LA PÉRIODE DE FORMATION HUMAINE
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Règlement intérieur
15 juin 2017 TITRE 2 : RÈGLES DE VIE À L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE . ... ARTICLE 31 : INTRODUCTION DE SUBSTANCE OU DE MATÉRIEL .
LHYPERBOLE ET LA LITOTE DANS LE ROMAN DE F. RABELAIS
France François Rabelais publie ses romans Gargantua (1532) et Son pouvoir s'exerce sur tous les domaines de la vie matérielle (l'alimentation
Œuvres sur papier
2 mars 2018 Ainsi les Scènes de la vie de Gargantua que Merson fait réaliser en verre en 1882
Concours PC - Physique Nous réunissons dans ce document 60
On note vM/O la vitesse du point matériel M (le bout 3) Si on met une rotation initiale ?i = vi/ri o`u vi est la vitesse orthoradiale initiale sur le.
THESE POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR DE l
Le spirituel et le matériel le savant et le populaire dans le Prologue de Gargantua. 60. VI. LE PROVERBIALISME DES « BIEN YVRES ». 66. DEUXIEME PARTIE.
UN GARGANTUA DAPRÈS RABELAIS Seul en scène
de la vie ! Lui qui se moque de nos propres de son « Gargantua » livre premier digne ... casseroles
RABELAIS GARGANTUA
https://sc96e6fa741e10733.jimcontent.com/download/version/1387200984/module/8791523049/name/RABELAIS%2520COURS%25202012.pdf
POUR COMPRENDRE GARGANTUA 1534
Puis il publie La vie très horrifique du grand Gargantua
Sur les traces de Gargantua
1534 : “La vie très horrifique du grand Gargantua”. Le livre est avant matériel tandis que la légende s'appuie sur les traditions
UNIVERSITE FRANCOIS RABELAIS
TOURS Ecole Doctorale : sciences de l'homme et de la sociétéAnnée Universitaire : 2007-2008
THESE POUR OBTENIR LE GRADE DE
DOCTEUR DE l'UNIVERSITE DE TOURS
Discipline : Lettres modernes
présentée et soutenue publiquement par :Proshina Maria
Le 12.03.2008
TITRE Consistance matérielle de la langue chez Rabelais et MontaigneDirecteur de thèse :
Demonet Marie-Luce
Co-directeur de thèse :
Giacone Franco
JURY :
Nom Prénom Qualité Lieu d'exerciceAlmanza Gabriella Professeur Université de Macerata
Céard Jean Professeur émérite Paris X-Nanterre
Cecchetti Dario Professeur Université de Turin
Huchon Mireille Professeur Sorbonne-Paris IV
2Table des matières
PREMIERE PARTIE 7
LE LANGAGE PROVERBIAL CHEZ RABELAIS 7
I. LE VIN DANS LES PROVERBES ET DANS LES EXPRESSIONS FIGEES 91. La culture populaire et la dimension utopique de l'abondance 9
2. Martiner, boire à tyre larigot, boire à tout guez comme un cheval de promoteur, tirer au chevrotin 12
3. Estre poyvré 16
4. Adieu paniers, vendanges sont faictes 18
5. Le sens propre et le sens figuré dans les expressions la langue me pelle et le vin à une aureille 20
II. LA NOURRITURE DANS LES PROVERBES ET DANS LES EXPRESSIONSFIGEES 24
1. Le matériau proverbial comme moyen de création d'épisodes 24
2. L'abondance alimentaire dans les expressions proverbiales 28
3. Le domaine de la nourriture et le domaine du sexe 34
III. LA PORTEE CRITIQUE DU DISCOURS PROVERBIAL 381. Le régime alimentaire des moines 38
2. La satire de la culture scolastique 40
3. La critique du mauvais usage de la langue française, l'épisode de l'écolier limousin 44
IV. LE TRANSFERT DU LANGAGE DANS LE REGISTRE MATERIEL 471. L'acte verbal dans les expressions proverbiales 47
2. Les propriétés sensibles du langage dans l'épisode des paroles gelées 53
V. L'ABSORPTION DU SAVOIR 56
1. Le transfert du livre dans le domaine alimentaire 56
2. Le spirituel et le matériel, le savant et le populaire dans le Prologue de Gargantua 60
VI. LE PROVERBIALISME DES " BIEN YVRES » 66
DEUXIEME PARTIE 75
LE LANGAGE PROVERBIAL CHEZ MONTAIGNE 75
3I. LA RECHERCHE DE LA SIMPLICITE DU STYLE 77
1. Le style comme reflet de " la forme naïve » 77
2. Les modèles de naïveté : les Cannibales, Socrate et les paysans 81
II. LA VALORISATION DE L'ART POPULAIRE 87
III. LA MATIERE PROVERBIALE ET LA MATIERE ALIMENTAIRE 951. La concrétisation du discours abstrait 95
2. L'assimilation du domaine littéraire au domaine sensoriel 103
IV. LA SEXUALITE 106
V. LE CORPS DANS LE MATERIAU PROVERBIAL 116
1. Les parties du corps 116
2. Le toucher 122
3. Les images vestimentaires 125
TROISIEME PARTIE 131
LES REGIONALISMES CHEZ RABELAIS 131
I. LA CONTRIBUTION DES REGIONALISMES A L'EFFET REALISTE DANSGARGANTUA 127
1. La concentration des termes dialectaux dans le chapitre 25 de Gargantua 127
2. Frère Jean et le sac du clos de Seuilly 138
3. L'enracinement du royaume de Grandgousier dans le Chinonais 144
II. L'USAGE DES DIALECTALISMES COMME MOYEN DE CARACTERISATION DESPERSONNAGES 150
1. Les personnages et leurs origines 150
2. La Sibylle de Panzoust : entre sorcière populaire et vaticinatrice de l'Antiquité 154
3. La fonction des régionalismes dans la création des Andouilles, personnages fictionnels 158
III. LES DIFFERENTES FONCTIONS DES REGIONALISMES DANS L'OEUVRERABELAISIENNE 163
1. Erotica verba 163
a. Dimension métaphorique des régionalismes 163b. Le relâchement du lien entre le qualifié et le qualifiant dans le contreblason du couillon 168
2. Les jeux de mots et l'arbitraire du signe 171
4IV. LES TERMES CULINAIRES 175
1. L'abondance alimentaire et la profusion des régionalismes 175
2. Les régionalismes autour du vin 180
QUATRIEME PARTIE 185
LES REGIONALISMES CHEZ MONTAIGNE 185
I. LES REGIONALISMES AU SERVICE DE LA PEINTURE DU MOI 1871. Tout le monde me reconnaît en mon livre, et mon livre en moi 187
2. La fragmentation du moi et la définition du style vagabond des Essais 192
3. La pratique de l'addition et la nouvelle terminologie 197
II. L'ATTITUDE CONTRADICTOIRE DE MONTAIGNE A L'EGARD DUPERIGOURDIN 201
1. Le double malaise de l'auteur : le périgourdin " brode » et le français " sans façon » 201
2. Le recours au lexique dialectal du Sud-Ouest de la France 206
III. L'ELOGE DU GASCON 212
1. Le langage mâle et militaire 212
2. Le gascon signifiant 224
IV. LA DIMENSION CORPORELLE DANS LES ESSAIS 232
CINQUIEME PARTIE 241
LA LANGUE ET LA MATIERE DANS L'OEUVRE DE RABELAIS 241I. L'UNION DE L'ESPRIT ET DE LA MATIERE 243
1. L'interaction de l'âme et du corps 243
2. Le banquet au large de Chaneph et la puissance libératrice du vin et de la nourriture 250
II. LE PARADIGME SYMPOSIAQUE SUR LE PLAN DU RECIT ET DE SATRANSMISSION 255
1. Le fonctionnement des banquets dans l'oeuvre rabelaisienne 255
2. Le narrateur et le narrataire comme convives-interlocuteurs 262
III. LE TRANSFERT DE L'ENSEMBLE DE L'OPERATION LITTERAIRE DANS LEDOMAINE MATERIEL 269
51. L'inspiration bachique 269
2. Le vin comme métaphore de la fécondité inépuisable de l'oeuvre 276
3. Le livre comme produit de consommation 280
IV. LA MISE EN VALEUR DE L'UTILITE PRATIQUE DE L'OEUVRE 2841. Le discours du présentateur-bonimenteur dans les prologues du Pantagruel et du Gargantua 284
2. La fiction littéraire comme une action curative à distance 289
V. LE ROLE PREPONDERANT DU THEME ALIMENTAIRE CHEZ RABELAIS ETFOLENGO 295
1. La matière verbale et la matière alimentaire 295
2. La fusion des registres du " haut » et du " bas » 302
3. La vanité de la fiction 307
SIXIEME PARTIE 317
LE LANGAGE DU CORPS ET SUR LE CORPS CHEZ MONTAIGNE 317I. LA NOTION DE PLAISIR DANS LES ESSAIS 319
1. La typologie des plaisirs 319
2. L'impératif du plaisir 327
II. L'ENTRELACEMENT DES METS ET DES MOTS AU NOM DE L'UNITE DE LAPERSONNE 335
1. La conversation à table 335
2. LA PAROLE PHILOSOPHIQUE 342
III. L'INCORPORATION DU SAVOIR 348
1. La mise en valeur de l'indépendance du jugement au moyen du langage métaphorique dans les chapitres
24 et 25 du premier livre 348
2. La naturalisation d'un discours étranger 354
IV. LE TRANSFERT DES ESSAIS DANS L'ORDRE DE LA MATIERE 3641. La dichotomie du vide et du solide dans le discours métalinguistique des Essais 364
2. Les Essais comme substance organique 371
CONCLUSION 379
6BIBLIOGRAPHIE 383
Antiquité et Renaissance 383
Dictionnaires 387
Documentation électronique 390
Etudes 391
INDEX NOMINUM 412
INDEX DU LEXIQUE 416
TABLE DES MATIERES 1
7Première partie
Le langage proverbial chez Rabelais
8 9 I. Le vin dans les proverbes et dans les expressions figées1. La culture populaire et la dimension utopique de l'abondance
Le langage proverbial offre des ressources importantes à la création littéraire de Rabelais. Ses richesses formelles et son lien au monde concret aident l'auteur dans sarecherche de la consistance matérielle de la langue. La matière verbale et la matière
alimentaire sont étroitement entrelacées dans l'oeuvre rabelaisienne. La langue sert à parler
et à goûter le vin. Il y a alors une parfaite correspondance entre la parole et le vin : le vin
accompagne les propos et en est aussi le sujet. Il transmet ainsi sa matérialité aux proverbes et aux expressions proverbiales qui se laissent manipuler. Une des caractéristiques essentielles du proverbe est la facilité de son adaptation au texte. Il constitue un énoncé autonome, et en même temps, il ne fonctionne qu'en rupture de cette autonomie, dans son lien nécessaire au discours qui l'intègre (Zumthor 1973 : 327). Rabelais utilise largement sa malléabilité. Le langage proverbial que nous analysons est issu de la culture populaire. La culture rurale occupe une place majeure dans les deux premiers livres de Rabelais, Pantagruel et Gargantua. Mais grâce aux locutions populaires, on peut également constater sa présence dans les derniers romans, Tiers, Quart et Cinquiesme livres. Ces locutions et proverbes sont surtout employés par les personnages de Panurge et de Frère Jean qui représentent la verve populaire de l'auteur. Par ailleurs, Rabelais insiste sur l'importance du monde matériel par l'abondance de la nourriture et du vin. Dans son oeuvre, plusieurs banquets ont les caractéristiques des fêtes populaires et ont en commun avec ces dernières la dimension utopique de l'abondance. La profusion alimentaire donne une impulsion à la créativité verbale. En effet, l'oeuvre rabelaisienne est très riche en expressions qui soulignent le fait de boire copieusement. Comme l'a montré Bakhtine, les images de banquet dans la tradition de la fête populaire se différencient nettement de celles concernant le " manger » dans la vie privée, de la gloutonnerie et de l'ivrognerie courantes. Ces images sont universelles, parce qu'elles ont pour fondement l'abondance croissante inépuisable du principe matériel. Ellessont pénétrées de l'idée du temps joyeux, qui s'achemine vers un futur meilleur. La fête
populaire marque une interruption provisoire de tout le système officiel, avec ses interditset ses barrières hiérarchiques : pour un bref laps de temps, la vie pénètre dans le domaine
de la liberté utopique (Bakhtine 1970 : 97). La puissante tendance à l'abondance utopique du pays de Cocagne détermine la mise en forme de ces images, leur hyperbolisme positif et 10 leur ton triomphant. Nous insistons sur ce point pour montrer qu'il n'y a pas d'incohérencedans la pensée de l'auteur. On a souvent signalé la contradiction entre la modération,
professée par les humanistes et l'hyperbolisme des beuveries dans les romans rabelaisiens. Nous voulons ainsi mettre en évidence que la signification positive de l'exagération dans la quantité du vin dans les proverbes et les expressions proverbiales tient au fait qu'il ne s'agit absolument pas du boire quotidien d'individus isolés, mais des banquets qui se déroulentpendant les fêtes populaires. L'ambiance caractéristique de la joie et de l'abondance
correspond aux éléments primordiaux dans le concept de pantagruélisme : [...] vivre en paix, joye, santé, faisans toujours grand chere (P., 34, p. 337). Ce sont des principes qui se répètent tout au long de l'oeuvre. Il ne faut pas oublier qu'ils'agit du siècle où la vie était courte et menacée, ce qui poussait à la jouissance de l'instant.
Les habitudes conviviales du peuple constituaient de rares moments d'une vie difficile. Elles assumaient un rôle fondamental de régulation de la vie collective, ayant la fonction d'une intense décharge émotionnelle qui réduisait les tensions accumulées (Muchembled1978 : 62-79). Le caractère exclusif du temps joyeux, où de nombreux excès sont permis,
explique la profusion du vin. Chez Rabelais, on ne retrouve pas de proverbes quiprescrivent une consommation modérée du vin et dénoncent ces dangers, ce genre de
proverbes concernant uniquement la vie quotidienne (Loux et Richard 1978 : 85). Les fêtes ne constituent pas seulement l'évasion et le plaisir, elles sont la culture paysanne en action. Elles sont la perfection du rituel magique populaire, puisqu'ellesréalisent momentanément une solidarité exceptionnelle : maîtrise de l'espace, du temps, des
rapports sociaux, du bonheur tel que peut l'offrir la vie (Muchembled 1978 : 126-127). Plusque l'expression vague d'une collectivité, elles forment le ciment de cette dernière et
expriment la cohésion d'un groupe humain donné. Le banquet est une pièce nécessaire à
toute réjouissance populaire. La table est un microcosme du corps social, le lieu idéal de la communication. De même qu'on ne peut pas parler tout seul, on ne peut pas manger et boire tout seul dans les romans de Rabelais. Les personnages ne célèbrent pas seulement le plaisir et l'abondance, ils multiplient aussi les représentations de la convivialité commeacte collectif. Ainsi, le banquet de la fête populaire est étroitement lié à la parole. Les
proverbes et expressions proverbiales, que nous allons étudier de près, représentent les points de cohésion, car ils appartiennent au langage commun et sont donc connus et compris par tous. En parlant de la culture populaire, nous ne soutenons certes pas que l'oeuvrerabelaisienne reflète un banquet villageois de façon réaliste. Nous voulons surtout souligner
11 l'atmosphère de fête populaire qui se manifeste dans certaines expressions. Le langage proverbial n'est pas uniforme, il contient des mots issus de dialectes différents ainsi que del'ancien français. Le problème qui se pose est celui de la différence entres les énoncés
proverbiaux populaires et les maximes savantes. L'origine populaire des proverbes a été contestée par les critiques comme Jolles et Meschonnic (1972 : 123 ; 1973 : 420). Les parémiologues ont de plus en plus tendance à souligner comme trait distinctif leur forme etnon leur origine populaire. La difficulté naît de la définition du terme " populaire ». Les
dictionnaires donnent à cet adjectif le sens de " issu du peuple » et celui de " qui est enusage parmi le peuple », mais le problème est de savoir ce qu'il faut entendre par
" peuple » : il peut en effet s'agir d'un groupe social déterminé ou bien d'une population dans son ensemble. Le caractère universel du proverbe tient au fait qu'il appartient à la conscience collective, même si les proverbes et les locutions, que nous allons analyser,décrivent les réalités qui appartiennent souvent à la vie campagnarde, et sont enracinés
dans le monde du concret qui les oppose nettement aux sentences et à d'autres formesgnomiques à la portée abstraite. En supposant l'origine strictement rurale de certains
proverbes et expressions, on ne peut cependant pas en dire autant de leur emploi, car ils sont un fait littéraire au Moyen Age et à la Renaissance. Comme le montre Taylor, les proverbes peuvent souvent changer de milieu social, parce qu'ils ne s'adressent passeulement à un auditoire populaire (la couche inférieure de la société), mais sont connus de
tous (Taylor 1931 : 35). Dans la première moitié du XVI e siècle, les classes supérieures et lettrées participent encore de la culture populaire, qui correspond à la culture de tout le monde, et dont l'application va évoluer au cours du siècle pour correspondre à la fin du siècle uniquement à la culture de la classe inférieure (Burke 1994 : 270). De même, lesrapports entre la culture écrite et orale sont complexes, et le Moyen Age ainsi que la
Renaissance passent de l'une à l'autre avec une facilité qui diminuera considérablement plus tard. Il faut toutefois ajouter que, même si la culture populaire est encore accessible à tout le monde et que l'intérêt de la Renaissance pour les proverbes dépasse largement celui du Moyen Age, les compilateurs de proverbes ont tendance à extrapoler ces derniers, sans tenir compte du contexte de leur premier emploi, et à les adapter aux exigences de l'usage savant. Aucun d'eux ne consigne les proverbes en dialecte ou idiome régional (Davis1979 : 379, 409). A la différence de ces compilateurs, Rabelais non seulement intègre le
discours proverbial à son oeuvre, dans sa tentative de restituer l'atmosphère de la fête
populaire, mais préserve aussi la forme dialectale de ce type de discours. 122. Martiner, boire à tyre larigot, boire à tout guez comme un
cheval de promoteur, tirer au chevrotin Prenons pour premier exemple le verbe " martiner », employé par l'auteur dans le passage suivant : Et tous flacconnerent si bien que le bruyt en vint par tout le camp, comment le prisonnier estoit deretour, et qu' ilz debvoient avoir au lendemain l'assault, et que a ce jà se preparoit le roy et les
capitaines ensemble les gens de garde, et ce par boire a tyrelarigot. Parquoy ung chascun de l' armee
se mist a Martiner, chopiner, et tringuer de mesmes. Somme ilz beurent tant et tant qu' ilz
s'endormirent come porcs sans nul ordre parmy le camp (P. de 1542, éd. Pléiade, 28, p. 313 ; P. de1532, 18, p. 104).
Le terme " martiner » ne constitue en lui-même ni un proverbe, ni une locution proverbiale, mais il a retenu notre attention dans la mesure où il renvoie aux traditions vinicoles du monde rural et au patois. Ce verbe dérive du nom de Saint-Martin, pieusement honoré par les vignerons et particulièrement par ceux de Touraine. La Saint-Martin tombe à l'époquedu vin nouveau, le 11 novembre, et devait être l'occasion de généreuses libations (Sainéan
1922-23 : II, 256). Une abondante parémiologie en porte témoignage, par exemple, les
expressions faire la Saint-Martin, " faire bonne chère » (Furetière 1690 : 1998), mal Saint-
Martin, " ivresse, à cause qu'autrefois se tenaient des foires pour la vente du vin vers la St Martin, où on buvait beaucoup » (Furetière 1690 : 1998 ; Duneton 1990 : 157, 1186) et le dicton de vignerons " A la sainct Martin boit on le bon vin » (Proverbes Communs, XV e s., dans Le Roux de Lincy 1859 : I, 125). Le verbe martiner apparaît pour la première fois dans le Pantagruel de 1532 et ensuite dans le dictionnaire de Cotgrave (1611 : 1998). L'auteur l'emprunte peut-être directement au parler de son pays natal (Rougé 49 : 1931). En effet, le FEW l'atteste en dialecte tourangeau au sens de " déguster le vin nouveau à la Saint-Martin » (VI/1, 387b). Etant donné qu'il s'agit de la première attestation du terme, nous pouvons supposer que l'auteur puise dans les sources orales, sans passer par les recueils de proverbes ou leur usage dans d'autres oeuvres littéraires. Il fait entrer dans lesystème du langage écrit les éléments de la langue parlée, issus de la vie populaire,
enrichissant ainsi la langue française. Dans le même épisode de beuverie qui suit l'envoi de drogues au camp du roi Anarche et dans lequel est employé le verbe martiner, nous rencontrons une expression synonymique boire à tyre larigot, ayant le sens de " boire copieusement », " boire d'un trait, en vidant bouteille après l'autre » (FEW, V, 193a). Cette expression populaire est 13 issue de larigot, une sorte de flûte (Ménage 1694 ; larigau Cotgrave 1998) et de verbe tirer au sens d' »aspirer », qui est usuel dans les chansons bachiques (Sainéan 1922-23 : I, 413, II, 257-258). Rabelais l'emploie dans le Pantagruel (P. de 1532, 18, p. 104 ; P., éd. Pléiade de 1542 : 28, p. 313) et dans le Gargantua (éd. Pléiade de 1542 : 7, p. 23). Di Stefano donne deux attestations antérieures à Rabelais : chez Menot et chez Basselin, auteurs du XV e siècle (1991 : 476a ; Baldinger 2001 : 294). Le proverbe populaire " je boy à tout guez, comme un cheval de promoteur » (G,40, p. 111), souligne également le fait de boire beaucoup. Sa seule trace écrite, que nous
avons rencontrée dans un texte du XVI e siècle, est postérieure à l'usage de Rabelais (Jean Le Bon, ca. 1570 dans Le Roux de Lincy 1859 : II, 188). Il est employé par Frère Jean, un des personnages qui représente la verve populaire de l'auteur et qui est l'archétype d'un grand buveur. Par ailleurs, ce dernier est moine et porte-parole de la critique envers le clergé. Effectivement, le proverbe ne sert pas seulement à souligner les abondanteslibations, mais indirectement, par le transfert du cheval à son cavalier, il vise la vénalité de
la juridiction ecclésiastique. La forme brève du proverbe permet de concentrer différentssens. La densité sémantique du proverbe est l'un de ses traits caractéristiques (Lafond
1993 : 102-103). Elle donne ainsi de la consistance à la langue. En outre, le proverbe
constitue une voix généralisée et désindividualisée, susceptible d'aborder des thèmes qui,
traités ouvertement, peuvent être dangereux. Le proverbe met en place la parole, en la voilant, pour la dévoiler ensuite, sous son couvert (Cerquiglini 1973 : 370). De cette façon,la métaphore du gué et la métonymie du cheval voilent l'attaque contre l'avidité du clergé.
Il faut ajouter que le terme de promoteur, employé dans le proverbe a un sens précis dans ledroit canonique. Il désigne un " ecclésiastique tenant près des juridictions ecclésiastiques le
rôle de ministère public et qui, et qui dans les assemblés du clergé, veillait au maintien des
privilèges et de la discipline » (TLF). Rabelais ne se limite pas à introduire les proverbes et les expressions proverbiales dans son oeuvre, il essaie de régénérer la langue commune, en rafraîchissant l'usage des lieux communs. Ses romans sont une illustration de la mise en oeuvre personnelle du langage proverbial. L'emploi de l'expression tirer au chevrotin peut servir d'exemple (P,20, p. 291, 28, p. 314, G. 11, p. 34). Dans Pantagruel, le sens de " boire abondamment » se
perçoit facilement grâce au contexte et surtout grâce aux expressions synonymiques telles que boire le ventre contre terre dans l'édition de 1532 et boire à ventre deboutonné dans celle de 1542 : Semblables actions de graces rendit Pantagruel a toute l'assistence et de la partant mena disner Thaumaste avecques luy et croyez qu' ilz beurent comme toutes bonnes ames le jour des mortz le 14 ventre contre terre jusques a dire dont venez vous? Saincte dame comment ilz tiroient au chevrotin il n' y eut par sans faulte celluy qui n'en beust xxv ou xxx muys (1532, P., 13, p. 79). Semblables actions de graces rendit Pantagruel a toute l'assistance, et de la partant mena disnerThaumaste avecques luy, et croyez qu'ilz beurent a ventre deboutonné (car en ce temps la on fermoit
les ventres a boutons, comme les colletz de present) jusques a dire, dont venez vous? Saincte damecomment ilz tiroyent au chevrotin, et flaccons d'aller, et eulx de corner, " tyre, baille, paige, vin,
boutte de par le diable boutte », il n'y eut celluy qui ne beust vingt et cinq ou trente muys (1542, P,
20, p. 291).
L'existence de la formule tirer au chevrotin est attestée en dehors de Rabelais (Sainéan1922-23, II, 256). En faisant d'elle un synonyme de " boire à grands traits », l'auteur ne lui
a cependant pas attribué sa signification habituelle. Tirer au chevrotin équivaut en effet à
" vomir l'excès de boisson » (FEW, II/1, 296a). Cette expression doit alors être rapprochée
des locutions tirer au renard ou écorcher le renard, sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir. C'est ainsi que l'entendent Cotgrave (1611 : 1998), Oudin (1640 : 1971) et, plus tard, Le Roux : " Tirer au chevrotin. Pour renarder, dégobiller, vomir, rendre gorge, mettre coeur sur carreau » (1787 : II, 251). Rabelais substitue son nouveau sens à la signification qui préexiste, en exploitant le double sens du verbe tirer. Lorsque tirer au chevrotinsignifie " vomir », tirer veut dire " éjecter », " expulser violemment quelque chose ».
Quand Rabelais l'entend au sens de " boire à l'excès », tirer signifie au contraire " aspirer
un liquide ». Par conséquent, son interprétation s'oppose nettement à celle de ses
contemporains et successeurs. Selon Le Duchat, il s'agirait là d'un emploi régional de la locution, en particulier du Dauphiné, où l'on met le vin dans des outres faites de peau de chèvre. Malheureusement, cette affirmation n'est appuyée par aucune preuve et Sainéan la juge gratuite (Sainéan 1922-23, I, 383). Quoi qu'il en soit, le terme chevrotin désigne en moyen français " peau de chevreau corroyée » (FEW, II/1, 296a) et Rabelais l'emploie en ce sens dans le passage suivant du Quart livre : Tenez presentement je vous donne ces jeunes guanteletz de jouste, couvers de chevrotin (Q.l., 12, p. 566).S'il ne s'agit pas d'un emploi régional du terme chevrotin dans l'expression tirer au
chevrotin, nous pouvons attribuer à Rabelais le mérite d'avoir détourné l'expression de son
sens habituel. Une de ses utilisations dans le texte est l'épisode de la guerre avec le roiAnarche :
15 Apres qu' ilz eurent bien tire au chevrotin, Panurge donna manger a Pantagruel quelque diable dedrogues composees de lithontripon, nephrocatarticon, coudinac cantharidise, et aultres especes
diureticques (P., 28, 314). Dans le même épisode, une page plus haut, Rabelais recourt à l'expression boire à tyrelarigot, où le sens du verbe tirer est aussi " aspirer » et pas " éjecter ». Nous pouvons donc
supposer que l'auteur exploite les mécanismes de la langue, les expressions et les sens déjà
en usage, pour les mettre ensuite au service de la création littéraire. Ainsi, l'auteur mettrait
en pratique le conseil, donné plus tard par Montaigne, d'enrichir la signification des mots, en les transplantant comme des herbes (Essais, III, 5, p. 1369 ; Villey, p. 874 [b]). 163. Estre poyvré
L'expression estre poyvré montre comment Rabelais met en lumière, au fil des occurrences, la polysémie d'une formule. Elle est employée trois fois dans l'oeuvrerabelaisienne (G., 2, p. 13 ; T.l., 25, p. 428 ; C.l., 46, p. 836). A côté de deux sens propres,
absents de l'oeuvre, il existe trois sens figurés. Poivrer quelqu"un pouvait signifier le
" maltraiter », le " bâtonner », sans doute par allusion à la vigoureuse saveur du poivre qui
assaisonne fortement un mets. Ce sens est attesté par Huguet uniquement chez Rabelais (2004). Pour le TLF, c'est aussi le premier emploi (1988 : 13, 694). Par ailleurs, ce poivre dont on saupoudre un plat désignait familièrement le malvénérien. Selon le FEW, cette acception aurait été lancée par l'oeuvre de Rabelais (VIII,
553a). En tout cas, elle ne peut pas être de beaucoup plus ancienne, car cette maladie était
récente à cette époque (Sainéan 1922-23 : II, 272-273). On rencontre cette application
couramment après lui, par exemple dans Le Moyen de Parvenir de Béroalde de Verville (1970 : II, 136). Le Roux explique de même : " Poivrer... On s'en sert au figuré, en parlant des filles de joie, qui donnent du mal à ceux qui ont commerce avec elles » (1787 : II, 152).Oudin enregistre également poivré au sens de " qui a une maladie vénérienne » et se
poivrer au sens de " prendre quelque mal vénérien » (1640, 1971 : 428). En ce qui
concerne son occurrence dans la prophétie de Her Trippa, celle-ci apparaît comme l'annonce résumée de tous les maux qui fondront sur Panurge. Il sera un époux battu etcoqu. Donc, s'il sera trompé par sa femme, il sera peut-être aussi poyvré, au sens de
" contaminé par le mal vénérien ». Dans ce cas, être poyvré désignerait non point l'un des
sens figurés à l'exclusion de l'autre, mais tous les deux à la fois. Ce serait une manière
ironique de signifier que Panurge sera dans un mauvais état, attrapé, comme l'interprèteMireille Huchon. L'ironie est soulignée par Her Trippa, quand il s'adresse à Panurge
comme à un home de bien. L'occurrence de l'expression dans le Cinqueisme livre contient une nuance supplémentaire. Devant le délire qui s'est emparé de ses compagnons et qui n'a même pasépargné le sage Pantagruel, Frère Jean s'exclame : " Nous sommes tous poïvrez » (C.l., 46,
p. 836). Or, le contexte ne nous renvoyant ni à l'idée de mauvais traitements ni à celle demal vénérien, la formule doit s'interpréter en son sens le plus vague : " Nous voilà tous
dans un bel état » ou " en délire » (Huchon). Pourtant, la cause de cet état est la
consultation de la Dive Bouteille, c'est à dire l'ivresse. Nous rencontrons donc ici unetroisième possibilité sémantique pour la locution être poivré. Dans le langage populaire, en
17effet, le poivre ne désigne pas seulement la vérole. Parce qu'il est fort et qu'il donne soif, il
constitue aussi l'un des synonymes argotiques de l'eau-de-vie ou du vin (FEW, VIII, 553a).Un poivrot désigne un ivrogne (Duneton 1990 : 166), être poivré signifie " être ivre » (Rat
1981 : 316, Le Petit Robert 1996 : 1716) et s"empoivrer a le sens de " s'enivrer,
s'empourprer, devenir poivre » (Duneton 1990 : 168). Même si ses utilisations métaphoriques ne sont pas attestées avant le XIX e siècle, on peut toutefois supposer une origine plus ancienne, qui n'a pas été attestée auparavant à cause de l'emploi purement oral. Ainsi, nous pensons que l'auteur du Cinquiesme livre a pu ajouter à l'acceptiongénérale de la formule une connotation bachique à laquelle l'invitaient les circonstances de
son récit. Rabelais résout le problème des limites de la langue écrite de son temps, en recourant aux sources orales et dialectales et en introduisant des nouvelles expressions, mais aussi en activant ses possibilités par l'élargissement du champ sémantique des mots, déjà en usage. 184. Adieu paniers, vendanges sont faictes
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