Principaux-mouvements-littéraires-Fiche-pédagogique.pdf
MOUVEMENTS. LITTERAIRES. Par J.E. Gadenne. (www.lettres.net). (page 1/2). DATES (environ) Mouvement littéraire et artistique en rupture avec.
Le mouvement littéraire Mitady ny very (à la recherche des perdus)
???/???/???? e-France : an on-line Journal of French Studies vol. 2
LES PRINCIPAUX COURANTS / MOUVEMENTS LITTERAIRES
LES PRINCIPAUX COURANTS / MOUVEMENTS LITTERAIRES. (Voir aussi manuel Méthodes et Techniques Nathan – Les mouvements littéraires). I- Antiquité greco-romaine.
Genre Définition Fantastique Mouvement littéraire né au XIXe siècle
Mouvement littéraire né au XIXe siècle. Le surnaturel fait irruption dans la réalité : des événements inexplicables ont lieu et il est.
Histoire dune littérature en mouvement: textes écrivaines et
???/???/???? For ten years literature served the purpose of the Women's Liberation Movement as much as the latter promoted literature
Édition mouvements littéraires et paralittérature
Les collaborateurs examinent ensuite les premières manifestations du mouvement littéraire de 1815 (reprise marquée des relations culturelles avec la France)
Avant de commencer - Notions dhistoire littéraire anglophone
contextualiser davantage les mouvements littéraires car l'un ne va pas sans l'autre. Les Lais de Marie de France et les textes de Chrétien de Troyes.
Daprès le manuel Méthodes et Pratiques. Hatier. 1 LES
LES PRINCIPAUX MOUVEMENTS LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES. XVIEME SIÈCLE. L'HUMANISME. LA PLÉIADE. Mouvement intellectuel et artistique européen né en Italie.
1 METHODOLOGIE POUR LE COMMENTAIRE LITTERAIRE
L'AUTEUR son oeuvre
La réception de la littérature italienne en France des années 1980 à
???/???/???? littérature italienne en France mais les années quatre-vingt voient ce mouvement se renforcer de manière importante au fil du temps (voir ...
UNIVERSITÉ PARIS 3 - SORBONNE NOUVELLE
ED 120 Littérature française et comparée
Littérature et civilisation françaises
Audrey Lasserre
HISTOIRE D'UNE LITTÉRATURE
EN MOUVEMENT
Textes, écrivaines et collectifs éditoriaux
du Mouvement de libération des femmes en France (1970-1981)THÈSE
présentée à l'Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle et soutenue publiquement pour obtenir le grade de Docteur .e en littérature et civilisation françaises, le 3 décembre 2014, sous la direction de Marc DambreEN PRÉSENCE DES MEMBRES DU JURY:
Christine Bard, Professeure, Université d'Angers Marc Dambre, Professeur émérite, Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle Michèle Le Doeuff, Directrice de recherche, CNRS Christine Planté, Professeure, Université Lumière Lyon 2 Alain Schaffner, Professeur, Université Paris 3-Sorbonne Nouvelle 1 Histoire d'une littérature en mouvement : textes, écrivaines et collectifs éditoriaux du Mouvement de libération des femmes en France (1970-1981) Le Mouvement de libération des femmes en France ne fut pas seulement un mouvementpolitique et social, ce fut également l'une des dernières, si ce n'est la dernière, avant-garde littéraire
que la France a connue. Du point de vue international, l'activité des littératrices au sein du Mouvement
constitue un des principes distinctifs de la lutte des femmes en France. Les manifestantes qui déposent
publiquement une gerbe de fleurs à la femme plus inconnue encore que le soldat inconnu sous l'Arc de
Triomphe le 26 août 1970, sont déjà pour certaines - appelées à le devenir pour d'autres - des
écrivaines. Dix ans plus tard, le MLF, depuis peu marque déposée à l'Institut national de la propriété
industrielle, appartient à une éditrice, Antoinette Fouque, promotrice d'une écriture dite féminine.
Dans l'espace circonscrit par ces deux points fixes, paraît un ensemble de textes qui s'inscrivent au
sein de deux tendances majoritaires - mais antagonistes - du Mouvement, le féminisme d'une part et
la néo-féminité, ou éloge de la différence, d'autre part. En miroir, un double rhizome éditorial se
développe, partageant maisons d'édition et revues en deux factions militantes et littéraires bien
distinctes. Pendant dix ans, la littérature se met tout autant au service du Mouvement des femmes que
le Mouvement irradie la littérature, chacun-e influençant et informant la pratique et la pensée de
l'autre. C'est de cette coïncidence entre littérature et Mouvement de libération des femmes que le
présent écrit se propose de rendre compte, afin de retracer un mouvement politique qui fut et se fit
littéraire, et, dans le même élan, une littérature qui fut et se fit politique. Par là même, la thèse
redouble la question posée par tout un mouvement de femmes à la littérature elle-même, contestant ses
définitions premières et repoussant les limites qui lui ont été assignées.Mots clés : Politique et littérature, Féminisme et littérature, Littérature -- Femmes écrivains --
Histoire et critique, Femmes et littérature, Lesbianisme -- Dans la littérature, Littérature française --
1970-.... -- Histoire et critique
The History of a Literature in Movement: Texts, Authors and Editorial Collectives of the Women's Liberation Movement in France (1970-1981) The Women's Liberation Movement (MLF) was not only a political and social movement, butone of the last, if not the very last, literary avant-garde that France has experienced. From an
international perspective, the activity of the literary women within the movement represents one of the
fundamental principles of the fight for women's rights in France. The demonstrators, who publicly placed a bouquet of flowers for the unknown wife of the Unknown Soldier under the Arc de Triomphe on August 26 th 1970, are for some, and are soon to become for others, women writers. Ten years later,the MLF, a recently registered trademark with the National Institute for Intellectual Property Rights,
belongs to the editor, Antoinette Fouque, promotor of female writing. Within the space determined bythese two fixed points, there exists a collection of texts that adhere to two major trends - although
antagonistic - of the movement, Feminism on one hand and Neofeminity, or the praise for"difference", on the other hand. Mirroring each other, a dual editorial form develops, sharing
publishers and scholarly journals, into two distinct literary and militant factions. For ten years,
literature served the purpose of the Women's Liberation Movement as much as the latter promotedliterature, each influencing and informing the other by practice and thought. It is precisely this
coexistence between literature and the Women's Liberation Movement that the present dissertationproposes to examine, in order to trace the political movement that was and made itself literary, and, by
the same token, a literature that was and made itself political. At the same time, the dissertation continues the question asked of literature by an entire women's movement, challenging its assigned definitions and pushing back its boundaries. Key words : Politics and literature, Feminism and literature, Literature -- Women authors --History and criticism, Women and literature, Lesbianism in literature, French Literature -- 1970-.... --
History and criticism
2 3Remerciements
Je voudrais ici exprimer toute ma gratitude à celles et ceux qui m'ont accompagnée, chacun-e à leur manière dans ce qui est devenu une aventure intellectuelle.Pour les entretiens qu'elles m'ont, au fil des années, accordés, Françoise Barret-Ducrocq,
Cathy Bernheim, Marie-Jo Bonnet, Geneviève Brisac, Josée Contreras, Christine Delphy, Catherine
Deudon, Xavière Gauthier, Juliette Kahane, Leslie Kaplan, Liliane Kandel, Michèle Le Doeuff,
Emmanuèle de Lesseps, Orit Mizrahi, Rachel Mizrahi, Claudine Mulard, Christine Planté, Nadja
Ringart, Evelyne Rochedereux, Dominique Samson, Adela Turin, Éliane Viennot, et Anne Zelensky. Pour avoir suivi, avec patience, écoute, et confiance, mes recherches, Marc Dambre. Pour leurs relectures attentives et leurs conseils toujours avisés, Bernard Alazet, Marie-OdileAndré, Cécile de Bary, Yannick Chevalier, Stéphanie Grégoire, Jean-Louis Jeannelle, Hugues
Marchal, Aline Marchand, Valérie Thouard et Amy Tondu.Pour leur accueil cordial et leur aide précieuse en matière documentaire, Annie Metz et
l'équipe de la Bibliothèque Marguerite Durand, Véronique Paris technicienne en archivistique des
Archives et collections spéciales de l'université d'Ottawa, et Bénédicte Dumont du service de la
documentation de Libération.Pour la création graphique du schéma des groupes du MLF, pour l'établissement raisonné, à
partir de l'intégralité du texte, de l'index de fin de volume, Grégory Carp. Pour la mise en forme
graphique de la couverture, Virginie Berthemet. 4 5 " Écrire, ne pas écrire, telle est la question. - Pas du tout, rectifia Rose Prudence, la question c'est : qu'est-ce que les mots ont à voir avec la Révolution, et vice-versa ? » Catherine CRACHAT et Rose PRUDENCE, " Les Chroniques du sexisme ordinaire : La tête d'une fille », Les Temps modernes, janvier 1978, n°378, p. 1106. " Vous êtes sans doute en France le plus important, sinon le seul mouvement politique. » Jérôme LINDON, Éditions de Minuit, à La librairie des Éditions Des femmes, novembre 1979. 6 7Sommaire
REMERCIEMENTS 3
SOMMAIRE 7
INTRODUCTION : " UN CERTAIN ETAT DE FUREUR » 9
PREMIERE PARTIE : LES GUERILLERES : LITTERATRICES DANS L'ACTION MILITANTE (1970-1973) 45INTRODUCTION 47
I. À L'ORIGINE DU MLF : UNE ACTION POETIQUE COLLECTIVE 63 II. FOUQUE ET WITTIG : UNE CONTRADICTION IRREDUCTIBLE AU SEIN DU MOUVEMENT 95III. HOMOSEXUALITE ET LESBIANISME 131
IV. SIMONE DE BEAUVOIR ET LA LUTTE DE FEMMES 159
V. UNE PLUME AU SERVICE DE LA REVOLUTION : DE L'EXPRESSION POLITIQUE ET DE L'ECRITURELITTERAIRE 189
DEUXIEME PARTIE : ECRIRE, DISENT-ELLES (1973-1977) 219INTRODUCTION 221
I. " TOUTES LES FEMMES DEVRAIENT ETRE DES ECRIVAINS » 229II. DONNER A LIRE 261
IV. 1975 : ANNEE INTERNATIONALE DE LA FEMME 365
V. UNES ECRITURES FEMININES 401
TROISIEME PARTIE : LE DIFFEREND DE LA DIFFERENCE (1977-1981) 437INTRODUCTION 439
I. PASSER LE MOUVEMENT EN REVUE 443
II. " LES FEMMES... MAIS N'ETES-VOUS PAS LASSES JUSQU'A L'ECOEUREMENT DE CE MOT ? » 483III. HARO SUR LE FEMINISME 511
IV. LA FIN JUSTIFIE LES MOYENS 541
CONCLUSION : " COURS PETITE SOEUR, LES AVANT-GARDES SONT DERRIERE TOI ! » 575BIBLIOGRAPHIE 581
ANNEXES 651
LEXIQUE 653
NOTICES 655
LES CHANSONS DU MLF 663
LES CARABOSSES ET LE BARCAROSSES 695
INDEX DES AUTRICES/EURS 699
TABLE DES MATIERES ANALYTIQUE 707
8 9Introduction : " Un certain état de
fureur »Le temps de la colère, les femmes,
notre temps est arrivé ; connaissons notre force, les femmes, découvrons-nous des milliers. Hymne du MLF (dernier quatrain), écrit en 1971 par Antoinette Fouque, Monique Wittig, et une dizaine de femmes du Mouvement. " Qu'avant toute préoccupation surréaliste ou révolutionnaire, ce qui domine dans leur esprit est un certain état de fureur. », Manifeste du surréalisme, Résolution du 2 avril 1925. " Le temps de la colère, les femmes, notre temps est arrivé » ouvre le dernier quatrain de la chanson devenue en quelques mois l'Hymne du MLF. Composée par une dizaine de femmes du jeune Mouvement de libération des femmes, notamment Antoinette Fouque et Monique Wittig, elle illustre d'abord, au sein de ce mouvement social et politique, la présencedes littératrices : Antoinette Fouque est à l'époque étudiante sous la direction de Roland
Barthes et s'apprête à devenir éditrice, Monique Wittig est une écrivaine déjà reconnue dont
l'oeuvre est associée au Nouveau roman. Toutes deux, liées quelques années plus tôt, ontcontribué à faire émerger, par l'un des groupes pionniers auquel elles participaient, le
Mouvement de libération des femmes en France. Monique Wittig en particulier est l'autrice d'un texte, " Combat pour la libération de la femme1 » qui est lu en 1970 par Anne Zelensky
et Christine Delphy du groupe FMA2 et par Christiane Rochefort et Misha Garrigue des
Petites Marguerites, favorisant la rencontre de celles qui vont impulser de Paris, par leur manifestation spectaculaire sous l'Arc de Triomphe, un mouvement national. L'Hymne signale également à quel point les femmes changent la conception même dece qu'il est convenu d'appeler à l'époque le militantisme : contrairement aux usages de
l'extrême gauche, elles se réunissent collectivement sur un mode de création festive, inventent
individuellement ou collectivement des textes et mettent ainsi, pour celles dont c'est la
compétence, leur plume littéraire au service de l'expression politique. L'Hymne atteste aussi,1 Monique WITTIG, Gille WITTIG, Marcia ROTHENBURG et Margaret STEPHENSON, " Combat pour la libération
de la femme », L'Idiot international, n° 6, mai 1970 repris dans Cathy Bernheim, Françoise Picq, Liliane Kandel
et Nadja Ringart, Mouvement de libération des femmes : textes premiers, Paris, Stock, 2009, p. 31.
2 Féminin masculin Avenir devenu Féministe Marxisme Action.
10 puisque le Mouvement des femmes se fait atelier d'écriture de tracts, de chansons et de texteslittéraires, que chacune de ces femmes remet en question les limites créatives qui lui ont été
socialement assignées. Le Mouvement des femmes dénonce ainsi dès l'origine les entravesfaites aux femmes créatrices, la manière dont leur création est " étouffée3 », tout comme leur
absence de reconnaissance : elles refusent que la littérature s'écrive sans les femmes. Lesécrivaines, telle que l'incarne l'écriture de chansons poétiques et politiques, réinvestissent
ainsi tous les genres littéraires, du récit à la poésie en passant par le théâtre et l'essai, pour
opérer leur révolution. Le temps des femmes est le temps de la colère, nous dit la chanson. En tant que motifet forme, la colère irrigue l'ensemble des textes de la période : " mon colérique elles4 » écrit
déjà Monique Wittig à propos du pronom de ses Guérillères (Minuit, 1969), alors qu'Hélène
Cixous décrit rétrospectivement " Le Rire de la méduse » (L'Arc, 1975) comme un " éclat de
colère5 ». Dans L'Amour presque parfait, Cathy Bernheim, participante, comme Monique
Wittig, du groupe d'artistes des Petites Marguerites, dont nous restituons pour la première foisici l'histoire, témoigne de l'esprit d'une génération de femmes en lutte en soulignant la force
de la collectivisation de cette colère individuelle6. Mais plus encore, cette colère est, dans le
cas des écrivaines, inspiration, fureur ; elle suit le choc, " celui-là même [nous dit Viviane
Forrester] qui détermine l'écriture poétique et la lie si intensément à la subversion politique :
l'étonnement.7 » De l'accès de colère face à la révélation de l'oppression des femmes,
procède un " délire » inspiré pour chacune des écrivaines, les unes revandiquant leur " folie »
comme le propre du féminin, les autres s'attachant à démontrer que leur parole n'est rien de
moins que de tout à fait lucide et rationnelle. Christiane Rochefort, pilier originel des Petites Marguerites, qui choisit de faire d'" uncertain état de fureur » le titre de deux romans restés inachevés, l'affirme encore des années
plus tard : " j'écris quand je suis en colère [...]. La rogne, ça me fait écrire.8 » En 1975, à la
3 Référence au collectif qui paraît en 1973 : Suzanne HORER et Jeanne SOCQUET, La Création étouffée, Paris, P.
Horay, 1973, 237 p.
4 Monique WITTIG, " Quelques remarques sur Les Guérillères », repris dans La Pensée straight, Paris,
Amsterdam, 2007, p. 115.
5 " Hélène Cixous : Le rire de la Méduse », Hélène Cixous, Martine Reid, Catherine Nesci, Frédéric Regard et
Jean-Michel Rabaté, lectures par Emmanuelle Riva, Conférence du 11 mai 2010, 00 :50 :47.6 " Je me souviens qu'à vingt ans, ma colère était si grande qu'il fallait qu'elle sorte. Si j'avais été seule, alors à
me dresser contre la norme, je ne crois pas que je serais encore ici aujourd'hui, à philosopher tranquillement [...].
J'y aurais laissé ma peau ou ma raison, comme beaucoup d'autres. » Cathy BERNHEIM, L'Amour presque parfait,
Paris, [Éditions du Félin, 1991] Le Félin Poche, 2003, p. 20.7 Virginia WOOLF, Trois Guinées, précédées de L'autre corps de Viviane Forrester, Paris, Des Femmes, 1978,
p. 10.8 Elle écrivait déjà dans la préface à la partie qui était consacrée aux Stances à Sophie par Anne Ophir dans
Regards féminins : condition féminine et création littéraire... Simone de Beauvoir, Christiane Rochefort, Claire
11Rencontre québécoise internationale des écrivains9 qui constitue également une des analyses
inédites de la thèse, Christiane Rochefort développe sa position en précisant que, d'une part,
la colère est une des caractéristiques de la littérature produite par les groupes opprimés, au
rang desquels figurent les femmes, et que, d'autre part, cette colère infléchit son écriture. Le
constat de l'oppression des femmes et de son injustice, qui est à l'origine de cette émotion vive, change donc le tour de l'écriture ; sa course s'en trouve à jamais modifiée. " Une lesbienne est la rage de toutes les femmes condensée jusqu'à son point d'explosion10 », ce slogan que l'on doit aux Radicalesbians américaines en 1970, est repris
par Monique Wittig alors qu'elle prépare son recueil poétique de fragments Le Corps lesbien.La réflexion sur l'hétérosexualité comme vecteur, voire comme origine de l'oppression des
femmes, accompagne en effet la contestation d'une décennie, et constitue une des spécificités
du Mouvement des femmes comme de l'oeuvre de Monique Wittig qui contribue à théoriser" la pensée straight ». Le lesbianisme n'est alors plus seulement la résultante d'un désir d'une
femme pour une autre femme mais déjà un choix politique. Ses textes s'écrivent ainsi à
l'encre violette, " couleur de la lavender menace11 », couleur du lesbianisme.
Hélène Cixous de son côté, lorsqu'elle appelle de ses voeux une écriture féminine tout
en la faisant advenir, précise que la femme " écrit à l'encre blanche12 », donnant un autre
coloration au texte, celle du lait maternel. Deux visions de la politique et de la littérature coexistent alors puis s'affrontent par textes successifs, deux factions de l'avant-garde :écrivaines féministes dont les textes refusent l'assignation à résidence sexuée d'un côté et
écrivaines de la différence ou de la néo-féminité*13 promouvant la femme et le féminin de
l'autre. Toutes deux forment une des dernières avant-gardes, si ce n'est la dernière, que la France ait connue. Liant indissociablement politique et littérature, elles mettent en question le politique tout autant que la littérature elle-même.Etcherelli que la " ségrégation » opérée par les critiques mettait les écrivaines " en rogne » (Paris, Denoël
Gonthier, 1976, p. 89).
9 Voir Liberté, 1976, vol. 18, no 4-5 (106-107), p. 113-122 et l'étude que nous consacrons à cette Rencontre dans
la deuxième partie.10 " What is a lesbian ? A lesbian is the rage of all women condensed to the point of explosion » est l'ouverture
du manifeste " The Woman indentified woman » des Radicalesbians (1970), le texte intégral de quatre pages a
été mis en ligne par l'Université de Duke à l'adresse suivante :11 Anonyme [Monique WITTIG], " Un moie est apparu... », Le torchon brûle, n° 5, [n. d. 1973], p. 3 et Revue
Minuit, 1972, p. 44.
12 Hélène CIXOUS, " Le rire de la Méduse », L'Arc, 1975, no 61, p. 44.
13 Nous signalons par un astérisque la première occurrence des termes, fréquents dans notre corpus, qui n'ont pas
rejoint les dictionnaires et que nous avons choisi de faire figurer dans le lexique placé en fin de volume.
12 Féminisme ou Mouvement de libération des femmes ? On le constate, peut-être avec surprise, toutes les femmes du MLF ne se disent doncpas féministes. Décrivant son expérience du Mouvement des femmes aux États-Unis,
l'écrivaine et philosophe Françoise Collin prévenait ainsi en 1972 : " on hésite parfois à
utiliser le terme de "féministe" qui est attaché à une certaine tradition et à une certaine forme
de lutte, le terme de mouvement des femmes, Women's Movement, est plus juste.14 » Pourtant,en France, c'est bien la lutte féministe de la première vague des suffragettes qui est
revendiquée par certaines femmes, dès l'origine du Mouvement. Christine Delphy, Monique Wittig, Emmanuèle de Lesseps ou encore Cathy Bernheim se regroupent ainsi sous l'appellation des Féministes révolutionnaires, qui, plus qu'un groupe, devient rapidement une tendance du Mouvement des femmes. Leur féminisme est résolument matérialiste. Un second groupe guidé par Antoinette Fouque, Psychanalyse et Politique, et les femmes qui en sontproches (Hélène Cixous notamment) se définissent alors, en réaction, résolument
antiféministes. C'est de cette tendance que procèdent du point de vue éditorial, les Éditions
Des femmes, et du point de vue littéraire, l'écriture féminine. On ne peut donc pas résoudre l'opposition essentielle, qui se mue au fil de la décennieen conflit agonistique, entre féministes et partisanes de l'écriture féminine, et plus largement
de la différence, en séparant le féminisme politique du féminisme philosophique. C'est en
effet le parti que prenait Christina Angelfors dans sa thèse publiée en 1989 La Double
conscience : la prise de conscience féminine chez Colette, Simone de Beauvoir et Marie
Cardinal
15, en distinguant le féminisme politique pluriel du féminisme philosophique qui se
rangerait en deux courants distincts mais sagement unis sous la définition que Nicole-Claude Mathieu en donne dans L'Arraisonnement des femmes en 1985 : " analyse, faite par desfemmes (c'est-à-dire à partir de l'expérience minoritaire), des mécanismes de l'oppression des
femmes en tant que groupe ou classe par les hommes en tant que groupe ou classe, dans diverses sociétés, et volonté d'agir pour son abolition16 ». L'un de ses deux courants
" philosophiques », celui dit de la néo-féminité refuse en effet explicitement, comme nous y
insistons, le terme de féminisme. Respecter l'intégrité de la pensée qui préside à ce choix
permet alors d'expliquer ce que le refus terminologique et conceptuel signifie. De plus, la distinction entre féminisme politique et féminisme philosophique témoigned'une vision du monde et du féminisme, qui associe la politique à l'action de rue et la
14 Françoise COLLIN, " New York des femmes », La Revue nouvelle, 1972, p. 25.
15 Christina ANGELFORS, La Double Conscience: la prise de conscience féminine chez Colette, Simone de
16 Nicole-Claude MATHIEU (dir.), L'Arraisonnement des femmes, 1985, Paris, EHESS, p. 172.
13 philosophie (comme la littérature) à la pensée, sans voir que les deux sont historiquementconjointes, ce qui constitue d'ailleurs la plus grande spécificité du Mouvement de libération
des femmes en France, au regard des autres mouvements européens ou américains17. À
simplement regarder le profil et le parcours des " militantes18 » de l'époque, on se souvient
que Monique Wittig publiée par les Éditions de Minuit est de toute les manifestations au pointde se retrouver à plusieurs reprises en garde à vue ; que l'influente Françoise d'Eaubonne, qui
écrit à l'époque fiction et essais sur le féminisme, fomente des commandos saucisson contre
l'association Laissez-les-vivre, que la jeune Antoinette Fouque forge de toutes pièces des éditions de femmes militantes soutenant les textes de femmes, etc. À compulser les revues comme les textes, leur dimension et leur projet politique deviennent évidents. Si les féministes matérialistes se nomment Féministes révolutionnaires, c'est dans la même logique radicale qu'Antoinette Fouque puis Hélène Cixous s'opposent au terme commeau concept de féminisme. Le travail de Psychanalyse et Politique consiste, dans la lignée de la
rupture inaugurée par mai 1968, et non dans la continuité des mouvements de femmes dusiècle passé et de la pensée du Deuxième Sexe, à " déconstruire le féminisme comme
idéologie et à faire émerger un sujet femme.19 » Formidable formule à laquelle les féministes
répondraient sans doute que le travail consistait pour elles, dans la lignée de la rupture
consacrée par mai 1968, et dans la continuité des mouvements de femmes du siècle passé et
de la pensée du Deuxième Sexe, à déconstruire la femme comme idéologie et à faire émerger
un sujet féministe. On y reviendra, Hélène Cixous affirme en 1977 que, de son point de vue, " de façonextrêmement précise, le féminisme [à l'époque] est une idéologie, qui à la limite, est
réactionnaire.20 » Elle oppose alors le féminisme à la lutte des femmes, en précisant que le
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