[PDF] LES ANNONCES DE LA SEINE Rentrée du Barreau de Paris





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déclarations

13 nov. 2015 15 ET 16 DÉCEMBRE 2015 ... Les mardi 15 et mercredi 16 décembre ... la bibliothèque de l'Ordre où des écrans tactiles permettront.



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13 nov. 2015 15 ET 16 DÉCEMBRE 2015 ... Les mardi 15 et mercredi 16 décembre ... la bibliothèque de l'Ordre où des écrans tactiles permettront.



COMPTE RENDU DU MERCREDI 16 DÉCEMBRE 2015

L'an deux mille quinze le MERCREDI 16 DECEMBRE 2015 à 19h00. Le Conseil Municipal de la ville de Vincennes



SOMMAIRE CM_CG des 14 15 et 16 décembre 2015

15 juin 2022 Ville de Paris ?Conseil municipal et départemental ? Séance des 14 15 et ... La séance est levée



Mise en page 1

16 nov. 2015 BIBLIOTHÈQUES. DE LYON. NUMÉRO 123. NOVEMBRE –. DÉCEMBRE 2015. EXPOSITION. Shadi Ghadirian rétrospective. DOSSIER REPÈRE. Resterons-nous.



LES ANNONCES DE LA SEINE Rentrée du Barreau de Paris

23 déc. 2015 Journal Spécial des Sociétés - Mercredi 23 décembre 2015 - numéro 60 ... des 15 et 16 décembre 2015 au Conseil de l'Ordre de Paris.



Approbation de la gratuité des inscriptions dans les bibliothèques

17 déc. 2021 La Ville de Marseille s'est dotée d'un Plan de Développement de la Lecture Publique adopté par délibération le 16 décembre 2015.



Untitled

Du 28 novembre au 20 décembre. Exposition de l'artiste YANKA - Espace. Plaisance Bibliothèque municipale. Mercredi 2 décembre. 16h30 : Club des 4-6 ans - 



mercredi 16 décembre 2015

16 déc. 2015 Roger ALLARD (1885-1961) poète et critique d'art. Manuscrit autographe Inscriptions pour un album des péchés capitaux



La Vie de lécole

2 déc. 2015 Sciences et avenir décembre 2015 ... En décembre 2015

LES ANNONCES DE LA SEINE Rentrée du Barreau de Paris anciennement

Mercredi 23 décembre 2015 - numéro 60

LES ANNONCES DE LA SEINE

JOURNAL OFFICIEL D'ANNONCES LÉGALES - INFORMATIONS GÉNÉRALES, JUDICIAIRES

ET TECHNIQUES

bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines,

Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

8, rue Saint-Augustin - 75002 PARIS - Téléphone : 01 47 03 1

0 10 - Télécopie : 01 47 03 99 00

Internet :

www.jss.fr - e-mail : redaction jss .fr et annonces@jss.fr

JOURNAL SPÉCIAL DES SOCIÉTÉS FONDÉ EN 1898 PAR RENÉ LESEUR - LES ANNONCES DE LA SEINE FONDÉES EN 1919 PAR RENÉ TANCRÈDE

DIRECTRICE DE LA PUBLICATION

: MYRIAM DE MONTIS - DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : CYRILLE DE MONTIS - RÉDACTEUR EN CHEF : JEAN-RENÉ TANCRÈDE

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

Rentrée du Barreau de Paris

11 décembre 2015

A u moment de quitter leurs fonctions

Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet

ont rendu compte de leurs réalisations, des combats qu'ils ont menés et des résultats obtenus lors de l'Audience Solennelle de Rentrée du Barreau de Paris qui se déroulait le

11 décembre dernier dans la 1ère

Chambre de la

Cour d'appel de Paris. Christiane Taubira, les Chefs des Juridictions suprêmes et de la Cour d'appel de Paris, le Défenseur des Droits, des fonctionnaires de la Haute Administration et de nombreuses personnalités françaises et étrangères du monde du droit et du chiff re étaient présents pour ce rendez- vous annuel incontournable de la famille judiciaire. Les lauréats du concours d'éloquence 2015 ont discouru avec talent et ont ainsi porté haut les couleurs de l'excellence oratoire du jeune Barreau parisien : le 1 er

Secrétaire Alexandre Luc-Walton

a choisi d'évoquer la mémoire du célèbre Avocat Jean-Jacques de Félice grand Défenseur des Droits de l'Homme, quant à la 2

ème secrétaire Cosima Ouhioun,

elle a consacré sa plaidoirie au procès de Mata Hari.

Madame la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, a

notamment insisté sur le rôle précieux des Avocats qui sont les garants du respect de la loi et des droits de la Défense. C'est le Vice-Bâtonnier Laurent Martinet qui s'est adressé en premier à ses confrères pour leur dire " ce à quoi je crois » : bicéphalisme de la fonction de Bâtonnier, exigence d'ouverture du Barreau de Paris, force et fécondité de la déontologie furent au coeur de ses propos qu'il a conclus en formulant le voeux que " la paix et la liberté règnent dans notre pays ». Le Bâtonnier Pierre-Olivier Sur a choisi de centrer sa brillante intervention sur " les combats pour la paix, par le Droit, face à l'Histoire » : l'aide juridictionnelle, le périmètre du droit, l'observatoire international des avocats, le marché du droit, la résolution amiable des litiges, la lutte contre le terrorisme... Face aux défis lancés à la profession d'Avocat, il a ainsi réaffi rmé avec force le triomphe de la place du Droit et des libertés indispensables à toute société humaine et démocratique. Jean-René TancrèdeAlexandre Luc-Walton, Pierre-Olivier Sur, Cosima Ouhioun et Laurent Martinet

AUDIENCE SOLENNELLE

rentrée du barreau de paris

- Le Droit contre la force par Pierre-Olivier Sur ....................................................2

- OEuvrer ensemble par Laurent Martinet ............................................................5

- Eloge d'un avocat disparu par Alexandre Luc-Walton ......................................7 - Le procès de Mata Hari par Cosima Ouhioun ................................................10 AGENDA ........................................................................ .................................4

ELECTIONS

barreau de paris

- Bâtonnier et vice-Bâtonnier .......................................................................

..........12 - Une reconnaissance constitutionnelle par Frédéric Sicard .............................12

- Membres du Conseil de l'Ordre .......................................................................

...13 - Faire rayonner le Barreau de Paris par Dominique Attias ...............................14

AU FIL DES PAGES

guide des saisies-contrefaçons et des constats 2016 .................14 ANNONCES LÉGALES......................................................................15

ÎLE-DE-FRANCE

l'art en prison - " paroles du dedans » par Marie-Stéphanie Servos ................................32 Journal Spécial des Sociétés - Mercredi 23 décembre 2015 - n uméro 60 5

Audience solennelle

collaborateurs.

Nos collaborateurs ne consulteront plus

Dalloz, Lextenso, LexisNexis, Lamy, etc. Ce seront des juristes situés dans les pays du Maghreb ou en Inde, qui eff ectueront les recherches juridiques et qui rédigeront même les actes. C'est ce qu'on appelle l'out sourcing

60 000 juristes l'exercent aujourd'hui en Inde.

Et, lorsque nous n'aurons plus besoin

d'out sourcing, ce serait des machines dotées d'intelligence artificielle qui nous remplaceraient... nous les Avocats, et vous les Juges... ?

Ce scénario de science-fiction est un danger

réel, auquel il faut résister. Car l'acte de Juger, avec des motifs et un dispositif, n'est finalement rien d'autre qu'un raisonnement facilement transposable dans un algorithme que la machine pourrait traduire, harmonisant ainsi les jurisprudences sur le plan national, européen et même mondial.

Par exemple pour un divorce : combien d'enfants,

quel patrimoine, quels revenus ? La prestation compensatoire, avec la pension alimentaire, pourraient se calculer automatiquement ! Il en est déjà ainsi pour l'évaluation du préjudice corporel, dans les aff aires d'accident...

Le projet de justice du 21

ème

siècle (J21) prévoit de renforcer les Modes Alternatifs de Règlement des Différends (les MARD). Initiative louable, puisqu'elle invite les parties à réfléchir et à rechercher une conciliation et peut-être même une transaction. Mais elle ne doit pas être détournée de sa vocation par l'intrusion de projection utilisant l'intelligence artificielle pour simuler ce que pourrait être une décision de Justice. Le Barreau, tout en encourageant la résolution amiable des litiges, insiste sur l'importance primordiale du facteur humain, pour qu'aucun

Juge ou Avocat, ne devienne jamais esclave de la

machine. Et pour qu'il y ait toujours au bout de la route, un Juge. C'est le défi de demain.

Un Juge, un Avocat, comme en médecine,

l'humain demeure essentiel.

L'humain c'est le lien, confiance/conscience,

la confiance du client, la conscience de l'Avocat et du Magistrat ;

L'humain c'est la transformation d'une

émotion à travers trois personnages, le

justiciable, l'Avocat, le Juge, pour dessiner la vérité judiciaire ;

L'humain c'est la plaidoirie qu'on attend, qu'on

prononce, qu'on entend. La plaidoirie demeurera le seul moyen pour l'exprimer. Nous seuls, Avocats et Magistrats, savons que l'homme est toujours plus grand que ses fautes... Cela, jamais le robot ne le comprendra et l'émotion ne sera jamais rattrapée par la machine. Il n'y aura jamais rien d'autre que des mots pour rassembler les éléments de preuve et d'humanité et peser sur l'intime conviction.

Craignons que si le robot remplaçait l'Homme,

on ne puisse plus dire " au commencement était le

Verbe »

, mais " au commencement est le Robot » Et même s'il en était ainsi, il faudra toujours à la fin, un Juge et un Avocat. Car la défense doit avoir la parole en dernier. Sinon c'est la fin du monde. Donc, pour l'éviter, ce n'est plus " au commencement était le Verbe, mais à la fin sera le Verbe ». Redescendons sur terre, vous l'avez compris, il est temps pour moi de céder la place à mon successeur Frédéric Sicard.

Je voudrais garder quelques images de

l'aventure avec vous tous : La minute de silence observée par 3 000 Avocats et Magistrats dans la Salle des pas perdus et le bourdon de Notre-Dame qui sonnait le glas, en janvier dernier ;

Les prestations de serment dans la salle haute

de notre bibliothèque, car j'ai essayé d'accueillir tous les jeunes Avocats pendant deux ans, pour les féliciter d'avoir choisi le plus beau métier du monde ; Le poème de Paul Eluard " Liberté », récité avec des enfants de 10 ans, dans une école, où

Initiadroit m'avait conduit ;

Jean-Yves Le Borgne et Henri Leclerc, dans

leurs discours aux nouvelles promotions de l'EFB pour cette émotion transmise par deux immenses Avocats à leurs futurs confrères et aussi à nous tous ;

Le premier rang de la grande Synagogue de

Jérusalem, pour la prière du vendredi soir entre le rabbin, l'imam et le prieur d'Abu Gosh, avec la délégation du Barreau de Paris ; La dernière étape du quartet tunisien prix Nobel de la paix, à notre Université d'Hiver, symbole de la Vérité, que les Avocats doivent soutenir. Voilà le caléidoscope des images, des émotions, des valeurs de notre Barreau, qu'avec Laurent

Martinet et le conseil de l'Ordre, nous avons

portées avec passion pendant deux ans, pour un seul but : le Droit contre la force.

OEuvrer ensemble

par Laurent Martinet A ujourd'hui, notre pays est confronté à une adversité que nous n'avions pas connue depuis des décennies.

Mardi et mercredi derniers, dans le cadre de

notre Université d'Hiver, des signaux d'alarme ont été lancés par des interlocuteurs extrêmement divers. Magistrats, Juge anti-terroriste, hommes et femmes politiques, ancien Premier Ministre, ancienne représentante des institutions patronales, journalistes et Avocats.

C'est paradoxalement cette conjoncture dramatique

qui m'incite, contre les usages et les habitudes les plus courantes, à commencer plutôt qu'à fi nir par former des voeux pour le nouveau Bâtonnat.

Des voeux de bonheur pour commencer. Je souhaite

que le nouveau Bâtonnier et la nouvelle Vice- Bâtonnière travaillent dans un monde et dans un pays en paix. Je souhaite, car je sais combien notre métier est une mesure de la Démocratie, qu'ils soient les représentants d'une profession épanouie et réellement présente dans la société et dans les débats. Je forme aussi pour eux, et pour tous les Avocats, des voeux de prospérité. Ce que j'appelle prospérité, ce n'est pas le luxe tapageur, ce n'est pas l'abondance irréaliste. Ce que j'appelle prospérité, c'est un état de succès et de réussite. C'est donc une capacité à porter les idées qui vous sont chères et à les réaliser. Ce que j'appelle prospérité, c'est - sans jeu de mot - une certaine façon " d'avoir les moyens » Je forme le voeu que le Bâtonnier et la Vice-Bâtonnière veuillent et puissent travailler dans la continuité de l'action qui fut la nôtre et celle de nos prédécesseurs. Car nous tous ici réunis, nous avons l'ambition de

construire pour le Barreau. Et j'ai une idée fixe, une conviction fondamentale. Je l'ai affirmée lors de l'Université d'Hiver 2014 et j'ai eu de nombreuses fois l'occasion de la dire et de la redire au cours de mon

mandat : il faut construire sans passer par la case détruire. Ainsi, on fédère. Ainsi, on va plus loin. Ainsi, on capitalise sur l'existant. L'existant, c'est aussi le moment de le rappeler et de dire combien nous en sommes fi ers, Pierre-Olivier et moi-même. Je laisse bien sûr au Bâtonnier le soin de faire tout à l'heure la synthèse de notre action. J'insisterai ici seulement sur ce à quoi j'ai dédié le plus d'attention. On sait quelle a été ma passion pour l'EFB dont, à travers moi, le Président fut, pour la première fois, le Vice-Bâtonnier. J'ai considéré d'emblée qu'il était essentiel que Magistrats et Avocats se rapprochent.

Xavier Ronsin, Directeur de l'ENM et moi-même,

avons pour cela mis en place des enseignements communs, tant en formation initiale qu'en formation continue, sur la base d'une réciprocité sans faille. Nous sommes en mesure aujourd'hui de proposer à nos élèves-Avocats de rejoindre l'ENM à Bordeaux, de même que les élèves de l'ENM sont les bienvenus à Paris. Je tiens à vous en remercier, Monsieur le Directeur, car ainsi nous avons construit, pour les Avocats et pour les Magistrats, un avenir diff érent de ce que fut notre passé et autrement plus prometteur. Je salue également le Bâtonnier Jean Castelain qui nous laissa une pépite en ouvrant cette Ecole. Une pépite, ce n'est d'ailleurs peut-être pas le seul mot pour la qualifi er. Je devrais dire aussi un écrin ; un creuset ; un lieu créatif, inventif, protéiforme au sens où il allait s'avérer susceptible de recevoir notre propre impulsion et de traduire toutes nos ambitions. C'est en hommage reconnaissant au tandem qu'il formait avec le Bâtonnier Jean-Yves Le Borgne qu'il m'a semblé naturel que celui-ci parraine notre première promotion, de

2 000 élèves-Avocats.

L'Ecole a rompu avec toute tentation de répéter l'enseignement universitaire, comme il le fallait. Elle est devenue une véritable école d'application pratique, formant les élèves-Avocats pour qu'ils aient l'espoir de connaître rapidement le succès, et le bonheur d'être immédiatement opérationnels, dès leur prestation de serment. Pour cela, nous avons voulu imprimer une double orientation, côté gestion et côté déontologie. En gestion, parce que la vie des Cabinets, leur survie parfois, dépend évidemment de la pertinence des décisions et des choix stratégiques et managériaux, et cela ne s'improvise pas.

Laurent Martinet

Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35

10 Journal Spécial des Sociétés - Mercredi 23 décembre 2015 - n

uméro 60

Audience solennelle

Le procès de Mata Hari

par Cosima Ouhioun R habillez-vous !

Vous trouvez ça approprié d'être aussi

débraillée en ces jours solennels ? Ne voyez- vous pas le danger qui rôde, le péril de notre Nation, l'ennemi à notre porte ? Tout le monde est en alerte, accroché à son poste, dans l'attente de la prochaine tragédie. Et vous, vous continuez à vous donner en spectacle, dans l'attente de déguster champagne et petits fours. Attendez, mon intention est bonne. Je veux vous défendre. Mais je ne peux pas le faire si vous êtes... dénudée ! Moi, sous ma robe, je me sens forte. Vous, nue devant moi, je vous vois faible. Ecoutez le philosophe : " il y a des cas, que commande la raison d'état, où il faut mettre pour un moment, un voile sur la liberté » . Mais c'est pour mieux vous protéger. Ah non ne m'accusez pas ! Comment ? " Qui est la femme soumise » ? Vous ? Qui ne vous refusez point et ne vous livrez pas ?

Qui savez-vous faire esclave et rester reine ? Ou

Moi ? Qui sous prétexte de pudeur cède à la peur ? Sous couvert de vous défendre, protège ceux qui vous gouvernent ? Le 24 juillet 1917 s'ouvre le procès. Ici même, juste en face de cette salle. L'accusée, heureusement s'est habillée. Une robe bleue au décolleté profond. Avec ce visage que vous aimez détester. Mais lequel ? Celui d'un parasite ? Cette sangsue qui vit à nos crochets et subsiste de notre argent, Ou Pire ? D'un étranger ? Celui qui vient en France pour nous voler notre travail, Non. Pire encore. Pire que tout cela. Une femme. Une parasite et une étrangère. Une femme. Pécheresse par nature. Qui n'use de ses charmes que pour en abuser. N'amuse les hommes que pour les amener à se confi er. N'écoute leurs confi dences que pour trahir leur confiance. Bref, juste une femme. Comme vous Mesdames. Comme moi. Mata Hari a 40 ans et un physique atypique pour une hollandaise. Une grande pousse aux cheveux noirs. Au teint mat et velouté. Au regard noir et provocateur. Belle. Sensuelle. Intelligente. Envoûtante. Puissante. Mais aussi : Impulsive. Impertinente. Obstinée. Vénale. Et parfois, naïve. La rumeur de la foule excite l'animal en cage. Elle les entend derrière la porte de la salle d'audience : ces curieux endimanchés attiré par le célèbre nom de la danseuse eff euilleuse. Il quête des billets d'entrée pour son dernier spectacle : " Va-t-elle encore se mettre à nu ? » Mais ce spectacle se jouera à huis-clos, sans public, sans journaliste, sans voyeur, sans personne. Face à elle, 3 lieutenants, 2 capitaines, un adjudant.

6 hommes, 6 militaires, le troisième Conseil de Guerre

qui scrute avec autant d'horreur que de fascination le menu du jour. Comment ça ? Une femme ? Une civile ? Jugée par des militaires ? Mais oui, l'état de siège est décrété : la Justice ne siège plus en robe mais en uniforme. Et ce n'est pas que la mode vestimentaire qui est changée :

Couvre-feu, perquisitions, interdiction des

manifestations ; L'espionnage n'est plus un délit mais un crime ;

Ce n'est plus 5 ans de prison mais la mort.

Mata Hari est inculpée pour espionnage et intelligence avec l'Ennemi, l'Allemagne. Depuis le box, son regard est attiré malgré elle par l'un des Juges. Il a un tic insupportable. Son oeil gauche cligne frénétiquement, et donne à ce visage abîmé des allures bestiales. Qu'est- ce qu'il a celui-là ? Une poussière dans l'oeil ? C'est Elle qui l'indispose ? Ou est-ce qu'il cherche à faire taire un souvenir douloureux ? Oui, il rentre à peine du front où il a touché cette réalité insupportable :

Cette Guerre qui n'en fi nit pas ;

Ces dirigeants qui ne tiennent pas leurs promesses et

qui sont pointés du doigt : par cette chair à canon qui se révolte, par cette force de travail qui se met en grève ;

Partout, ils détectent des espions ;

Partout, ils cherchent des coupables pour détourner l'attention ; Et l'enthousiasme des soldats qui a laissé place à la lassitude et au ressentiment. Lui-même, en rentrant, a trouvé sa femme dans les bras d'un autre. Il est écoeuré par cette noce à Paris, l'inconduite des

épouses, l'insouciance des civils.

Et c'est à lui que revient l'honneur de prendre la parole en premier : " Madame Zelle, approchez-vous et déclinez votre identité » . Ce nom la fait frissonner. Cette Madame Zelle est une inconnue pour Mata Hari. Elle se lève, se glisse avec légèreté jusqu'à la barre. Et ne sait par où commencer. Elle si pleine de vies, de nombreuses vies et de nombreuses identités. Laquelle donner aujourd'hui ? Elle est née : Margaretta Gertrude Zelle d'une famille ni prolétaire, ni bourgeoise. Elle s'est mariée : Lady Mac Leod à un militaire hollandais, lâche, alcoolique et violent qui l'emmène vivre en Indonésie. Mariée à 18 ans, mère à

20, divorcée à 25. Impulsive. Effi cace. Elle s'est émancipée

sous un nouveau nom de scène. Le seul qu'elle choisit, le seul qui lui ressemble : Mata Hari qui signifi e, le soleil en Indonésien. Elle s'invente un nouveau passé qu'elle modifi e au gré des interlocuteurs : elle se dit indienne ou javanaise, initiée par des prêtres hindouistes aux danses sacrées dont elle seule connaît le secret. La vie est une comédie et Mata Hari passe la sienne à interpréter un rôle. Sans le savoir, elle creuse déjà sa tombe : tous ces mensonges font d'elle le parfait espion. Elle a 26 ans lorsqu'elle arrive à Paris réaliser ses rêves de grandeur. Son succès est immédiat. Devant tout Paris, Berlin, Milan, Madrid, Amsterdam, elle exécute des numéros de danse exotique. Du jamais vu. Du jour au lendemain, elle devient la reine de Paris et de la Belle Epoque. Les journaux la célèbrent. Les salons la réclament. Le public l'adule. Elle incarne la liberté : elle rejette les institutions bourgeoises et cette morale qui devrait s'imposer avec plus de rigueur aux femmes qu'aux hommes. Elle n'est ni l'épouse, ni la mère, ni la veuve éplorée. Elle collectionne les amants sans s'en cacher : Hollandais, Irlandais, Allemands, Russes, ou Français .Riches, célèbres ou désargentés, jeunes ou séniles, sportifs ou apoplectiques, militaires, diplomates ou banquiers. Elle s'affi che dénudée ? Et alors ? Elle est entretenue ? Et alors ? Sa légèreté n'enlève rien à son intelligence. Et ce qu'elle n'a pas peur d'être, elle n'a pas

peur non plus de le dire. Mata Hari ment mais elle ne triche pas. Ce qui forçait l'admiration à la Belle Epoque pousse à la suspicion en temps de guerre. La femme libre, moderne et puissante, devient la putain immorale et manipulatrice. Le Président l'interroge longuement sur son mode de vie, ses amants, ses mensonges. La femme le regarde droit dans les yeux. Elle revendique et provoque :" Monsieur le Président,

J'ai toujours vécu pour l'amour et le plaisir. J'aime les offi ciers, je les ai aimés toute ma vie. J'aime mieux être la Maîtresse d'un officier pauvre que d'un banquier riche. Mon plus grand plaisir est de pouvoir coucher avec eux, sans penser à l'argent. Et puis, j'aime faire entre les diverses nations des comparaisons, mais je vous jure que les relations que j'ai eues avec eux ne sont inspirées que des sentiments dont je parle ». Le Président manque de s'étouffer. Lui-même est lieutenant-colonel ; elle le voit rougir de honte à l'idée qui lui traverse l'esprit : " Pourquoi pas moi ? Ce qu'il aurait été bon et réconfortant d'être l'un de ces offi ciers ». Il s'égare quelques instants et s'imagine assister à l'un de ses spectacles : il fantasme, une scène, là, au centre de cette salle. Imaginez : Une brume épaisse qui s'estompe peu à peu. Le soleil se lève et entame sa danse. Le corps levantin de Mata Hari ondule comme un océan face au vent. Ses bras se nouent comme des serpents. Avec délicatesse, elle se libère un à un des voiles qui la recouvrent. Jusqu'au complet dénuement. Le lieutenant colonel se retranche dans son bunker intérieur. Pendant que l'accusée pérore sur son passé. Le Commissaire du gouvernement, André Mornet, ancien avocat, ancien premier secrétaire de la conférence, se lève à son tour et tousse pour réveiller le premier et montrer à la deuxième qu'il ne se laisse pas impressionner par son éloquence.

C'est à lui d'entrer en scène.

Son dossier est épais. Des centaines de pages de rapports de fi lature quotidienne de Mata Hari depuis son retour à Paris en 1915. On l'attend à la sortie de son hôtel. On la suit dans les soirées privées. Chaque fait, chaque geste, chaque rencontre de la danseuse paraît suspect. La voici qui dîne avec un diplomate - c'est qu'elle lui soutire un secret. La voilà qui sirote un verre avec un roumain suspect - c'est qu'elle lui transmet ce secret. La voici encore qui reçoit un virement depuis la Hollande - c'est sa rémunération pour son crime ! Et cette lettre qu'elle écrit à u n ami en Espagne, Elle lui parle de Paris : elle fait référence aux décisions politiques qui y sont prises ! Elle lui parle de la danse : c'est une métaphore pour parler de la guerre ! Le caractère anodin de cette lettre cache nécessairement un message secret. Les rapports de surveillance sont aussi passionnants qu'une notice de médicament : " A une heure 30 la dénommée Zelle est allée au salon de lecture de l'hôtel et vingt minutes plus tard, elle est remontée dans sa Chambre »,

édifiant.

" Vers 14h30, la nommée Zelle s'est rendue chez Léon, chapelier » confondant. " Aujourd'hui... rien à signaler ». Mata Hari est un virus indétectable. Et surtout, dans ce dossier, une pièce, une pièce qui va l'enterrer : une série de télégrammes rédigés par les renseignements allemands et interceptés par leurs homologues français. Tout y est ! le recrutement en tant qu'espion de la danseuse par l'Allemagne en 1915 ; les rapports prétendument complets adressés à l'ennemi ; Et les 5 informations transmises parmi lesquelles : " le projet de la France d'une off ensive générale de grand style sur tous les fronts pour le printemps 1917 ». Ou encore : " la rumeur qui coure parmi les officiersquotesdbs_dbs28.pdfusesText_34
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