[PDF] Confrontations artistiques et féministes aux hiérarchies du genre





Previous PDF Next PDF



Se raconter se représenter

IMAGE 1 : Gustave Courbet Le désespéré



fr3.pdf

8. Montaigne pense-t-il être différent des autres hommes ? L'IMAGE. En quoi cet autoportrait de Gustave Courbet peut-il faire écho au texte de Montaigne ?



Gustave Courbet

S'il veut faire carrière à Paris il ne peut pourtant se défaire de son Courbet hisse dans cette œuvre un intime « contextualisé » à une histoire ...



Terre des lettres

Textes et images 2 Quel personnage cet autoportrait évoque-t-il ? ... L'entêtement du comte de Chateaubriand à faire coucher un enfant seul.



LA MISE EN SCÈNE DE LIMAGE William KENTRIDGE

Mais le goût du dessin et de l'art le pousse à entrer aux. Beaux-Arts de Johannesburg. Il étudie le mime dans une école à Paris mais aussi le théâtre devenant : 



AUTOPORTRAIT

est cette altérité face aux autoportraits. Rien n'est figé d'autant que l'artiste a sans doute représenté plus de lui qu'il n'en savait jusqu'à faire écho 



CYLE TERMINAL - Spécialité - PROGRAMME LIMITATIF - Le cycle

Claude Monet aurait peint cette toile en quelques heures de la chambre tableau de Gustave Courbet



Gustave Courbet

S' il veut faire carrière à Paris il ne peut pourtant se défaire de son Courbet hisse dans cette œuvre un intime « contextualisé » à une histoire ...



Confrontations artistiques et féministes aux hiérarchies du genre

19 oct. 2018 En quoi les œuvres d'individues classées comme femmes ... Il faudra



2019

1 avr. 2019 le peintre Gustave Courbet. Cet autoportrait reflète le parti pris réaliste12 de la peinture de Courbet entre-autre par le choix du sujet ...



[PDF] Se raconter se représenter - Amazon S3

cet autoportrait de courbet peut faire écho au texte de Montaigne en ce qu'il exprime une inquiétude devant la tâche à accomplir : se représenter se peindre 



Chercher à se connaitre - Lelivrescolairefr

En quoi cet autoportrait de Gustave Courbet peut-il faire écho au texte de Montaigne ?



Les « incipit » de Courbet et lautoportrait - OpenEdition Books

Cette posture d'auteur est transposée à la peinture par Gustave Courbet (1819-1877) par ses multiples autoportraits et par les textes qu'il écrit sur 



Gustave Courbet Le Désespéré (1843-45) analyse doeuvre

21 jui 2016 · Le Désespéré est un des autoportraits les plus célèbres de l'artiste français Gustave Courbet peint vers 1845 alors qu'il avait 25 ans



[PDF] fr3pdf - Collège Simone Veil Pontoise

8 Montaigne pense-t-il être différent des autres hommes ? L'IMAGE En quoi cet autoportrait de Gustave Courbet peut-il faire écho au texte de Montaigne ?



Autoportrait - Cairn

est cette altérité face aux autoportraits Rien n'est figé d'autant que l'artiste a sans doute représenté plus de lui qu'il n'en savait jusqu'à faire écho 



Gustave Courbet - Wikipédia

Cela ne me contrarie pas le moins du monde au point de vue de leur jugement mais pour se faire connaître il faut exposer et malheureusement il n'y a que cette 



[PDF] Modalités de lautoportrait photographique contemporain

ses vertus et cacher- autant que faire se peut- ses défauts Le portrait d'un personnage célèbre doit donc répondre à cette double exigence : il faut 



[PDF] Terre des lettres - Nathan enseignants

raconte ? Justifiez votre réponse en citant le texte b À quel genre littéraire cet extrait se rattache-t-il ?



Courbet PDF Peintures - Scribd

A) L 'engagement dans la peinture : de l'art et de l'artiste S'il est un peintre qui a suscité des polémiques au XIX ème siècle c'est bien Gustave Courbet!

  • Quel est l'intérêt de se raconter ?

    Se raconter aide à prendre de la distance et à donner un sens à son existence. "L'intérêt de l'écriture est qu'on peut se relire, redécouvrir ce qu'on a écrit et s'étonner", fait remarquer Annemarie Trekker.
  • Qu'est-ce qui pousse les artistes à se représenter quel rapprochement Pouvez-vous faire avec l'autobiographie ?

    Il se signale comme témoin de la scène mais, en se représentant lui-même, il revendique être l'auteur de l'œuvre, ce qui est encore rare pour l'époque. Ce geste n'est pas dénué d'une certaine ironie. En effet, l'artiste apparaît en effet minuscule au regard de ses commanditaires.
  • Quel est le but de Montaigne dans les Essais ?

    Les clés de l'art de vivre décrit par Montaigne dans les Essais est de cultiver à la fois l'ouverture au monde et l'attention à soi. Montaigne fait en particulier l'éloge du plaisir de la conversation, du voyage, mais aussi de la lecture.
  • Montaigne déclare qu'il veut donc limiter ses lecteurs à ses proches ("mes parents et amis"). Il donne une première justification à cette autobiographie : il veut lutter contre la mort. L'antithèse entre "perdu" et "retrouver" met en valeur sa justification. En quelque sorte l'écriture permettrait de survivre.
>G A/, i2H@yR3NNyR9 ?iiTb,ffi?2b2bX?HXb+B2M+2fi2H@yR3NNyR9 am#KBii2/ QM RN P+i kyR3

É)GBb KmHiB@/Bb+BTHBM`v QT2M ++2bb

`+?Bp2 7Q` i?2 /2TQbBi M/ /Bbb2KBMiBQM Q7 b+B@

2MiB}+ `2b2`+? /Q+mK2Mib- r?2i?2` i?2v `2 Tm#@

HBb?2/ Q` MQiX h?2 /Q+mK2Mib Kv +QK2 7`QK

i2+?BM; M/ `2b2`+? BMbiBimiBQMb BM 6`M+2 Q` #`Q/- Q` 7`QK Tm#HB+ Q` T`Bpi2 `2b2`+? +2Mi2`bX /2biBMû2 m /ûTɬi 2i ¨ H /BzmbBQM /2 /Q+mK2Mib b+B2MiB}[m2b /2 MBp2m `2+?2`+?2- Tm#HBûb Qm MQM-

Tm#HB+b Qm T`BpûbX

*QM7`QMiiBQMb `iBbiB[m2b 2i 7ûKBMBbi2b mt ?Bû``+?B2b /m ;2M`2

J;HB2 Gi`v

hQ +Bi2 i?Bb p2`bBQM, J;HB2 Gi`vX *QM7`QMiiBQMb `iBbiB[m2b 2i 7ûKBMBbi2b mt ?Bû``+?B2b /m ;2M`2X `i 2i ?BbiQB`2 i2H@yR3NNyR9

Université Bordeaux Montaigne

École Doctorale Montaigne Humanités (ED 480) THÈSE DE DOCTORAT EN ARTS (histoire, théorie, pratique)

Confrontations

artistiques et féministes aux hiérarchies du genre Présentée et soutenue publiquement le 18 juin 2018 par

Magalie LATRY

Sous la direction de Pierre Sauvanet

Membres du jury

Christine BARD, Professeure d'histoire, Université d'Angers. Sabine FORERO-MENDOZA, Professeure d'esthétique et histoire de l'art contemporain,

Université de Pau et des Pays de l'Adour.

Katalin KOVÁCS, Maîtresse de conférence HDR en Littérature et civilisation française,

Université de Szeged (Hongrie).

Hélène MARQUIÉ, Maîtresse de conférence HDR en études de genre, Université Paris 8.

Pierre SAUVANET, Professeur d'esthétique et philosophie de l'art, Université Bordeaux

Montaigne.

Faire comme si un discours innocent pouvait être tenu contre l'idéologie revient à continuer de croire que le langage peut n'être que l'instrument neutre d'un contenu triomphant. En fait, il n'y a aujourd'hui aucun lieu de langage extérieur à l'idéologie bourgeoise : notre langage vient d'elle, y retourne, y reste enfermé. La seule riposte possible n'est ni l'affrontement ni la destruction, mais seulement le vol : fragmenter le texte ancien de la culture, de la science, de la littérature, et en disséminer les traits selon des formules méconnaissables, de la même façon qu'on maquille une marchandise volée.

Roland Barthes, Sade Fourier Loyola,

Éditions du Seuil, 1971, p. 15.

L'écriture cyborg a trait au pouvoir de survivre, non pas sur la base de l'innocence originelle, mais en s'emparant des outils avec lesquels marquer le monde qui vous appose les marques de l'autre.

Donna Haraway, " Manifeste Cyborg », in

Des singes, des cyborgs et des femmes. La réinvention de la nature, Éditions Jacqueline

Chambon, 2009, p. 310.

- 2 -

Merci,

Aux soutiens sans faille - familiaux, amoureux, amicaux - vous vous reconnaissez. Merci pour votre patience, et

l'humour distancié nécessaire au fait de côtoyer de près où de loin une doctorante.

À Peyo. Tu rends tout plus facile.

À mes élèves. Si la ''transposition didactique'' permet de clarifier des idées pour vous, vos fulgurances, votre

créativité et vos enthousiasmes nourrissent la flamme en retour.

À Valérie Molinié, du musée des Augustins de Toulouse, Danièle James-Raoul, Agnès Lhermitte et Charlotte

Maria, merci d'avoir accepté de partager vos documents et vos travaux. À mon relecteur et mes relectrices : Agnès, Anne-Marie, Guillaume, Fanny, Laetizia, Leslie. À Pierre Sauvanet. Sans vous, encore une fois, rien n'aurait pu se faire.

Aux membres du jury du 18 juin 2018, Christine Bard, Hélène Marquié, Katalin Kovács, Sabine Forero-

Mendoza. Quel plaisir et quel honneur.

À l'ensemble de l'équipe CLARE (EA 4593) pour l'ambiance particulièrement propice à des premiers pas de

chercheur.e.s.

À mes camarades.

Je dédie ce travail à Sylviane (Guilhorre), et à la mémoire de Colette (Courtiade) et de Gilberte (Larrieu).

À défaut de nom, vous m'aurez transmis le reste. - 3 -

Table des matières

I. Cadres - Histoire..................................................................................................17

I.A. Prémices. L'âge classique....................................................................................................17

I.A.1. Classer.......................................................................................................................................................................17

I.A.2. Un XVIIe siècle féministe ?...................................................................................................................................22

I.A.3. Femme et artiste......................................................................................................................................................27

I.A.4. Du genre en art, du genre de l'art.........................................................................................................................32

I.B. Première vague féministe. Premières avant-gardes artistiques. Les révolutions.................36

I.B.1. Le progrès.................................................................................................................................................................36

I.B.2. 1800...........................................................................................................................................................................43

I.B.2.a. Permanences....................................................................................................................................................43

I.B.2.b. Noire de peau..................................................................................................................................................46

I.B.2.c. Femmes en révolution....................................................................................................................................50

I.B.2.d. Écoles et Académie .......................................................................................................................................54

I.B.3. 1893...........................................................................................................................................................................61

I.B.3.a. Première vague................................................................................................................................................61

I.B.3.b. L'art mâle d'une demoiselle...........................................................................................................................65

I.B.3.c. Ce qu'il nous reste de Clotho........................................................................................................................66

I.B.3.d. " le seul génie féminin dans l'art où elle créa »............................................................................................70

I.B.4. 1928...........................................................................................................................................................................77

I.B.4.a. Politiques sélectives.........................................................................................................................................77

I.B.4.b. Y-a-t-il oeuvre ?................................................................................................................................................81

I.B.4.c. Images dialectiques.........................................................................................................................................84

I.B.4.d. Perspectives lesbiennes et féministes...........................................................................................................91

I.C. Deuxième vague féministe. Radicalisation des avant-gardes artistiques. ..........................96

I.C.1. Déferlante.................................................................................................................................................................96

I.C.2. 1961.........................................................................................................................................................................104

I.C.2.a. Impureté.........................................................................................................................................................104

I.C.2.b. Logique des avant-gardes............................................................................................................................108

I.C.2.c. Violence et féminisme..................................................................................................................................111

I.C.2.d. Une vie vouée à l'art.....................................................................................................................................117

I.C.3. 1973.........................................................................................................................................................................121

I.C.3.a. De l'action comme oeuvre d'art plastique..................................................................................................121

I.C.3.b. Engagement...................................................................................................................................................125

I.C.3.c. Le blanc et le rouge.......................................................................................................................................129

I.C.3.d. La formation, la transmission, la reconnaissance.....................................................................................133

- 4 -

I.D. Troisième(s) vague(s). L'ère des " post- ».........................................................................137

I.D.1. " Postmodernisme », queer et féminisme intersectionnel...............................................................................137

I.D.2. 1997........................................................................................................................................................................144

I.D.2.a. Sophie/Maria................................................................................................................................................144

I.D.2.b. Calle/Auster..................................................................................................................................................146

I.D.2.c. Constellations des luttes..............................................................................................................................150

I.D.2.d. Dissolution des frontières...........................................................................................................................152

I.D.3. Cinq expositions...................................................................................................................................................157

I.D.3.a. 1995 : fémininmasculin................................................................................................................................157

I.D.3.b. 1997 : Vraiment. Féminisme et art............................................................................................................159

I.D.3.c. 2005 : Hors d'oeuvre.....................................................................................................................................162

I.D.3.d. 2009 : elles@centrepompidou....................................................................................................................164

I.D.3.e. 2013 : Les Papesses......................................................................................................................................167

II. Transversales - Stigmates.................................................................................172

II.A. Toutes des.........................................................................................................................172

II.A.1.... folles..................................................................................................................................................................172

II.A.2.... cuisinières.........................................................................................................................................................186

II.A.3.... coquettes..........................................................................................................................................................200

II.A.4.... médiocres.........................................................................................................................................................210

II.A.5.... sorcières............................................................................................................................................................223

II.B. Toutes en leur sexe...........................................................................................................237

II.B.1. Être un sexe (et rien qu'un sexe).......................................................................................................................237

II.B.2. Être gouvernée par son sexe..............................................................................................................................246

II.B.3. Se retrouver entre personnes du même sexe...................................................................................................250

II.B.4. Figurer son sexe...................................................................................................................................................254

II.C. Hiérarchies.......................................................................................................................259

II.C.1. Étymologie d'une classification.........................................................................................................................260

II.C.2. Regards constructivistes......................................................................................................................................266

II.C.3. Vanité des limites.................................................................................................................................................275

III. Contournements - Possibles...........................................................................284

III.A. Textes..............................................................................................................................284

III.A.1. Le texte accompagne l'oeuvre...........................................................................................................................286

III.A.1.a. Titres............................................................................................................................................................286

III.A.1.b. Traces..........................................................................................................................................................292

III.A.1.c. Livres...........................................................................................................................................................295

III.A.2. Le texte explique l'oeuvre..................................................................................................................................298

III.A.3. Le texte est l'oeuvre............................................................................................................................................300

III.B. Corps...............................................................................................................................303

III.B.1. Corps représentés...............................................................................................................................................303

III.B.2. Corps des images................................................................................................................................................309

- 5 -

III.B.2.a. Approche sémiotique................................................................................................................................309

-Louise Moillon.....................................................................................................................................................310

-Marie-Guillemine Benoist..................................................................................................................................313

-Camille Claudel....................................................................................................................................................316

-Claude Cahun.......................................................................................................................................................318

-Niki de Saint Phalle.............................................................................................................................................321

-Gina Pane..............................................................................................................................................................323

-Sophie Calle..........................................................................................................................................................325

III.B.2.b. Incarnat.......................................................................................................................................................328

III.B.3. Corps des artistes...............................................................................................................................................335

III.C. Plasticités........................................................................................................................346

Index des noms cités.............................................................................................400

- 6 -

Avertissements

Les termes de ce travail sont " féminisés ».

La littérature féministe, qu'elle soit scientifique ou militante, s'est penchée tôt sur un problème de

la langue française, qui prend le masculin pour un neutre. Cette convention n'est pas exempte d'un fond

idéologique misogyne. Afin de pallier l' " invibilisation » des femmes que cette convention suppose, voire

érige en principe, il est devenu d'usage de " féminiser » les textes. Il faut noter que les marques

grammaticales du genre féminin n'y remplacent pourtant pas celles du masculin - comme Monique Wittig

aura pu le faire dans certains romans - mais les complètent ; les textes ne sont pas à proprement parler

féminisés, mais rendus mixtes. Plusieurs conventions typographiques ont cours, l'usage, comme pour tous

les faits linguistiques, fera le tri dans les années qui viennent. Mais pour l'heure, il a fallu faire un choix. Ce

choix a été guidé par un souci de fluidité de lecture (à ne pas entraver par des slash, tirets ou majuscules

qui " marquent » trop le texte, car ils y font généralement exception), par le goût (certaines solutions

paraissant subjectivement plus élégantes que d'autres), par une envie de ne pas alourdir par des répétitions

(" présents et présentes »), et enfin par une nécessité de ne pas mettre cette question entre parenthèses

(" les écrivain(e)s »).

Les deux solutions adoptées sont le point suivi de la marque féminine (dont l'expérience m'a

convaincue qu'il est aisé de l'adopter lorsqu'on le lit), et l'énumération. Quand cela est possible, la marque

du féminin suit un point, éventuellement suivi de la marque du pluriel : les écrivain.e.s, quelqu'un.e.

Certains masculins, et notamment ceux en -teur, sont problématiques. Des protagonistes important.e.s du

rapport esthétique sont concerné.e.s. La solution du point semble ici moins fluide (les " spectateur.trice.s »,

les " sculpteur.trice.s »). L'énumération a alors été privilégiée : " les spectateurs et spectatrices ». L'usage

n'étant pas fixé, j'ai décidé d'utiliser la solution du point pour les " auteur.e.s » lorsqu'il y a mixité, mais

" autrices » lorsque le terme ne concerne que les femmes. D'autres principes de ce qu'on appelle désormais

" écriture inclusive » ne marquent pas le texte et ne nécessitent donc pas de développer plus avant1.

Précision quant à deux prénoms d'auteurs

Deux auteurs de la bibliographie ont changé de prénom. Afin de répondre aux exigences

universitaires et à une des fonctions d'une bibliographie - qui doit permettre aux lecteurs et lectrices de

retrouver les ouvrages utilisés - c'est le prénom présent sur la couverture au moment de l'édition du livre

qui est cité en note et en bibliographie. Mais comme il n'est en revanche pas question pour moi de nier ou

d'occulter leurs prénoms et leur genre, je souhaite écrire dès cet avertissement que j'identifierai Sam

Bourcier et Paul B. Preciado au masculin et que j'utiliserai leurs prénoms actuels dans le corps du texte.

1On se reportera aux recommandations du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, dans la brochureGuide pratique pour une communication publique sans stéréotype de sexe.

- 7 -

INTRODUCTION

Dans les années 1620, une jeune fille, Louise Moillon, produit ses premiers tableaux, des natures mortes. En 1997, Sophie Calle suit un " régime chromatique » retrouvant, sur bien des

points, ce qui se nouait et se jouait trois siècles et demi plus tôt. Entre temps, la hiérarchie des

genres artistiques a été mise à mal, sa formulation claire sitôt faite qu'elle fut battue en brèche, de

sorte que manger et photographier ce que l'on mange est aujourd'hui de l'art autant, sinon plus,

que de peindre des aliments à l'huile sur bois. De la classification des genres d'André Félibien, qui

plaçait la nature morte en bas de l'échelle en 1667, aux pratiques transdisciplinaires actuelles, un

processus est à l'oeuvre qui abolit la classification des genres en peinture, jusqu'à mêler par la suite

les arts entre eux, par exemple les " arts de l'espace » et les " arts du temps », pour reprendre une

autre classification.

Il se trouve qu'en même temps que l'idée d'une hiérarchie des arts, puis celle de frontières

entre les arts, déclinaient en Europe, avançait l'idée relativement neuve que les femmes sont des

êtres à part entière, qui en s'émancipant pouvaient viser à une égalité entre elles et les hommes -

nous parlerons ici d'égalité entre individu.e.s plutôt qu'entre les sexes, l' " égalité des sexes » étant,

si on s'y penche un peu, au moins incongrue dans la forme. Cette égalité entre femmes et hommes concerne bien évidemment les artistes : il sera

intéressant d'observer que Moillon était une exception au XVIIe siècle. Si les artistes femmes sont

d'une manière certaine encore extra-ordinaires aujourd'hui, car l'ordinaire est encore le masculin

réputé neutre, elles sont toutefois plus nombreuses, et émancipées - au moins en principe - d'un

lien obligatoire au père artiste ou au mari artiste, ce qui n'était pas le cas des pionnières. Au

panthéon de l'histoire de l'art féministe, les artistes sous tutelle, reconnues du bout des lèvres et

uniquement car " filles de » ou " femmes de » sont légion, ce qui est socialement logique jusqu'à la

deuxième vague du féminisme, dans la seconde moitié du XXe siècle. En effet, l'autodétermination, qui peut comprendre le choix d'un métier, l'autorisation de travailler sans la permission d'un tuteur masculin1 ou celle de disposer de l'argent gagné en son nom propre a concerné toutes les femmes, les artistes ne font pas exception : c'est un des conquis2 des féministes que de voir des femmes reconnues en tant qu'artistes ; c'est une de leurs

batailles futures qu'elles le soient pleinement - que ce soit sous la forme d'une lutte spécifique,

comme celle menée sur le terrain de l'art par les Guerilla Girls, ou un conquis indirect d'avancées

plus générales.

1Père ou mari, en vertu du Code civil jusqu'à la réforme des régimes matrimoniaux de 1965.2Nous préférons parler de conquis sociaux plutôt que d'acquis, suivant une recommandation attribuée au ministrecommuniste du travail et de la sécurité sociale Ambroise Croizat : " Ne parlez pas d'acquis sociaux, mais de conquissociaux, parce que le patronat ne désarme jamais. » De même que le patriarcat : les " acquis » semblent pérennes etofferts à un public passif, les " conquis » sont fragiles et ont été arrachés par la lutte de peuples actifs.

- 8 - Les termes d'avancées, d'évolution et d'avants-gardes, dont il sera largement question, ne

doivent pas laisser croire que nous nous livrerons ici à une lecture positiviste de l'histoire - qu'elle

soit artistique, politique ou événementielle. Nous ne connaissons que trop les limites d'une telle

grille de pensée. C'est avec Walter Benjamin, notamment, que nous userons des notions de

progrès et d'histoire : son travail conceptuel permet de constater des progrès historiques sans

adhérer à la croyance d'un Progrès de l'Histoire. Car, avec le recul que nous nous offrons, de quelque quatre siècles, il semble clair que des progrès se constatent concernant l'émancipation des femmes par elles-mêmes, puisque cette émancipation est neuve dans sa valence collective. Il semble également clair que les arts,

indéniablement, ont évolué ; il ne sera pas question ici d'un jugement de valeur ou des antiennes

sur la fin de l'art ou le règne du n'importe quoi, de dire que l'art contemporain est bel et bon dans

son ensemble ou au contraire qu'il n'est plus de l'art : l'élargissement du spectre, et les occasions

multipliées d'y trouver son compte en tant que spectateur ou spectatrice nous semblent un constat suffisant et un postulat acceptable. La méthode pour interroger cette évolution conjointe de l'histoire des arts et de l'histoire

des féminismes au point que ces histoires soient susceptibles d'être pensées comme mutuellement

réciproques sera une investigation avec et à travers les oeuvres. Il ne sera pas question ici d'un

catalogue avec un souci d'exhaustivité, qui semble devoir être toujours déçu, ni, encore moins,

d'une recherche d'illustration par l'art d'une thèse préexistante. Ayant constaté des coïncidences

chronologiques et sémantiques dans l'histoire du genre artistique et celle du genre en tant que

sexe social, c'est l'étude des oeuvres qui permettra de vérifier l'hypothèse que ces coïncidences ne

sont pas fortuites, et qu'elles peuvent s'expliquer par une co-incidence, au sens fort, à savoir :

nourris les uns par les autres, les féminismes et les arts contemporains tendent à la mise en crise

des hiérarchies impliquées par la classification en genres. La méthode pour travailler cette hypothèse est directement issue de son objet : le corpus

théorique, les outils conceptuels seront pour une très grande part féministes, que le féminisme en

question soit militant ou universitaire, le corpus étudié est un ensemble de sept oeuvres d'art

produites par des artistes assignées femmes. La réciproque sera également effective : les oeuvres

d'art aideront à penser et pourraient tout aussi bien être considérées comme appartenant au

corpus théorique qui aiderait à penser l'objet d'étude que serait le féminisme. En quoi les oeuvres d'individues classées comme femmes, et la lecture historique et

transversale de ces oeuvres permettent-elles de mettre en crise les assignations et les catégories,

qu'elles soient artistiques ou sociales ? Cette question s'étendra à celle, théorique, des différents

mouvements féministes. On l'aura sans doute compris, il ne s'agira pas pour nous d'évoquer une

hypothétique " nature féminine », le féminisme dit essentialiste ne sera pas convoqué comme

outil d'analyse. Cependant, le champ des possibles féminismes est encore large une fois - 9 -

l'essentialisme évacué : le constructivisme, le concept de genre, le féminisme matérialiste, le queer,

le post-colonialisme, l'intersectionnalité, l'affirmation trans, le séparatisme lesbien seront autant

de focales pour penser avec les oeuvres. L'anachronisme sera revendiqué : on ne craindra pas de lire des oeuvres patrimoniales avec des outils conceptuels qui ne leur sont pas contemporains. Outre les co-incidences

historiques entre avancées féministes et évolutions artistiques, c'est ici et maintenant, dans une

esthétique de la réception, que nous affirmerons la possibilité de penser le monde avec les oeuvres. Les catégories, classements, hiérarchies, domaines, frontières artistiques sont devenues poreuses ; peut-on penser, dans un mouvement similaire, que la frontière entre les sexes pourrait

être abolie ? Il faudra, pour ce faire, prendre de front le paradoxe féministe qui suppose que les

femmes s'organisent entre elles afin de faire disparaître la catégorie de femme ou que des trans,

en passant d'un " sexe » ou d'un " genre » à l'autre1, mettent en crise les catégories plutôt que de

les confirmer. Le paradoxe n'est qu'apparent et c'est, aussi, ce que nous ouvriront les oeuvres

étudiées.

L'approche esthétique, dont l'origine et l'étymologie devrait nous rappeler qu'il y est toujours question du sensible, est celle d'une spectatrice. C'est le coeur de la méthode de ce

travail : l'expérience de la confrontation à l'oeuvre d'art. Le reste est contexte, ce qui informe le

regard au sens plein, c'est-à-dire, en définitive, ce qui le forme, ce qui lui permet d'apprécier, au

sens fort, les oeuvres. La contextualisation et les questionnements qui en naissent enrichissent le rapport à l'oeuvre, mais c'est lui, et lui seul, qui est notre moteur. Ce travail n'est pas un jeu intellectuel, ou une recherche d'érudition, la question qui nous occupe ici me préoccupe en tant que spectatrice et en tant qu'individue. Cette affirmation de

l'intimité nécessaire avec les oeuvres pour pouvoir penser avec elles expliquerait assez bien leur

choix. Au-delà de toutes justifications conceptuelles, historiques, logiques - et elles sont nombreuses, on le verra - ce sont elles qui ont impulsé la recherche, avant tout parce qu'elles

m'ont surprise, amusée, émue, parce qu'elles m'ont plongée dans des abîmes de réflexion, parce

que je voulais en savoir plus sur elles et sur celles qui les avaient créées, parce que, simplement, je

les aime. Les oeuvres des deux artistes déjà citées, Moillon et Calle seront les bornes du corpus étudié : des oeuvres d'arts plastiques produites par des artistes classées comme femmes, en

France, reconnues socialement par les institutions artistiques (présentes dans des centres d'art ou

des musées, reproduites dans les histoires de l'art éditées, enseignées en classe), créées lors d'une

1Ce qui n'est pas le cas de toutes les personnes trans.

- 10 -

période courant du XVIIe siècle à nos jours. Le regard que nous leur porterons peut être qualifié

de féministe matérialiste, tel que le définit Christine Delphy : À mon sens, le matérialisme n'est pas un outil possible parmi d'autres, pour les groupes

opprimés : c'est l'outil même, précisément dans la mesure où c'est la seule théorie de l'histoire

pour laquelle l'oppression est la réalité fondamentale, le point de départ1.

Cette conviction partagée sera le " point de départ » de notre travail. Si nous avons choisi

le XVIIe siècle comme borne ouvrant la période étudiée ici, c'est parce que ce siècle est à la fois

un aboutissement des théories des genres artistiques, siècle des énonciations aussi claires que

celles de Félibien, mais aussi le début d'une brèche ouverte dans ces théories. Remonter au XVIIe

siècle permet de penser, avec Linda Nochlin2, un soubassement matérialiste à la sous-

représentation des femmes dans le rang des artistes, avant que celles-ci finissent par émerger. Ce

n'est pas seulement lorsque le mouvement de mise en crise du genre - artistique, sexué - est enclenché qu'il faut nous placer, nous tenterions alors de comprendre les aboutissants sans

maîtriser les tenants. Tenants théoriques qu'il faudrait suivre - et nous le ferons - jusqu'à

l'Antiquité voire la Préhistoire, mais en pratique, c'est en commençant avec l'oeuvre classique de

quotesdbs_dbs44.pdfusesText_44
[PDF] pars vite et reviens tard marie-belle

[PDF] joséphine litzelmann

[PDF] cloture d'une succession

[PDF] succession non réglée depuis 10 ans

[PDF] signature succession chez notaire

[PDF] règlement d'une succession

[PDF] délai succession dépassé

[PDF] combien de temps un notaire peut garder l'argent d'une succession

[PDF] acte de succession chez le notaire

[PDF] taux de saturation marketing calcul

[PDF] taux de saturation du marché

[PDF] taux de pénetration produit

[PDF] taux de pénetration formule

[PDF] taux de pénetration calcul marketing

[PDF] flaubert madame bovary commentaire