[PDF] Mémoire - La modernisation de la fonction publique locale - doc





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La modernisation de la fonction publique locale

1. Lecture néo-institutionnelle du programme stratégique transversal

dans une administration locale

2. En quoi la réforme des grades légaux

Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication (ESPO)

Institut des sciences du travail (TRAV)

La modernisation de la fonction publique locale

institutionnelle du programme stratégique transversal dans une administration locale : le cas de la ville de Gembloux En quoi la réforme des grades légaux implique un changement de " marché bureaucratique

Année académique 2016

Master 60 en sciences du travail

des sciences économiques, sociales, politiques et de communication (ESPO)

Institut des sciences du travail (TRAV)

La modernisation de la fonction publique locale

institutionnelle du programme stratégique transversal le cas de la ville de Gembloux. implique un changement marché bureaucratique » ?

Mémoire réalisé par

François Thomas

Promoteurs

Julien Raone

Christian de Visscher

Année académique 2016-2017

Master 60 en sciences du travail

des sciences économiques, sociales, politiques et de communication (ESPO) ii iii

" Je soussigné, déclare sur l'honneur que ce mémoire à été rédigé par mes soins, sans aide

illégale d'aucune sorte, que les citations et emprunts qu'il contient sont référencés

conformément aux règles de bonne conduite de présentation du mémoire déterminées par

l'Institut des sciences du travail. »

François THOMAS

iv

Remerciements

J'adresse mes plus vifs remerciements à toutes les personnes qui m'ont aidé, de près ou de loin, dans la réalisation de ce mémoire. En premier lieu, je remercie Messieurs de Visccher et Raone, respectivement professeur

ordinaire et chargé de cours invité à l'Université catholique de Louvain, qui malgré leur

emploi du temps très chargé, ont accepté de diriger mon mémoire. Je remercie aussi Monsieur Benoît Dispa, Député-Bourgmestre, Madame Josiane Balon Directrice générale, ainsi que tous mes collègues de la ville de Gembloux, pour leur collaboration et les informations fournies sur leur expérience du PST et de la réforme des grades légaux. Je souhaite également remercier Monsieur Olivier Jégou, Assistant à l'Université catholique de Louvain, qui m'a aidé à clarifier mon projet d'étude. Enfin je tiens à remercier particulièrement Julie, mon épouse, pour son soutien indéfectible face à la procrastination dont j'ai fait preuve durant toutes les années de ce cursus universitaire, et sans qui ce travail n'aurait pas abouti. v

Abréviations

CPAS : Centre Public d'Action Sociale

CRAC : Centre régional d'aide aux communes

DF : Directeur Financier

DG : Directeur Général

DGO1 : Direction générale opérationnelle des Routes et des Bâtiments DGO5 : Direction générale opérationnelle des Pouvoirs locaux et de l'Action sociale IWEPS : Institut Wallon de l'Évaluation, de la Prospective et des Statistiques.

NGP : Nouvelle Gestion Publique

NMP : Nouveau Management Public

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économiques PCDR : Programme communal de développement rural

PCS : Plan de Cohésion Sociale

PSB : Public Service Bargain

PST : Programme Stratégique Transversal

SPF : Service Public Fédéral

SPW : Service Public de Wallonie

SWOT : Strengths - Weaknesses - Opportunities - Threats

UVCW : Union des Villes et Communes de Wallonie

vi

Table des figures

Figure 1 : Composantes des processus d'institutionnalisation Figure 2 : Caractéristiques standards du marché bureaucratique

Figure 3 : Types de marchés bureaucratiques

Figure 4 : Caractéristiques principales de l'évolution d'une administration wébérienne à

une administration NMP vii

Table des matières

Remerciements......................................................................................... iv

Abréviations............................................................................................. v

Table des figures.......................................................................................vi

Introduction générale................................................................................... 1

1. PAPER 1 : Lecture néo-institutionnelle du PST dans une administration locale : le cas

de la ville de Gembloux.......................................................................... 4

1.1. Introduction................................................................................... 4

1.2. Le PST et son contexte communal......................................................... 7

1.3. Le PST, pour quelle légitimité ?..............................................................................11

1.4. Le PST, signe d'homogénéisation ?........................................................................ 13

1.5. Le PST dans le processus d'institutionnalisation....................................... 20

1.6. Nouveau management public (NMP) et néo-institutionnalisme sociologique......25

1.7. Conclusion....................................................................................28

2. PAPER 2 : En quoi la réforme des grades légaux implique un changement de " marché

bureaucratique » ?..........................................................................................................31

2.1. Introduction.................................................................................. 31

2.2. La " réforme des grades légaux ».........................................................33

2.3. La ville de Gembloux face à l'évolution de son marché bureaucratique............ 39

2.4. Point de vue des acteurs du marché...................................................... 44

2.5. Conclusion....................................................................................53

3. NOTE D'ARTICULATION................................................................... 56

1

Introduction générale

Depuis mon entrée en fonction, il y a neuf ans, comme gestionnaire des ressources humaines à la ville de Gembloux, j'ai pu observer d'importants changements dans le mode de gouvernance des pouvoirs locaux en Wallonie. Ces changements semblent vouloir faire évoluer les communes vers une gestion plus managériale. La crise des finances publiques, le mécontentement des citoyens vis-à-vis des prestations administratives, le développement des technologies de l'information ont été autant d'arguments pour affirmer la nécessité de " Réinventer le gouvernement » aux Etats-Unis ou d'adopter une " Nouvelle Gestion Publique » (NGP) dans les pays du Commonwealth, au Benelux et en Suisse (de Visscher et Varone, 2004). Cette nécessité de faire évoluer le secteur public vers des nouveaux modes de management

s'est imposée en Belgique, en premier lieu, au niveau fédéral, au début des années 2000,

avec la réforme " Copernic », dont l'une des réalisations a été, notamment, de transformer

les ministères en service publics fédéraux

1. Ces pratiques ont ensuite trouvé écho au niveau

régional puisqu'en 2006 le gouvernement wallon a mis en place une très importante

réforme de son administration visant à renforcer l'efficacité et la qualité des services, mais

également à mieux répondre aux attentes de la société. Celle-ci a abouti, en 2008, à la

formation du service public de Wallonie. Enfin, les pouvoirs locaux ont eux aussi initié une réflexion sur la modernisation de leurs organes. En effet, " le temps est désormais venu, pour nos villes et communes de prendre le train de la modernité en marche et de penser, d'agir et de servir le citoyen en parfaite concordance avec la mentalité du XXIe siècle » (Furlan, 2011, p. 4). Ce contexte de modernisation de la gouvernance locale a vu, entre autre chose, la naissance, en 2011, du Programme Stratégique Transversal (PST). Selon Paul Furlan,

ministre des pouvoirs locaux de l'époque, " les pouvoirs locaux trouveraient un réel intérêt

à s'inspirer des techniques de gestion du secteur privé », afin dit-il, " de professionnaliser

la gestion communale, tout du moins, pour ce qui concerne la planification stratégique » (Furlan, 2011, p. 4). Selon l'union des villes et communes de Wallonie (2016), le PST est une démarche de gouvernance locale qui se concrétise au travers d'un document stratégique visant à aider la

1 Arrêté royal du 7 novembre 2000 portant création et composition des organes communs à chaque service

public fédéral 2 commune à mieux programmer ses actions et sa politique, en s'appuyant sur une culture de la planification et de l'évaluation. Par ailleurs, cette modernisation de la gouvernance locale ne se limite pas au seul PST. En effet, le décret wallon du 18 avril 2013 modifiant certaines dispositions du code de la

démocratie locale et de la décentralisation (CDLD), appelé aussi " réforme des grades

légaux », a pour objectif de moderniser le fonctionnement des administrations locales par

la revalorisation salariale des grades légaux, le renforcement du rôle managérial du

directeur général, le renforcement du rôle du directeur financier et la création de nouveaux

outils de gestion que sont : la lettre de mission, le contrat d'objectifs, le comité de direction ou l'organigramme 2. La mise en place du PST et la " réforme des grades légaux » m'interpellent car il s'agit de

l'implémentation d'outils de gestion issus du secteur privé, appliqué au secteur public

local, qui induisent des changements importants dans la relation entre le collège communal et ses fonctionnaires dirigeants. Pourquoi ces nouveaux outils de gestion sont-ils mis en

place, en vertu de quoi et sur quel modèle ? Quelles sont les conséquences de ces

changements dans la relation entre autorité politique et administration ? Afin de répondre à ces questions portant sur la modernisation de la fonction publique locale, j'aborderai ce travail selon deux angles différents. Premièrement, d'un point de vue sociologique, je tenterai de faire l'analyse du PST, au travers du prisme de la théorie néo- institutionnelle, à partir du cas de la commune de Gembloux. Deuxièmement, du point de vue du management public, je vais essayer de comprendre en quoi l'évolution managériale traduite dans la réforme des grades légaux, modifie les termes du marché bureaucratique codifiant les relations entre les instances politiques communales et ses fonctionnaires dirigeants.

1. PAPER 1 : Lecture néo-institutionnelle du PST dans une administration locale : le

cas de la ville de Gembloux.

2. PAPER 2 : En quoi la réforme des grades légaux implique un changement de

" marché bureaucratique » ?

2 Circulaire du SPW du 16 décembre 2013 relative à la réforme du statut des titulaires des grades légaux

3

PAPER 1 :

Lecture néo-institutionnelle du PST dans une

administration locale : le cas de la ville de

Gembloux

4

1. PAPER 1 : Lecture néo-institutionnelle du PST dans une

administration locale : le cas de la ville de Gembloux.

1.1. Introduction

Reposant avant tout sur une volonté de " modernisation de la gestion des communes » et s'inspirant ouvertement du modèle de la " gestion d'entreprise », le PST s'inscrit dans le prolongement du programme de politique générale dont il se veut une présentation détaillée et plus aboutie (Fallon et al., 2016). En proposant ce projet de programmation stratégique appliqué aux pouvoirs locaux, l'idée

du ministre Furlan (2011) est de " sortir des sentiers battus, d'inscrire les institutions

démocratiques locales dans le défi de la gouvernance du XXI e siècle ». Selon lui, les

pouvoirs locaux trouveraient un réel intérêt à s'inspirer des techniques de gestion du

secteur privé, afin dit-il, " de professionnaliser la gestion communale, tout du moins, pour ce qui concerne la planification stratégique ». L'objectif du PST, selon le ministre Paul Furlan, serait que sur base d'un état des lieux, les villes et communes puissent dessiner les contours d'un véritable projet en dégageant les

actions prioritaires, en fédérant les différents plans et programmes sectoriels existants en

un tout cohérent et en aboutissant à une vision des projets à moyen terme qui soit

transversale, coordonnée et peut-être même transcommunale.

En outre, le PST a également pour vocation de concrétiser le stratégique en opérationnel,

en actions prioritaires à mettre en oeuvre par l'administration communale, tant en interne qu'en externe, tout en prenant en considération les moyens disponibles qu'ils soient humains ou financiers. Monsieur Furlan précise par ailleurs que face à une crise

économique lancinante et à un tournant décisif pour notre schéma institutionnel, les

pouvoirs locaux se doivent, et c'est une nécessité absolue, d'optimaliser à la fois leur offre

de services et leurs moyens d'action.

Pour l'UVCW, le PST représente une opportunité, pour les élus locaux, d'évaluer les

actions menées, et ce, au-delà, de l'aspect strictement budgétaire qui pour le ministre n'est

représentatif ni de la qualité de la gestion communal, ni de celle du service rendu au

citoyen. L'ambition de monsieur Paul Furlan est de viser la professionnalisation, l'efficacité opérationnelle maximale et l'excellence. 5 Il s'agit donc d'une démarche de gouvernance locale qui se concrétise au travers d'un document stratégique qui est établi par la commune et qui va l'aider à mieux programmer ses actions et sa politique, en s'appuyant sur une culture de la planification et de l'évaluation. L'adoption de cet outil de programmation stratégique par la ville de Gembloux pose question. En effet, pourquoi ce nouvel outil de gestion est-il mis en place ? En vertu de quoi et sur quel modèle ?

Pour répondre à ces questions, j'utiliserai l'approche néo-institutionnelle dont les

théoriciens prétendent, qu'au fil du temps les organisations tendent à devenir de plus en plus homogènes sans nécessairement être plus performantes. Ils cherchent à expliquer le caractère homogène de la vie organisationnelle, pourquoi les organisations se conforment aux demandes des différentes parties prenantes qui leurs sont extérieures (Rouleau, 2007). Selon Linda Rouleau (2007), les premiers institutionnalistes proposent de concevoir l'organisation non plus comme le résultat de coordinations rationnelles dans la poursuite ou l'atteinte d'un but, mais comme une structure sociale qui doit faire face à son environnement institutionnel. Reconnaître une base sociale et culturelle dans l'influence extérieure sur les organisations

n'est cependant pas le seul apport de la théorie institutionnaliste. Les néo-institutionnalistes

tentent de dépasser cette étape et de décrire le processus qui transforme les pratiques et les

organisations en institutions (Hatch, 2009).

Les caractéristiques principales du néo-institutionnalisme sociologique, ont été résumées

comme suit par Rouleau (2007) : - Les structures formelles ont des propriétés symboliques dont il faut tenir compte. - Il est difficile pour les dirigeants qui prennent des décisions de résister aux pressions de l'environnement. - Au fil du temps, les organisations tendent à devenir homogènes en se conformant aux pressions de l'environnement. - L'adoption de règles et de procédures formelles est largement influencée par les mythes rationalisés qui sont véhiculés à l'endroit de ces règles et procédures. - En adoptant les règles et les procédures qui sont prétendument efficaces et rationnelles, les organisations augmentent leur légitimité vis-à-vis de l'extérieur. 6 - Les organisations qui obtiennent la légitimité de leur environnement ont plus de ressources et augmentent, par conséquent, leurs chances de survie à long terme. - Au fil du temps, le comportement des organisations s'institutionnalise, c'est-à-dire qu'elles en viennent à reproduire des modes d'action stables. - Plus une organisation fonctionne à partir de modes d'action institutionnalisés, plus il est difficile d'y introduire des changements. Néanmoins, avant d'aborder effectivement la lecture du PST au travers de la théorie néo-

institutionnel, il convient de préciser que cette théorie, née de l'institutionnalisation, fait

partie du mouvement interprétativiste-symbolique, qui est une des trois grandes

perspectives de la théorie des organisations au même titre que le modernisme et le

postmodernisme. La logique de ce mouvement est fondée sur la conviction que les réalités organisationnelles sont produites socialement au fur et à mesure que les membres de l'organisation interagissent, négocient et font sens de leur expérience (Hatch, 2009). Dans

cette idée interprétativiste-symbolique, la réalité est une diversité socialement construite ;

le savoir est censé être particulier, se développe au moyen de sens et interprétation et est

reconnu pour sa cohérence ; le modèle des relations humaines est la communauté et son but ultime est la compréhension.

En outre, on ne peut pas parler de la théorie néo-institutionnelle sans faire référence à la

théorie institutionnaliste portée par les travaux de Philip Selznick, qui est un des premiers

auteurs à tenter de comprendre ce qui différencie une organisation d'une institution.

Selznick a fondé la théorie institutionnaliste sur l'observation suivante : les organisations s'adaptent non seulement aux luttes de leurs groupes internes, mais également aux valeurs de la société externe (Hatch, 2009). Sur base de cette idée, Paul Di Maggio et Woody Powell estiment que les organisations n'entrent pas en concurrence uniquement pour les ressources et les clients, mais aussi pour le pouvoir politique et la légitimité institutionnelle, pour l'adéquation aussi bien sociale qu'économique (Di Maggio et Powell,

1983).

Selznick décrit, par ailleurs, le processus d'institutionnalisation, sur lequel nous reviendrons plus loin, comme dégénératif et pathologique. Néanmoins, ce processus a, par

la suite, été interprété de façon plus positive par le courant interprétativiste-symbolique, en

vue de l'utiliser pour expliquer l'importance du symbolisme dans l'étude des organisations.

Ce qui a donné naissance au mouvement néo-institutionnalisme, qui a été alimenté par de

7 nombreux sociologues des organisations aux États-Unis, parmi lesquels W. Richart Scott, John Meyer, Paul Hirsch, Woody Powell et Paul Di Maggio. Il prend ses racines dans le " vieil institutionnalisme » de Philip Selznick et de ses collègues (Hatch, 2009). Suivant ce courant, je vais donc essayer, de comprendre premièrement, pourquoi le programme stratégique transversal communal a été mis en oeuvre au sein des pouvoirs

locaux de Wallonie ? Quelle(s) justification(s) donner à cette évolution managériale ?

Deuxièmement, je vais tenter de comprendre à quelles pressions cèdent l'institution en adoptant cet outil PST ? Et dans un troisième temps, je confronterai le PST au processus d'institutionnalisation afin d'en évaluer son évolution actuelle. Il me semble important de préciser, qu'à ce stade, le PST, est toujours un projet pilote. Néanmoins, pour faire cette lecture néo-institutionnaliste du PST, je vais partir du principe

que cette action est pérenne dans le temps, et donc répétée au fil des mandatures

successives. En effet, selon W. Richard Scott (1992) cité par Hatch (2009), l'institutionnalisation est définie comme " le processus par lequel certaines actions sont

répétées, et se voient par ce fait même attribuer une signification similaire par soi-même et

les autres ».

1.2. Le PST dans son contexte communal

Cet outil de gestion permet aux communes de mettre en place une programmation

stratégique qui repose sur la définition d'objectifs stratégiques déclinés en objectifs

opérationnels et en actions. La stratégie à mettre en oeuvre s'accompagne d'une priorisation des objectifs et/ou des actions et fait appel à des moyens humains (les agents qui dans l'administration réaliseront les actions) et financiers (fonds propres, emprunts,

subsides...). Cette démarche s'accompagne, en outre, d'indicateurs à définir, afin de

mesurer la réalisation des objectifs et leur impact sur la stratégie souhaitée. Cette phase d'évaluation doit permettre d'affiner la démarche, de poursuivre ou d'ajuster les objectifs. Par ailleurs, le PST est en filiation directe avec le programme de politique générale et s'appuie sur celui-ci. En effet, le code de la démocratie locale et de la décentralisation, et

plus particulièrement son article L1123-27 prévoit : " Dans les trois mois après l'élection

des échevins, le collège soumet au conseil communal un programme de politique générale couvrant la durée de son mandat et comportant au moins les principaux projets politiques. ». Le PST est en définitive la transformation du programme de politique 8

générale en programme stratégique. Il est d'ailleurs appelé à le remplacer à l'issue de la

phase pilote s'étalant sur la mandature actuelle. Il peut être défini comme un ensemble de choses que l'on planifie de faire, un ensemble de projets ou d'intentions d'actions regroupés en un seul processus de programmation qui fédère tous les plans et programmes dans lesquels la commune s'inscrit, qui présente la vision politique des élus dans le long terme, sur la durée de la mandature, qui concerne toute l'activité communale, implique l'autorité politique et l'administration, ainsi que tous les départements, tous les services et tous les agents, mais également tous les partenaires de la commune, et offre une vue globale de l'activité communale aux décideurs, leur permettant ainsi de mener des politiques cohérentes entre elles (Boverie et al., 2013). Le PST est composé de deux grands volets, un volet interne qui concerne

l'" administration générale » et un volet externe qui porte sur le " développement des

politiques » que l'autorité locale entend mener. Le volet interne vise l'amélioration de l'organisation de l'administration et de ses services communaux au profit des citoyens, des associations, des entreprises. En effet, la qualité du service public communal passe par la qualité de son personnel et de ses processus interne. Il peut couvrir différents domaines d'action dont les plus fréquemment rencontrés sont l'accessibilité de l'administration, la structure de pilotage de l'administration, la gestion des ressources humaines, la structuration des services, le fonctionnement propre à chaque service, les processus et la simplification administrative, la communication interne, la gestion du patrimoine, la gestion informatique ou encore les synergies entre les services. Le volet externe vise, quant à lui, le développement des politiques communales. La

commune étant une autorité publique, elle peut poser des actes d'autorité pour réaliser sa

politique dans un très grand nombre de domaines. Elle est dotée de pouvoirs réglementaires (ordonnances de police, règlements taxes...), elle gère l'octroi de permis (voiries, urbanisme, environnement...), elle pose des actes d'investisseur (création de crèches, logements, infrastructures sportives...) et elle soutient aussi les initiatives

citoyennes (subsides, primes, aides matérielles...). Il vise à préciser les différentes actions

que la commune entreprend dans tous les domaines de l'action communale. La commune peut également, dans ce volet externe, recourir à des partenariats (CPAS, zone de police, zone de secours, asbl, régie autonome,...), voire les réaliser dans un cadre transcommunal

(avec les autres communes, les intercommunales, la province, la région, la fédération

9

Wallonie-Bruxelles, le fédéral,...). Il concerne donc énormément de domaines d'action que

l'autonomie communale permet d'investir et dont les plus fréquents sont l'action sociale, l'aménagement du territoire, la culture, le développement économique, l'énergie, l'environnement, les programmes de coopération internationale, le logement, la mobilité, la propreté publique, la sécurité, le sport ou le tourisme.

Cette démarche réclame une très forte implication de la commune et doit être pilotée à tout

le moins par le bourgmestre et le directeur général, mais également par le comité de

direction. A cet égard, on signalera que c'est le décret wallon du 18 avril 2013 de

modernisation de la gouvernance locale (mieux connu sous le nom de "réforme des grades

légaux») qui a prévu, notamment, de doter les municipalités d'un comité de direction. Ce

comité assure un rôle de liaison très important entre les organes politiques, le système

administratif et les différents services de l'administration. Il veille à l'organisation, au

fonctionnement des services communaux et assure la transversalité et la communication

entre ceux-ci. Il est en général composé des grades légaux que sont le directeur général et

le directeur financier, des directeurs de département ou des chefs de service dans les

communes de grande et moyenne taille, voire les agents dans les communes de plus petite taille. Le décret susvisé le rend obligatoire pour les communes de plus de 10.000 habitants. Il est indispensable que le collège communal s'implique directement dans le PST et qu'il structure le pilotage opérationnel de celui-ci en le confiant au comité de direction. Notons, en outre, que le PST se décline dans le contrat d'objectifs qui lie le directeur

général au collège communal et qui fait également partie des nouvelles obligations

inhérentes au décret wallon du 18 avril 2013.

La procédure d'élaboration et de suivi du PST, issue du guide pratique élaboré par

l'UVCW et BSB Management Consulting peut être résumée comme suit :

Phase 1 : Constater (faire un état des lieux)

Phase 2 : Formuler les objectifs stratégiques

Phase 3 : Décliner les objectifs stratégiques en objectifs opérationnels Phase 4 : Construire les indicateurs de résultats des objectifs opérationnels

Phase 5 : Lister les actions

Phase 6 : Planifier la réalisation de son PST

10

Phase 7 : Actualiser et évaluer son PST

Il s'agit donc d'une démarche totalement novatrice au sein des communes wallonnes. C'est pourquoi le ministre en charge des pouvoirs locaux de l'époque a soutenu une phase-pilote qui s'échelonne sur toute la législature 2012-2018.

Se voulant un canevas souple et évolutif, susceptible de s'adapter au mieux à la réalité des

communes wallonnes, le PST aspire à la modernisation, voire, pour reprendre les mots du

ministre P. Furlan, à la " professionnalisation » de la gestion communale. Dans cette

optique, cet instrument a été conçu pour agir sur quatre niveaux : la transversalité, la

planification, la transparence et l'évaluation (Fallon et al., 2016).

Après cet éclairage succinct sur le projet de planification stratégique appliqué à l'action

publique locale wallonne, il convient de se pencher sur le cas particulier de la ville de Gembloux, désignée commune pilote à l'instar de vingt-trois autres communes.

Cette désignation fait suite à l'appel à candidatures lancé, en 2013, par le ministre des

pouvoirs locaux auquel la ville de Gembloux a répondu. Si au départ, cette nouvelle manière de travailler, basée sur la planification d'objectifs

stratégiques, déclinés en objectifs opérationnels et en actions, n'a pas enchanté toute

l'administration et a pu paraître assez difficile à intégrer, quelques agents particulièrement

impliqués, en collaboration avec le Bourgmestre, se sont très vite consacrés à la mise en

oeuvre de ce projet. La communication interne autour de ce projet d'un nouveau type a

provoqué une certaine méfiance et un certain degré d'angoisse au sein du personnel

communal, d'aucuns craignant le surcroît de travail engendré, ou encore, la mise en place

d'un outil destiné à contrôler le travail accompli. Aussi, très rapidement, le Bourgmestre a

souhaité associer l'ensemble du personnel afin de garantir son adhésion à la démarche tout

en démystifiant le projet. A cet effet, il a organisé, en juin 2013 une réunion de

présentation générale.

L'ampleur de la tâche et la nécessité de faire adhérer toutes les composantes de la

commune à cette démarche, tant au niveau politique qu'administratif, ont rapidement

poussé la ville à se faire accompagner d'un bureau de consultance pour l'aider à dégager et

structurer les idées clés utiles à la rédaction du PST. Le résultat de cette analyse, combiné à

l'analyse des documents, des plans existants, des sources d'informations externes et de la

déclaration de politique générale de la législature 2012-2018, ont abouti à la rédaction du

PST de la ville de Gembloux. Celui-ci comporte vingt objectifs stratégiques, déclinés en 11 cinquante-cinq objectifs opérationnels et une liste de cent cinquante-deux actions à mettre

en oeuvre, tous articulés autour des quatre grands thèmes issus de la déclaration de

politique générale de cette mandature, à savoir : " Gembloux une ville, conviviale,

dynamique, solidaire et durable ». Toutes ces différentes étapes ont abouti à l'approbation du PST par le Conseil communal de la ville de Gembloux le 5 février 2014. Dès sa mise en oeuvre, les premières difficultés sont rapidement apparues. Dans le chef de

certains agents, de gros problèmes d'appropriation de la démarche ont pu être constatés. La

rédaction des fiches actions relatives aux projets récurrents et/ou annuels a également

provoqué beaucoup de questionnement, notamment en ce qui concerne la fixation de

l'indice de progression. En outre, il a été constaté que sans rappel régulier, les agents n'ont

pas forcément encore bien intégré la rédaction des fiches dans leur travail quotidien. Plus

problématique encore, une minorité s'en est volontairement désintéressée. Pour tenter de

répondre à ces difficultés, un membre du comité de direction ainsi que le cabinet du

Bourgmestre ont été à l'initiative de rencontres formatives, par pôle, afin de préciser la

démarche et de rappeler la nécessité de mise à jour régulière des fiches. Par la suite, le

cabinet a procédé, de manière spontanée et régulière, à des "coups de sonde» au travers du

PST, l'amenant à effectuer plusieurs rappels spécifiques sur base de ses observations.

À ce jour, le PST de la ville de Gembloux est toujours en cours de réalisation et les

difficultés exprimées ci-dessus sont toujours d'actualité.

1.3. Le PST, pour quelle légitimité ?

D'après Meyer et Rowan (cités par Rouleau, 2007), les structures, les règles et les

procédures organisationnelles véhiculent un ensemble de croyances. Ils démontrent que les structures formelles ont des dimensions symboliques. Pour eux, l'adoption de règles et de

procédures n'est pas toujours que rationnelle et cède souvent à l'attrait des " mythes

rationalisés » véhiculés à leur endroit. Ils définissent le mythe rationalisé comme une

croyance en l'efficacité d'une règle, d'une procédure ou d'une technique. Pour illustrer ce propos, ils signalent qu'en adoptant par exemple des pratiques de certification ou de

participation à un réseau, c'est moins l'efficacité qui est visée que la recherche de

légitimité vis-à-vis des acteurs externes. Selon eux, les entreprises qui adoptent de telles

pratiques espèrent surtout augmenter leur légitimité auprès de leur clientèle en offrant des

produits et des services dont la qualité est reconnue par des organismes externes de 12

contrôle de la qualité. En adoptant des règles et des procédures qui sont prétendument

efficaces et rationnelles, les organisations augmentent leur légitimité et assurent ainsi leur survie. Vu sous cet angle, on peut considérer que l'adoption du PST, n'est pas le résultat d'un choix rationnel reposant sur la certitude de l'efficacité de cet outil, mais la conséquence du besoin de se conformer à ce que le public cible des administrations locales attend d'elles. Le ministre des pouvoirs locaux disait d'ailleurs en 2011 : " Le temps est désormais venu, pour nos villes et communes de prendre le train de la modernité en marche et de penser, d'agir et de servir le citoyen en parfaite concordance avec la mentalité du XXI e siècle. » et

d'ajouter " les pouvoirs locaux trouveraient un réel intérêt à s'inspirer des techniques de

gestion du secteur privé », afin dit-il, " de professionnaliser la gestion communale, tout du moins, pour ce qui concerne la planification ».

La notion de légitimité est un élément central de la théorie néo-institutionnelle. Elle dépend

de la capacité des structures de l'organisation à se conformer à leur environnement

institutionnel. Ainsi, certaines caractéristiques structurelles, comme la bureaucratie dans le secteur public, deviennent des standards institutionnalisés en fonction desquels les

organisations sont jugées, ce qui leur assure alors la légitimité sociale requise pour

continuer à utiliser les ressources telles que les subsides publics. Cette légitimité sociale est

un apport très important à la théorie et peut être considéré comme faisant partie du

processus de transformation organisationnel au même titre que les matières premières et les autres ressources. Dans le cas de la ville de Gembloux, qui s'est portée candidate pour ce projet pilote que constitue le PST, il me semble que le même raisonnement peut être appliqué, avec en plus

un effet d'opportunité. En effet, la majorité politique actuelle, en place à la ville de

Gembloux, se veut avant-gardiste et essaye d'être à la pointe de toutes les nouveautés en

matière de gestion de l'administration et de service aux citoyens, tout en gardant un

contrôle stricte du budget communal. Elle a donc saisi l'opportunité qui s'est présentée d'adopter ce nouvel outil de gestion, se conformant ainsi à une certaine attente des citoyens

de voir leur commune se doter d'un outil de gestion dont l'efficacité n'est plus à démontrer

dans le secteur privé. L'adoption du PST par la ville de Gembloux semble être un facteur de légitimation de l'action politique dans un cadre structuré autour d'objectifs pour lesquels un résultat est 13 attendu et dont les citoyens ne remettront pas en cause le bienfondé car comme le disait

Meyer et Rowan (cité par Hatch, 2009), les mythes rationalisés ne sont jamais testés

objectivement parce que chacun les tient pour vrais. On peut donc considérer, que l'adoption d'une telle pratique par la ville de Gembloux

permet d'augmenter sa légitimité auprès des citoyens gembloutois. Il m'est cependant

difficile de savoir si cette adhésion au PST par la ville de Gembloux relève d'un choix

conscient ou inconscient de la réalité de ce mythe rationalisé. S'agissant d'assurer la survie

de l'institution, je ne pense pas que celle-ci puisse être remise en cause, néanmoins cette

perspective renforce utilement la légitimité sociale de ce niveau de pouvoir et donc

probablement sa " survie ».

1.4. Le PST, signe d'homogénéisation ?

En outre, si l'on considère le processus d'institutionnalisation à partir de la définition qu'en

donne Scott (cité par Hatch, 2009), qui parle de la répétition de certaines actions, on

constate que les raisons de cette répétition des actions peuvent être de trois ordres. Parfois

les actions sont répétées parce que des règles explicites et de lois existent précisément pour

s'en assurer (influences juridiques et politiques). Parfois, les modèles d'activités sont

soutenus par des normes, valeurs et attentes (influences culturelles) et enfin, parfois, par lequotesdbs_dbs42.pdfusesText_42
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