LA RECONNAISSANCE EN DROIT DE LA FAMILLE TURC
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20 mars 2017 1) Les formalités requises en droit interne . ... A- Les exhumations à la demande des familles .
Turquie - JaFBase
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![Recueil de la jurisprudence Recueil de la jurisprudence](https://pdfprof.com/Listes/20/1478-20uriCELEX_62011CC0451.pdf.jpg)
FR
Recueildelajurisprudence
1 - 2 - 3 -ECLI:EU:C:2012:3311
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. YVES BOT
présentées le 7 juin 2012Langue originale: le français.
Affaire C-451/11
Natthaya Dülger
contreWetteraukreis
[demande de décision préjudicielleformée par le Verwaltungsgericht Giessen (Allemagne)]
"Accord d 'association CEE-Turquie - Interprétation de la décision n o 1/80 du conseil d'association -
Droit de séjour des membres de la famille d'un travailleur turc appartenant au marché régulier de
l'emploi d'un État membre - Ressortissante thaïlandaise ayant résidé pendant cinq ans au moins avec
le travailleur turc - Droits acquis avant le prononcé du divorce avec le travailleur turc»
1. La présente affaire offre à la Cour l'occasion de préciser la portée de l'article 7 de la décision no 1/80
du conseil d'associationLe conseil d'association a été institué par l'accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, qui a
été signé le 12 septembre 1963 à Ankara, par la République de Turquie, d'une part, ainsi que par les États membres de la CEE et la
Communau
té, d'autre part. C et accord a été conclu, approuvé e t confirmé au nom de la Communauté par la décision 64/732/CEE du
Conseil, du 23 décembre 1963 (JO 1964, 217, p. 3685, ci-après l'"accord d 'association»)., du 19 septembre 1980, relative au développement de l'association
La décision n
o 1/80 peut être consultée dans Accord d'association et protocoles CEE-Turquie et autres textes de base,
Office des publications
officielles des Communautés européennes, Bruxelles, 1992.. Cettedisposition prévoit qu'un membre de la famille d'un travailleur turc, qui a été autorisé à r ejoindre ce
travailleur sur le territoire de l'État membre d'accueil, a le droit de répondre à toute offre d'emploi sur
ce territoire lorsqu'il y réside depuis trois ans au moins et bénéficie du libre accès à toute acti
vité salariée de son choix lorsqu'il y réside régulièrement depuis cinq ans au moins.2. En particulier, la Cour est amenée à d ire pour droit si un ressortissant d'un État tiers qui n'a pas la
nationalité turque peut être considéré comme un membre de la famille d'un travailleur turc au sens de
ladite disposition et se prévaloir, ainsi, des droits que cette dernière lui confère.
3. Dans les présentes conclusions, nous indiquerons les raisons pour lesquelles nous estimons que
l'article 7, premier alinéa, second tiret, de la décision n o 1/80 doit être interprété en ce sens qu'un
ressortissant d'un État tiers n'ayant pas la nationalité turque et ayant résidé durant une période de
cinq ans au moins avec son conjoint travailleur turc appartenant au marché régulier de l'emploi peut
être qualifié de "membre de la famille» d'un travailleur turc.4. Puis, nous proposerons à la Cour de dire pour droit qu'un tel ressortissant, qui, en sa qualité de
membre de la famille d'un travailleur turc, bénéficie des droits qu'il tire de cette disposition, ne perd
pas le bénéfice de ces droits en raison de son divorce avec ce travailleur turc prononcé à une date
postérieure à l'acquisition de ceux-ci. 4 5 6 4 - 5 - 6 -2ECLI:EU:C:2012:331
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
I - Le cadre juridique A - Le droit de l'Union1. L'accord d 'association
5. Afin de réglementer la libre circulation des travailleurs turcs sur le territoire de la Communauté, un
accord d 'association a été conclu le 12 septembre 1963 entre cette dernière et la République de
Turquie. Cet accord a pour objet de "promouvoir le renforcement continu et équilibré des relations
commerciales et économiques entre les parties, en tenant pleinement compte de la nécessité d'assurer
le développement accéléré de l'économie de la Turquie et le relèvement du niveau de l'emploi et des
conditions de vie du peuple turc» Voir a rticle 2, paragraphe 1, de l'accord d 'association.6. La réalisation progressive de la libre circulation des travailleurs turcs visée p ar ledit accord d oit se
faire selon les modalités décidées par le conseil d'association, qui a pour tâche d'assurer l'application
et le développement progressif du régime d'associationVoir a rticle 6 de l'accord d 'association.
2. Le protocole additionnel à l'accord d 'association
7. Le protocole additionnel à l'accord d 'association
Ce protocole a été signé le 23 novembre 1970 à Bruxelles et conclu, approuvé e t confirmé au nom de la Communauté par le règlement (CEE)
n o 2760/72 du Conseil, du 19 décembre 1972 (JO L 293, p. 1). fixe les conditions, les modalités et le rythme de laphase transitoire de l'association. Il contient, à son titre II, plusieurs articles relatifs à la circulation des
personnes et des services.8. Il prévoit ainsi, à son article 59, que, "[d]ans les domaines couverts par le présent protocole, la
Turquie ne peut bénéficier d'un traitement plus favorable que celui que les États membres s'accordent
entre eux en vertu du traité instituant la Communauté».3. La décision n
o 1/809. Le conseil d'association a a insi adopté la décision n
o 1/80 qui a, notamment, pour objet d'améliorerla situation juridique des travailleurs et des membres de leur famille par r apport au régime institué par
la décision no 2/76 du conseil d'association, du 20 décembre 1976, relative à la mise en oeuvre de
l'article 12 de l'accord d 'association. Cette dernière décision prévoyait, en faveur des travailleurs turcs,
un droit progressif d'accès à l'emploi dans l'État membre d'accueil ainsi que, en faveur des enfants de
ces travailleurs, le droit d'accéder dans cet État aux enseignements.10. Les dispositions applicables aux droits des membres de la famille d'un travailleur turc sont
énoncées à l'article 7 de la décision n o 1/80. Ce dernier est rédigé comme suit:"Les membres de la famille d'un travailleur turc appartenant au marché régulier de l'emploi d'un État
membre, qui ont été autorisés à le rejoindre:ont le droit de répondre - sous réserve de la priorité à a ccorder aux travailleurs des États membres
de la Communauté - à toute offre d'emploi lorsqu'ils y résident régulièrement depuis trois ans au
moins; 7 8 7 - 8 -ECLI:EU:C:2012:3313
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
y bénéficient du libre accès à toute activité salariée de leur choix lorsqu'ils y résident régulièrement
depuis cinq ans au moins.Les enfants des travailleurs turcs ayant accompli une formation professionnelle dans le pays d'accueil
pourront, indépendamment de leur durée de résidence dans cet État membre, à condition qu'un des
parents ait légalement exercé un emploi dans l'État membre intéressé depuis trois ans au moins,
répondre dans ledit État membre à toute offre d'emploi.» B - Le droit national11. L'article 4, paragraphe 5, de la loi relative au séjour, au travail et à l'intégration des étrangers sur le
im Bundesgebiet), du 30 juillet 2004 BGBl. 2004 I, p. 1950, dans sa version publiée le 25 février 2008 (BGBl. 2008 I, p. 162). prévoit qu'un étranger qui, en application de l'accordd'association, dispose d'un droit de séjour est tenu de prouver l'existence de ce droit en apportant la
preuve qu'il détient un permis de séjour s'il ne possède ni une autorisation d'établissement ni un titre
de séjour permanent dans l'Union européenne. Le permis de séjour est délivré à la demande.
II - Les faits du litige au principal et la question prØjudicielle12. La requérante au principal, M
me Dülger, est une ressortissante thaïlandaise née le 26 juillet 1973 àBuriram (Thaïlande). Elle est entrée sur le territoire allemand le 30 juin 2002 en possession d'un visa
de tourisme.13. Le 12 septembre 2002, elle a épousé, au Danemark, M. Dülger, un ressortissant turc né le
1er décembre 1960 en Turquie. Ce dernier est, depuis 1988, en possession d'un permis de séjour
illimité en Allemagne. Il y a travaillé, auprès de différents employeurs, du 1
er octobre 2002 au 30 juin2004, du 1
er août 2004 au 8 juin 2005, du 1er mars 2006 au 15 mars 2008 ainsi que du 1er juin 2008 au 31décembre 2009. Il est constant, à cet égard, que, pour la période pertinente, M. Dülger est un
ressortissant turc appartenant au marché régulier de l'emploi au sens de l'article 7 de la décision
n o 1/80 Voir, notamment, point 5 de la décision de renvoi.14. Le 18 septembre 2002, la requérante au principal a sollicité auprès des autorités allemandes la
délivrance d'un permis de séjour et a i ndiqué, à cet égard, qu'elle était mariée e t avait deux enfants
nés en 1996 et en 1998 en Thaïlande. Elle a obtenu une autorisation de séjour à d urée limitée afin de
pouvoir mener une vie conjugale commune avec son conjoint. C ette autorisation a été, par la suite,
régulièrement prorogée, dont, en dernier lieu, du 10 septembre 2008 au 26 juin 2011. Depuis le
21juin 2011, ladite requérante est en possession d'un certificat de fiction légale de maintien d'un
droit au séjour.15. Le Verwaltungsgericht Giessen (Allemagne) précise que la requérante au principal a vé cu de
manière ininterrompue avec M. Dülger depuis leur mariage, au mois de septembre 2002, jusqu'à leur
séparation, au mois de juin 2009.16. Le 3 juin 2009, la requérante au principal s'est séparée de son conjoint et s'est installée dans un
foyer d'accueil pour femmes à Friedberg (Allemagne) avec ses deux filles, ces dernières étant arrivées
sur le territoire allemand le 1 er juillet 2006. Depuis, elle perçoit des prestations sociales pourelle-même ainsi que pour ses filles. Le divorce avec son époux est devenu définitif le 3 février 2011.
9 9 -4ECLI:EU:C:2012:331
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
17. Par lettre du 9 septembre 2009, le service des étrangers du Wetteraukreis (district de Wetterau) a
attiré l'attention de la requérante au principal sur le fait qu'elle avait acquis un droit de séjour
autonome après s'être séparée de son conjoint, mais que ce droit n'existait que pendant un an, sans
être soumis à l'obligation pour ladite requérante de faire la preuve qu'elle était en mesure de subvenir
ses besoins et à ceux de ses enfants. Si elle devait continuer à d épendre de l'aide sociale à partir d u
4juin 2010, son droit de séjour, comme celui de ses enfants, devrait être limité a posteriori et elle
devrait quitter le territoire allemand. Ce n'est que si elle et ses enfants étaient, à cette date, en mesure
de subvenir à leurs besoins de manière autonome qu'elle pourrait continuer à bénéficier de son droit
de séjour.18. Le 18 septembre 2009, la requérante au principal a a dressé au Wetteraukreis une demande de
délivrance d'un permis de séjour sur le fondement de l'article 4, paragraphe 5, de ladite loi relative au
séjour, au travail et à l'intégration des étrangers sur le territoire fédéral, au motif qu'elle avait acquis
des droits au titre de l'article 7 de la décision n o 1/80. Elle estime, en effet, être un membre de lafamille d'un travailleur turc appartenant au marché régulier de l'emploi d'un État membre, avec lequel
elle a r ésidé régulièrement depuis trois ans au moins, la question de savoir si le membre de la famille
avait la nationalité turque étant dépourvue de pertinence.19. Par d écision du 15 mars 2010, le Wetteraukreis a r efusé de faire droit à la demande de la
requérante au principal. Il considère que cette dernière n'a acquis aucun droit en vertu de cette
disposition, puisque seuls les membres turcs de la famille d'un travailleur turc seraient en mesure de
se prévaloir d e ladite disposition. Par a illeurs, son conjoint turc n'aurait pas apporté la preuve de son
appartenance au marché régulier de l'emploi puisqu'il n'aurait exercé que de courtes périodes
d'emploi durant leur période de vie commune.20. La requérante au principal a formé un recours contre cette décision devant la juridiction de renvoi.
Cette dernière éprouve des doutes quant à l'interprétation qu'il convient de donner de l'article 7 de la
décision no 1/80. Le Verwaltungsgericht Giessen a donc décidé de surseoir à statuer et de poser à la
Cour la question préjudicielle suivante:
"Une ressortissante thaïlandaise qui a été mariée à un travailleur turc appartenant au marché régulier
de l'emploi d'un État membre et a vécu sous le même toit que ce dernier de manière ininterrompue
pendant plus de trois ans après avoir été autorisée à le rejoindre peut-elle invoquer les droits qui
résultent de l'article 7, premier alinéa, premier tiret, de la décision n o 1/80 [...] avec commeconséquence qu'elle dispose d'un droit de séjour du fait de l'effet direct de cette disposition?»
III - Notre analyse21. À titre liminaire, nous constatons qu'il est établi que la requérante au principal a vécu de manière
ininterrompue avec le travailleur turc depuis leur mariage, au mois de septembre 2002, jusqu'à leur
séparation, le 3 juin 2009 Voir point 5, sous c), de la décision de renvoi. La situation de ladite requérante serait donc susceptible de relever non pas de l'article 7, premier alinéa, premier tiret, de la décision n o 1/80, mais de l'article 7, premier alinéa,second tiret, de celle-ci, étant donné qu'elle a résidé régulièrement depuis cinq ans au moins sur le
territoire de l'État membre d'accueil. 10 11 12 10 - 11 - 12 -ECLI:EU:C:2012:3315
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
22. Dès lors, afin d'apporter une réponse utile à la juridiction de renvoi, il y a lieu de s'interroger sur le
point de savoir si l'article 7, premier alinéa, second tiret, de la décision n o 1/80 doit être interprété ence sens qu'un ressortissant d'un État tiers n'ayant pas la nationalité turque et ayant résidé durant une
période de cinq ans au moins avec son conjoint travailleur turc appartenant au marché régulier de
l'emploi peut être qualifié de "membre de la famille» d'un travailleur turc. Dans l'hypothèse d'une
réponse affirmative, un tel ressortissant perd-il les droits qu'il tire de cette disposition en raison de
son divorce avec ce travailleur turc prononcé à une date postérieure à l'acquisition de ces droits?
A - Sur la notion de membre de la famille23. La Cour a d éjà été amenée à i nterpréter la notion de "membre de la famille» d'un travailleur turc
au sens de l'article 7, premier alinéa, de la décision n o 1/80. Elle a, notamment, jugé que l'enfant d'untravailleur turc conserve cette qualité même après avoir a tteint sa majorité et même s'il mène une vie
indépendante de celle de ses parents dans l'État membre d'accueilVoir, notamment, arrêts du 16 mars 2000, Ergat (C-329/97, Rec. p. I-1487, points 26 et 27), ainsi que du 4 octobre 2007, Polat (C-349/06,
Rec. p. I-8167, point 21).
De même, la Cour a considéré que
la qualification de "membre de la famille» d'un travailleur turc n'est pas limitée à la famille par le sang.
En effet, le beau-fils âgé de moins de 21 ans ou à charge d'un travailleur turc appartenant au marché
régulier de l'emploi d'un État membre est un membre de la famille de ce travailleur Voir a rrêt du 30 septembre 2004, Ayaz (C-275/02, Rec. p. I-8765).24. En revanche, la Cour est amenée, pour la première fois, à r épondre à la question de savoir si un
ressortissant d'un État tiers n'ayant pas la nationalité turque peut être qualifié de "membre de la
famille» d'un ressortissant turc, au sens de l'article 7, premier alinéa, de la décision n
o 1/80, etbénéficier, ainsi, des droits que celui-ci confère. À cet égard, le fait que, comme le souligne la
juridiction de renvoi, dans plusieurs de ses arrêts concernant des affaires portant sur cette disposition,
la Cour a évoqué les droits des membres turcs de la famille d'un travailleur turc
Voir, notamment, arrêts du 22 juin 2000, Eyüp (C-65/98, Rec. p. I-4747); du 18 juillet 2007, Derin (C-325/05, Rec. p. I-6495), et du
22décembre 2010, Bozkurt (C-303/08, Rec. p. I-13445). ne nous paraît pas
pertinent pour la résolution du litige au principal. En effet, dans ces affaires, le membre de la famille
du travailleur turc avait effectivement la nationalité turque, contrairement au cas qui nous est ici
soumis.25. À la simple lecture de l'article 7, premier alinéa, de la décision n
o 1/80, nous constatons que cettedisposition subordonne le bénéfice des droits qu'elle prévoit à la réunion de quatre conditions, à savoir
que l'intéressé soit un membre de la famille d'un travailleur turc, que ce dernier appartienne au marché
régulier de l'emploi, que le membre de la famille ait été autorisé à r ejoindre ce travailleur et, enfin, qu'il
réside dans l'État membre d'accueil durant trois ans au moins ou cinq ans au moins. Il ne ressort donc
pas du libellé de ladite disposition que la qualité de membre de la famille est soumise à une
quelconque condition de nationalité, ce qui n'est pas le cas du travailleur par l'intermédiaire duquel le
membre de la famille obtient ces droits, ce travailleur devant incontestablement être de nationalité
turque.26. Pour autant, l'accord d 'association visant à r églementer la libre circulation des travailleurs turcs sur
le territoire de l'Union, il existe un doute quant à la question de savoir si un ressortissant d'un État
tiers, n'ayant pas la nationalité turque, peut être qualifié de "membre de la famille» d'un travailleur
turc et se prévaloir, ainsi, des droits prévus à l'article 7, premier alinéa, de la décision n
o 1/80. 13 14 15 16 17 13 - 14 - 15 - 16 - 17 -6ECLI:EU:C:2012:331
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
27. La notion de "membre de la famille», au sens de cette disposition, doit, ainsi que la Cour l'a
indiqué dans l'arrêt Ayaz, précité, faire l'objet d'une interprétation uniforme au niveau de l'Union, en
vue d'assurer son application homogène dans les États membresVoir point 39 de cet arrêt.
Sa portée doit, dès lors, être
déterminée e n fonction de l'objectif qu'elle poursuit ainsi que du contexte dans lequel elle s'insère
Voir point 40 dudit arrêt.
28. À cet égard, il convient de rappeler que l'article 7, premier alinéa, de la décision n
o 1/80 poursuitun double objectif. Dans un premier temps, avant l'expiration de la période initiale de trois ans, cette
disposition vise à permettre la présence des membres de la famille du travailleur migrant auprès de ce
dernier, aux fins de favoriser ainsi, au moyen du regroupement familial, l'emploi et le séjour du
travailleur turc déjà régulièrement intégré dans l'État membre d'accueilVoir a rrêt du 29 mars 2012, Kahveci et Inan (C-7/10 et C-9/10, point 32 ainsi que jurisprudence citée).
29. Par la suite, la même disposition entend renforcer l'insertion durable de la famille du travailleur
migrant turc dans l'État membre d'accueil, en accordant au membre de la famille concerné, après une
période de trois ans de résidence régulière, la possibilité d'accéder lui-même au marché du travail. Le
but essentiel ainsi poursuivi est de consolider la cohésion de la famille dont la composante essentielle,
savoir le couple, se trouve déjà régulièrement intégrée dans l'État membre d'accueil
Voir, en ce sens, arrêt Kahveci et Inan, précité (point 33 et jurisprudence citée).En donnant au
conjoint les moyens de gagner sa propre vie dans l'État en question, le texte renforce la situation
économique potentielle de la famille, situation qui constitue un incontestable facteur d'intégration.
30. Par le jeu même de ce mécanisme conçu en faveur de l'intégration du travailleur turc, le conjoint
acquiert, au terme du délai r equis, une situation autonome qui résulte de la nature même du système
organisé par les textes spécifiques Idem.31. À notre avis, il ressort clairement de cette jurisprudence que, s'il est vrai que l'article 7, premier
alinéa, de la décision n o 1/80 s'applique au membre de la famille du travailleur turc, il n'en reste pasmoins que cette disposition a été adoptée dans le but de préserver l'unité familiale afin que le
travailleur turc puisse être véritablement intégré dans l'État membre d'accueil. Les parties à l'accord
d'association o nt, en effet, estimé que la présence des membres de la famille de ce travailleur à ses
côtés était essentielle pour lui garantir les meilleures conditions de travail possibles au sein de cet
État. À ce titre, ladite disposition revêt donc une importance toute particulière du point de vue
humain.32. Dès lors, il importe peu, selon n ous, que le membre de la famille autorisé à rejoindre le travailleur
turc soit ou non de nationalité turque. La famille se définit non pas par la possession de la même
nationalité, mais par les liens étroits qui unissent deux ou plusieurs personnes, que ces liens soient
des liens de droit créés, par exemple, par le mariage, comme dans l'affaire au principal, ou encore des
liens du sang.33. Nous ne voyons pas pour quelles raisons le travailleur turc aurait un droit à maintenir ses liens
familiaux lorsque son conjoint est de la même nationalité alors que, en revanche, il devrait être
empêché d'avoir a uprès de lui ce conjoint lorsque ce dernier est d'une nationalité autre que la
nationalité turque. Cela amènerait, finalement, à considérer que la présence d'un conjoint d'une même
nationalité auprès du travailleur turc est plus essentielle pour l'intégration de ce dernier dans l'État
membre d'accueil que celle d'un conjoint qui n'a pas la nationalité turque. Il en résulterait, par
ailleurs, que, à situation comparable, une épouse qui n'aurait pas la nationalité turque serait moins
bien traitée qu'une épouse de nationalité turque. Cela entraînerait une discrimination inacceptable.
18 19 20 212223
24
18 - 19 - 20 - 21 -
22 -
23 -
24 -
ECLI:EU:C:2012:3317
CONCLUSIONSDEM. BOT - AFFAIREC-451/11
DÜLGER
34. En plus d'être injustifiable, une telle analyse porterait considérablement atteinte à la finalité même
de l'article 7, premier alinéa, de la décision n o 1/80 ainsi qu'au droit du travailleur turc au respect de savie privée et familiale, tel que prévu à l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne. En effet, l'article 51, paragraphe 1, de celle-ci prévoit que ses dispositions s'appliquent
lorsque les États membres mettent en oeuvre le droit de l'Union. Or, ainsi que la Cour l'a indiqué au
point 23 de l'arrêt Kahveci et Inan, précité, l'article 7 de la décision n o 1/80 fait partie intégrante dudroit de l'Union et les États membres sont donc liés par les obligations résultant de cette disposition
exactement de la même manière qu'ils ont le devoir d e respecter les droits institués par la législation
de l'Union.35. Contrairement à ce que soutiennent les gouvernements allemand et italien, nous ne pensons pas
que notre analyse soit de nature à étendre le champ d'application de la décision n
o 1/80.36. Ainsi que nous l'avons indiqué précédemment, le travailleur turc demeure le principal bénéficiaire
de l'article 7, premier alinéa, de la décision n o 1/80, puisque cette disposition vise à préserver l'unitéfamiliale afin que ce travailleur puisse être véritablement intégré dans l'État membre d'accueil. Les
droits que ladite disposition confère aux membres de la famille d'un travailleur turc sont des droits
dérivés, acquis uniquement en cette qualité de membre de la famille. Le travailleur turc reste donc
l'élément déterminant sans lequel il n'est pas possible, pour le membre de sa famille, d'acquérir ces
droits Voir, en ce sens, arrêt Bozkurt, précité (points 36 et 37).37. En outre, nous rappelons que l'article 7, premier alinéa, de la décision n
o 1/80 prévoit que sontsusceptibles de bénéficier desdits droits les membres de la famille du travailleur turc, appartenant au
marché régulier de l'emploi d'un État membre, qui ont ØtØ autorisØs à le rejoindre
Nous soulignons.
Les États
membres restent donc libres d'autoriser ou non le regroupement familialVoir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2004, Cetinkaya (C-467/02, Rec. p. I-10895, point 22).
. Ce n'est qu'une fois qu'ilsont expressément autorisé ce regroupement familial qu'ils sont tenus de respecter les droits garantis
par cette disposition.38. Par a illeurs, notre analyse est corroborée p ar le fait que, selon une jurisprudence constante, les
principes admis dans le cadre des articles 45 TFUE, 46 TFUE et 47 TFUE doivent être transposés,
dans la mesure du possible, aux ressortissants turcs bénéficiant des droits reconnus par la décision
n o 1/80 Voir a rrêt Ayaz, précité (point 44 et jurisprudence citée).39. Ainsi, la Cour a i térativement jugé que la notion de "membre de la famille» d'un travailleur turc,
au sens de l'article 7, premier alinéa, de cette décision, doit être interprétée e n se référant à
l'interprétation de la même notion figurant à l'article 10, paragraphe 1, du règlement (CEE)
n o 1612/68Règlement du Conseil du 15 octobre 1968 relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (JO L 257, p. 2).
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