[PDF] Le Club de lHorloge (1974 -2002). Evolution et mutation dun





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Le Club de lHorloge (1974 -2002). Evolution et mutation dun

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literary theory and American politics—especially leftist and race Orwell's accounts of popular intelligence and political inclinations are also varying.

1 UNIVERSITE PARIS VIII -VINCENNES-SAINT-DENIS ECOLE DOCTORALE SCIENCES SOCIALES Le Club de l'Horloge (1974 -2002). Evolution et mutation d'un laboratoire idéologique.

Philippe LAMY Thèse de doctorat de sociologie sous la direction de Claude DARGENT Professeur Université Paris VIII Saint-Denis Soutenance le : 13 mai 2016 JURY: - Olivier DARD professeur d'histoire contemporaine -Université Paris-Sorbonne - Stéphane FRANÇOIS maître de conférences - Université de Valenciennes - Florence HAEGEL directrice de recherche - Professeure Sciences Po - Marie-Anne MATARD-BONUCCI Professeure d'histoire contemporaine - Université Paris VIII Saint-Denis - Nonna MAYER directrice de recherche au CNRS

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3 " Je suis d'accord avec Halévy pour penser qu'il y a des idées de droite et que ces idées sont bonnes. Je ne crois pas que cela suffise pour dire que les partis de droite sont des partis d'idées ». Albert THIBAUDET Réflexions sur la politique Robert Laffont, 2007, page 538

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5Remerciements Une thèse est certes, le fruit d'un travail personnel mais elle n'aurait pu aboutir sans l'aide, le soutien e t la colla boration de multiples personnes. Je re mercie d'abord mon directeur de thèse, Claude DARGENT qui a su me faire confiance et a conservé tout au long de ses années sa patience. J'ai apprécié la gentillesse et le dévouement des personnels des bibliothèques universitaires, notamment ceux de la B.D.I.C. à Nanterre, du Centre d'histoire de Sciences Po rue Jacob, de la bibliothèque de Sciences Po Paris et de la B.N.F. . Je remercie la Préfecture de police, notamment madame le Commissaire divisionnaire Françoise GICQUEL d'avoir bien voulu m'accorder une dérogat ion pour cons ulter les dossiers de la direction du rensei gnement de la Préfecture de police. Je suis égale ment reconnaissant envers le personnel de la Préfecture de police chargé des dossiers d'association pour son efficacité et sa célérité dans l'envoi des statuts du Club. Je tiens également à remercier l'ensemble des membres ou ex-adhérents du Club de l'Horloge, ainsi que ceux qui les ont accompagnés, qui ont bien voulu m'accorder quelques heures pour me livre r leur vision de l'histoire de c e club. Je suis plus particuli èrement reconnaissant à Yvan BLOT dont les nombreux témoignages m'ont été précieux, ainsi qu'à Jean-Yves LE GALLOU qui a accepté de me confier des pièces privées, m'aidant à mieux comprendre les conditions de la création du Club de l'Horloge. Enfin, une pensée particulière pour ma femme qui m'a toujours soutenu et accepté qu'une partie de notre appartement se transforme en bibliothèque et centre de documentations sur les droites et les extrêmes droites en France et en Europe.

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7 PLAN INTRODUCTION 17 CHAPITRE I - LA FONCTION DES CLUBS SOUS LA VE REPUBLIQUE 28 I-1Clubsetcrisedespartis:lesdeuxvagues30A. La première vague : pour le renouveau de la gauche 31 a. Une première classification b. Le tournant de l'élection présidentielle de 1965 c. Une nouvelle classification : " filiales », " wagons » et " antichambres » d. Quel bilan ? e. Le modèle Jean Moulin B. La deuxième vague : le " clubisme » de droite 45 a. La référence giscardienne des Clubs Perspectives et Réalité b. Les clubs gaullistes c. Le renouveau des clubs à droite. d. " Le tiers état de l'opposition » e. Les " résidences secondaires » de l'UMP f. Une fondation pour la réflexion : la FONDAPOL g. La " machine à idées » de Nicolas Sarkozy I-2Ladominationdesthinktanks.65A. Le modèle anglo-saxon 65 a. Quelle définition ? b. Le think tank, un agent d'influence c. Les trois vagues B. Les think tanks en France, essai non transformé 72 a. Un phénomène d'importation étranger ? b. La Fondation Saint Simon : entre club et think tank c. Terra Nova est-elle un modèle ?

8CHAPITRE II: LES RACINES DU PASSÉ 81 Préambule : le suicide de D. VENNER II-1FEN/Europe:uneextrêmedroitedoctrinaire85A. Les premiers jalons 86 a. " Pour une critique positive » b. Jean Mabire ou la théorie Viking c. Le creuset de la F.E.N. B. Le double échec : l'activisme et les élections 92 a. agitation et scoutisme païen b. La tentation électorale : de TIXIER au REL/MNP C. Elaboration d'une doctrine pour une " droite radicale » 98 a. Les ruptures idéologiques b. Un racisme qui se veut " scientifique » c. Les doctrinaires de la race d. Le réalisme biologique D. 1967 : A la reconquête du pouvoir idéologique 112 a. Un texte fondateur ? b. L'exil intérieur de Dominique VENNER et l'I.E.O. II2"LanouvelleActionfrançaise»:leGRECE118A. Une société de pensée 118 a. Naissance " des » GRECE b. Création d'une revue : Nouvelle Ecole et G. SOREL c. Constitution du GRECE d. L'école de Francfort e. De MAURRAS à ... Alain de BENOIST f. Le Cercle Proudhon et la première A.F. g. Des démarches parallèles. B. La stratégie métapolitique ou le " gramscisme " de droite 135 a. A la recherche de la droite et d'une stratégie b. La récupération de GRAMSCI

10CHAPITRE III : GENESE ET NAISSANCE DU CLUB DE L'HORLOGE 229 III-1.1974:l'annéecharnière.229A. Archipel du Goulag et nouveaux philosophes 230 a. La révélation des camps b. Le reflux du " gauchisme » et les nouveaux philosophes B. Le renouveau de la droite 233 a. Droite, année zéro b. La fin des glorieuses c. La suspension de l'immigration C. " L'ombre portée de mai 68 » 238 a. La grande peur b. " Mai 68, c'est fini » III-2-Emergenced'unClub244A. Enarques, haute fonction publique et politisation 246 a. Formation d'une élite b. L'école du Pouvoir c. L'engagement en politique d'une génération d'énarques d. Les " résistants » de l'ENA B. Au début était le GRECE 257 a. Les liens avec le GRECE : filiale ou scission ? b. De l'usage du démenti c. Le GRECE, école de formation d. La matrice du Club de l'Horloge : le Cercle PARETO e. Le couple BLOT/NOREY f. Les ignorés du GRECE C. Un club gaullo-pompidolien 285 a. la crise du parti gaulliste b. le Cercle Pompidou ?

11CHAPITRE IV - ELABORATION D'UNE PENSEE ET D'UNE DOCTRINE POUR LA DROITE 297 IV-1Elaborationd'unsocledoctrinal298A. A la recherche d'une pensée de troisième voie 298 a. La stratégie du GRECE b. La 3e voie gaulliste c. Le Club de l'Horloge dans les pas des " non-conformistes » B. La p ensée du GRECE appliquée à Philip pe MALAUD : la Révolution libérale» 306 a. Un minimum doctrinal inspiré du GRECE b. Un galop d'essai : la Révolution Libérale c. Le sens de la révolution libérale C. Le premier livre du socle doctrinal : " Les Racines du Futur » 314 a. De GRAMSCI à Carl SCHMITT b. la crise, l'insécurité et l'immigration c. Le recours à DUMEZIL d. A travers sa défense, une autre vision de l'Europe e. Des défenseurs de l'Etat f. Un maître à penser oublié : François PERROUX g. Les racines chrétiennes D. La biologie au service d'une pensée inégalitaire : " la Politique du Vivant » 339 a. De l'utilisation du génocide vendéen à la " religion officielles de la Shoah b. De l'usage de la pensée contre-révolutionnaire c. C'est la faute à Rousseau d. Biologie et politique : contre l'égalitarisme e. La récupération de LYSSENKO f. La peur de la caféaulisation IV-2Ledeuxièmeminimumdoctrinaletlesmaîtresàpenser360A. Une référence nationale et libérale 361 a. Un texte pour les droites et le Front national

12b. Le rôle des clubs de pensée dans le " tournant néo libéral » c. La référence obligée : Friedrich HAYEK d. La surprise de L. KLAGES e. La rupture totale avec le GRECE B. Les maîtres à penser du Club de l'Horloge 373 a. Les trois courants b. Les oubliés : Maurras et Spencer IV-3Lap référenc enationaleouleprincipalacqu isthéoriqueduclubdel'horloge379A. L'émergence du débat sur l'immigration 380 a. Un discours dominant à l'extrême-droite b. La gauche prise par le tournis de la crise c. La radicalisation de la droite parlementaire : le tournant des municipales de 1983 d. L'irruption d'un nouvel acteur politique B. L'élaboration de la préférence Nationale 390 a. Le test GRIOTTERAY b. Les précédents doctrinaux c. La maturation et l'élaboration du concept de préférence nationale d. Les précédents historiques C. La brèche dans l'opposition républicaine 404 a. Un programme pour le Front national b. Une écoute à droite c. Le retour aux origines CHAPITRE V : ORGANISATION, FONCTIONNEMENT ET DIFFUSION DES IDEES DU CLUB DE L'HORLOGE 413 V-1Organisation:lemodèleJeanMOULIN413A. Statuts et direction a. La rédaction des statuts

13b. une direction peu renouvelée B. Etre adhérent du Club de l'Horloge 417 a. Combien d'adhérents? b. la composition du Club : à la recherche de l'élite. c. un univers masculin d. comment adhérer ? C. La diffusion des idées 432 a. Le travail en commission b. Le choix du livre et la " tellenisation ». c. A la recherche d'une certaine forme de sociabilité d. Les vecteurs de la pensée du club : Lettre et contrepoint D. Financement du club 446 a. Les amis de l'industrie b. Albert BEAUFOUR V-2LesrelaisextérieursduClubdel'Horloge453A. Les Cercles de province 453 a. Des cercles à l'existence éphémère, difficilement contrôlables b. Le Cercle lyonnais d'Yvan CHIAVERINI c. Le " terreau municipal » de Nice B. Les réseaux à l'étranger 463 a. Le club du beffroi b. L'exemple du Monday Club c. Les néo franquistes et la " nouvelle droite » : el Club del Sable d. Les cousin reaganiens : Heritage Foundation C. Les Comités d'Action Républicaine 469 a. un sous club de l'Horloge b. la droite de conviction : une passerelle vers le FN.

14CHAPITRE VI : L'ENGAGEMENT EN POLITIQUE D'UN CLUB DE PENSEE : POSITIONNEMENT ET STRATEGIES. 479 VI1-Stratégiesd'entrismes479A. Un équilibre à respecter 480 a. Stratégie d'entrisme ou stratégie individuelle b. Des réseaux ALBERTINI au RPR : le cas Yvan BLOT c. A la recherche de l'équilibre : l'UDF B. Les partis charnières 496 a. le contrôle d'un parti national et libéral : le CNI b. Le MPF : un pis aller C. Une réussite conduisant à l'échec : l'OPA sur le Front national 505 a. Emergence d'un groupuscule b. Les migrations vers le F.N. c. La prise en main de l'appareil du FN par les " horlogers » d. Identité, une réussite pour le FN et ... le Club de l'Horloge e. Les " horlogers » frontistes f. De l'apogée à la chute VI-2LesréseauxetrelaisduClubdel'Horloge.529A. Le Club 89, un cousin 530 a. création et développement du Club 89 b. République, Reaganisme et " lepénisme » c. " Le Club 89, blanchisseur d'idées d. le gaullisme d'ordre, l'UNI, relais universitaire B. Le réseau " gramscien » des élus culturels 540 a. A la reconquête du pouvoir culturel municipal b. Les associations " gigognes » C. Les associations relais de la pensée du Club 545 a. A3D ou la défense de la démocratie directe. b. Le Comité pour l'Europe des patries c. Les associations " populaires »de la vulgate contre l'immigration

15D. Les relais médiatiques 552 a. Le Figaro Magazine au service du national libéralisme b. Magazine Hebdo : " l'organe semi-clandestin de la nouvelle droite » c. Les magazines éphémères d. Un oubli : la communication politique VI-3Lesstratégiesauservicedesdroites561A. Etre un laboratoire d'idées 561 a. La réalité de l'entrisme dans les cabinets b. Les " assistants parlementaires » du Club de l'Horloge c. La " négritude » au service des idées du Club de l'Horloge B. La rupture avec la nouvelle droite et les " nouveaux républicains 573 a. L'été pluvieux de la nouvelle droite b. Les " nouveaux républicains » c. La République , machine de guerre contre la gauche C. Le fer de lance de l'opposition 580 a. une stratégie républicaine au secours de l'opposition b. La bataille des mots c. Un relatif succès au R.PR D. Décomplexer la droite 594 a. Droite année, zéro b. L'usage abusif des thèses de Zeev STERNHELL c. " Etre de droite n'est plus un crime ! » d. Vichy n'est pas fini ! E. Pas d'ennemi à droite ! Une stratégie d'union des droites 609 a. La plate-forme RPR/UDF b. Le Yalta idéologique c. Le modèle italien Epilogue 625 Conclusion 635 Bibliographie 645

16 Annexes : 669 1. Le Cercle Pareto 2. Premier projet de " minimum doctrinal » 3. Le " minimum doctrinal »officiel " Nation et Liberté » 4. Procès verbal de la réunion constitutive du Club de l'Horloge du 10 juillet 1974 5. Les douze maîtres à penser (document interne Club de l »Horloge) 6. Régularisation du premier bureau (statuts du Club de l'Horloge 1978) 7. Les statuts des nouveaux républicains 8. Les universités du Club

17 Introduction La " Nouvelle Droite » est découverte en 1979, année incontestablement charnière. Plusieurs événements majeurs bouleversent alors l'ordre politique international encore marqué par la guerre froide, et ces événements auront dans une certaine mesure des répercussions sur la vie politique française. En Grande Bretagne, le Parti conservateur gagne les élections législatives le 4 mai 1979 et Margaret THATCHER, nourrie intellect uellement par les idées de Friedrich HAYEK, est désignée Premier ministre. Cette élection marque le début de la " révolution thatchérienne » et la mise en oeuvre des thèses néo-libérales, précédant la future " révolution conservatrice américaine » de Ronald REAGAN qui gagne l'élection présidentielle l'année suivante. Au Proche-Orient, plusieurs manifestations, réprimées dans le sang, provoquent le départ du Shah d'Iran le 16 janvier 1979. Personne ne se doute que l'ordre géopolitique de cette région va être profondément transformé par le retour à Téhéran le 2 février de l'ayatollah KHOMEINY marquant la victoire de " l'islam politique ». L'invasion de l'Afghanistan par les troupes soviétiques le 27 décembre crée une nouvelle zone d'instabilité en Asie du Sud ouest, et déclenche un conflit dont l'Union Soviétique ne se remettra pas1. Dans ce " cimetière des empires », naît en partie l'islamisme radical qui s'affirme dès les premières années du XXIe. En France, après un mouvement social très dur consécutif à la crise dans la sidérurgie, les forces politiques se préparent à la future échéance électorale majeure, l'élection présidentielle de 1981. La première élection au suffrage universel et à la proportionnelle des parlementaires européens, " élection nationale à prétexte européen »2 permet de fixer les rapports de forces entre la gauche et la droite, ainsi que les rapports internes au sein de chaque bloc3. Rien ne permet tait de prévoir que tout l'é té serait consacré à l'émergenc e d'un nouveau phénomène politique : la " Nouvelle Droite ». Le 22 juin 1979, le quotidien Le Monde publie 1 SÉRILLON Claude. Les années 70. Chêne Mémoire vive, 2006, 336 pages 2 DE LA SERRE Françoise, SMOUTS Marie-Claude, BIBES Geneviève, MÉNUDIER Henri. Une élection nationale à prétexte européen. In: Revue française de science politique, 29e année, n°6, 1979, pages. 986-1014. 3 Le bloc gauche/extrême -gauche représente 47% (PS-MRG : 2 3,5% ; PC : 20 ,5%, extrême gauch e LO/LCR : 3%). A droite, l'UDF l'emporte aisément avec 27,6% contre 16,3% pour la liste RPR qui avait mené une violent e campagne contre l'Eur ope. La liste de l'ext rême-droite (PFN) ne r eprésente que 1,3%. Les écologistes, suivant alors une ligne autonome obtiennent 4,39%.

18un premier article signé de Thierry PFIRSTER, intitulé : " La nouvelle droite s'installe ». Puis c'est au Nouvel Observateur de consacrer sa couverture aux " habits neufs de la droite française » le 2 juillet 1979. L a " machine médiatique » s 'emballe. Le Matin de P aris, quotidien de sensibilité socialiste, publie une série d'articles du 25 au 30 juillet. Tous vont dans le même sens. Il s'agit de lever le voile sur une opération d'entrisme et d'infiltration de la majorité présidentielle par un petit groupe qui ne cache pas ses opinions de " de droite ». Ce groupe agit notamment au sein du Figaro-Magazine dirigé par Louis PAUWELS. Cette opération " d'entrisme » ne concerne pa s uniquement ce journal mais vise également l'administration et les " antichambres » de la vie politique. Derrière ce terme de " nouvelle droite », les journalistes ciblent d'abord le Groupement de recherches et d'études pour la civil isation europée nne, le G.R.E.C.E., a ssocié à la revue Nouvelle École dirigée par Alain de BENOIST mais également un club politique quasiment inconnu, le Club de l'Horloge. Ce club est présenté le plus souvent comme la " filiale » du GRECE dans les milieux polit ico-administratifs. Au total, plus de cinq cent a rticles sont consacrés à ce sujet de juin à novembre 1979 dont les plus importants ont été regroupés dans un ouvrage intitulé " la Nouvelle Droite » 1. Consécration suprême pour Alain de BENOIST et ses amis, Bernard PIVOT consacre une émission d'Apostrophes2 à ce qu'il considère être l'événement intellectuel et politique de l'été 1979. Henry de LESQUEN représente le Club de l'Horloge et présente leur dernier ouvrage, " La Politique du vivant ». Malgré cette campagne de presse, l'opinion publique française a du mal à se positionner. Dans un sondage publié dans Les Nouvelles Littéraires3, 56% des français déclarent de ne pas avoir entendu parler de la " nouvelle droite » et 32% de ceux qui en ont entendu parler, la définissent comme " catholique ultra » alors que la singularité de cette école de pensée est de se définir comme païenne. 18% pensent au RPR, 15% au mouvement des Jeunes giscardiens et 22% à la petite formation d'extrême droite, le Parti des Forces Nouvelles (PFN). 1 BRUNN Julien. La Nouvelle Droite. Le dossier du " procès ». Nouvelles Editions Oswald, Paris, 1979, 392 pages. 2 Apostrophes 28 septembre 1979, Quelle nouvelle droite ? avec la participation de J.P. APPARU, Georges HOUDIN, Alain TOURAINE, Alain de BENOIST, Henry de LESQUEN pour le Club de l'Horloge. Document INA. 3 Sondage PUBLIMETRIE du 20 au 22 septembre 1979, 313 personnes selon la méthode des quotas. La droite recommence-t-elle à penser ? Les Nouvelles Littéraires, semaine du 27 septembre au 4 octobre 1979.

19Avec le temps, l'événement a perdu de sa force. Il n'est pas toujours mentionné, comme par exemple dans la chronologie commentée sur la Ve République1 écrite par Sylvi e GUILLAUME même si en introduction l'auteure précise la difficulté à trouver des termes spécifiques pour définir la " nouvelle droite » ou les " nouveaux philosophes ». Ø Quelle " nouvelle droite ? Faut-il et peut-on parler de " nouvelle droite » ? Ce terme désigne alors un courant politique conservateur aux Etat Unis 2. Contrairement à ce qui a souvent été affirmé, ce n'est pas la presse qui a créé les mot s de " nouvelle droite ». Je an-Yves CAMUS, politologue et chercheur associé à l'IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques), auteur de nombreux article s et ouvrages sur l'extrême-droite, affirme en s'appuyant sur les écrits d'Alain de BENOIST3, que ce terme a d'abord été utilisé par le journaliste Gilbert COMTE4 dans un sens interrogatif dans un article du Monde en mars 1978, puis par Claude ROY dans le Nouvel Observateur, le 18 septembre 1978 et finalement dans un sens polémique lors de la campagne de presse afin de " stigmatiser l'émergence d'une extrême droite dissimulant son racisme, son anti-égalitarisme, voire sa filiation néo-nazie »5. 1 GUILLAUME Sylvie. La France contemporaine. Chronologie commentée (1959-1989). Perrin, 1991, 584 pages, page 17. 2 Philippe CHASSAIGNE écrit que ce terme est décalqué de l'expression " New Right » désignant la future école néo-conservatrice de Irving KRISTOL. Mathias BERNARD dans son ouvrage consacré à Valery Giscard d'ESTAING estime que c'est " par référence au vocabulaire américain » qu'on accole le terme de nouvelle droite au GRECE. Replacé dans le contexte de l'époque, il semble que ce ne soit pas le cas. Ce terme de " nouvelle droite » s'entend d'abord par opposition à la " vieille droite ». Cf. CHASSAIGNE Philippe. Les années 1970. Fin d'un monde e t origine de notre moderni té. Am and Colin2012, 397 p ages, page 349 ; BERNARD Mathias. Valery Giscard d'Estaing. Les ambitions déçues. Armand Colin, 2014, 487 pages, page 299. 3 De BENOIST Alain, Les idées à l'endroit. Editions libres-Hallier, 1979, 298 pages, page 16. 4De formation maurrassienne, secrétaire de Pierre BOUTANG (1949-1951) Gilbert COMTE fut journaliste au Monde de 1962 à 1982. Dans un entretien à la revue royaliste, Les Épées, (Décembre 2007) publié en intégralité sur son site internet, il dit avoir " entretenu des rapports avec Alain de BENOIST. Je ne figure pas parmi ses proches mais je reconnais ses éminentes qualités intellectuelles, sa fermeté d'âme, son très grand courage ». 5 CAMUS Jean-Yves, Nouvelle dr oite, in TAGUIEFF Pierre-André. Dictionnaire historique et critique du racisme. P.U.F., 2013, 1964 pages, pages 1285-1286.

20C'est une petite formation d'extrême-droite, dominante dans ce champ à l'époque, le Parti des Forces nouvelles (PFN) qui revendique en premier ce terme en 19751. Pascal GAUCHON, son secrétaire général titre l'éditorial du premier numéro de leur revue Initiative nationale " Contre le retour de la IVe : la nouvelle droite »2 . Quoique marginal, il faut également mentionner, la revendication de Michel G eorges MICBERTH (1945-2013), a uteur pamphlétaire, se définissant comme " anarchiste de droite », qui appelle de ses voeux une " nouvelle droite » dès 1975.3 Dans un premier temps le GRECE, dans une posture défensive, récuse ce terme de " nouvelle droite », lui préférant celui de " nouvelle culture ». Il s'est pourtant lui même positionné dans cette opposition binaire " vieux/neuf », " nouveau/ancien » , soucieux de vouloir transformer en profondeur la droite française. Alain de BENOIST, lui même, présentant son ouvrage, " Vu de droit e », da ns l'émission Radioscopie de Jacque s CHANCEL, le 28 novembre 1977, affirme que son " désir est en quelque sorte de créer une nouvelle droite » (souligné par nous). Dans un des premie rs articles publ ié dans le Figaro-Magazine, sous le pseudonyme de Frédéric TOULOUZE, ce qui lui permet de citer ses écrits à la troisième personne, Alain de BENOIST imagine que des nouvelles frontières idéologiques se dessinent, que de nouveaux clivages s'instaurent autour de la question du pouvoir, entre les défenseurs de la " diversité nécessairement hiérarchisante » et ceux " qui rêvent d'une société plus égalitaire ». Et de s'interroger si " une nouvelle droite » (et une " nouvelle gauche ») n'est pas en train de se mettre en place ? » 4 Utilisant ce terme de " nouvelle droite », Thierry PFIRSTER ne veut pas créer un nouveau concept mais reprend l'expression utilisée par Louis PAUWELS qui entend se différencier de la " droite bourgeoise, conservatrice et réactionnaire ». L'éditorialiste du Figaro-magazine 1 Cf. la troisième partie, " la nouvelle droite » de PENINQUE Philippe. " La politique à coup de poing ou l'extrême droite extra parlementaire de 1968 à 1975. Mémoire d'histoire Institut d'Etude politiques 1975 -1976, 86 pages. 2 Initiative nationale n°1 mars 1975 3 MICBERTH M.G.. Vers une nouvelle droite. Le Quotidien de Paris, 7 novembre 1975 . 4 TOULOUZE Frédéric (Alain de BENOIST). " Les intellectuels ne sont plus à gauche. Le Figaro-Magazine 7 octobre 1978 , pages 88 -91.

21estime que le bilan de la droite française est un " bilan de faillite »1. Face à l'idéologie " égalitaire » qu'il considère être l'idéologie dominante, il appelle de ses voeux à l'élaboration d'une " contre-idéologie », en gestati on dans des groupes intellectuel s qu'il désig ne explicitement : " le Club de l'Horloge ou Nouvelle Ecole ». Le Club de l'Horloge pourrait donc être identifié à cette " nouvelle droite », son projet politique étant de reconstituer une armature idéologique à la droite française. Mais, voulant éviter toute confusion, les deux structures épousant au fil du te mps des thèses à priori irréduc tibles, nota mme nt sur l'interprétation du libéralisme, nous suivrons Pierre-André TAGUIEFF en n'utilisant le terme de " nouvelle droite » que pour désigner le " GRECE et sa mouvance »2. Ø Un laboratoire idéologique pour une " droite de droite » Plutôt discret les premières années de son existence, le Club de l'Horloge sort de l'anonymat en 1979. Sa démarche se veut originale. Il se créée en 1974, année de l'élection du premier président non-gaulliste de la Ve République, à l'initiative d'énarques qui veulent réagir au mouvement des idées né de mai 68. Ils ont pour projet de constit uer une st ructure de réflexions, visant à construire une doctrine pour la majorité. En choisissant la formule du club politique, " forme marginale d'action collective »3 et en se référant très explicitement au Club Jean MOULIN, les jeunes énarques visent le combat des idées. Ils seront en phase comme nous le ve rrons dans un premier chapitre au moment de la dé faite de Valery GIS CARD d'ESTAING, avec le renouveau des clubs à droite, sans se lier officiellement avec un parti politique comme les Clubs Perspectives et Réalités ou le Club 89. Les clubs ne disparaissent pas mais sont supplantés par l'apparition des " think tanks ». Le Club de l'Horloge inscrit sa démarche dans une stratégie qualifiée de " gramsciste de droite». Avant de conquérir le pouvoir politique, il faut gagner la bataille des idées et surtout redonner à la droi te une colonne vertébrale idéologique . Quelle droite ? En dé tournant l'expression utilisée par Pierre BOURDIEU à l'égard de la gauche4, le Club de l'Horloge veut 1 PAUWELS Louis. Contre-idéologie. ITEM mars 1978, Page 39 2 TAGUIEFF Pierre-André (entretiens). Origines et métamorphoses de la nouvelle droite. Vingtième siècle n°40 , octobre-décembre 1993, pages 3-22. 3 BLONDIAUX Loïc. " Les clubs : so ciétés de pensée, agence ment de r éseaux ou instances de sociabilité politique ? », Politix, printemps 1988, pages 29-42, page 42. 4 Pierre BOURDIEU rappelait dans Télérama (12 août 1998) que par ces termes, il appelait de ses voeux " une gauche vraiment de gauche, d'une gauche vraiment respectueuse des promesses qu'elle a faîtes pour obtenir les

22constituer une " droite de droite » , une droite sans complexes, qui assume son histoire , ses valeurs, ses racines; une droite qu'il faut doter d'une doctrine. Le Club de l'Horloge n'est pas un simple " laboratoire d'idées » ou " think tank ». C'est un " laboratoire idéologique » qui n'entend pas limiter son rôle à l'organisation de conférences ou de rédactions de notes, ce qu'il fait par ailleurs. Même quand il se fait le " nègre » pour des hommes politiques, il n'épouse pas leurs convictions mais se sert de leur notoriété pour écrire son projet politique. La " Révolution libérale » de Philippe MALAUD est de ce point de vue un modèle du genre, véritable " galop d'essai » qui permet au Club de tester ses idées. Le Club de l'Horloge s'est donné comme ambition de proposer à la majorité présidentielle, celle de Valery GISCARD d'ESTAING, un véri table projet de société, une conception du monde et un programm e politique, c'est-à-dire une idéologie 1. Face à la crise, s'inscrivant dans une démarche essentialiste, le Club de l'Horloge dès ses premiers écrits, notamment les Racines du Futur, puise dans la mythologie indo-européenne, pour construire un " modèle européen » organisé autour des trois fonctions de Georges DUMEZIL. Nous étudierons dans le chapitre IV la construction de cette pensée, qui ne varie pas quelque soit la conjoncture. Certains pans de cette pensée sont parfois remisés mais jamais oubliés et les premiers ouvrages du Club sont toujours considérés comme le socle idéologique de sa pensée. Ø Le cheval de Troie du GRECE ? A-t-il été l'élément avancé du G.R.E.C.E, son cheval de Troie ? Notre premier entretien fut volontairement avec Alain de BENOIST. Le penseur de la " nouvelle droite » fut catégorique : " Ma réflexion première est assez simple. Depuis que le Club de l'Horloge existe, il n'a cessé d'être présenté dans la presse, par les journaliste comme un prolongement de la " nouvelle droite », com me une filiale de l a " nouvelle droite », com me lié à la " nouvelle droite », tout es choses qui sont absol ument inexactes. He nry De Lesquen, d'ailleurs a régulièrement démenti. Moi, je l'ai fait plus occasionnellement »2. Nous pensons au contraire que le Club de l'Horloge est un " enfant » du GRECE qui très rapidement, prend suffrages des électeurs de gauche ». Association Raisons d'agir avec Pierre BOURDIEU, Christophe CHARLE, Bernard LACROIX, Frédéric LEBARON et Gérard MAUGER. Pour une gauche de gauche. Le Monde 8 avril 1998 1 PARENTEAU Danic, PARENTEAU Ia n. Les idéolo gies politiques. Le clivage gauch e-droite. Pr esses de l'Université du Québec, Québec, 2009, 194 pages. 2 Entretien avec Alain de BENOIST, 10 mars 2010.

23son autonomi e et rompt avec Alain de BENOIST e t ses am is, d'abord pour des rais ons tactiques en 1979, puis pour des véritables divergences idéologiques et stratégiques au milieu des années quatre-vingt. Mais plusieurs membres du Club de l'Horloge conservent des liens avec la mouvance du G.R.E.C.E. . Les manifestations de célébration organisées après la mort de Domini que VENNER, penseur de l'ex trême droite identit aire et fondateur d'Europe-Action, nous ont conforté dans l'idée qu'il existait un lien idéologique continu entre le groupe qu'il avait créé au sortir de la guerre d'Algérie, Europe Action et son " bras étudiant », la Fédération es Etudiants Nationalistes (F.E.N.), le " Groupement de Recherches et d'Etudes pour une Civilisation Européenne » (G.R.E.C.E.) et enfin le Club de l'Horloge. Nous rappelons en prologue du second chapitre le décès de Dominique VENNER et son lien avec les fondate urs du Club de l'Horloge. Quelques heures avant sa mort, D. VENNER déjeune avec trois personnes, dont Jean-Yves LE GALLOU, qui forment, selon les termes même d'Henry de LESQU EN, président du Club de l'Horloge, une " communauté de pensée »1. C'est cette communauté de pensée, son histoire, ses textes, sa stratégie qu'il nous faut étudier en premier afin de comprendre les conditions de création et la pensée politique du Club de l'Horloge. Ainsi que Pierre-André TAGUIEFF l'a montré, le GRECE n'est pas un bloc homogène, tra versé par différente s approches idéologiques et son histoi re n'est pas totalement linéaire. Le ou plutôt " les » GRECE fondés en 1968 sont différents du GRECE de 1978 et encore plus de celui de 1988. De nombreux travaux ont déjà été consacrés à la " Nouvelle droite » essentiellement centrés sur le GRECE et Alain de BENOIST2. Il nous fallait les reprendre pour sous un a ngle différent afin de comprendre et d'analyse r les convergences mais aussi les di vergences idéologiques entre le GRECE et le Club de l'Horloge, les différents choix stratégiques. C'est pourquoi nous avons jugé utile de consacrer un important aux " racines du passé » du Cl ub de l'Horloge. Nous nous inté resserons 1 Propos du 25 mai 2013 reproduits sur le site Polémia de Jean-Yves LE GALLOU. 2 DESBUISSONS Ghislaine, La Nouvelle droite (1968-1984). Contribution à " étude des idées de droite en France, thèse de 3' cycle , sciences politiques, l . E. P. de Grenoble , 1984, 2 tomes ; dir ecteur : Ma urice CROISAT. 581 pages ; DURANTON-CRABOL Anne-Marie, Le GRECE de 1968 à 1984 : doctrine et pratique, thèse pour le doctorat en histoire (nouveau régime), université de Paris-X Nanterre, 1986 ; directeur : René RÉMOND. 442 pages ;DURANTON - CRABOL Anne-Marie. Visages de la nouvelle droite. Le GRECE et son histoire. Presses de la FNSP. 1988 ; FRANÇOIS Stéphane. Les néo-paganismes et la Nouvelle Droite. Arche Milano. 2008, 318 pages ; FRANÇOIS Stéphane. Tradition, écologie et identité. Etudes sur la nouvelle Droite et ses d issidences 158 page s 2011 ; FR ANÇOIS Stéphane. Au delà des vents du n ord. L'extr ême droite française, le pôle nord et les Indo-Européens. Presses Universitaires de Lyon, 2014, 322 pages ; TAGUIEFF Pierre André La stratégie culturelle le la " Nouvelle Droite»en France (1968-1983) in Vous avez dit fascismes ?, Arthaud/Montalba, Paris, 1984 , page 13 à 152. ; TAGUIEFF Pierre-André. Sur la nouvelle droite. Descartes &Cie 1994. 426 pages.

24essentiellement au GRECE, de la premi ère déce nnie constit ué, celui où pl usieurs des membres du Club de l'Horloge et non des moindres, se sont formés, notamment au sein du Cercle PARETO que nous considérons comme ayant été la " matrice » du Club de l'Horloge. Nous nous sommes attachés à comprendre les conditions de la création du Club de l'Horloge qui, avons nous découvert, aurait pu s'appeler différe mm ent (Cf. le troisièm e chapitre). Plusieurs des premiers membres souhaitaient participer aux activités d'un club considéré comme un club de droite, contribuant à aider le parti gaulliste, alors représenté par l'UDR, et l'UDF naissante. Très rapidement, les adeptes du " gramscisme de droite » ont été hégémoniques sur le plan idéologique même si ils n'étaient pas forcément majoritaires. L'été 1979 a servi de révélateur, avec plusieurs départs de membres en désaccord avec l'évolution du Club de l'Horloge. Ø Un club mais aussi une force d'action Particularité de ce " laboratoire », il fait également le choix d'investir les partis politiques et les cabinets ministériels afin de diffuser ses idées au sein de la droite parlementaire. C'est également un " groupe d'action », ainsi que nous l'expliquons dans un chapitre six. Après la victoire de la gauche, le Club de l'Horloge ne se positionne plus comme un simple cercle de pensée (cf. le chapitre 5), mais se définit explicitement comme une " force d'opposition », cherchant à se démultiplier en province avec la création de cercles régionaux et à se constituer des réseaux en France mais également à l'étranger. Nous entrons dans une phase où la droite, face à la gauche enfin au pouvoir depuis 1958, radicalise son discours. Ce discours, elle le construit en partie grâce aux travaux et réflexions du Club de l'Horloge qui multiplie les réunions où les respons able s de la droite parlementaire se pressent. Cet te radicalisation doctrinale ne favorise-t-elle pas la percée é lectorale du Front nati onal ? Le t hème de la " préférence nationale », développé par le Club de l'Horloge en 1985, n'est pas uniquement destiné à alimenter le programme du Front national. Il a été aussi, comme nous le verrons, construit à partir de discours et de pratiques issus de la droite parlementaire RPR et UDF. Plusieurs étapes devront être distinguées afin de mieux comprendre comment cette formation élitiste a pu et su peser sur la vie politique française. On s'attachera également à repérer les différents itinéraires politico-administratifs des membres du Club, à commencer par le noyau fondateur afin de mie ux comprendre cet te st ratégie définie pa r eux-mêmes comme une stratégie d'entrisme et d'influence.

25L'irruption d'un nouvel acteur modifie les rapports de force au sein de la droite et contrarie la classification classique des trois droites de René RÉMOND. L'historien reconnaît en 2005 dans son dernier ouvrage, " Les droites aujourd'hui », la réalité de cette quatrième droite qu'il qualifie " d'extrême » sans pouvoir la rattacher à un courant de pensée précis1. Après " l'explosion électorale » du Front national en 19842, convaincu après les élections cantonales de 1985, qu'il ne s'agit pas d'un simple " feu de paille électoral », le Club de l'Horloge prend le risque de s'investir complètement au sein de cette formation d'extrême-droite, encore groupusculaire en 1982. Il le fait à un moment où nous le verrons, son discours compte encore au sein des droites parlementaires. Ne prend-t' il pas alors le risque de voir le capital idéologique placé dans les formations de droite, RPR et UDF, com plètement dilapidé ? En réinvestissant ce capital dans le Front National, le Club de l'Horloge arrive à lui donner cette ossature idéologique qu'il souhaitait donner à la droite. Mais ainsi que le rappelle René RÉMOND, " la politi que ce ne sont pas seule ment des idées : ce sont aussi de s passions, des espoirs, des craintes, des aspirations, des intérêts, des phantasmes »3 et pourrions nous rajouter, des rapports de force. Fin 1998, c'est la scission au sein du FN provoquée par Bruno Mégret, et la création du Mouvement National Républicain (MNR). Dans l'incapacité de récupérer l'héritage du FN, notamment électoral, l'aventure du MNR finit en impasse. Le Club de l'Horloge ne pèse plus. En avril 2002, ils sont inexistants dans les entourages des deux candidats du second tour, Jacques CHIRAC et Jean-Marie LE PEN. C'est pourquoi nous avons choisi d'arrêter notre étude du Club de l'Horloge après 2002, tout en y consacrant quelques lignes sous forme d'épilogue. Ce laboratoire n'est plus que l'ombre de lui même. Il réoriente son discours en s'inspirant de Samuel HUNTINGTON et construit le mythe d'une " super-classe mondiale » diffusant une " idéologie cosmopolite. » 1 RÉMOND René. Les droites aujourd'hui. Audibert, 2005, 267 pages. 2 MAYER Nonna, PERRINEAU Pascal (sous la direction de.) Le Front national à découvert. Presses de la Fondation nationale des sciences politiques. 1989. 366 pages, page 43. 3 Op. cit. page 263.

26Ø Questions de méthode. Le Club de l 'Horloge ne comprend plus aujourd'hui que quelques dizaines de membres, dirigé par le même noyau fondateur, même si certains, comme Yvan BLOT, ont pris leurs distances. Persuadés d'être les victimes de campagnes de presse orchestrées par des lobbies clandestins, le Club de l'Horloge ne se livre pas fac ileme nt. Les membres du Club de l'Horloge, à l'exception du Préside nt (Yvan BLOT puis Henry de LESQ UE N) et du Secrétaire général (J.Y. LE GALLOU , Michel LEROY et un peu Pierre MILLAN) qui délivrent la parole officie lle, ne s'e xpriment pas, y compri s quand ils l'ont quitté e t ne mentionnent pas leur appartenanc e. Il n'a pas é té possible d'accéder aux sources écrites internes, non a rchivé es. Nous savons, pour en pos séder un exemplai re, qu'i l exist ait un bulletin interne, existence confirmée par des membres du Club, mais il n'a pas été possible de le consulter. De même, chaque conseil d'administration fait l'objet d'un procès verbal. Nous espérons que ces documents seront accessibles dans un futur proche. Nous avons bénéficié cependant de plusieurs pièces écrites, dont certaines sont reproduites en annexe, fournies par Jean-Yves LE GALLOU un des fondateurs du Club de l'Horloge et son premier secrétaire général, documents qui ont été fort utiles. Ce choix a certes été sélectif mais nous a aidé quant à la compréhension de la genèse de ce Club. Il n'a pas été possible de déterminer si des archives du Cercle PARETO à Sciences Po existaient. Nous avons privilégié les sources écrites ouvertes du Club de l'Horloge (ses ouvrages, la revue Contrepoint, la Lettre d'information du Club de l'Horloge), expression écrite contrôlée et maîtrisée et nous avons recherché un grand nombre de sources orales. La majorité des acteurs et témoins ont accepté d'être enregistrés et nous mentionnons à chaque fois en note de bas de page, s'il s'agit simplement de notes prises pendant l'entretien sans enregistrement. La carrière politico-administrative de l'aute ur de cette thèse, qui n'a jamai s caché à se s interlocuteurs ses engagements passés, n'a pas toujours été un élément facilitateur et a même provoqué des fins de non recevoir, soit que les personnes souhaitaient tourner une page, soit qu'elles n'entendaient pas compromettre une fin de carrière administrative. Nous avons pu cependant nous entretenir avec quinze personnes, membres ou ayant été membres du Club de l'Horloge, dont quatre de ses principaux fonda teurs. De même, nous avons pu entendre d'anciens responsables politiques qui ont côtoyé des membres du Club de l'Horloge. Nous mesurons parfaitement la fragilité de chaque témoignage, d'autant qu'il s'est écoulé plus de quarante ans depuis la création du Club en 1974. De ce fait, le souvenir des événements

27s'estompe. Beaucoup sont tentés de réécrire l'histoire au regard des événements passés mais également du présent. Pour des raisons parfois obscures, certains des témoins continuent de récuser certains fait s, ou pratiquent le mensonge par om ission. Ainsi, le rôl e de Daniel GARRIGUE, maire de Bergerac en 2014 et ancien député de Dordogne, dans la fondation du Club de l'Horloge avait toujours été caché. Il a parfois fallu plusieurs entretiens pour que les interlocuteurs acceptent de donner des éléments nouveaux pour aider à la compréhension. Il a été difficile d'obtenir des entretiens avec de s anciens responsa bles de part is de la droite parlementaire. Le Club de l'Horloge est encore assimilé au Front national et à l'extrême-droite et les prises de positions actuelles des deux responsables les plus médiatiques, Jean-Yves LE GALLOU et Henry de LESQUEN, président de Radio Courtoisie ne contribuent pas à lever une éventuelle équivoque. Nous avons pu consulter, par dérogation, les archives des renseignements généraux de la Préfecture de police consacrées au GRECE et au Club de l'Horloge, celles de la direction centrale des renseignements gé néraux (DCRG) n'éta nt pas encore classées en 2014. Malheureusement, elles ont été fortement expurgées dans le passé. Le fond constitué par Jérôme COTILLON au centre d'histoire de Sciences Po nous a été fort utile pour comprendre et illustrer la genèse des " premiers GRECE ». Enfin, il nous faut remercier Jean-Yves LE GALLOU pour les copies des documents qu'il a consenti à nous transmettre qui illustrent d'un jour nouveau les conditions de la création du Club de l'Horloge.

28CHAPITRE 1 - LA FONCTION DES CLUBS SOUS LA VE REPUBLIQUE Dans sa présentation de la création du GRECE, Anne -Marie DURANTON CRABOL 1 se référant à l'analyse de Serge SUR2, établit un lien entre les crises que peuvent connaître la formation des partis politiques et la création des clubs. " Dans les moments de reflux et de difficultés, les familles politiques se dotent fréquemment d'une structure de type club ». Lors d'une réunion d'orientation à ses débuts, le GRECE, toujours soucieux de donner un aspect scientifique, à ses travaux, se présent e comme étant à mi-chemin entre un organis me scientifique, le CNRS et un club, le Club Jean Moulin »3. Le GRECE se crée (cf. chapitre 2) après les échecs d'abord de l'activisme armé de l'OAS puis électoraux de 1965 et 1967 de la mouvance d'extrême-droite autour du couple " Europe Action - Fédération des Etudiants Nat ionalistes ». P uis, constatant e t regrettant une insuffisance doctrinale à droite, des membres du GRECE et des élèves de grandes écoles décident, non de constituer un courant au sein d'un parti politique, mais de créer un club politique afin de rénover la pensée de la droite. Ce sera le Club de l'Horloge. Le Club Jean Moulin est souvent cité comme étant le modèle. Le Club de l'Horloge eut également son heure de gloire, sur une court e période . Lorsque Jean POP EREN, responsable du Parti socialiste, veut à son tour avoir sa propre structure, le Centre de recherches et d'information Galilée, aprè s le congrès de Rennes en 1990, il précise qu'il veut crée r " un Club de l'Horloge de gauche » tout en oubliant pas de faire référence au Club Jean Moulin4. Les clubs politiques, sous la cinquième république, sont, pour la plupart du temps, des objets assez éphémères. Si nous prenons les trois clubs ment ionnés dans le " Dictionnaire des intellectuels français » auxquels il faut rajouter la Fondation Saint Simon, les clubs sont 1 DURANTON CRABOL Anne-Marie. Le GRECE (Groupement de Recherche et d'Etudes sur la civilisation européenne) de 1968 à 1984 : Do ctrine et Pratique. Thèse de doc torat Dir. René Rémond A nnée 1986 . Université Paris X Nanterre 461 pages. page 71 2 SUR Serge " La vie politique en France sous la Ve république. Montchrestien, 1982, 652 pages. 3 " Le premier aspect de la recherche peut être qualifié de type CNRS, le second de club jean Moulin. Et bien, notre vocation est réaliser le jus te milieu entr e ces 2 formules ». (Bull etin intérieur rendant compte du 3e séminaire GRECE, mai 69 page 6 4. Jean POPEREN, figure de la gauche, a été à la fois un homme de partis, le PCF, puis le PSU et enfin le PS, mais a également été partie prenante du mouvement des Clubs créant l'Union des groupes et clubs socialistes qui rejoint la FGDS en 1968. Nouvel Observateur 19-25 mars 1992.

29présentés en introduction comme des " lieux de formation, " d'expression, de rencontre, carrefours de sociabilité intellectuelles, de reconnaissances à usage interne ou externe 1». Trois clubs sont re censé : le Cl ub de l'Horloge, le Club J ean Mouli n et le Club 89. La Fédération nationale des Clubs Perspectives et Réalités, qui a joué un rôle dans l'élaboration d'une doctrine giscardienne n'est pas mentionnée. Nous pouvons constater qu'à ce jour, ces structures ont soit disparu , soit ne sont plus que l'ombre d'el les-mêmes. Le Club Jean Moulin, créé en 1958, la référence majeure, ne dure véritablement que sept à huit ans, victime d'un lent processus de désagrégation de 1965 à 19702. Le Club 89, créé en 1981, mis en sommeil après la victoire de Jacques CHIRAC en 1995, a été " réveillé » en 2010 par Benoit APPARU, alors secrétaire d'Etat au Logement qui en prenait la présidence. Il se définit alors comme le club de " réflexion de la maj orité pr ésidentielle » dé sireux de travailler a u programme de la majorité, comme en 1986, pour l'élection présidentielle. Emporté par la défaite de 2012, il semble avoir cessé toute activité en 20133. Après avoir connu, elle aussi une période de sommeil après les élections législatives de 1986, la Fédération nationale des Clubs Perspectives et Réalité s'est transformée en juillet 1995 en parti politique pour devenir le Parti Populaire pour la Démocratie Française (PPDF) rejoignant l'U.D.F. Quant au Club de l'Horloge, il n'est plus que l'ombre de lui même, ne produi sant plus d'ouvrage s et ne réunissant péniblement que quelques dizaines de personnes pour son université annuelle dans une petite salle à Paris. La Fondation Saint Simon s'est pour sa part auto-dissoute après dix sept ans d'existence. Pourtant, il se crée encore des clubs politiques, ou intitulés comme tels, généralement après une défaite électorale majeure, mais désormais, le plus souvent, au service d'une personnalité. Malgré la constitution de courants au s ein de l 'UMP en 2012, ses différe nts lea ders constituent leurs propres clubs. Ainsi François FILLON transforme son ancien club France 9 en Force Républicaine après l'épisode de la " guerre des chefs » pour la conquête de l'UMP. Jean-François COPÉ, pourtant assuré de conserver la présidence de l'UM P, maintient sa propre struct ure de réflexions, " Génération France ». Na thalie KOSCIUSKO-MORIZET 1 JULLIARD Jacques, WINOCK Michel (Sous la direction de.) Dictionnaire des intellectuels français. Seuil. 1996. 1259 pages, page 20. 2 ANDRIEU Claire. Pour l'amour de la République. Le club Jean Moulin 1958-1970 . Fayard, 2002, 608 pages 3 Il se présente toujours sur son site internet comme le " Club de réflexion de la Majorité Présidentielle » et ne comporte que des interventions datées de 2011.

30rebaptise son club ADN créé en 2001 en " France Droite » et Xavier BERTRAND crée La Manufacture1. Même le Front national crée sa propre structure de réflexion en 2012, " le club Idées Nation » présidé par Louis ALIOT vice-président du FN. Cet aspect éphémère peut-il expliquer que la question des clubs politiques soit peu abordée depuis une cinquantaine d'années . Peu d'ouvrages ont été publiés sur la question à quelques exceptions près, dont les livres de J. MOSSUZ sur les clubs et de Claire ANDRIEU sur le Club Jean Moulin. C'est fort à propos que Loïc BLONDIAUX2 notait déjà en 1988 que les clubs étaient l es " parents pauvre de l'étude des organisations politiques ». Lors du 12e congrès de l'Association Française de science Politique, une section thématique fut consacrée à l'étude des clubs, fondations politiques et " think tanks » notant que " la science politique française était encore balbutiante dans l'appréhension de ces objets que sont les fondations et think tanks »3. Peu de place leur est consacrée dans les ouvrages de science politique quand ils ne sont pas mentionnés du tout . Il est vrai que le club politique, société de pensée, héritage de la Révolution fra nçaise a cédé le pas au " think tank », c oncept anglo-saxon qui tend à s'imposer. 1) CLUBS ET CRISE DES PARTIS : LES DEUX VAGUES Le phénomène " clubiste » se développe à deux moments précis de la Ve République et qui correspondent à des moments de crise qui touche les institutions et les partis politiques. Il n'y a pas cependant d'automaticité entre la crise profonde que connaît un parti et la création de clubs. 1 Le Figaro 2 et 3 mars 2013. 2 BLONDIAUX Loïc. Les clubs : so ciétés de pensée, agenceme nts de rés eaux ou instances d e sociabil ité politique Politix. Vol.1 n°2 Printemps 1988 pp29-42 3 12e congrès de l'AFSP 9-13 juillet 2013. Section Thématique 57. " Comment étudier les clubs, les fondations politiques et les think tanks ? ». Respons ables Mathieu LA URENT et Thibaut RIOUFREYT . Site ww w. congres-afsp.fr ; on peut être étonné de lire dans la présentation de ce groupe de travail que les " études portant sur les clubs des années soixante sont nombreuses ». Ainsi que l'écrit Mathieu Laurent dans sa thèse sur les structures non-partisanes dans le champ politique, " on note la faibless e de l' intérêt porté jusqu'ici par la science politique aux clubs et cercles de réflexion » (...) La bibliographie portant sur le sujet n'est certes pas inexistante mais paraît à la fois dispersée et datée ». LAURENT Mathieu Les structures non-partisanes dans le champ politique. Thèse de doctorat en sciences politiques (direction Jacques Chevallier) Thèse de doctorat en sciences politiques. Septembre 2011 Panthéon Assas 2011, 426 pages plus annexes. Pages 25 et 26.

31Ainsi la crise de mai 1968 a pris de court l'ensemble des formations politiques y compris le Parti communiste qui s'est vu attaqué sur sa gauche par des groupes dont la plupart des dirigeants avaient été formés au sein de l'Union des Etudiants Communistes (U.E.C.). Le Club Jean Moulin, lui même ,dont les membres réfléchissaient depuis des années sur l'état de la société française est pris au dépourvu. L'extrême-gauche apparaît dans le paysage politique sous de mult iples c hapelles (Ligue communiste, Gauche prolétarienne, Lut te Ouvrière, PCMLF, Révolution, AJS-OCI, V.L.R., organisation Comm uniste Libertaire, Organisati on révolutionnaire anarchiste -ORA). Pourtant c ette crise n'a pas provoqué la création de multiples clubs, y compris dans la mouvance de la SFIO. Nous ne sommes plus dans la tradition du 19e siècle qui voit l'éclosion de clubs après les journées révolutionnaires de 1830 et 1848. Le Club Jean Moulin ne se régénère pas et son secrétaire général, Jean-Jacques de ROSA, démissionne en 1969. L'élection présidentielle de 1969 est révé latrice de ce tte crise qui touche la SFIO. La gauche est éliminée du premier tour de l'élection présidentielle. Gaston DEFERRE, candidat de la SFIO, soutenu par Pierre MENDES France dépasse juste la barre des 5% (5,01%) s uivi par Michel ROCARD (3,61%) pour le PSU. Le Pa rti communiste demeure encore la grande force politique de gauche avec 21, 27 %. Mais neuf ans après, il est devancé par le nouveau Pa rti soc ialiste a ux élections législatives. Les Clubs ne jouent quasiment aucun rôle dans cette période de convulsions de la société française, contrairement à ce qui s'est produit en 1958. A) La première vague : pour le renouveau de la gauche La première vague de clubs naît sur les décombres de la IVe République, en pleine guerre d'Algérie. Le Club Jean Moulin, " Citoyens 60 », le Cercle Tocqueville, pour ne mentionner que les plus connus et les plus importants, naissent tous les trois en 1958. Le Club des Jacobins est l'exception majeure. Ce club, créé en 1951 par Charles HERNU joue un rôle important pour la refondation de la gauche1. La gauche socialiste sort discréditée et affaiblie 1 Responsable des Jeunesses du Parti Radical du Rhône, Charles HERNU avec Georges MAURY, lui même membre du bureau national des Jeunesses Radicales décident de faire revivre le " Club des Jacobins ». Les statuts sont déposés 12 décembre 1951 Le premier comité directeur est composé , outre C. HERNU et G. MAURY de Charles BRIANDET , Georges SOLPRAY, Jacq ues GAMBIER de la FORTERIE, Ro bert FUSILIER (adhérent SFIO), Pierre NAUDET. Le Club des Ja cobins compter a près de 2000 adhérents. Beaucoup d'entre eux sont adhérents du Parti Radical et francs-maçons (entre 50 et 60%). Le Club des Jacobins se définit à ses origines comme " une société d'éducation civique et de propagande ayant pour but de réunir tous les républicains » Il devient rapidement un club de " combat politique » appuyant Pierre MENDÈS FRANCE dans son entreprise de rénovation et de conquête du Parti radical. Entreprise essentiellement parisienne à ses débuts, le Club des jacobins essaime en province. Après 1958, le Club des Jacobins travaille au rassemblement

32des premières années de la Ve République. Le ralliement de Guy MOLLET au général de GAULLE précipite la scission de la minorité, déjà très critique sur la politique algérienne et donne naissance au Parti Socialiste Autonome (PSA), future composante du Parti Socialiste Unifié (PSU). Se prése ntant comme " l'avant garde de la V e république », la SFIO s'effondre. En 1962, elle a perdu 80% de ses adhérents et la moitié de son électorat par rapport à la Libération1. Les premiers clubs naissent de ce malaise, dû notamment aux conditions d'exercice du pouvoir par le gouvernement Guy Mollet en Algérie, avec la torture et le refus de prendre en compte la question nationale algérienne. Beaucoup d'adhérents des clubs n'oublient pas que le nouveau régime est né d'un coup d'état militaire à Alger, qui aurait pu déboucher sur une dictature militaire ou une guerre civile comme en Espagne en 19362. Les clubs se considèrent alors comme des comités de vigilance antifasciste3. Plusieurs naissent après le 13 mai 1958 comme le Cercle Tocqueville et le club Jean Moulin. Le club d'Alain Savary, Socialisme et Démocratie, est constitué à partir d'un groupe anti-OAS. La Quatrième République est identifiée au " système des partis », système qui a conduit à son impuissance. " Les difficultés de la démocratie française depuis une quarantaine d'années », écrit Jacques JULL IARD, sont dues pour une large part aux défic iences des partis politiques (...) d'où le rôle vicariant des clubs et des syndicats »4. Les Clubs se créent donc par insuffisance des partis politiques, notamment la S.F.I.O. et la gauche républicaine. Cette notion de club, pourtant héritage de la grande Révolution française, est étrangère au Parti Communiste dont il faut rappeler qu'il est encore sous la IVe république la principale force de gauche a) Une première classification de la gauche républicaine et socialiste en réunissant en 1964 des clubs afin de constituer la Convention des Institutions Républicaines, première étape de la conquête du parti socialiste par François MITTERRAND. Cf. RECLUS Philippe. La république impatiente ou le Club des Jacobins (1951 -1958), Paris, Publications de la Sorbonne. 1987, 200 pages 1 KERGOAT Jacques. Histoire du Parti Socialiste. La découverte, 1997, 124 pages. 2 WINOCK Michel. L'agonie de la IVe République (13 mai 1958). Gallimard, 2006, 386 pages, page 13. 3 MOSSUZ Janine. Que sont devenus les Clubs ? Revue française de sciences politiques, 20e année, n°3 1970. pp 964-973 4 JULLIARD Jacques. La Quatrième République. Calmann- Lévy, 1980, 351 pages , page 21

33De nombreux clubs se créent en rupture avec le s organisati ons politiques traditionne lles Certains ont également la volonté de contribuer à une régénérescence de la vie politique et partisane. Janine MOSSUZ note la diversité des finalités des clubs et opère une distinction entre les " sociétés de pensée pures » et les " clubs de combat politique »1 . A l'intérieur même de cette distinction, elle sépare les sociétés de pensée pures qui se définissent comme " apolitiques » com me l'ADELS ou les groupes Rencontres, et les " sociétés de pensée déchirées »2 qui entendent aussi peser sur la vie publique grâce à leurs réflexions et travaux (Club Jean Moulin, Cercle Tocqueville, Citoyens 60, Démocratie nouvelle). Quant aux clubs de " combat politique » (Club des J acobins, Ligue pour le combat républicai n, Atelier républicain) ils ont été créé par des hommes politiques minoritaires au sein de leur propre formation, ou en désaccord, et qui font pression de l'extérieur afin de gagner en influence au sein de leur anci enne forma tion. Tout en é tant les " procureurs des partis », c es clubs cherchent à gagner des positions de force à l'extérieur pour mieux négocier leur retour, que ce soit pas fusion comme avec la C.I. R. ou l'UGCR ou l'adhésion collective. Les oppositions ne sont pas uniquement des positions de personnes. Elles portent également sur des orientations stratégiques, notamment sur la questi on des alliances, sur des pratiques politiques et des orientations programmatiques. b) Le tournant de l'élection présidentielle de 1965 L'élection présidentielle de 1965 est un tournant important dans l'histoire de la gauche sous la Ve République. Non seulement le général de GAULLE est mis en ballotage au premier tour (43%) mais c'est le candidat de la gauche, F. MITTERRAND, qui devient le candidat de toutes les oppositions au gaullisme3. Ainsi que l'écrit Serge BERSTEIN, " écrasée en 1962, l'opposition retrouve une crédibilité certaine »4. Les clubs sont engagés alors dans le processus de renouvellement de la gauche socialiste, processus qui débouche d'abord sur la 1 MOSSUZ Janine. Les Clubs et la politique en France. Armand Colin. 1970. 128 pages. 2 MOSSUZ Janine. Que sont devenus les clubs ? Revue française de science politique, 20e année, n°5 , 1970, pp . 964 -973, page 967. 3 J.L. TIXIER VIGNANCOUR, candidat des extrêmes droites appelle à voter F. MITTERRAND, malgré des désaccords dans son entourage. BOUCLIER Thierry. TIXIER VIGNANCOUR, une biographie. Editions Rémi Perrin, 2003, 322 pages. 4 BERSTEIN Serge. La France de l'expansion. I. La République gaullienne 1958-1969. Nouvelle Histoire de la France contemporaine ; 17, Editions du Seuil, Paris, 1989, 375 pages, pages 287 -288.

34constitution du Nouveau Parti Socialiste en juillet 1969, puis en 1971 du Parti socialiste au congrès d'Epinay. Plusieurs rencontres jalonnent l'histoire des clubs et de la " nouvelle gauche » dans les années soixante. La première, Les Assises de la Démocratie se tient à Vichy en avril 1964 réunissant une trentaine de clubs1 . C'est, selon les termes même de Claire ANDRIEU, " l'apogée du mouvement des Clubs »2. La portée de ces journées se veut être avant tout éducative. Aucune déclaration commune n'est faite à l'issue, mais l'action des clubs apparaît au grand jour, la presse rendant compte des travaux. Deux mois plus tard, à Paris les 6 et 7 juin, le Club des Jacobins, qui n'avait pas été admis aux Assises de la démocratie car considéré comme trop impliqué dans le jeu des partis, organise avec le Centre d'Action Institutionnel 3 une " Convention des Institutions Républicaines »4. Trente deux organisations sont présentes. La finalité n'est plus cette fois-ci éducative mais bien politique. " Le vrai chemin pour nous, écrit Charles HERNU, c'est de nous fondre dans un vaste parti politique dont auront besoin les structures politiques, économiques et sociales de la France de demain...»5. La Convention sera partie prenante de la constitutiquotesdbs_dbs23.pdfusesText_29

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