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Mots-clés : Conquête Résistance





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Gbakré Jean Patrice GNETO. La répression coloniale en pays Dida (Sud-ouest ivoirien) : cas de la tribu

Satroko 1917 - 1918

Rev. hist. archéol. afr., GODO GODO, N° 30- 2018.LA RÉPRESSION COLONIALE EN PAYS DIDA (SUD-OUEST IVOIRIEN) : CAS DE LA TRIBU SATROKO 1917 - 1918

Dr. Gbakré Jean Patrice GNETO

Chercheur, Institut d"Histoire, d"Arts et d"Archéologie Africains IHAAA, Université Félix Houphouët Boigny-Abidjan Cocody dobezohi@gmail.com

RÉSUMÉ

A l"instar de nombreuses régions de Côte d"Ivoire, le pays dida a opposé une farouche

résistance à l"occupation coloniale. Mais celle survenue dans la tribu Satroko, a marqué les

esprits. Elle débute en mai 1917 avec la rébellion des tribus Satroko, Guegoko et Benga qui ne répondaient plus aux demandes de l"administration. Cette insurrection se résumait au refus

de payer l"impôt de capitation et à l"attaque des détachements envoyés par le chef de poste.

L"insubordination débouche sur une guerre ouverte le 18 décembre 1917.
Face à l"ampleur de la rébellion, le Gouverneur de Côte d"Ivoire, ordonne l"envoi d"un détachement de cent quarante-trois (143) soldats dans la tribu Satroko. Ce n"est que le 10

août 1918, après huit (8) mois de campagne dans la région, que l"armée coloniale arrive à bout de l"insurrection.

Les résultats de la répression atroces sont connus. Trois cent vingt-neuf (329) dida tués et entassés dans trois fosses communes. Une cachette incendiée avec ses occupants, qui étaient tous des enfants. Leur crime, le refus de soumission à l" autorité coloniale.

Mots-clés

: Dida, Colonisation, Résistance, Guerre, Répression.ABSTRACT occupation. But that occurred in the tribe Satroko, marked the spirits. It began in May 1917

with the rebellion of the tribes Satroko, Guegoko and Benga who no longer responded to the demands of the administration. This insurrection amounted to the refusal to pay the capitation

tax and the attack of the detachments sent by the head of post. Insubordination led to an open war on 18 December 1917 and ended on 10 August 1918. Faced with the extent of the rebellion, the Governor of Côte d'Ivoire ordered the dispatch

of a detachment of one hundred and forty-three (143) soldiers. The results of the atrocious repression are known. Three hundred and twenty nine (329) dida were killed and piled up in

three mass graves. A hiding place burned with its occupants, all of whom were children. Their crime, the refusal of submission to the colonial authority. Keywords: Dida, Colonization, Resistance, War, Centenary.

90© EDUCI 2018. Rev. hist. archéol. afr., GODO GODO, ISSN 1817-5597, N°30 , 2018

INTRODUCTION

A l"instar des populations d"autres régions de Côte d"Ivoire 1 , les Dida ont opposé une résistance farouche à l"occupation coloniale 2 . Au nombre des batailles que les

tribus dida ont eu à livrer au colonisateur, une mérite d"être portée à la postérité, parce

qu"ayant marqué les esprits. Il s"agit de la guerre contre les Français, à Satroko, dans le département actuel de Lakota. entrées en rébellion contre l"administration coloniale. Cette r

évolte se résumait au

refus de payer l"impôt de capitation et à l"attaque des détachements envoyés par le chef de poste de Lakota. La guerre débute alors le 18 décembre 1917 et s"achève le 10 août 1918. Face à “l"ampleur de la rébellion et à la gravité de la situation“ 3 qui dépassait ses compétences, l"administrateur commandant le cercle de Lahou a demandé et obtenu du Gouverneur de Côte d"Ivoire, l"envoi d"un détachement de quarante-six (46) tirail- leurs et de quatre-vingt-dix-sept(97) par la suite. Les résultats de la répression sont atroces. Le bilan de l"action de police donne un total de trois cent vingt-neuf (329) résistants tués, contre seulement six(6) soldats du côté de l"armée coloniale. Trois fosses communes encore visibles dans le village rappellent les endroits où ont été enterrées les victimes dida, mais également le souvenir du génocide des enfants de Satroko, brulés vifs par le Lieutenant Clérice et ses hommes.

Ce sujet révèle un intérêt particulier lié à la brutalité et à la cruauté de la colonisation

française. Mais, il montre également la détermination et la résistance des peuples africains face à l"oppression des puissances coloniales. en 1913, comment comprendre la révolte d"une partie de la populati on, notamment celle des Satroko trois années plus tard Pourquoi autant d"attention des plus hautes autorités de la colonie de Côte d"Ivoire et du Gouverneur de l"Afrique Occidentale Française (AOF) à Dakar, à propos de cette crise La méthodologie adoptée est une fusion de la méthode historique, ethnologique et archéologique. L"utilisation de cette méthode pluridisciplinaire a un avantage certain. Les données historiques sont essentiellement des sources écrites (archives coloniales) et des sources orales (témoignages recueillis à Satroko et dans les tribus voisines du Diéko).

1- Le Baoulé (février 1909-Juillet 1911) ; Agni (octobre 1908-décembre 1910) ; Attié et Abbey (Mai1909-

Janvier1912)

; Adioukrou (décembre 1909 ; Dida (Mai 1908-juin19013) ; Gouro (décembre 1908-Juin

1913); Bété (décembre 1908-juin 1915)

; Krou (juillet 1909-Février 1913) ; Guéré-Wobé (Mars 1911-Mai 1915)
; Dan et Guéré (Novembre 1908-décembre 1920).

2- Nous sommes dans la seconde phase de la conquête coloniale française en Côte d"ivoire. Sous la

encore au contrôle de la France. Tel est le cas du pays dida et en particulier le Satroko.

3- Archives Nationale de Côte d"Ivoire (ANCI) 1EE 133. 11. Lettre du Gouverneur de l"Afrique Occidentale

neur de la colonie de Côte d"Ivoire de l"époque. Gbakré Jean Patrice GNETO. La répression coloniale en pays Dida (Sud-ouest ivoirien) : ... 91
L"étendue de notre champ historique à l"archéologie nous transporte dans le temps, nous permettant ainsi de revisiter les sites des fosses communes du village de Ikakoulilié, épicentre de la contestation. Quant à l"ethnologie, elle permet de mieux comprendre les motivations de la révolte d"une société, celle des Dida, de nature ce fait, trois axes principaux devront conduire notre travail

1- La conquête militaire du pays dida

: 1908-1913

2- Les raisons de la rébellion et la manifestation de la crise du Satroko

: décembre

1917- Août 1918.

3- Le bilan de la répression et les conséquences de cette guerre de souveraineté.

1. LA CONQUÊTE MILITAIRE DU PAYS DIDA : 1908-1913.

Deux temps forts vont marquer cette première partie qui a trait à la conquête mili- taire du pays : la pénétration française qui débute en 1908 et la créatio n des postes Carte n°1 : Le pays Dida actuel dans l"ensemble ivoirien

Source

: ATLAS de Côte d"Ivoire, planche D1c.

Conception

: GNETO Gbakré Jean Patrice

Réalisation

: KONAN Kouadio Eugène à l'IGT

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1.1- La pénétration française en pays dida

en 1908 Le pays dida est situé dans le Sud - Ouest de la Côte d"Ivoire, dans l"actuelle région du Lôh-Djiboua. Les autochtones de cet espace appartiennent au groupe Krou, l"un des quatre groupes ethnolinguistiques que compte la Côte d"Ivoire, comme l" indique la carte n°1. Le Satroko, objet de cette étude est un pays montagneux où quelques collines atteignent parfois 400 mètres d"altitude. Couvert de forêt et d"une brousse impé- nétrable, le pays compte de nombreux cours d"eaux et était asse z peuplé avant la conquête coloniale. Les villages de cette région étaient à cette époque sur des sites encore à des tirailleurs équipés. de Lakota 4 en 1917, avait pu noter très tôt, un sentiment d"hostilité des Dida à leur égard. Dans son rapport de présentation du pays au Lieutenant Clérice, en charge des opérations dans le Satrohoin, il note que “l"accueil des habitants est toujours froid. Quelques-uns à leur arrivée, prennent la brousse. Les autres entrent dans leur case et tournent le dos pour les saluer“ 5 C"est dans ce contexte d"inimitié que les Français accèdent au pays dida. Une côte avec l"occupation de Grand Lahou, G. Thomann (1999, p.51), c"est seulement en 1904 que la mission du Lieutenant Guignard s"enfonce à l"int

érieur du pays dida,

en direction de Divo sans grand succès Elle débute véritablement vers 1908, au moment où la pression coloniale s"était beaucoup accentuée en Côte d"Ivoire. Sur l"initiative du nouveau Lieutenant-gou- verneur Gabriel Angoulvant, une politique très dure avait été engagée en vue de l"assujettissement de la population. L"objectif était de montrer à la métropole que le pays avait été soumis à la France. C"est dans un tel contexte de motivation que débute le 28 septembre 1908, la pénétration du pays dida avec la mission Terrasson de Fougère, qui y marque le début véritable de la présence française 6 . Mais avant lui, l"Administrateur Guignard s"était déjà aventuré au nord de Lahou dans le district de Divo. A la suite donc de la mission de Terrasson de Fougère, une Brigade est désignée pour continuer les du morcellement des tribus, en guerre continuelles les unes contre les autres 7 , sans cohésion véritable entre elles. C"est par arrêté n°742 portant création du secteur militaire du pays dida et par arrêté

4- Quand survient la guerre du Satroko en mai 1917, l"administration civile en place depuis 1913 à Lakota

est remplacée et occupée par des militaires. Pendant deux ans et demi, soit de 1918 à 1921, la sub-

division est restée sans chef d"administration.

5- Archives Nationales de Côte d"Ivoire (ANCI), 1EE132-2. Cercle de Lahou,

1908-1913.

6- TERRASSON (F. de), Monographie de Grand Lahou, Avril 1913.

7- (ANCI)

Gbakré Jean Patrice GNETO. La répression coloniale en pays Dida (Sud-ouest ivoirien) : ... 93
8 , que prend forme l"organisation administrative de cette partie de la Côte d"Ivoire. Ces arrêté s formalisaient désormais les rapports entre les populations et l"administration coloniale. Pou r faire respecter son autorité, l"administration coloniale crée les secteurs militair es du pays dida.

1.2- La création des postes militaires de Divo, Lakota et Zikisso

Le pays dida, dans sa partie située plus à l"Est, à l"ori gine était rattaché au cercle Baoulé dépendant de Tiassalé. C"est en mai 1902 que le Garo, la zone la plus orien- tale du pays dida proche des Baoulé par exemple, fut visitée pour la première fois par le Commandant du secteur de Tiassalé. Jusqu"en 1910, ce secteur des Dida encore appelés Mamini, dépendait encore du district de Tiassalé. Il faut attendre jusqu" au cercles de Baoulé 9

Mais déjà en 1909, étaient créés le poste de Divo et en 1911 celui de Lakota. La création

de ces postes militaires marque la rupture avec le mode ancien d"exercice du pouvoir et œuvre coloniale débute véritablement à Lakota avec le Capita ine Richard qui ouvre le

poste militaire le 26 juin 1911. Celui de Lakota est situé près du village de Sérikpalilié

, au milieu d"une région peuplée qui réunit aussi des avantages g

éographiques et politiques

10 Le poste a été construit sur un espace qui domine le fond d"une vallée d"environ vingt-cinq mètres, au centre du secteur militaire. Il permettait d" avoir une vue pano- ramique, dans toutes les directions. Ce sera la base d"opérations pour la pénétration du pays dida. Au plan politique, le poste militaire viendra comme une force de dissuasion, au milieu d"une population autochtone toujours en guerre les unes avec l es autres. En outre, il fut envisagé la création d"un poste militaire en 1914 vers Bétrouhoin, à l"Ouest de Lakota dans le canton Oparéko. Mais l"idée ne fut pas exécutée à cause de son éloignement. Ce n"est qu"au début de 1913, que le pays dida tout entier passe à l"administration civile avec le poste provisoire de Zikisso. Ce poste militaire est créé le 2 février 1912 par le capitaine Richard 11 . Il est relié à Oumé et ouvre avec deux agents : Les administrateurs Antony et Eugène Albou. Il est dirigé par Dupony Tiberco. Une année plus tard, une école est créée à Zikisso, mais le poste sera fermé le

16 mai 1916, sur proposition du Gouverneur Agoulvant, pour manque de personnel.

Nous étions en pleine première guerre mondiale et les hommes ét aient au front 12 Avec la création des postes militaires et la mise en place peu aprè s des subdivisions administratives en 1913, débutent véritablement la prise en main p ar l"administration coloniale, de l"organisation administrative et politique du pays. Le dida rompt ainsi, avec le mode ancien d"exercice du pouvoir politique, la gérontocratie, pratiquée dans tout le pays.

8- J.O.C.I de 1910-1911-1913, pp. 124-579-108.

9- (ANCI) Série 4EE-33 (1) Lahou, secteur militaire du pays dida. XIV-4-7 : Lettres, notes de services, pro-

cès-verbaux de palabres, reçus de chefs de postes du secteur Ouoss ou du Toumodi (1901-1903).

10- (ANCI)

11- (ANCI)

Série 1EE-133, Cercle de Lahou.

12- (ANCI) Série 1EE 132-3 et 1 EE 135-2.Cercle de Lahou, .

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L"avènement des chefs de tribus et de villages répondait au manque de fonction- naires coloniaux, mais aussi visait insidieusement à faire de l"autorité coutumière, l"auxiliaire de l"administration coloniale dans la conduite et la gestion de la politique coloniale. Cette période de grâce accordée au colonisateur français ne ferra cependant pas long feu. L"année 1917, consacre de nouvelles périodes troubles, consécutives à la désobéissance de l"autorité coloniale. Consécutives à la pénétration française dans le pays en 1908, les révoltes vont connaître une relative accalmie en 1913, avec le passage du poste militaire à l"autorité civile, pour reprendre de plus belle à partir de 1917. Notons que les actions de police oppositions à l"implantation de l"autorité administrative co loniale française. L"ampleur de la rébellion et la gravité de la situation dans la subdivision adminis- coloniales de Côte d"Ivoire. Pendant cette période, l"action de développement dans la subdivision de Lakota est mise en veilleuse, l"attention de toute l"administration étant focalisée sur la situation dans le Satroko.

2- LES RAISONS DE LA RÉBELLION ET LA MANIFESTATION

DE LA CRISE DU SATROKO : DÉCEMBRE 1917- AOÛT 1918 Cette rébellion se traduit d"abord par le refus de répondre positivement aux demandes de l"administration. Il s"en suivra alors la crise.

2.1- Les raisons de l"insurrection des Dida contre la colonisation

française C"est à partir de Mai 1917 que les tribus Sartroko (7 villages, 2

96 hommes adultes),

Guégoko (3 villages, 117 hommes adultes) et Benga (2 villages, 75 hommes adultes) sont entrées en rébellion, en ne répondant plus aux demandes de l"administration qui leur exigeait une collecte importante de vivres, en particulier, du riz. Cette rébel- lion s"exprimait également par le refus de payer l"impôt de capitation, l"attaque des détachements envoyés par le chef de poste, le refus de soumission

à une autorité

qui, depuis 1908, les spoliait, etc. 13 Pour le succès de leur action, les insurgés s"étaient procurés environ une dizaine de kilogrammes de poudre à canon et parcouraient la région par groupes arrimés de gagnait déjà les tribus voisines douteuses qui allaient grossir à tout moment les rangs de la résistance contre le colonisateur. Il s"agit des tribus Diéko (14 villages) et Gragba (7 villages) de la subdivision de Lakota et de la tribu Boko (4 villages ) de la subdivision de Divo. Les populations de certains villages de ces tribus se tenaient aussi dans la forêt et quelques-unes avaient brûlé leur village en signe d"hostilité.

13- KADJI Barthelemy, 67 ans, chef de Satroko. Entretien public à Satroko le 11 Août 2016.

Gbakré Jean Patrice GNETO. La répression coloniale en pays Dida (Sud-ouest ivoirien) : ... 95

2.2- La “répression brutale“ de la colonisation française en

pays dida Face à l"ampleur de la révolte, l"administrateur commandant le cercle de Lahou, cercle auquel appartenait le pays dida, a demandé et obtenu du Gouverneur de Côte d"Ivoire, l"envoi d"un détachement de cent quarante-trois (143) tirailleurs. Le Lieutenant Clérice et son détachement arrivent le 27 décembre 1917 dans le village d"Ikakoulilié, centre de la contestation. Il avait pour mission d"obtenir la reddition des populations séditieuses ; emmener toute la population des groupes révoltés à se présenter au poste pour être recensé nominativement ; les fusils devraient être rendus ainsi que le stock de poudre à canon encore existant ; le meneur et les agresseurs des détachements devraient être livrés. procurer des renseignements 14 L"expédition punitive du Lieutenant Clérice et de ses hommes va durer de dé- cembre 1917 à Août 1918, soit huit mois, pendant lesquels les pires atrocités seront commises dans le Satrohoin et dans les tribus voisines. En janvier et février 1918, il reçoit des instructions de l"administrateur du cercle de Lahou, lui donnant les coudées franches au sujet des tribus qui donnaient asile aux rebelles. Agissant par surprise de nuit dans les villages abritant ces insurgés, le Lieutenant Clérice aidé des sergents Estorteguy et Barbier, soumettent les tribus voisines du Diéko et du Boko.

2.3- La résistance dida

et les acteurs clés de la révolte l"héritage tactique et stratégique de peuples regroupés en p etites communautés autonomes, (P.KIPRE S/D, 1987 .pp 45-49). La stratégie de guerre adoptée pour se faire, est la tactique de guérilla et de la guerre de partisans, marquées par des embuscades et des pièges de la forêt, J.N Loucou (2007, p.76). L"armement utilisé est rudimentaire et composé de vieux fusils

traduisant une résistance désespérée face à une armée régulière. La résistance dura

cependant huit mois. Et L"on s"interroge encore sur les circonstances particulières quilibre des forces en présence Sur Cette question, les traditions orales du pays sont très prolixes et ne tarissent pas d"éloges à l"endroit des principaux chefs de guerre dida, qu"ils disaient être dotés de pouvoirs mystiques. La tradition orale raconte par exemple qu"Abouadé Kéou, chef de la tribu Satroko (Subdivision de Lakota), spécialement recherché par les Blancs pour être l"âme de la contestation, avait le pouvoir de se transform er en fourmis magnans ou en termitière pour attaquer l"ennemi, et disparaître aussitôt. Et notre source de préciser que les pouvoirs mystiques, chaque grand chef guerrier de cette époque, en possédait 15

14- (ANCI) Série 1EE 132-2 et 1 EE 135-10.Cercle de Lahou, .

15- KADJI Barthelemy, 67 ans, chef de Satroko. Entretien public à Satroko le 11 Août 2016.

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Selon les rapports de police, ce dernier (Abouadé Kéou), originaire du village de

Ikakoulilié, centre de la révolte, était l"organisateur de la résistance dida entre 1917-

1918.
16 Il est à noter également que les actes de rébellion étaient certes imputables à des notables dida, mais la véritable rébellion que l"administration coloniale a eu à réprimer avait, outre Kéou, deux autres chefs redoutables : Abondo Salé de Yobéri (Subdivision de Fesco), Bassa Dago, chef de Gobabré (subdivision d e Lakota). leur tribu, décidaient de continuer la lutte dans la tribu voisine. Ce fut le cas de Kri- zoua du canton Zabia (subdivision de Gagnoa), et d"Abondo Salé de Yobérie. Ce dernier n"a jamais voulu accepter l"autorité française. Il était le principal pourvoyeur en munitions des insurgés. Bien qu"ayant reçu entre 1908-1909 Monsieur de Villier, chef de la subdivision de Fresco dans son groupe de villages, il ne tarda pas à leur montrer une sourde hostilité qui passa peu à peu à la révolt e. A la suite de diverses exactions, il disparut de la région alors que de

Villier et

Lahayé, commandant du cercle de Lahou s"apprêtaient à l"arrêter. De nombreuses complicités facilitant sa fuite, on en vint même à croire à sa mort, quand la guerre du

Satroko montra qu"il n"en était rien

17 Quant à Bassa Dago, chef de Gobabré (tribu voisine du Satroko) lui, montra de l"hostilité dès la pénétration du pays dida par la France . Sa tribu, le Diéko constitua l"un des points les plus irréductibles du secteur dida. Bien que le colonisateur vint à cacher un nombre important de fusils. Les évènements de 1917 allaient révéler ses intentions. Alors que les insurgés du Satrohoin trouvaient aide et assistance dans ses campements, il protestait à Lakota de son loyalisme. Les Français tentèrent donc de l"utiliser comme émissaire dans l e Satrohoin et l"invitèrent à réintégrer son village avec son clan. C" est alors qu"il jeta le masque et encouragea ouvertement les Diéko à se joindre aux Satrohoin dans la lutte contre la métropole. Son appel fut entendu, mais l"on imagine aisément les atrocités de la répression, dans l"expédition punitive qui s"ensuivit 18 de contagion dans tout le pays dida. C"est pourquoi les autorités de l"AOF avertis, prêtent une attention particulière sur la révolution de cette t ribu.

3- BILAN DE LA RÉPRESSION COLONIALE FRANÇAISE EN

AOÛT 1918

Satrohoin et des tribus voisines

meurtries, présentent une situation des plus désastreuses, tant au plan humain qu"au plan économique.

16ႇ

dida en 1917.

17- Idem.

18- (ANCI) Série 1EE 133-9 : Correspondances échangées avec le cabinet du Gouverneur ; lettre du

Gouverneur de l"AOF sur la situation politique en pays dida. Gbakré Jean Patrice GNETO. La répression coloniale en pays Dida (Sud-ouest ivoirien) : ... 97

3.1- Le bilan des atrocités de la répression coloniale

Cette action de police a donné un bilan de trois cent trente-quatre (334) tués, côté insurgés dida contre seulement six (6) victimes du côté de l"armée coloniale 19 . Les dépouilles des victimes dida, ont été entassées dans trois fosses communes que l"on retrouve encore à Ikakoulilié 20 Pire, les habitants dans leur fuite dans la forêt, ont cru bien faire en regroupant les enfants à bas âges, dans une seule case. Les populations de Satroko n"igno- épargne la vie des enfants, en temps de guerre. Le Lieutenant Clérice et ses hommes ne l"ayant pas compris ou feignant l"ignorer, ont incendié cette cachette, avec ses occupants. Furieux de ne pas trouver de “rebelles“ dans le village , ils s"en sont pris

à leurs enfants

21
Aucun rapport de police ne fait mention de cette dérive, indigne d"une armée régulière. L"existence des charniers, des fosses communes et autres graves atroci tés de l"histoire de cette rébellion n"apparaissent pas dans les rapports du Lieutenant

Clérice

22
. Aucune mention n"est faite du génocide des enfants de Satroko, dans les celles faites au Gouverneur Général de L"AOF à Dakar 23
. Seules les sources orales donnent des témoignages précis sur ce passé douloureux 24
principaux meneurs de la rébellion. Les sources orales 25
disent qu"Abouadé Kéou, connu pour être l"âme de la révolte, s"est rendu de lui-m

ême, pour épargner la vie de

ses parents faits prisonniers. Bassa Dago et Abondo Salé sont également arrêtés.

Ils seront tous incarcérés à Lahou où Dago mourra peu après, alors qu"ils étaient en

instance de déportation. Kéou lui, est déporté et incarcéré à dix années de réclusions

à la prison de Dabakala

26
, d"où il sortira en 1929. Il vivra encore longtemps auprès des siens avant de s"éteindre en 1957quotesdbs_dbs46.pdfusesText_46
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