècle en efffet, ce qui est la Belgique aujourd'hui était une partie de la Hollande ; le développement capitaliste de la Hollande, sous la bannière protestante, amena une interventioncatholique et réactionnaire. En 1579, deux blocs existaient : la confédération d'Arras au sud, l'Union d'Utrecht au nord.La partie maintenant son indépendance devint
la Hollande, capitaliste et puissance maritime, alors que la partie reconquise par le duc d'Albe, Ferdinand Alvare de Tolède, représentant du catholicisme et envoyé par l'empereur PhilippeII d'Espagne, suivit une voie indépendante du
reste de la Hollande et devint la Belgique.Au XVe siècle, cependant, la coupure n'est pas
encore réalisée, et c'est le sud de la Hollande qui est le plus développé, avec Tournai, Gand, Bruxelles, Louvain, ainsi que Bruges qui est alors le plus grand port international. La " découverte » de l'Amérique déplaça le poids du capitalisme, faisant d'Anvers la plaque tournante de la ifinance européenne et deséchanges entre le nord et le sud de l'Europe.
L'historien italien Lodovico Guicciardini (né àFlorence en 1521 et mort à Anvers en 1589),
neveu de l'illustre historien italien Francesco Guicciardini et auteur du célèbre Storia d'Italia, a décrit cette transformation, dans un ouvrage22222222La peinture flamande
devenu célèbre.Dans la Descrittione di Lodovico Guicciardini
patritio ifiorentino di tutti i Paesi Bassi altrimenti detti Germania inferiore (Description de l'ensemble des Pays-Bas augmentée de la Germanie inférieure), publié en 1567, il parle de la présence à Anvers de pas moins de 124 orfèvres et de 300 peintres et sculpteurs. Parmi les très grands artistes, on retrouve les peintres Jan van Eyck, le Maître de Flémalle,Konrad Witz, Lukas Moser.
Il ne faut, cependant, pas opposer de manière
unilatérale la peinture lflamande et sa culture, à l'âge gothique . L'âge gothique marque l'avènement de la royauté comme système organisé et du clergé comme force idéologique centrale. La manière dont un pays sort de cet âge gothique est déterminée par les rapports entre les classes. Voici une illustration avec un tableau du Maître de Flémalle, dont l'identité est inconnue. Il s'agit de du Triptyque de Mérode ou Triptyque de l'Annonciation. [image page 3, document annexe]Les commentateurs bourgeois n'ont dans cette
oeuvre remarqué que les allusions religieuses ; on a par exemple tout à droite, le charpentier Joseph qui a construit une ratière symbolisant le Christ piégeant et défaisant le diable, une métaphore utilisée par trois fois par saintAugustin.
Or, du point de vue matérialiste historique, ce qui nous intéresse surtout est le réalisme de cette oeuvre. Il ne s'agit pas d'une reproduction métaphysique, malgré l'ange ; ce qui compte c'est la profusion de détails, détails empruntés à la vie réelle de l'époque du peintre. Il y a là la grande contradiction incomprise parles commentateurs bourgeois : si la scène sedéroule 1500 ans plus tôt, pourquoi les peintres
la transposent-ils toujours dans leur propre contexte ?Ces peintres qui transposent toujours dans leur
propre pays une réalité palestinienne datant de1500 ans plus tôt par rapport à eux, ont-ils été
idiots, ou bien la religion n'a-t-elle été qu'un vecteur ? La réponse matérialiste historique est la suivante : la religion n'est ici qu'un outil à l'expression du réalisme de la bourgeoisie naissante.La peinture lflamande est religieuse en
apparence, la réalité y transparaît pourtant déjà, et le mouvement historique de cette peinture le prouve.2. Jan van Eyck et le réalisme face à
l'âge gothique Il suiÌifiÌit de regarder les deux grands chefs d'oeuvre de Jan van Eyck (vers 1390 - 1441) pour comprendre le double caractère de la peinture lflamande, comme sortie de l'âge gothique et aiÌifiÌirmation du réalisme bourgeois propre à l'humanisme. Le tableau de 1434 intitulé Les Époux Arnolifini est un classique très connu ; si les interprétations ne manquent pas et conifinent au ridicule, du point de vue matérialiste historique il suiÌifiÌit amplement de voir le réalisme de l'oeuvre. [image page 3, document annexe]Non seulement les détails sont innombrables,
jusqu'au miroir représentant le peintre et le chien faisant partie de la famille, la peinture est minutieuse, mais également la classe représentée est la bourgeoisie.3Les documents du PCMLM
Le fait que l'homme tienne la main droite de sa
femme avec sa propre main gauche témoigne d'un mariage dit " morganatique », où la femme ne vient pas de la même haute classe sociale.On a l'apparition d'une classe sociale
dominante, fondée sur le choix individuel propre au capitalisme, et d'ailleurs le peintre a signé l'oeuvre " Johannes de eyck fuit hic » (Jan Van Eyck fut ici), ce qui n'était pas encore la norme. [image page 3, document annexe] [image page 4, document annexe] Jan Van Eyck est ainsi le peintre du patriciat, de la bourgeoisie urbaine s'aiÌifiÌirmant avec les débuts du capitalisme.Et comme on est précisément ici dans une
période de transition, l'autre grand chef d'oeuvre de Van Eyck est un travail commun avec son frère Hubert (celui-ci ayant initialement commencé l'oeuvre).L'Adoration de l'Agneau mystique ou Autel
de Gand (en néerlandais : Het Lam Gods, littéralement L'Agneau de Dieu) est tout à fait dans l'esprit gothique.Il s'agit d'un polyptyque , c'est-à-dire d'un
ensemble de panneaux peints, parfois articulé, comme c'est le cas ici ; le voici ouvert et fermé. [image page 4, document annexe] [image page 4, document annexe]On a ici le chef d'oeuvre de l'âge gothique,
c'est-à-dire donc sa ifin : à partir du moment où on atteint une telle précision dans la représentation, un caractère tellement multiple, on n'est déjà plus dans la féodalité. [image page 5, document annexe]La peinture lflamande arrive à passer dans le camp du réalisme, dépassant ici la peinture de la Renaissance italienne. [image page 5, document annexe] [image page 5, document annexe] [image page 5, document annexe]3. Vers la complexité et l'esprit de
synthèseLe réalisme de la peinture lflamande est un
phénomène de classe. Voici le retable de la Madeleine, de l'allemand Lukas Moser (vers1390 - après 1434) : on y voit comment la mise
en perspective témoigne déjà d'une volonté de complexité, de recherche de la sophistication, c'est-à-dire de l'esprit de synthèse.C'est cela qui fait de cette oeuvre un chef
d'oeuvre. [image page 6, document annexe]Il va de soi que c'est la même chose que l'on
retrouve chez l'allemand Albrecht Dürer (1471 -1528), dont voici le Retable Paumgartner.
[image page 6, document annexe]Chez Albrecht Dürer, on voit pareillement
comment la technique est au service du réalisme. La culture du patriciat - la haute bourgeoisie urbaine - et de la bourgeoisie en général permet de s'afffranchir non pas tant du thème religieux que de l'idéologie religieuse : on a déjà la démarche psychologique " individuelle », qui confère d'ailleurs à certaines de ces44444444La peinture flamande
oeuvres une grande " modernité ». L'idéologie stérile du clergé de l'âge gothique s'éteint inévitablement devant la complexité aiÌifiÌirmée par l'humanisme, comme courant historique général. [image page 7, document annexe] [image page 7, document annexe] [image page 8, document annexe] [image page 8, document annexe] [image page 8, document annexe] [image page 8, document annexe]Le paradoxe du XVe siècle, c'est qu'il porte
en lui à la fois un gothique très développé, et déjà les bases du réalisme. Voici par exemple L'Assomption, d'un peintre de Bruges qui a été nommé par la suite Maître de la Légende de sainte Lucie en raison de la méconnaissance de son identité. On a là une très grande complexité, chaque ange ayant pratiquement sa personnalité ; il n'y a plus seulement un appel religieux, mais déjà quelque chose de personnel et de dynamique. On est là dans une démarche tendant à la complexité du réalisme. [image page 9, document annexe]La Lamentation, par Geertgen tot Sint Jans
(vers 1465 - vers 1495), est un autre exemple très parlant de la quête de la complexité, aux dépens de " l'unité » apparente du gothique. Le catholicisme, comme idéologie de la réaction aristocratique, prendra précisément cet aspect en compte pour produire, en réaction, leBaroque.[image page 10, document annexe]
4. Saint Luc dessinant la Vierge, La
Vierge du chancelier Rolin
Saint Luc dessinant la Vierge est un tableau
peint vers 1435-1440 par Rogier van derWeyden (1399/1400-1464). C'est une oeuvre
importante de la peinture lflamande, car elle relflète une tendance très importante de la période. [image page 11, document annexe]On y voit en efffet Saint Luc ; or, celui-ci est
le saint patron des arts. Le tableau a d'ailleurs été fait pour la guilde de Saint Luc de la ville deBruxelles, qui était la guilde des artistes.
Sur le tableau, Saint Luc est lui-même en
train de dessiner, ce qui signiifie qu'il est possible de représenter le divin de manière ifidèle.En apparence, c'est ainsi une oeuvre
simplement religieuse. Une sculpture de la chute d'Adam et Eve se situe notamment sur l'accoudoir ; on voit aussi la Vierge accroupie sur les marches du trône par esprit d'humilité. [image page 11, document annexe]A cela s'ajoute le jardin fermé en arrière-
plan, un hortus conclusus, qui est un symbole de la pureté de la vierge. On a même, caché, un boeuf allongé dans la pièce de droite (il symbolise Saint Luc). [image page 11, document annexe]5Les documents du PCMLM
Ce qu'on voit est d'ailleurs très proche d'une
autre grande oeuvre : La Vierge du chancelierRolin, peint vers 1435 par Jan van Eyck (1390-
1441).
[image page 12, document annexe]On a la même dimension religieuse,
cependant en réalité, ces deux oeuvres sont pourtant des aiÌifiÌirmations réalistes. Ce qu'on voit à l'arrière-plan, en efffet, c'est la ville. A chaque fois, deux personnages regardent d'ailleurs vers la ville, depuis le hortus conclusus. [image page 12, document annexe]On a donc la reconnaissance de la ville et de
la représentation ifidèle, réaliste - on a l'aiÌifiÌirmation de la bourgeoisie.Car ce qui compte notamment dans le
tableau Saint Luc dessinant la Vierge, c'est la valorisation de la représentation. On considère même d'ailleurs que le visage de Saint Luc a les traits de Rogier van der Weyden.Cela signiifie que l'art peut représenter des
choses importantes, alors qu'auparavant l'art était soumis à des représentations de ce qui était religieux. C'est une rupture très importante, historique ; c'est l'aiÌifiÌirmation du réalisme, car c'est la méthode qui prime, et non plus ce qui est représenté.C'était l'ouverture de toute une époque. Et
de fait, la représentation est réaliste, et laVierge Marie donnant le sein est tout à fait
réaliste, elle n'a rien de mystique, de transcendant. Les détails des habits et de la pièce témoignent également du réalisme.On voit donc comment la thématique
religieuse est absorbée par le réalisme, commecourant. La bourgeoisie aiÌifiÌirme le lien avec la
prise sur le réel.5. La Descente de Croix, Le changeur et
sa femme La Descente de Croix est un autre chef d'oeuvre réaliste de Rogier van der Weyden, le peintre de Saint Luc dessinant la Vierge. C'est une commande la corporation des arbalétriers deLouvain.
[image page 13, document annexe] Ce tableau est époustoulflant de réalisme ; laVierge Marie est évanouie, alors que tout le
monde pleure : on a là une reconnaissance de la sensation éprouvée par les individus, mais de manière collective. [image page 13, document annexe] [image page 14, document annexe] Les traits psychologiques sont ici présentés de manière impeccable ; le réalisme s'aiÌifiÌirme dans toute sa splendeur. Rien que les mains témoignent du relflet de la réalité, avec une très grande concision dans leur représentation. [image page 14, document annexe]Le réalisme de l'oeuvre n'est pas du tout
conforme à l'esprit catholique, pour qui ce qui compte n'est pas la représentation, mais le représenté au sens religieux. Or, ici, on a des sentiments humains universels qui sont aiÌifiÌirmés. Le christianisme touche ici à sa contradiction66666666La peinture flamande
essentielle : se voulant universel, mais s'aiÌifiÌirmant comme religion, et donc liée à la féodalité. Ainsi, ce tableau de 2mètres 30 de hauteur et 3mètres 20 de largeur est conforme à l'humanisme, pas à la religion : il porte en lui le réalisme.La formidable Descente de Croix est, il est
vrai, encore attaché à la forme religieuse. Mais elle pave la voie au réalisme dans le sens typique. L'oeuvre magistrale est bien entendu Le changeur et sa femme, de Quinten Massys. [image page 15, document annexe] On a là une représentation ifidèle, typique, de la classe sociale montante, celle de la bourgeoisie naissante, avec de visible dans le miroir une fenêtre avec l'inévitable befffroi, qui relève de la culture des Pays-Bas (soit les actuelles Hollande et Belgique, avec une partie du Nord de la France). [image page 15, document annexe] Ce tableau est le symbole du capitalisme naissant. Une classe sociale est représentée, de manière typique. Il est d'ailleurs signiificatif que des interprètes bourgeois opposent la ifigure de l'homme à celle de la femme. Celui-ci serait symbole d'avarice, soi-disant, alors qu'elle représenterait la religion : voilà une lecture parfaitement catholique (avec son anti- capitalisme romantique), mais nullement correcte.La femme, en efffet, lit un Livre d'heures, un
ouvrage religieux pour les laïcs : c'est déjà l'aiÌifiÌirmation protestante de la possibilité pour tout un chacun de mener une vie correcte enétudiant soi-même la religion.
On a là un monde de représenté qui esttotalement indépendant de l'Église catholique :
on est passé de la représentation réaliste d'un symbole religieux, à l'aiÌifiÌirmation réaliste du monde bourgeois.