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Perspectives chinoises

2013/3 | 2013

L'urbanisation

de la Chine rurale Causes et conséquences d'une urbanisation rapide dans une région ethniquement variée Étude de cas d'un chef-lieu de district au Yunnan Ben

Hillman

Traducteur

Antoine

Roset

Édition

électronique

URL : http://journals.openedition.org/perspectiveschinoises/6621

ISSN : 1996-4609

Éditeur

Centre d'étude français sur la Chine contemporaine

Édition

imprimée

Date de publication : 15 septembre 2013

Pagination : 27-34

ISBN : 979-10-91019-08-8

ISSN : 1021-9013

Référence

électronique

Ben Hillman, "

Causes et conséquences d'une urbanisation rapide dans une région ethniquement variée

Perspectives chinoises

[En ligne], 2013/3

2013, mis en ligne le 15 septembre 2016, consulté le

14 novembre 2019. URL

: http://journals.openedition.org/perspectiveschinoises/6621

© Tous droits réservés

la diffŽrence des rŽgions littorales o l"urbanisation des campagnes est en majeure partie la consŽquence de l"industrialisation, l"urbani- sation des bourgs ruraux de l"intŽrieur de la Chine est parfois dŽter- minŽe par des mesures prises par le gouvernement local. Cet article se penche sur les motivations sous-jacentes ˆ ces mesures et sur les consŽ- quences de l"urbanisation rapide des campagnes dans une rŽgion de Chine caractŽrisŽe par une rŽalitŽ ethnique complexe. Shangri-la, dans le nord-ouest de la province du Yunnan (1) . Majoritairement rural, le district compte 176 000 habitants, dont 60 000 vivent ˆ prŽsent ˆ Zhongdian, qui est passŽ en deux dŽcennies du rang de bourg rural ˆ celui de petite ville(2) . Avant les annŽes 1990, Zhongdian Žtait ˆ la tra"ne en ma- en terre ˆ voie unique, pour gagner la capitale provinciale, situŽe ˆ 750 km. dans la rŽgion, en 1999, la ville poussiŽreuse n"Žtait constituŽe que d"une rue pavŽe, flanquŽe d"immeubles dŽcrŽpits abritant les bureaux du gouver- nement, la banque publique, le bureau de poste et les ma gasins officiels du district et de la prŽfecture. Quelques rares boutiques vendaient de la quin- caillerie, des vtements et des produits pour la maison. Pas de supermarchŽ. chevaux, qui Žtait le principal moyen de transport pour les locaux. Jusqu"ˆ cette Žpoque, l"agriculture, l"Žlevage et la sylviculture Žtaient la

base de l"Žconomie locale. Le gouvernement du district tirait l"essentiel deses revenus de l"exploitation commerciale du bois, qui Žtait entre les mains

Zhongdian dans les annŽes 1990 a ŽtŽ dŽclenchŽe par l "essor de la sylvi- services urbains destinŽs ˆ subvenir aux besoins des scieries situŽes au cen- tre du district, mais les opŽrations d"abattage du bois Žtaient trop disper- sŽes sur le territoire pour que la sylviculture suffise ˆ engendrer une croissance urbaine sur une vaste Žchelle. En 1998, le gouvernement central ment des consŽquences nŽgatives sur les finances du gouvernement local(3) . En rŽactio n, un groupe de responsables du district, anticipant l"ave- nir, mit au point une nouvelle stratŽgie de dŽveloppement axŽe sur le tou-N o

2013/3 • perspectives chinoisesarticle évalué anonymement

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1.En 2002, Zhongdian a ŽtŽ rebaptisŽ district de Ç Shangri-la È afin de promouvoir le tourisme. Les

habitants du district continuant ˆ l"appeler Ç Zhongdian È, nous en ferons de mme dans cet ar-

ticle afin d"Žviter toute confusion.

2.MalgrŽ l"absence de statistiques dŽmographiques prŽcises, on estime gŽnŽralement que les mi-

noritŽs ethniques reprŽsentent deux tiers de la population locale. Les TibŽtains reprŽsentent le

groupe le plus importan t, suivis par les Naxis.

3.Cette interdiction a ŽtŽ prononcŽe suite ˆ des rapports scientifiques indiquant que la dŽforestation

provinces. Plus d"un million d"ouvriers forestiers perdirent leur emploi. Voir Yang Yuexian, Ç Impacts

and effectiveness of logging bans in natural forests: People"s Republic of China È, inPatrick B. Durst, Thomas R. Waggener, Thomas Enters and Tan Lay Cheng (Žds.),

Forests Out of Bounds: Im-

pacts and Effectiveness of Logging Bans in Natural Forests in Asia-Pacific, Bangkok, Organisation

des Nations Unies pour l"Alimentation et l"Agriculture, Bureau rŽgional pour l"Asie et le Pacifique,

2001, p. 81-102.

perspectives chinoisesDossier

Causes et consŽquences d"une

urbanisation rapide dans une rŽgion ethniquement variŽe ƒtude de cas d"un chef-lieu de district au Yunnan

BEN HILLMAN

RÉSUMÉ : À la différence des régions littorales de Chine où l"urbanisation des zones rurales est majoritairement le résultat de l"indus-

trialisation, celle des bourgs naguère largement ruraux de l"intérieur du pays est parfois le fruit des orientations politiques locales.

Cet article se penche sur le cas de Zhongdian (Shangri-la), où l"urbanisation a été surtout déterminée par le tourisme. Il montre com-

ment, alors que les réquisitions de terrains se sont généralement déroulées de manière plus pacifique dans cette région faiblement

peuplée, l"urbanisation a engendré des problèmes spécifiques liés à la diversité ethnique de cette zone du nord du Yunnan. Bien que

les autorités locales trouvent certains avantages à favoriser l"urbanisation, rien ne les incite à prendre des mesures en faveur de l"éga-

lité d"accès aux nouvelles opportunités économiques créées par l"urbanisation.

MOTS-CLÉS : Chine rurale, urbanisation, minorités ethniques, Tibet, emploi, éducation, inégalités.

risme (4) . EncouragŽs par la rŽussite Žconomique du tourisme dans d"autres parties de la province, ils espŽraient pouvoir attirer un grand nombre de tou- ristes en mettant en avant le charme de la campagne environnante et l"at- trait d"une rŽgion habitŽe par des TibŽtains et d"autres groupes ethniques (5) L"obstacle principal ˆ ce projet Žtait l"insuffisance des infrastructures et des services : l"aŽroport le plus proche Žtait situŽ ˆ six heures en voiture de Zhongdian, et le rŽseau routier Žtait dangereux et vŽtuste. Les possibilitŽs vincial des subventions spŽcifiquement destinŽes ˆ amŽliorer l"Žtat des ressources Žtaient affectŽes ˆ l"agrandissement du centre urbain. Le mo- ment ne pouvait tre mieux choisi. En effet, c"est ˆ cette pŽriode que le gou- investissements dans les rŽgions sous-dŽveloppŽes et ethniquement hŽtŽ- pour ce type de projets de dŽveloppement. La Chine connaissait au mme moment un essor du tourisme intŽrieur. Les citadins de la c™te orientale, qui voyaient leurs revenus augmenter, dŽ- couvraient de plus en plus les joies des vacances et partaient ˆ la dŽcouverte de contrŽes plus exotiques. En 2000, le gouvernement central dŽcida d"aug- menter le nombre de jours lŽgaux de congŽs dans le pays pour stimuler l"in- dustrie du loisir, ce qui se traduisit effectivement par une hausse du nombre de touristes. Zhongdian connut un record de frŽquentation en 2001 avec

1,24 million de visiteurs, contre 45 000 en 1995. Et mme si ce chiffre com-

prend toutes les arrivŽes, notamment celles de voyageurs d"affaires et de locaux de retour chez eux, cela reprŽsente nŽanmoins une augmentation considŽrable. Le tourisme a eu des rŽpercutions Žconomiques et sociales immŽdiates et profondes. Alors que se multipliaient h™tels, restaurants et autres infrastructures touristiques, la population rurale des environs et des recherche d"un emploi ou d"opportunitŽs commerciales. Pour Zhongdian, ce fut le dŽbut d"une urbanisation effrŽnŽe (6) (voir photos 1 et 2). Entre la fin des annŽes 1990 et le milieu des annŽes 2000, plus de 200 h™tels et auberges firent leur apparition dans la ville et ses environs, tandis que le nombre de magasins alimentaires, de boutiques de dŽtail et de projets rŽsidentiels explosait littŽralement (7) routes asphaltŽes furent construits, notamment une toute nouvelle rocade. En seulement quelques annŽes, des milliers de voitures furent enregistrŽes, se trouvaient ˆ la pŽriphŽrie de Zhongdian furent phagocytŽs par la nouvelle expansion urbaine. Dans les rues de la ville, les voitures disputaient au bŽtail le droit de circulation. Le district fit appel ˆ des architectes de Shanghai, dont un AmŽricain, pour crŽer un nouveau plan du centre-ville. Ce projet, terminŽ en 2008, comprenait une grande place piŽtonne comme dans les grandes villes chinoises flanquŽe par un nouveau thŽ‰tre et une zone com- merciale haut de gamme. Les efforts du gouvernement local pour donner un second souffle ˆ la Ç vieille ville È, connue sur place sous le nom de Dukezong, est un exemple parlant de la transformation de Zhongdian. Dukezong, plaque tournante du commerce sur la route principale entre Lhassa et la Chine des plaines, Žtait le centre de Zhongdian pendant la pŽriode prŽ-communiste et durant les village ramassŽ de maisons tibŽtaines en pisŽ, entourŽ de terres agricoles et de p‰turages, et dont les habitants, malgrŽ leurs activitŽs de commer- ants, conservaient au niveau familial leurs propres champs. Au centre de Dukezong se situait un espace ouvert utilisŽ pour le marchŽ, qui rassemblait tous les dix jours les fermiers des districts voisins. Avec l"introduction des logements en briques dans les annŽes 1960 et 1970, la vieille ville s"est peu ˆ l"abandon ; quelques maisons de la pŽriphŽrie Žtaient encore occupŽes par des paysans ‰gŽs, mais la jeune gŽnŽration avait disparue. Au dŽbut des annŽes 2000, Dukezong a ŽtŽ redŽcouvert par des routards occidentaux ˆ la recherche de destinations exotiques dans la province du Yunnan. En 2002, un Anglais a louŽ une maison abandonnŽe ˆ Dukezong 28
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le soutien appuyŽ du secrŽtaire du Parti du district et du gouverneur de Diqing, qui ˆ l"Žpoque

Žcrivait un mŽmoire de master sur le dŽveloppement Žconomique des rŽgions de Chine ˆ popu-

lation non-han. Sur les relations entre le gouvernement local et les dirigeants monastiques pendant la pŽriode de Hillman, Ç Monasticism and the Local State: Autonomy and Authority in a Tibetan Prefecture È,

The China Journal, n¡ 54, 2005, p. 22-52.

6.Voir Ashild Kolas,

Tourism and Tibetan Culture in Transition: A Place Called Shangrila,Londres, Routledge, 2008, et Ben Hillman, Ç China"s Many Tibets: Diqing as a model for 'development with

Tibetan Characteristics" È,

Asian Ethnicity, vol. 11, n¡ 2, 2010, p. 269-277.

7.La croissance effrŽnŽe reposant sur le tourisme est une caractŽristique de beaucoup de provinces oc-

cidentales de Chine, notamment le Yunnan, le Guizhou et le Sichuan. Pour une autre Žtude de cas de

l"effet du tourisme sur le rythme d"urbanisation des rŽgions peuplŽe de minoritŽs ethniques, voir

Liu Xiaoying et Yang Jiancui, Ç Xibu minzudiqu nongcun chengzhenhua fazhan moshi yanjiu - yi zangzu

cidentales - L"exemple du district de Jiuzhaigou), Heilongjiang Minzukan, n¡ 3, aožt 2007, p. 1-10.

Dossier

Photo 1 -Rue principale de Zhongdian en 2003. © Ben HillmanPhoto 2 -Rue principale de Zhongdian en 2013. © Ben Hillman

c ommerce le long d"une route en terre, qui ne disposait ni d"eau courante, que quelques autres Žtablissements similaires tenus par des Žtrangers atti- r potentiel touristique de la vieille ville de Dukezong, ˆ l"image de Dali et Li- jiang, d"anciennes villes situŽes ˆ des altitudes infŽrieures sur la mme route risme. Dans le but d"obtenir des investissements venus des Žchelons supŽ- gouvernement provincial et central, notamment un membre du ComitŽ per- manent du Bureau politique, des visites du bar pour montrer ce qui pouvait

tre rŽalisŽ avec les vieilles maisons

(8) recouvertes de pavŽs ˆ l"ancienne et des lampadaires rŽtros furent installŽs rent ˆ mettre des panneaux Ç ˆ louer È sur leurs faades. En peu de temps, la quasi-totalitŽ des maisons de Dukezong furent louŽes ˆ des commerants sonnes venues de l"extŽrieur acceptent de payer pour des b‰tisses menacŽes de ruine. Mais ils participent dŽsormais ˆ la ruŽe et ouvrent eux aussi des commerces ou se rendent en masse ˆ Dukezong pour s"amuser. L"ancienne place du marchŽ, remise ˆ neuf, est utilisŽe par le comitŽ de quartier pour organiser tous les soirs des danses en groupe. ConsŽquence de la croissance de la ville, les locaux peuvent bŽnŽficier dŽsormais de l"afflux de nouveaux produits et services. Les nouveaux restaurants, bars et supermarchŽs sont lution et la construction de b‰timents disgracieux, la transformation de Zhongdian en une petite ville a plut™t ŽtŽ une aubaine pour ses habitants. La plupart d"entre eux ont ainsi pu apprŽcier un mode de vie qui n"est ni tout ˆ fait rural ni tout ˆ fait urbain. Beaucoup de familles ont continuŽ ˆ vivre dans les grandes maisons de style tibŽtain avec une cour intŽrieure tout en profitant de tous les services urbains dŽsormais disponibles. Beaucoup de celles qui Žtaient propriŽtaires de maisons dans la vieille ville ou sa pŽriphŽrie se sont enrichies gr‰ce ˆ la location de leur propriŽtŽ dont le loyer, minime

ŽvoquŽ plus haut Žtait de 40 000

yuan, contre 2000 dix ans auparavant. L"essor des ventes de terrain par legouvernement local C"est le gouvernement local de Zhongdian qui a ŽtŽ le principal bŽnŽfi- ciaire de la flambŽe des prix des terrains entre 2003 et 2013. Il Žtait pro- priŽtaire au centre du district de plusieurs parcelles de terre qu"il avait construction future de b‰timents administratifs, d"infrastructures publiques et de logements pour les employŽs gouvernementaux. Des revenus gigan- tesques pouvaient tre gŽnŽrŽs en utilisant ces terrains pour le dŽveloppe- ment urbain, d"autant plus que les bŽnŽfices de la vente pouvaient tre employŽs par le gouvernement local ˆ sa discrŽtion. Le gouvernement du district a empochŽ d"immenses revenus fonciers en employant principalement trois mŽthodes. Tout d"abord, les fonctionnaires ont pu vendre ˆ des promoteurs privŽs des droits d"usufruit ( shiyong quan)sur des terrains en possession du district (9) . Ces droits pouvaient tre vendus p lusieurs centaines de fois le prix initial auquel le district avait rachetŽ la terre aux paysans. Pour donner une idŽe des bŽnŽfices dŽgagŽs, en 2004, au c iale de Zhongdian, une parcelle de terrain de moins de la moitiŽ de la taille d"une maison amŽricaine de banlieue a ŽtŽ adjugŽe ˆ 480 000 yuans (60 000 dollars amŽricains). Le district avait acquis le terrain quelques an- (25 dollars) de compensation. En 2011, une enqute portant sur les ventes de terres dans 17 provinces a dŽmontrŽ que le prix moyen payŽ par les au- toritŽs locales pour un hectare de terre arable Žtait de 44 100 dollars (17 850 dollars pour une acre) et qu"elles en tiraient en moyenne 1 828 000 dollars pour une surface identique lorsqu"elles les revendaient ˆ des promo- teurs immobiliers et ˆ d"autres acheteurs (10) Les autres mŽthodes pour gŽnŽrer des revenus gr‰ce au sol passent par les taxes perues sur les changements de statut des terres. Dans la campagne chinoise, les terrains sont gŽnŽralement classŽs en (i) terre agricole, (ii) terre pour la construction de logements ou l"exploitation commerciale et (iii) terre en friche (11) . Comme dans d"autres rŽgions du monde, ces catŽgories cadas- trales dŽterminent l"utilisation lŽgale du terrain concernŽ. Ainsi, les terrains classŽs comme terres agricoles peuvent uniquement tre utilisŽs pour les cul- tures et non pour des fonctions rŽsidentielles, commerciales ou industrielles. Pour qu"un terrain agricole soit reconverti pour ces usages, il faut passer par du gouvernement du district, qui rŽclame une coquette somme pour ce ser- vice, jusqu"ˆ 80 000 d"hectare). Ce genre de taxe est devenu une source considŽrable de revenus pour les gouvernements locaux dans toute la Chine, et ˆ Zhongdian son im- portance est exacerbŽe par l"Žtroitesse de l"assiette fiscale. La transformation des terrains agricoles en terrains ˆ usage commercial ou rŽsidentiel offrait Žgalement aux fonctionnaires locaux des occasions nouvelles d"enrichissement personnel. Moyennant une rŽmunŽration infor- melle, les hommes d"influence pouvaient jouer de leur entregent pour or- ganiser la cession des terres ˆ des entreprises privŽes pour un prix bien cas o l"entreprise bŽnŽficiaire du transfert Žtait dŽsignŽe comme entreprise locale Ç stratŽgique È, ce qui lui donnait droit ˆ un traitement prŽfŽrentiel. Les fonctionnaires locaux pouvaient aussi tirer des profits importants en plans de dŽveloppement urbain du gouvernement, notamment la construc- tion de nouvelles routes, de prŽvoir quelles zones seraient susceptibles de voir leur valeur augmenter dans le futur (il s"agit lˆ d"un type de corruption Žcrans, souvent enregistrŽes au nom d"un proche, les fonctionnaires locaux pouvaient dans un premier temps acquŽrir personnellement des terres pour les revendre avec un bŽnŽfice une fois les infrastructures achevŽes. Au dŽbut des annŽes 2000, le district de Shangri-la a fait construire deux nouvelles N o

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29

8.Pour un exposŽ sur les politiques de dŽveloppement du tourisme ethnique dans les zones tibŽ-

taines de Chine, voir Ben Hillman Ç Ethnic Tourism and Ethnic Politics in Tibetan China È,

Harvard

Asia Pacific Review

, printemps 2009, p. 1-6.

9.En Chine, la propriŽtŽ privŽe du sol est inexistante. La terre est possŽdŽe soit par l"ƒtat soit, s"il

s"agit de la campagne, par la communautŽ (de village ou de hameau). NŽanmoins, les droits d"uti-

lisation ˆ long terme font dans les faits office de propriŽtŽ.

10.Institut du dŽveloppement rural de Landesa,

Landesa 6th 17-Province China Survey(rŽalisŽ en collaboration avec l"UniversitŽ d"ƒtat du Michigan et l"UniversitŽ Renmin), Seattle, 2012.

11.Les forts et p‰turages sont techniquement enregistrŽs comme terres agricoles.

Ben Hillman -Causes et consŽquences d"une urbanisation rapide dans une rŽgion ethniquement variŽe

avenues bordŽes de b‰timents administratifs, de complexes rŽsidentiels et d e centres commerciaux. Entre 2002 et 2005, les emplacements commer- ciaux situŽs le long de ces avenues ont ŽtŽ vendus ˆ des prix inimaginables auparavant. Quelques fonctionnaires qui avaient bŽnŽficiŽ d"informations c onfidentielles sur les plans de construction urbaine ont fait fortune. Effectivement, au cours des treize annŽes pendant lesquelles nous nous sommes rendu ˆ Zhongdian, de nombreux fonctionnaires se sont visiblement enrichis, malgrŽ des salaires officiellement modestes. Leurs maisons se sont consommation est devenu de plus en plus ostentatoire. Il est dŽsormais dans leurs habitudes de prendre des vacances ˆ l"Žtranger, d"envoyer leurs enfants Žtudier hors de Chine, d"acheter des jouets onŽreux ou de dŽpenser l"Žqui- valent de milliers de dollars en divertissement ou en nourriture. Ils affichent tionnaires locaux dŽpensent 10 000 yuans (1300 dollars amŽricains) ou plus pour un repas, soit plus du double du salaire net mensuel d"un chef de service dans un district, indemnitŽs comprises. La plupart d"entre eux ont un train de vie qui n"a rien ˆ envier ˆ leurs homologues des provinces orientales et beaucoup vivent dans la plus grande opulence par rapport aux citoyens or- dinaires. fiscal en vigueur, les gouvernements de districts sont autorisŽs ˆ conserver jusqu"ˆ 95 % des imp™ts sur le commerce, le logement et les constructions. Sans surprise, le gouvernement de Zhongdian a encouragŽ activement les projets comprenant des espaces commerciaux ou de bureau ainsi que les logements rŽsidentiels. L"augmentation du parc rŽsidentiel est devenue par- des annŽes 2000, de faire passer Zhongdian du statut de district rural ˆ celui de ville de rang de district ( shi) (12) . Pour parvenir ˆ ce but, il leur fallait ac- cro"tre la population de la ville. Une sŽrie de raisons expliquent le dŽsir des autoritŽs de changer le statut de leur localitŽ. Les villes jouissent d"un statut administratif supŽrieur aux facilitŽ aux Žchelons politiques supŽrieurs. Le secrŽtaire du Parti d"une ville de rang de district devient souvent, par exemple, membre du comitŽ per- manent du Parti de la prŽfecture, ce qui lui donne davantage de poids sur les dŽcisions importantes prises ˆ l"Žchelon gouvernemental supŽrieur. Dans certaines provinces, les villes de rang de district rendent directement compte ˆ la province, sans passer par le niveau administratif intermŽdiaire. Les gou- vernements des villes ont Žgalement un contr™le plus important que leurs homologues ruraux en ce qui concerne les investissements Žtrangers, le commerce et les opŽrations de change. Ils exercent Žgalement un contr™le renforcŽ sur les forces de police locale, notamment en ce qui concerne le recrutement. Les autoritŽs des villes sont autorisŽes ˆ approuver de grands projets d"investissements, sans avoir ˆ en rŽfŽrer aux Žchelons supŽrieurs. De plus, elles peuvent crŽer de nouveaux services pour l"administration ur- baine et dŽvelopper des dŽpartements administratifs existants comme les transports ou la construction urbaine, ce qui permet aux chefs du district d"embaucher plus de fonctionnaires, pratique courante en Chine rurale pour (13) leur marchŽ pour les entreprises locales, dont beaucoup sont contr™lŽes par

les fonctionnaires, et pour les vŽhicules de financement des gouvernementslocaux, qui permettent de contourner les restrictions fixŽes par le gouver-

n ement central sur les prts ˆ destination des gouvernements locaux. Les gouvernements des villes peuvent Žgalement dŽcider de nouveaux imp™ts et augmenter le taux d"imposition sur les constructions (jusqu"ˆ 7 % au lieu d e 5 %) et les entreprises locales. Le statut de ville devait Žgalement permettre aux autoritŽs de Zhongdian de demander davantage de transferts budgŽtaires pour le dŽveloppement des infrastructures urbaines. Les projets d"infrastructures prŽsentent beau- coup d"intŽrt car de nombreuses familles de fonctionnaires ont des parts dans les entreprises locales de BTP, et mme quand un membre du gouver- nement ne peut obtenir un contrat pour l"entreprise familiale, il peut s"as- surer de confortables pots-de-vin qui accompagnent souvent les projets de travaux publics (14) . Le statut de ville permet enfin aux autoritŽs locales d"ac- cro"tre le quota des terres arables pouvant tre reconverties pour un usage non agricole. Le gouvernement de Zhongdian a ainsi pu augmenter les taxes pliquent pour les villes (15) Entre 1983 et 1997, environ 15% des districts chinois ont obtenu le statut de ville, promotions qui ralentirent fortement par la suite. Depuis 1997, cette gouvernement central ˆ durcir et ˆ clarifier les conditions nŽcessaires au changement de statut. DŽsormais, des niveaux minima d"industrialisation, d"urbanisation et de revenu des gouvernements de districts sont rŽclamŽs densitŽ de population semble indiquer que l"obtention du statut de ville re- transformation urbaine des zones rurales (16) En 2002, la population non-agricole de Zhongdian Žtait approximative- ment de 24 000 habitants. En tant que district comptant une densitŽ de eu besoin d"un gain de 100 000 habitants pour devenir Žligible au rang de ville. Ce qui normalement aurait ŽtŽ impossible ˆ rŽaliser en l"espace de dix sur la population urbaine stricto sensu, ˆ savoir le nombre d"habitants en possession d"un permis de rŽsidence urbain ( hukou), mais plut™t sur le nom- bre d"habitants exerant une activitŽ non-agricole. Cela signifiait que les au- toritŽs pouvaient inclure dans les statistiques dŽmographiques les milliers de travailleurs migrants venus ˆ Zhongdian pour travailler dans le tourisme et les activitŽs apparentŽes. Mme si cela ne permettait toujours pas de porter le nombre total de rŽsidents urbains ˆ 100 000 (en 2012, des fonc- 30
perspectives chinoises• N o

2013/3

12.En Chine, il existe diffŽrents statuts administratifs pour les villes. Quatre municipalitŽs : PŽkin,

Shanghai, Chongqing et Tianjin ont rang de province, ce qui signifie que leur maire a le mme grade que les gouverneurs de province. Le pays compte actuellement 284 villes de niveau prŽfec- toral et 369 villes de niveau de district. Beaucoup d"entre elles ne sont pas des villes stricto sensu,

mais plut™t des zones administratives de grande taille dŽlimitŽes autour d"un centre urbain et qui

peuvent comprendre des villages et des terres agricoles.

13.Sur l"utilisation des emplois de la fonction publique pour le clientŽlisme, voir Ben Hillman, Ç Factions

and Spoils: Examining Local State Behavior in China È,

The China Journal, n¡ 62, 2010, p. 1-18.

14.Sur les pots-de-vin et la corruption des fonctionnaires dans les projets de travaux publics, voir

Gong Ting, Ç Corruption and Local Governance: the double identity of Chinese local governments in market reform È, Pacific Review, vol. 19, n¡ 1, 2006, p. 85-102.

15.Entretien avec un ancien fonctionnaire du district de Zhongdian, 30 septembre 2012.

16.C"est la conclusion d"une Žtude menŽe par un chercheur de la RPC qui a montrŽ que le statut de

ville a ŽtŽ accordŽ plus gŽnŽralement ˆ des districts dont les autoritŽs avaient rŽussi ˆ atteindre

des niveaux ŽlevŽs de croissance Žconomique et ˆ s"aligner sur les prioritŽs du gouvernement

central. Voir Li Lixing, Ç The Incentive Role of Creating 'Cities" in China È,

China Economic Review,

vol. 22, n¡ 1, p. 172-181.

Dossier

tionnaires estimaient en privŽ la population permanente de la ville entre dian accueillait des milliers de touristes auxquels il fallait fournir des services urbains. du statut de ville Žtait qu"au moins 20 % des habitants du district de Shan- gri-la soient enregistrŽs comme habitants de la ville de Zhongdian. Afin de faire augmenter la population urbaine officielle, les autoritŽs ont encouragŽ les fonctionnaires en poste dans d"autres endroits du district et de la prŽ- ˆ acheter des biens immobiliers dans le chef-lieu de district, ce qui leur don- nait le droit de s"y faire enregistrer. Le gouvernement du district finana des projets de construction rŽsidentielle et offrit aux fonctionnaires des sub- ventions pour l"achat de logements. Ces mesures ainsi que d"autres projets rŽsidentiels soutenus par le gou- vernement ont accŽlŽrŽ le rythme des expropriations des terres agricoles autour de la ville. Les paysans expropriŽs de leur terre Žtaient automati- quement Žligibles pour le statut de rŽsidence urbain ( chengshi hukou). Tout le monde Žtait gagnant, le gouvernement du district comme les agricul- teurs de la pŽriphŽrie de la ville. Les autoritŽs ont ainsi pu augmenter la taille de la population urbaine tout en rŽduisant le risque de rŽsistance des paysans, pour peu que le prix proposŽ pour l"achat de leurs terres leur paržt acceptable. Le permis de rŽsidence urbain est allŽchant car il rend possible qu"au droit ˆ une meilleure protection sociale, en ce qui concerne les re- traites par exemple. Une autre dŽcision qui a permis de gonfler la population urbaine a ŽtŽ l"implantation de toutes les Žcoles secondaires du district dans le chef- lieu. Alors qu"Žtait invoquŽe officiellement la rŽduction des cožts et l"amŽlioration de la qualitŽ de l"enseignement en concentrant les moyens Žducatifs dans un mme lieu, les fonctionnaires reconnaissaientquotesdbs_dbs6.pdfusesText_11

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