[PDF] Rapport annuel 2019 de la Cour de cassation





Previous PDF Next PDF



RAPPORT ANNUEL

01-Jan-2020 C. Droit à la Liberté Personnelle (article 7 de la CADH) ... limogeage infligée à Monsieur Petro Urrego qui était alors Maire de Bogotá ...



PREFECTURE

29-Jun-2015 Madame BEUMIER Catherine. Comptable mandant NEXITY



1 CRPA - Cercle de Réflexion et de Proposition dActions sur la

12-Jun-2018 Nous souhaitons particulièrement attirer votre attention sur la déchéance noire à ... Concernant les mesures de tutelle et curatelle Mme ...



Lapproche juridique du trouble mental

02-May-2016 Monsieur Olivier SAUTEL et Madame Christine YOUEGO qui m'ont confié de nombreux enseignements et n'ont eu de cesse de me rappeler que « le ...



Anieres

à la majorité : d'ouvrir à M. le Maire un crédit budgétaire supplémentaire. 2020 de TTC 40'000 F dans la rubrique. 3420.01.36360.00 / Culture sport et.



Rapport annuel 2019 de la Cour de cassation

10-Jan-2020 Madame la garde des sceaux ministre de la justice



CATALOGUE 2021-2022 - Formations

21-Sept-2021 Toutes les réponses aux questions relatives à l'exercice du mandat et aux missions de l'élu départemental. Formateurs : Sébastien MAIRE ...



La responsabilité

Le sujet retenu ici sera la distinction entre faute personnelle et faute de service qui structure la mise en œuvre du droit de la responsabilité administrative.



Autorégulation et hétérorégulation en situation dapprentissage d

26-Apr-2018 Ainsi plus le niveau d'hétérorégulation globale et les stratégies hétérorégulatrices soutenant la planification

Rapport annuel 2019 de la Cour de cassation

COUR DE CASSATION

2019RAPPORT ANNUEL

RAPPORTANNUEL201

Ayant constaté que des études ou des commentaires d'arrêts avaient été reproduits sans autorisation,

la

Cour de cassation entend rappeler ce qui suit :

En application du code de la propriété intellectuelle, toute repoduction ou représentation intégrale

ou partielle de la présente publication, faite par quelque procédé que ce soit (reprographie, microfilmage, scannérisation, numérisation...), sans le consentement de l'éditeur ou de ses ayants droit

ou ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et

suivants du code de la propriété intellectuelle.

Il est également précisé que l'usage abusif et collectif de la photocopie met en danger l'équilibre

économique des circuits du livre.

© Direction de l'information légale et administrative, Paris, 20

Direction

artistique pour la couverture et les pages 1et 2 : Service de communication de la Cour de cassation

Avertissement

Code de l'organisation judiciaire

Article R. 431-9 (décret n°2008-52 du 2 juin 2008) :

"Il est fait rapport annuellement au président de la République et au garde des sceaux, ministre de la

justice, de la marche des procédures et de leurs délais d'exécution." Article R. 431-10 (décret n°2008-522 du 2 juin 2008) :

"Le premier président et le procureur général peuvent appeler l'attention du garde des sceaux, ministre

de la justice, sur les constations faites par la Cour à l'occasion de l'examen des pourvois et lui faire part

des améliorations qui leur paraissent de nature à remédier aux difficultés constatées."

3

SOMMAIRE

LIVRE 1

DISCOURS .................................................................................................................................................... 5

LIVRE 2

SUGGESTIONS DE MODIFICATIONS LÉGISLATIVES OU RÉGLEMENTAIRES ...................... 23

LIVRE 3

JURISPRUDENCE DE LA COUR ............................................................................................................ 89

LIVRE 4

ACTIVITÉ DE LA COUR ............................................................................................................................. 231

LISTE DES ABRÉVIATIONS ..................................................................................................................... 337

TABLE DES MATIÈRES ............................................................................................................................. 341

LIVRE 1

DISCOURS

/ Discours de la première présidente 7

DISCOURS PRONONCÉ lors de l"audience solennelle de début d"année judiciaire, le 10 janvier 2020, par

Madame Chantal Arens,

première présidente de la Cour de cassation

Madame la garde des sceaux,

La Cour de cassation vous remercie de votre présence dèle à cette audience qui

témoigne du vif intérêt porté à nos travaux et marque le début dune nouvelle année,

porteuse de projets structurants pour notre institution. Soyez assurée que la Cour de cassation est résolument engagée dans cette voie. Monsieur le vice-président de lAssemblée nationale,

Monsieur le vice-président du Sénat,

Mesdames et Messieurs les premiers présidents, présidents et procureurs généraux des Cours suprêmes, Monsieur le président de la Cour européenne des droits de lhomme, Monsieur le président du Conseil constitutionnel, Monsieur le vice-président du Conseil dÉtat,

Monsieur le Défenseur des droits,

Madame la présidente de la Commission des lois de lAssemblée nationale, Monsieur le premier président de la Cour des comptes, Madame la procureure générale près la Cour des comptes, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil supérieur de la magistrature, Mesdames et Messieurs les hautes personnalités représentant les autorités civiles, militaires et religieuses, Monsieur le Président de lOrdre des avocats au Conseil dÉtat et à la Cour de cassation, Mesdames et Messieurs les représentants des professions judiciaires,

Mesdames et Messieurs,

Chers collègues,

La justice est à la fois une vertu et une institution. Pour le citoyen, cette double dimension doit faire sens. Or, dans cette période dincertitude, les aspirations du corps

social sont multiples et parfois contradictoires. Dans une société à la fois éclatée et glo-

balisée, il est difcile didentier une attente commune à tous.

LIVRE 1 / Discours

8 En tant que magistrats qui faisons vivre l"institution judiciaire, il nous appartient de partager l"idée que la justice participe de la légitimité démocratique. Nous avons tous, chaque citoyen de ce pays, besoin de la justice. Le droit codi é et appliqué organise la cohabitation d"individus aux conceptions morales et politiques différentes comme le soulignait Max Weber. La disquali cation de l"action de la justice ou de ses serviteurs est dangereuse. Pour autant, j"entends l"incompréhension de la société à son égard et je pense qu"il est urgent d"agir pour restaurer la con ance. L"appareil judiciaire est souvent considéré comme nébuleux, son organisation opaque, son vocabulaire trop technique. Pour sortir d"une perception abstraite et stéréotypée de la justice, il faut, en tant qu"elle est l"un des fondements de notre contrat social, la rendre plus accessible et repenser la façon de communiquer. Comme nombre d"observateurs, je constate que la justice n"est pas épargnée par la crise de con ance que traversent les institutions démocratiques. Ce phénomène n"est pas nouveau. Avec la mondialisation, la perte de repères stables et les changements perpétuels, se développe une culture de la dé ance alors que toute organisation, aussi régalienne soit-elle, requiert la con ance des citoyens. Or, la justice n"est pas qu"une simple administration qui se doit d"être performante. Le juge est avant tout un faiseur de paix sociale, qu"il fut hier juge de paix ou de proximité, ou aujourd"hui juge des contentieux de la protection ou encore des affaires familiales. Il participe à la restauration du lien brisé par le conit. Les tribunaux, toujours autant sollicités, offrent un lieu de médiation, au sens pre- mier, qui est de permettre l"accès à un tiers. Mais, si le fonctionnement des juridictions est encore trop complexe, si le temps de l"intervention conduit au découragement des

justiciables, ou si la décision est perçue comme décalée par rapport à leur propre réa-

lité, alors l"incompréhension reprend le dessus. Nous sommes aujourd"hui témoins d"une confrontation majeure entre les institutions et les citoyens, qui n"épargne pas la justice. Je suis convaincue que, dans ce contexte de crise récurrente, le droit est plus que jamais vecteur de régulation sociale et que l"ins- titution judiciaire, qui a vocation à répondre aux conits, doit avant tout être comprise, humaine et proche, sans donner à voir une approche trop surplombante. La Cour de cassation, malgré la place toute particulière qui est la sienne, ou précisé- ment en raison de cette place, au sommet de la pyramide judiciaire, n"est ni indifférente ni éloignée de ce besoin de lien social et d"espace de dialogue : elle en fait pleinement partie et entend le rappeler avec force.

Beaucoup a déjà été fait pour réduire la fracture entre la justice et les justiciables.

Pourtant, j"observe que, malgré l"engagement sans cesse renouvelé des magistrats et fonctionnaires de justice, des progrès restent à faire. Convaincue de cette urgente nécessité, je souhaite à la fois conduire, avec les magis- trats de la Cour, des réformes au sein de la Cour de cassation et accompagner les trans- formations nécessaires de l"institution judiciaire dans son ensemble, en lien avec les cours d"appel, dès lors qu"on aborde l"of ce juridictionnel. / Discours de la première présidente 9 Vous l"aurez compris, la Cour de cassation ne mène pas ces réexions pour elle- même, mais bien dans la perspective d"être plus accessible, mieux comprise et mieux entendue par ceux auxquels elle s"adresse. Le rôle de la Cour de cassation est de trancher les questions de droit. Mais elle n"en- tend pas seulement dire le droit. Par ses arrêts, elle entend s"adresser à tous, autant à la communauté des juristes, professionnels du droit, qu"aux personnes intéressées par le litige et l"ensemble des citoyens. La technique juridique utilisée par le juge pour rendre ses décisions ne saurait être une n en soi mais bien le moyen de servir cette ambition. En effet, il faut se garder de considérer le formalisme juridique comme l"achèvement indépassable de la rationalité juridique. Le droit ne se dit pas de lui-même. C"est bien

là tout l"enjeu du rôle du juge de cassation confronté à la multiplication des réformes

législatives et à une demande de justice toujours croissante. En2019, près de 18 000 décisions civiles ont été rendues par la Cour de cassation, qui concernent les libertés individuelles, l"activité économique et sociale du pays, les droits des entreprises, la famille et le patrimoine de l"ensemble des justiciables, per- sonnes physiques et personnes morales. En dépit de cette activité très importante, la Cour de cassation a rempli son rôle normatif tout en veillant à rendre une justice ancrée dans le réel, ce à quoi je me suis engagée lors de mon installation, et que j"en- tends mener à bien. Huitgroupes de travail ont été créés depuis septembre dernier avec pour objectif de trouver une réponse adaptée aux dé s qui sont les nôtres : - faire face à plus de 25 000 pourvois en matière civile et pénale, - dé nir la place du droit international et européen dans la hiérarchie des normes, - améliorer la lisibilité des décisions rendues, - asseoir le rôle normatif de la Cour de cassation, - poursuivre ses relations institutionnelles, - renforcer les échanges avec ses homologues étrangers, en Europe et dans le monde. Les préconisations des groupes de travail, attendues au printemps prochain, seront le fruit d"une importante concertation et d"une collaboration étroite avec les magis- trats du siège, avec les magistrats du parquet général, les avocats aux Conseils et les cours d"appel. À ce titre, je me réjouis de partager avec Monsieur le procureur général une même vision dynamique de la Cour de cassation dans le paysage judiciaire et institutionnel. Je tiens également à remercier tout particulièrement Monsieur le président Boré qui a accepté avec enthousiasme de participer, avec plusieurs de ses confrères, à la réexion engagée par les différents groupes de travail. Je saisis cette occasion pour saluer son dauphin, M e Molinié, avec lequel, je le sais, les relations seront toutes aussi fructueuses.

LIVRE 1 / Discours

10 L"objectif de la Cour est de tirer le meilleur des idées qui vont émerger, a n que chacun prenne place dans l"œuvre collective qu"est l"œuvre de justice. J"entends coordonner l"ensemble des travaux menés, a n de parvenir à des pro- jets d"ampleur, à court, moyen et plus long terme. Conformément aux échanges avec Madame la garde des sceaux lors de la remise par M.Nallet de son rapport pour une réforme des pourvois en matière civile, la Cour de cassation fera connaître ses propo- sitions au printemps de cette année. La Cour de cassation s"est en effet engagée dans une réexion sur le traitement dif- férencié des affaires dont elle est saisie, pour déterminer celles qui justi ent, plus que d"autres, une étude approfondie. La Cour sera ainsi mieux en situation de maîtriser ses champs d"interventions prioritaires. Ainsi, elle entend déployer les moyens nécessaires à une politique de traitement en profondeur des questions de droit pertinentes ou sensibles, ce qui implique que puisse

être traité, par la voie du rejet simpli é, un nombre plus conséquent d"affaires, dans la

mesure où la jurisprudence est parfaitement établie. Je pense utile de rappeler que l"of ce du juge, et particulièrement du juge de cas-

sation, est moins lié à son imperium qu"à sa capacité de dire le droit, de mettre en récit

une affaire et d"apporter un dénouement à ce récit par une décision de justice. C"est cela rendre la justice. Ainsi la capacité d"inuence du juge dans une décision dont le public est plus large que les parties directement concernées sera consacrée. Cette approche plus téléologique de la jurisprudence doit être complétée par un développement de la communication sur le sens des décisions rendues, car pour avoir con ance il faut être suf samment informé, afortiori dans une société hyper-connec- tée, en quête d"immédiateté de l"information. C"est pourquoi il nous faut aussi dépasser une conception purement servicielle des

attentes à l"égard de l"institution judiciaire et, en miroir, se garder d"y répondre par une

vision exclusivement managériale. Je suis consciente de l"importance du sens à donner à nos réformes, de leurs effets sur les acteurs judiciaires, et de leur compréhension par les citoyens.

La réexion sera bien sûr enrichie grâce aux universités avec lesquelles les liens, déjà

étroits, vont être renforcés. La Cour entend développer, dès ce mois de janvier, avec les

facultés de droit, l"organisation de colloques sur une ou plusieurs thématiques dé nies chaque année en lien avec les attentes des praticiens du droit ; elle accueillera, par le biais de parrainages, les étudiants de mastères a n qu"ils appréhendent mieux le rôle et

la place du juge. L"École nationale de la magistrature, dont les spéci cités doivent être

préservées a n de garantir l"excellence de la formation initiale et continue des magis- trats, pourra, comme elle le fait déjà, compter sur la Cour de cassation pour poursuivre ses missions, et engager avec elle de nouvelles réexions, notamment sur l"attractivité des fonctions civiles dont le déclin préoccupe, j"y reviendrai. L"approche systémique de l"institution judiciaire qui est la mienne implique un dia- logue constant entre les juges du droit et les juges du fond : il n"y aura pas de réformes / Discours de la première présidente 11 de la Cour de cassation sans que ne soient associés les cours d"appel et les tribunaux judiciaires, dans un esprit de coconstruction et d"échanges réciproques. En interne, pour faciliter la compréhension directe de ses décisions, qui constituent un des supports essentiels de communication de sa jurisprudence, la Cour de cassation s"est engagée dans une nouvelle méthode de rédaction de ses arrêts. Cette réforme ne saurait être réduite à un simple changement de style. Salué par une grande partie de la doctrine, le passage au style direct favorise la lecture et par là même clari e le raisonnement juridique. Il marque une véritable rupture culturelle, car il s"accompagne d"une approche beaucoup plus contextualisée et pragmatique de la

règle juridique, dans une démarche de qualité destinée à assurer le crédit de la justice,

et à accroître la con ance qu"on lui porte. De même, la motivation enrichie est claire- ment au service de la compréhension de la décision, pour répondre non seulement aux attentes des citoyens, mais également pour être en phase avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l"homme et de la Cour de justice de l"Union européenne. Dans cette perspective également, la Cour de cassation a généralisé le contrôle de conventionnalité. Il s"agit, pour la Cour, de véri er qu"une règle de droit interne ne conduit pas à porter, en soi ou par son application concrète, une atteinte dispropor- tionnée à un droit fondamental garanti par une norme nationale, ou par une conven- tion internationale, au regard du but légitime poursuivi par cette règle. La Cour fait ainsi œuvre de pédagogie pour permettre une meilleure compréhension, mais aussi une meilleure appropriation de la décision dans des domaines qui concernent directe- ment les personnes, comme la liberté d"expression ou la protection de la vie privée. Elle

remplit ainsi son rôle d"adaptation de la loi aux attentes de la société puisque la déci-

sion se veut au plus près des données culturelles, économiques et sociales du moment. Au-delà de l"ordre interne, cette entreprise didactique a vocation à renforcer l"attrac- tivité et la compétitivité de notre droit au plan international.

En cette année de célébration du 70

e anniversaire de la Convention européenne des droits de l"homme, c"est l"action du président de la Cour européenne des droits de l"homme, Linos-Alexandre Sicilianos, invité d"honneur de cette audience solennelle de rentrée, que je souhaite saluer. La Cour européenne des droits de l"homme est, en effet, un parfait exemple de cette œuvre de justice paci catrice que j"évoquais en introduction de mon propos. La jurisprudence de la Cour s"illustre par une remarquable adaptation des normes de la Convention, conçue comme un instrument vivant, à l"évolution des sociétés euro- péennes et au dialogue constant avec les juridictions nationales. Je vous remercie, Monsieur le président Sicilianos, de nous honorer de votre pré- sence. Votre engagement dans le domaine de la protection des droits de l"homme a été constant, que ce soit dans le cadre de votre brillante carrière universitaire, ou au travers des différents mandats que vous avez exercés au sein des Nations unies et de l"Union européenne. Je tiens particulièrement à saluer votre implication personnelle dans le cadre de la présidence française du Comité des ministres du Conseil de l"Europe, notamment à l"occasion de la Conférence des chefs des cours suprêmes organisée dans ces lieux les 12 et 13septembre dernier et consacrée au dialogue des juges. Soyez assuré que la

LIVRE 1 / Discours

12 Cour de cassation partage votre conviction que l"État de droit et le dialogue des juges sont intimement liés et que l"harmonie entre les juges participe de la démocratie véri- table et effective. Mesdames et Messieurs les premiers présidents, présidents et procureurs géné- raux des cours suprêmes du Royaume-Uni, de Belgique, de Roumanie, d"Allemagne, du Maroc, de Tunisie, d"Irlande et de Monaco, Monsieur le président de la Cour com- mune de justice et d"arbitrage de l"OHADA, je suis particulièrement honorée de votre présence à cette audience de rentrée. Mesdames et Messieurs les membres du Conseil supérieur de la magistrature, auto- rité constitutionnelle garante de l"indépendance juridictionnelle, je souhaite saluer vive- ment l"action que vous menez en faveur de l"amélioration de la gestion des ressources humaines des magistrats, comme votre contribution au rayonnement du Conseil tant en interne qu"au-delà des frontières, en particulier auprès de nos partenaires euro- péens et francophones. La Cour mène également des échanges nourris avec le Conseil constitutionnel et le Conseil d"État, sur des sujets d"intérêt commun, notamment en prévision de la célébration des 10ans de la question prioritaire de constitutionnalité. Je vous remer- cie Monsieur le président du Conseil constitutionnel et Monsieur le vice-président du Conseil d"État pour la qualité et la richesse de nos relations. C"est dans un esprit de dialogue constant que j"entends conduire les réformes pré-

cédemment évoquées, car, je le répète, il n"y aura pas de réforme possible de la Cour

de cassation sans une coopération étroite des juges du fond, ni une reconsidération de leurs méthodes de travail. Même si nos places et nos rôles diffèrent, nous appartenons à un seul ensemble, l"institution judiciaire, dont le rôle premier est de rendre la justice et, pour ce faire, nous sommes continuellement en interaction. Je souhaite à cet égard saluer tout particulièrement le travail des magistrats et des fonctionnaires des tribunaux judiciaires et des cours d"appel. Je les félicite pour leur immense investissement et leur indéfectible sens du service, qui les conduit, en dépit de conditions de travail souvent dif ciles, et à bien des égards perfectibles, à accom- plir leur mission avec un engagement remarquable. La mission d"harmonisation de la jurisprudence dévolue à la Cour de cassation exige une continuité dans nos relations avec les cours d"appel. Il nous faut, dossier après dos- sier, inscrire les décisions prises dans un contexte plus large, incluant les incidences pour les juridictions du fond et anticipant sur les conséquences à moyen et long terme pour la société. Une autre mission de la Cour de cassation est de sécuriser l"interprétation de la loi, d"assurer l"unité du système juridique. Sécuriser l"interprétation de la loi implique de faire en sorte que tous les juges la comprennent dans le même sens. C"est encore assurer la continuité dans le temps de

cette interprétation. Cette cohérence favorise la prévisibilité de la justice qui est source

de sécurité juridique. Il est primordial de soumettre à la Cour de cassation les questions nouvelles ou de principe, pour qu"elle puisse statuer dans des délais ef cients, soit par avis, soit dans une décision, sur tous les sujets ayant un retentissement immédiat sur l"activité de nombreuses juridictions et partant sur la vie des citoyens. À cet égard, je / Discours de la première présidente 13 tiens à souligner l"importance de rappeler la place du contentieux civil dans nos orga- nisations, dans la formation et dans la gestion des ressources humaines des magistrats. La loi civile est la " véritable Constitution des Français » disait le doyen Carbonnier : aujourd"hui comme hier, on naît, on vit, on meurt sous l"empire du droit civil. Il est urgent d"agir pour que l"attractivité des fonctions civiles soit préservée. La Cour de cassation va renforcer et institutionnaliser ses déplacements dans les cours d"appel a n de faire partager ses méthodes de travail et mieux connaître les attentes des juridictions du fond. Dès ce premier trimestre 2020, un accompagnement des magistrats des cours d"appel est mis en place, qu"il s"agisse de rencontres théma- tiques sur des questions nouvelles ou de principe, de la technique de cassation, de la

méthodologie de l"arrêt d"appel ou de l"intensité du contrôle exercé. Des outils métho-

dologiques seront développés ensemble, tels les bibliothèques de motivation, pour des contentieux qui intéressent un grand nombre de justiciables : droit de la construction, droit des peines, contentieux familial, droit des étrangersƒ Cette étroite collaboration trouvera encore à s"exprimer avec la diffusion de l"en- semble des décisions de justice, encore appelée " open data » -littéralement " don- nées ouvertes ». En ce domaine, la Cour de cassation a une responsabilité toute particulière. Tout est à construire en lien avec le ministère de la justice. Il s"agit, pour moi, d"un chan- tier prioritaire. L"enjeu de l"open data est majeur puisqu"il s"agira de permettre aux acteurs du droit et de la justice, comme aux citoyens, d"accéder à l"ensemble des décisions, pour une meilleure prévisibilité de la jurisprudence. Mon objectif est de parvenir à une diffusion large et rapide des arrêts des cours d"appel qui, actuellement, ne le sont qu"en nombre relativement limité sur Jurica, et dont moins de 1 % est disponible sur le site Légifrance, soit environ 10 000 par an alors que près de 3,9millions de décisions sont rendues par l"ensemble des juridictions fran-

çaises chaque année.

La question de la mise en œuvre de l"open data est primordiale car la condition indispensable de l"accès à la jurisprudence est d"assurer la protection de la vie privée, par l"anonymisation de l"ensemble des décisions rendues accessibles. Cette diffusion va supposer la création d"un programme de référencement des déci- sions en lien étroit avec l"ensemble des cours d"appel. Lors d"une rencontre récente avec les premiers présidents de cour d"appel, j"ai sou- haité partager avec eux ce projet majeur pour toute l"institution et je me félicite des

échanges d"ores et déjà engagés qui m"autorisent à penser les prochaines étapes dans

le cadre d"un projet commun. La Cour de cassation, ensemble les magistrats de France et les fonctionnaires de jus-

tice, s"engagent à relever le dé en utilisant les potentialités des technologies appliquées

au droit. La transformation numérique induit une modi cation radicale des méthodes de travail. Les nouveaux outils développés conduiront probablement à l"automatisation de certaines tâches ; l"intelligence arti cielle offrira une assistance croissante aux pro- fessionnels du droit. Toutefois la qualité de ces outils et l"accompagnement des magis- trats et des fonctionnaires dans cette transformation seront essentiels. Une réexion concrète, transversale, avec tous les acteurs concernés, et notamment la CNIL, me paraît indispensable. Consciente des mutations en mouvement, des attentes qui évoluent, l"institution judiciaire doit rester en prise avec son temps et avec la société. Cette rentrée est pour moi l"occasion de partager avec vous ma vis ion des réformes nécessaires et des perspectives envisageables pour une institution bi en plus inscrite dans le réel que l"image qu"elle renvoie. La justice doit davantage se donner les moyens d"être comprise pour ce qu"elle est et ce qu"elle fait pour le quotidien des citoyens. Si l"interdépendance des systèmes et des humains rend encore plus complexe toute évo- lution de notre système juridique, soyons toutefois résolument con ants en la capa- cité qui a toujours été la nôtre à nous adapter aux grand s dé s mondiaux et nationaux de demain, tout en gardant notre identité.14 / Discours du procureur général 15

DISCOURS PRONONCÉ lors de l"audience solennelle de début d"année judiciaire, le 10 janvier 2020, par

Monsieur François Molins,

procureur général près la Cour de cassation Madame la garde des sceaux, ministre de la justice, Monsieur le président de la Cour européenne des droits de lhom me, Monsieur le président du Conseil constitutionnel, Monsieur le vice-président du Conseil dÉtat, Mesdames et messieurs les chefs des cours suprêmes étrangères, Mesdames et messieurs les hautes personnalités,

Mes chers collègues,

Mesdames, messieurs,

Il me revient tout dabord, avec Madame la premièreprésidente, de me faire lin- terprète de lensemble des magistrats et fonctionnaires de cette c our, pour vous souhai- ter, Madame la ministre, Mesdames et Messieurs les hautes personnalités, la bienvenue dans cette maison et vous dire combien nous sommes sensibles à votre présence renou- velée, dans laquelle nous voyons lexpression de lintérêt que vou s portez à la justice et à ceux qui sont chargés de la faire vivre au quotidien.

Ni rite désuet, ni séance académique, laudience solennelle de rentrée à laquelle vous

êtes conviés aujourdhui est le signe de la vie, loccasion de rendre des comptes de son action et dannoncer un lendemain en traçant des perspectives d action.

Car la justice est laffaire de tous, et chacun, dans ce pays où règne lÉtat de droit,

doit pouvoir demander raison. Il y a unan, lors de laudience solennelle de rentrée de la Cour, quelques semaines après ma prise de fonctions, je vous exposais mes ambitions et mon projet pour le par- quet général, pour lui permettre de toujours mieux jouer son rôle douverture e t dequotesdbs_dbs29.pdfusesText_35
[PDF] Rédiger la lettre d accompagnement (cover letter) de l article

[PDF] écrire une lettre -fiches outils et grilles de relecture - Classeurdecole

[PDF] 26 modèles de lettres pour faire respecter ses droits Droit des

[PDF] La liberté d 'expression en 10 questions - Maif

[PDF] Cas pratique : Le droit du divorce ? l épreuve de la liquidation

[PDF] Le traitement de la littérature grise - Enssib

[PDF] livret 1

[PDF] Tableur - FSR

[PDF] Modèle mandat de gestion 75 HT - 2010 - Solution Investissement

[PDF] manuel de procedures administratives, comptables et - sfoap

[PDF] manuel qualite simplifie - PAI France

[PDF] Généralités sur les matériaux composites - Hal

[PDF] matière, matériau, objet - Pour les sciences - Portail académique

[PDF] Bilan TP8 : Composition de la matière vivante Atelier 1 : Expérience

[PDF] Conception et Réalisation d 'une application de GESTION DES