[PDF] Le refus de transfusion sanguine en réanimation Refusal of blood





Previous PDF Next PDF



Alternatives médicales à la transfusion de sang. Pratiques. Efficaces

eviter la transfusion sanguine. «Les m. ´ edecins devraient s'efforcer de r. ´ eduire au minimum les pertes sanguines sachant que s'abstenir.



Options alternatives à la transfusion homologue : résultats français

la transfusion sanguine Organisation mondiale de la Santé



Transfusion de globules rouges homologues : produits indications

Techniques alternatives possibles à la transfusion sanguine et indications . Une alternative au support transfusionnel est possible selon les modalités ...



Transfusion sanguine homologue en urgence : concentrés de

TRANSFUSION SANGUINE HOMOLOGUE EN URGENCE : CONCENTRÉS DE GLOBULES patient qu'il n'y ait aucun alternative thérapeutique



Dépliant Transfusion.indd

Une transfusion sanguine est proposée en cas d'anémie c'est-à-dire un manque n'y a pas d'alternative



Lutilisation clinique du sang

5 La mesure dans laquelle le sang et les produits sanguins ne sont prescrits que lorsqu'il n'existe aucune alternative à la transfusion pour le patient 



Le refus de transfusion sanguine en réanimation Refusal of blood

However despite hemoglobin substitutes will be the ultimate solution to this problem



INFORMATION SUR LA TRANSFUSION SANGUINE

Si votre état de santé nécessite sans autre alternative



TRANSFUSION DE PLASMA THÉRAPEUTIQUE : PRODUITS

établissement de transfusion sanguine être gérée de manière pluridisciplinaire pour choisir une thérapeutique alternative en cas de situation clinique.



Le refus du patient témoin de Jéhovah

https://sofia.medicalistes.fr/spip/IMG/pdf/le_refus_du_patient_temoin_de_jehovah_de_subir_une_transfusion_sanguine.pdf



Blood and blood transfusion - SlideShare

Transfusion alternatives for patients who refuse blood components and products This leaflet explains alternatives to blood transfusion available at St George’s University Hospitals NHS Foundation Trust If you have any further questions please speak to a doctor nurse or midwife caring for you



Sanguine: Visual Analysis for Patient Blood Management

AnalyzeSanguine a novel data visualization tool prototype for PBM in complex cardiothoracic surgery Evaluate howSanguinecan rapidly demonstrate PBM performance in context Consider howSanguinecan be used to generate “patients like mine” Defining PBM Rationally optimizing anemia and hemostasis Goal of “restricting” blood utilization



Alternatives and adjuncts to blood transfusion

Transfusion alternatives were mostly developed to reduce blood use in surgery but have much wider application They are most effective when used in combination and as part of a comprehensive patient blood management programme



Alternatives to blood transfusion - Transfusion Guidelines

Alternatives to blood transfusion for MDS patients • EPO – Low risk patients with MDS(check erythropoietin level) – EPO +GCSF for patient with RARS • Oral lenalidomide for patients with 5q-syndrome (transfusion dependant) • Azacitidine – SC for patients with High Risk MDS – Oral Aza trial for transfusion dependant patients with



Searches related to alternative transfusion sanguine PDF

epargne sanguine(p ex hypotensioninduitepositionnement dupatient sur la table op ´ eratoirenormothermie) Techniquesmini-invasives(p ex radiochirurgie laparoscopiquecœlioscopique ou st ´ er ´ eotaxique) Embolisation art ´ erielle S’assurerde l’accorddupatient Gestion perop ´ eratoire

What is alternative blood transfusion?

ALTERNATIVESTO BLOOD TRANSFUSION ? These are other options of blood transfusion. sometimes blood substitute or patient’s own blood is collected & later rein fused subsequently to replace lost circulating volume. ? Reasons for an alternative blood transfusion; 1.

How effective is blood transfusion reduction in anaemic surgical patients?

effective than no intervention in reducing blood transfusion requirements in anaemic surgical patients (£166 less per patient, 59% reduction in proportion receiving blood transfusion). This analysis was assessed as partially applicable with potential serious limitations.

What is the confidence interval for Blood Transfusion alternatives?

(b) Confidence interval crosses both default MIDs (0.75 and 1.25) and line of no effect Transfusion Alternatives to blood transfusion for patients having surgery: Oral iron, IV iron and erythropoietin National Clinical Guideline Centre, 2015

What is a blood transfusion used to treat?

A blood transfusion can be used to treat this by increasing your haemoglobin with a bag of red blood cells from a blood donor. There are currently no alternatives to transfusion of red blood cells that can improve the oxygenation of blood.

Le refus de transfusion sanguine en réanimation Refusal of blood

Rapport d"expert

Le refus de transfusion sanguine en réanimation

Refusal of blood transfusion in intensive care

F. Lemaire

Service de réanimation médicale, hôpital Henri-Mondor, 94010 Créteil, France Reçu le 23 août 2003 ; accepté le 29 septembre 2003

Résumé

Il n"y a pas de geste plus banal en réanimation que la transfusion d"érythrocytes. LesTémoins de Jéhovah (TJ) la refusent, l"interdiction de

la transfusion sanguine étant centrale dans leur doctrine. Les besoins de transfusion ont été récemment revus à la baisse en réanimation, à la

suite de l"étude de Paul Hébert publiée en 1999 dans leNew England Journal of Medicine. Même si l"avenir de la transfusion est clairement

dominé par l"emploi des substituts de l"hémoglobine, il faut insister sur ce qu"aucun de ces produits ne peut aujourd"hui être utilisé en routine

pour traiter une anémie aiguë. Il existe certainement une tendance en France depuis quelques années à exiger que les médecins obtiennent le

consentement des patients avant de les traiter. Cette obligation du respect de leur volonté est inscrite dans la loi " soins palliatifs » de 1999 et

des médecins qu"ils laissent mourir des TJ en " risque vital » sans les transfuser. Même si pour l"instant la juridiction administrative à son

échelon le plus élevé (le Conseil d"État) semble avoir " rectifié » la loi, le dilemme éthique reste insoluble pour les réanimateurs confrontés à

ce problème : sauver la vie de ces patients au prix de leur espoir de vie éternelle, ou respecter leur volonté et laisser mourir des malades

aisément guérissables...

© 2003 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Red cell transfusion is commonplace in the ICU. Jehovah witnesses refuse it because they believe it will jeopardize their eternal life. In the

intensive care setting, Paul Hebert et al. have recently shown that patients"survival was better when the hemoglobin content was 7 g/dl instead

of 11 g/dl. Since, blood transfusion needs in the ICU have been globally re-evaluated. However, despite hemoglobin substitutes will be the

ultimate solution to this problem, there is currently no alternatives for red blood cells transfusion in the case of acute anemia. In France, recent

laws (in 1999 and more recently in 2002) have reinforced the obligation for physicians to respect their patients"will, including the refusal of

care, should death ensue. But in courts"decisions filed last summer, the judges of the higher court (Conseil d"Etat) confirmed the obligation of

physicians to save their patients"life.The ethical dilemma still persists: ICU physicians have the uncomfortable choice between obeying their

patients"will and letting them die, or saving their lives but putting at risk their hope of eternal life.

© 2003 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.1. Introduction

Il n"y a pas de geste plus banal en réanimation que la transfusion d"érythrocytes, même si ses indications et son innocuité sont aujourd"hui réévaluées. LesTémoins de Jého- vah (TJ) la refusent, l"interdiction de la transfusion sanguine étant centrale dans leur doctrine. Les médecins, au nom du

respect qu"ils doivent à la volonté de leurs patients (leur" autonomie »), sont maintenant sommés de les laisser mou-

rir d"anémie aiguë si la situation se présente à eux. Le refusent-ils qu"on les accuse alors du paternalisme le plus rétrograde, de l"exercice abusif d"un " pouvoir médical » devenu bien archaïque.

1991 à 242 réanimateurs, membres de la Société européenne

envers ce refus de soins bien particulier, la transfusion san-

guine, était variable selon les pays, avec un net gradientAdresse e-mail :francois.lemaire@hmn.ap-hop-paris.fr (F. Lemaire).Réanimation 12 (2003) 610-614www.elsevier.com/locate/reaurg

© 2003 Société de réanimation de langue française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.

doi:10.1016/j.reaurg.2003.09.015 tranchée du non respect de la volonté des patients dans ce domaine est la plus forte. La position de la justice est égale- ment particulière : alors qu"aux États-Unis, par exemple, les juges donnent systématiquement raison aux TJ contre les médecins[2], la situation en France est globalement inverse. Nous verrons que le mouvement récent du Conseil d"État appelant les médecins à manifester plus d"égard pour la et ne reflète probablement pas une évolution majeure de la jurisprudence.

2. Le besoin de transfusion de globules rouges en

réanimation Toute réflexion sur ce sujet devrait commencer par un exercice de contrition. Les réanimateurs ont par le passé accordé trop peu d"im- portance aux saignées qu"ils imposaient à leurs patients, ils vraisemblablement transfusé en excès, sans discernement ni réflexion spécifique. Les accidents des transfusions (devenus rares, tout de même), le désastre de la transmission transfu- sionnelle du sida dans les années 1980, l"inefficacité de nombre de ces transfusions pourtant répétées, quelques pro- cès intentés par des Témoins de Jéhovah transfusés contre leur gré n"ont pas véritablement transformé cet état d"esprit. medicine » oblige, qu"il faut attribuer un revirement dans les attitudes des réanimateurs, sinon dans leurs comportements. Cet essai multicentrique randomisé avait montré que la mor- talité d"un groupe de 418 patients de réanimation transfusés de façon " restrictive » (7 g/dL) était inférieure (22 vs 28 %) à celle de 420 patients transfusés de façon " libérale » (12 g/dL). La réflexion sur le bénéfice des transfusions en réanimation s"est depuis étendue, avec la constatation trou- blante de J.-L Vincent et al. d"une plus grande mortalité des patients de réanimation transfusés part rapport à ceux qui ne l"ont pas été, à gravité équivalente[4].

2.1. Les prélèvements sanguins au cours du séjour en

réanimation La saignée en réanimation est quotidienne, obligatoire, et massive.Y concourent le besoin légitime de suivre de façon rapprochée les constantes biologiques de patients instables, la faible pénétration des méthodes de microdosage en réani- mation adulte et sans doute la facilité d"utilisation des cathé- ters en place, notamment dans les artères. Vincent et al.[4] ont suivi 1136 patients dans 145 services de réanimation européens pendant 28 jours. La ponction sanguine quoti- dienne et moyenne de ces patients était de 40 ml de sang. Quarante-six pour cent de ces patients avaient cinq ou plus prélèvements par jour. Il y a plus de 15 ans, Smaller et

Kruskell avaient rapporté des chiffres similaires : un litre desang était en moyenne soustrait lors d"un séjour en réanima-

tion de 20 jours. Une réflexion site par site devrait permettre de réduire ce " vampirisme médical ».

2.2. Revue à la baisse de l'hématocrite " optimal »

Nous avons vu que les patients les plus transfusés avaient dans l"étude canadienne une mortalité supérieure à ceux qui l"étaient moins. Il est possible que cette étude, abondamment présentée et commentée dans les revues et les congrès médi- caux, ait modifié les comportements des réanimateurs. de 1999, montre que le seuil à partir duquel les malades sont transfusés n"est plus que de 8,5 g/dL.

2.3. Les alternatives

Même si plusieurs dérivés ou équivalents de l"hémoglo- bine sont aujourd"hui testés, il n"y a aujourd"hui en France aucun substitut sanguin disponible lors des soins courants, hors essai thérapeutique. Quelques cas cliniques de traitement " héroïque » d"ané- mie grave sans transfusion ont été publiés. Pivalizza et al.[5] rapportent le cas d"un patient TJ chez qui une splénectomie (d"une rate lymphomateuse de 2,8 kg) a été réalisée malgré un hématocrite de départ de 16 % (5,3 g/dL). Gannon et Napolitano[6]rapportent le traitement compassionnel d"une hémorragie digestive aiguë chez un TJ par une hémoglobine bovine (HBOC-201) et des fortes doses d"érythropoïétine humaine recombinante. La survie de ce patient malgré un taux d"hémoglobine à 3,5 g/dL est certainement spectacu- laire. Mullon et al.[7]ont rapporté l"histoire également dramatique d"une patiente TJ âgée de 21 ans porteuse d"une anémie hémolytique auto-immune sévère. Seule l"adminis- tration de la même solution d"hémoglobine bovine HBOC-

201, administrée à titre compassionnel, a permis la survie

malgré une anémie aiguë avec un hématocrite à 4,4 %. Ces cas cliniques, pour isolés qu"ils soient, sont promet- teurs et ce sont bien les substituts du sang qui apporteront in fine la solution de cette situation insupportable aussi bien pour les patients TJ que pour les équipes médicales. De nombreux substituts du sang sont en développement actuel- lement, y compris dans des essais de phase III. Mais, pour l"instant, aucun de ces produits n"a encore apporté la preuve de son efficacité ni surtout de sa sécurité. Pire, un des essais les plus prometteurs, l"essai Baxter[8]testant une solution d"hémoglobine (DLCHb), a été interrompu en raison d"une surmortalité majeure dans le bras " nouveau traitement ». En résumé, on ne peut que constater aujourd"hui une baisse importante des indications et des seuils de la transfu- sion de globules rouges. Les stratégies d"épargne sanguine et la mise à disposition de substituts du sang dans un avenir prochain changeront sans nul doute les données de ce di- lemme médical. Mais il faut aussi répéter qu"aucune de ces solutions ne s"applique aujourd"hui, et qu"en face d"une anémie aiguë menaçant le pronostic vital la transfusion de globules rouges reste le dernier recours.

611F. Lemaire / Réanimation 12 (2003) 610-614

3. L'évolution récente de la jurisprudence française

Il s"agit là d"un domaine complexe, évolutif, mêlant mé- decine, éthique, droit et justice. Jusqu"ici, la situation était relativement simple : les méde- cins devaient certes tenir compte de la volonté de patients ils pouvaient passer outre si la vie de ces derniers était en danger. La cour administrative d"appel de Paris avait ainsi refusé de condamner en 1998 l"Assistance publique-Hôpitaux de Paris pour avoir transfusé Mr S..., TJ, soigné et décédé à fisance rénale aiguë avec une anémie profonde, confirmant en cela la décision de première instance. La cour s"était fondée sur ce que : " ... l"obligation faite au médecin de toujours respecter la volonté du malade en l"état de l"expri- mer ...trouve sa limite dans l"obligation qu"il a également, conformément à la finalité même de son activité, de protéger la santé, c"est-à-dire en dernier ressort, la vie elle-même de l"individu... ». Le Conseil d"État (CE), saisi à son tour, ne renversait pas ce jugement, mais le nuançait en octobre 2001 en posant " qu"il n"existe pas pour le médecin de hiérarchie abstraite et intangible entre l"obligation de soigner et la volonté du patient ». Par ailleurs, les juges du CE estimaient à leur tour que les médecins avaient choisi, compte tenu de la sévérité extrême dans laquelle se trouvait le patient, " ...dans le seul but de le sauver, un acte indispensable à sa survie et proportionnel à son état. ». Indiquons cependant que cette décision n"avait pas suivi les recommandations du commis- saire du gouvernement, Didier Chauvaux[9], maître des requêtes au CE, nettement plus " autonomistes » : " Les permettrait d"appliquer le traitement de force ... Leur devoir professionnel est seulement de tout faire pour obtenir le consentement aux soins ». À la crainte qu"expriment souvent les médecins d"être reconnus coupables de s"être abstenus d"intervenir, il est répondu par avance : " ...il ne leur a jamais été reproché de ne pas avoir exercé une contrainte sur leurs patients, ce qui leur était impossible juridiquement et maté- riellement ». Plus loin : " Nous croyons qu"on ne peut échapper à la conclusion qu"un refus opposé de manière ferme et constante par un patient en état de prendre une décision doit être respecté ...Il nous semble difficile de nier que la méconnaissance de la volonté du patient constitue une faute...»"Ilnous semble radicalement impossible de consi- se transformer en une obligation de les subir »[9]. La loi " droits des malades » de mars 2002 va renforcer l"obligation faite aux médecins de respecter la volonté de leurs patients:"Lemédecin doit respecter la volonté de la personne après l"avoir informée des conséquences de ses choix.Si la volonté de la personne de refuser ou d'inter- rompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter les

soins indispensables.Aucun acte médical ni aucun traite-ment ne peut être pratiqué sans le consentement libre et

éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment... » (Article L.1111-4). Quelques mois plus tard, au cours de l"été 2002, une requête était adressée au juge des référés du TA de Lyon par madame I.F. demandant d"enjoindre au CHU de Saint- Étienne de ne plus transfuser madameV.F, soeur de la requé- rante et TJ, hospitalisée en réanimation chirurgicale pour un traumatisme. Celle-ci avait été transfusée deux jours plus tôt, et était alors considérée par l"équipe médicale comme hors de danger. La requête s"appuyait sur l"article L 1111-4 du CSP (voir plus haut), mais aussi sur la convention euro- péenne de sauvegarde des droits de l"homme et des libertés fondamentales. Le juge des référés a enjoint au CHU de " s"abstenir de procéder à des transfusions sanguines sur la personne de madameV.F. » Mais il a ajouté que cette injonc- dans une situation extrême mettant en jeu son pronostic vital ». Le CE, également saisi en référé, a confirmé la décision des juges lyonnais, précisant en outre que les méde- cins devaient " tout mettre en oeuvre pour convaincre la patiente d"accepter les soins indispensables et devaient s"as- surer que le recours à la transfusion était un acte indispensa- ble à la survie de l"intéressée et proportionnée à son état ». Au même moment environ, une séquence identique se répétait au centre hospitalier de Valenciennes : une patiente, T.J. transfusée contre son gré, portait plainte en référé au TA de Lille et obtenait " l"injonction au CH de ne pas procéder à l"administration forcée de transfusion sanguine à madame C. contre son gré et à son insu ». La presse grand public (le Figaro : " Témoin de Jéhovah transfusé, hôpital condamné » malade ; la justice donne raison à une patiente TJ transfusée contre son gré... ») a vite salué une victoire du droit des patients contre le " pouvoir médical ». Maisàyregarder de plus près, il n"est pas sûr qu"il y ait là un véritable retourne- ment de la jurisprudence. En effet, les médecins et représen- tants de l"hôpital, absents à l"audience, n"ont pu faire état de l"urgence vitale, pourtant présente selon eux et qui nécessi- tait la transfusion (J.L. Chagnon, communication person- nelle). Or la décision de justice mentionne explicitement cette non démonstration de l"urgence vitale (" il n"est pas allégué par le défendeur que le refus de respecter la volonté de la patiente serait rendu nécessaire du fait d"un danger immédiat pour sa vie »). Notons aussi que le motif de ces deux dernières requêtes était différent des contentieux habi- tuels en matière de transfusion de TJ : c"est au nom de la violation d"une " liberté fondamentale » que les procédures ont été engagées, ouvrant d"ailleurs la porte à un possible recours devant la cour européenne des droits de l"homme [10]. Les commentaires sur cette série de jugements, qu"ils émanent de médecins, de juristes ou d"avocats, sont dans l"ensemble convergents : les médecins doivent certes tout faire pour convaincre leurs patients TJ, ne pas transfuser automatiquement et sans réelle nécessité, mais en présence

612F. Lemaire / Réanimation 12 (2003) 610-614

d"un risque vital, lorsque la transfusion est le dernier recours et représente le seul geste susceptible de sauver la vie du patient, le médecin retrouve alors son traditionnel pouvoir de décision. " On peut imaginer que tel n"était pas le souhait du législateur... » écrit Y. Lachaud[11]. Tout se passe en effet excès d"une loi qu"il estime pencher par trop en faveur du droit des malades...

4. Problèmes éthiques

circonstances extrêmes unTJ contre sa volonté peut se sentir assuré de la mansuétude des juges, les problèmes éthiques et moraux posés par le non respect du refus de soin ont-ils disparu pour autant ? Il est permis d"en douter, tant sont ici éloignés les deux points de vue et flagrant le conflit de valeurs :

4.1. Les médecins

Admettons le besoin de transfusion concentré sur celles qui sont véritablement " vitales », lorsque la vie du patient, indemne d"affection coronarienne, est en danger parce que bien de laisser mourir d"anémie aiguë ce patient dont on sait pourtant que la survie serait facilement assurée par quelques culots globulaires. Le problème n"est jamais posé aussi fran- chement. En particulier, la loi de mars 2002 demande certes au médecin de " tout mettre en oeuvre pour convaincre (son pas ce qu"il doit faire s"il n"y parvient pas. Faut-il rappeler pour débuter que si l"exercice de la méde- cine consiste à lutter contre la maladie et la mort, la mission même de la réanimation est bien le traitement et la sup- pléance des défaillances des grandes fonctions vitales, le transport de l"oxygène étant la première d"entre elles ? Sans nécessairement l"expliquer par la survivance d"un " pouvoir médical » aujourd"hui si vilipendé, la classique tradition paternaliste latine ou la persistance d"un " vitalisme » d"ins- piration catholique, il faut simplement reconnaître que de- mander aujourd"hui à un médecin français, qui plus est à un réanimateur, spécimen humain réputé actif, de regarder les bras croisés mourir son malade lui est proprement insuppor- table. On peut douter que cette situation changera dans un avenir proche. Mais si cela devait être, les médecins deman- deront sans doute que leur soit appliquée une clause de conscience, à l"instar de ce que le législateur Belge a prévu dans sa loi sur l"euthanasie. Le réanimateur appelé ainsi à respecter ce refus de trans- fusion n"a le plus souvent pas choisi de traiter ce malade particulier, et donc n"a pas eu la possibilité de prévoir à l"avance cette situation, de passer un contrat avec lui. Il en va

différemment dans la chirurgie élective, par exemple, quipermet au TJ lors des consultations préalables d"exposer sa

demande et au chirurgien de s"engager (ou non) à ne transfu- ser en aucun cas. Le réanimateur n"a pas cette possibilité, ni celle de transférer un malade qu"il ne peut ou ne veut pas soigner en conscience. Il est ainsi pris en otage d"une situa- tion qu"il n"aurait peut-être pas acceptée s"il avait pu la prévoir. La logique de l"acharnement a certes reculé en médecine dite intensive, et les réanimateurs ont appris à limiter ou à fin de vie, à introduire dans leur activité quotidienne des concepts de médecine palliative ; mais le consensus social — encore fragile d"ailleurs — limite ces pratiques aux échecs de la réanimation, lorsque justement celle-ci ne fait que reculer une mort devenue inévitable. La crainte du risque médicolégal joue sans doute un cer- tain rôle. S"il lui faut choisir, le non respect d"une liberté fondamentale paraît exposer le médecin transfuseur à une condamnation moins lourde que le " refus d"assistance à personne en danger »[12]. C"est par exemple le message qu"André Lienhart, responsable du groupe contentieux de la SFAR, passe aux anesthésistes-réanimateurs[13], lorsqu"il leur rappelle que l"abstention volontaire d"assistance à une personne en péril ne prévoit pas d"exception, fût-elle médi- cale, et peut valoir une peine de prison de cinq ans et une amende de 75 000 euros. Ce risque est cependant déclaré inexistant par D. Chauvaux etA. Garay, ce dernier renvoyant

à un arrêt " Gatineau » de 1973[10].

Les réanimateurs font aussi état de ce qu"ils ne communi- quent en fait que rarement directement avec leurs malades. Ceux-ci sont le plus souvent inconscients. Les interlocuteurs sont alors les membres de la famille ou plus souvent encore d"autres TJ, membres de la communauté. Ceux-ci sont vo- lontiers présentés comme envahissants, insistants, soupçon- neux, voire agressifs. Les médecins considèrent alors qu"ils n"ont pas à s"expliquer ou à se justifier devant eux, encore moins à obéir à leur volonté. La répugnance des médecins français à respecter la vo- lonté des TJ a sans doute d"autres racines, moins facilement reconnues : alors qu"aux États-Unis les sectes religieuses terre d"implantation des " vieilles » religions. Certes, en France, les TJ ne figurent pas sur la liste officielle des " sec- dère pas vraiment comme des chrétiens habituels. Profondé- ment, elle les croit influençables et manipulés, et le médecin qui refuse de respecter leur refus de la transfusion estime que ce refus de soin, au fond irrationnel (la Bible ne dit-elle pas qu"il est interdit demanger du sang, sans avoir expressément prévu la transfusion sanguine ?) n"est pas véritablement éclairé et peut donc ne pas être suivi. Ce refus des réanima- teurs à accéder aux demandes des TJ rejoint d"ailleurs plus généralement la réticence des personnels hospitaliers à ac- cepter ce qu"ils perçoivent comme une intrusion du religieux dans un univers fondamentalement laïque.

613F. Lemaire / Réanimation 12 (2003) 610-614

On voit que les raisons pour un réanimateur français de transfuser contre son gré un TJ, qu"on les trouve bonnes ou de refuser cette transfusion ne sont pas moins respectables.

4.2. Les Témoins de Jéhovah

Le refus de la transfusion sanguine est depuis 1945 un dogme fondateur, central et fédérateur desTJ. La transfusion d"érythrocytes menace leur espérance de vie éternelle. Très récemment encore, le TJ transfusé était exclu de sa commu- nauté, voire de sa famille. O. Muramoto[14]nous apprend qu"un certain adoucissement de cette politique est récem- ment survenu, et que la décision serait désormais plus indi- viduelle. Mais le point essentiel reste que, avec ou sans procédure d"exclusion, le Témoin de Jéhovah transfusé de- vient " impur », indigne d"accéder à la vie éternelle. Les médecins doivent comprendre que leTJ qui refuse une trans- c"est en connaissance de cause qu"il accepte de mourir plutôt soigner que les corps ? Et avez-vous oublié que la personne a une âme qui lui importe plus ? »[2]. Cette injonction de respecter la volonté du malade au prix de sa vie même est d"ailleurs celle qui vient d"être prise par le comité consultatif de bioéthique de Belgique[15]: " Dans le cas des Témoins de Jéhovah majeurs et capables en droit comme en fait, le médecin est obligé de respecter le refus d"une transfusion sanguine de nécessité, même si cela signifie le décès du patient. »

5. Conclusion

De plus en plus fréquemment confronté aux fins de vie dans les services de soins intensifs, le réanimateur a appris à ne pas s"acharner, à ne pas poursuivre mécaniquement une réanimation qui n"aboutirait qu"à une survie jugée commu- nément inacceptable. Aujourd"hui, cette qualité de vie que l"on décrète " inacceptable » le serait en raison de profonds handicaps résiduels, notamment neurologiques, ou de dou- leurs réfractaires. Il semble qu"il y ait aujourd"hui consensus sur la possibilité dans de tels cas d"interrompre la réanima- tion pour ne poursuivre que des soins " palliatifs ». Il ne me semble pas exclu que dans un avenir proche, de façon simi- laire, les réanimateurs assimilent la survie d"un TJ obtenue

parunetransfusion"forcée»àundecescasdesurvieauprixd"une qualité de vie inacceptable. Mais il faudrait pour cela

que celui qui décide si cette vie mérite ou non d"être sauvée soit le malade, et non plus son médecin.

Références

[1] Vincent JL. Transfusion in the exsanguinating Jehovah"sWitness- the attitude of intensive care doctors. European JAnaesthsiology 1991;8:

297-300.

[2] Knuti KA, Amrein P, Chabner B, Lynch T. Faith, identity and leukemia: when blood products are not an option. The oncologist

2003;7:371-80.

[3] Hebert PC, Wells G, Blajchman MA, Marshall J, Martin C, Pagliar- ello G, Tweeddale M, Schweitzer I, Yetisir E, The Transfusion Requirements in Critical Care Investigators for the Canadian Critical Care Trials Group. A Multicenter, Randomized, Controlled Clinical Trial of Transfusion Requirements in Critical Care. N Engl J Med

1999;340(6):409-17.

[4] Vincent JL, Baron J-F, Reinhart K, Gattinoni L, Thijs L, Webb A, Meier-Hellmann A, Nollet G, Peres-Bota D, for the ABC Investiga- tors. Anemia and Blood Transfusion in Critically Ill Patients. Jama

2002;288(12):1499-507.

[5] Pivalizza EG, Tjia IM, Juneja HS, Cohen AM, Duke JH. Elective splenectomy in an anemic Jehovah Witness patient with cirrhosis.

AnesthAnalg 1998;87:529-30.

[6] Gannon JG, Napolitano LM. Severe anemia after gastrointestinal hemorrhage in a Jehovah"s Witness: New treatment strategies. Crit

Care Med 2002;30:1893-5.

[7] Mullon J, Giacoppe G, Clagett C, McCune D, Dillard T. Transfusions of Polymerized Bovine Hemoglobin in a Patient with SevereAutoim- mune HemolyticAnemia. N Engl J Med 2000;342(22):1638-43. [8] Sloan EP, Koenigsberg M, Gens D, Cipolle M, Runge J, Mallory MN, Rodman Jr G, for the Dclhb Traumatic Hemorrhagic Shock Study Group. Diaspirin Cross-Linked Hemoglobin (DCLHb) in the Treat- ment of Severe Traumatic Hemorrhagic Shock: A Randomized Con- trolled Efficacy Trial. Jama 1999;282(19):1857-64. [9] Chauvaux D. Transfusion contre la volonté du patient; CEAssemblée

26 octobre 2001. Revue de droit administratif Dalloz 2002:146-55.

[10] Garay A. La sauvegarde judiciaire de la liberté du malade : nouveau paradigme des relations médecins-malades en France ? La gazette du palais 2003:19-24. [11] Lachaud Y. Le droit au refus de soins après la loi du 4 mars 2002 : premières décisions de la juridiction administrative. La gazette du palais 2002:19-22. [12] Baranger D, Sicot C. Loi du 4 mars 2002 : transfusion sanguine et témoins de Jéhovah. Réanimation 2003;12:171-2. [13] LienhartA.Latransfusionsansconsentementencasd"urgencevitale: données récentes. 12 juin 2003. [14] Muramoto O. Bioetical aspects of the recent changes in the policy of refusal of bmood by Jehovah"Witnesses. British Medical Journal

2001;322:37-9.

[15] Comité consultatif de Bioéthique (Belgique). Avis n° 16 du 25 mars

2002 relatif au refus de transfusion sanguine par les Témoins de

Jéhovah. 10 juin 2003.614F. Lemaire / Réanimation 12 (2003) 610-614quotesdbs_dbs33.pdfusesText_39
[PDF] refus de transfusion sanguine

[PDF] témoins de jéhovah transfusion sanguine jurisprudence

[PDF] expression écrite 9eme année module 3

[PDF] module lectures inoubliables 8ème année

[PDF] module de consolidation des prérequis 9ème

[PDF] le nouveau statut general des militaires

[PDF] la discipline faisant la force principale des armées il importe

[PDF] devoir de désobéissance militaire

[PDF] principe de précaution

[PDF] la peste orphée et eurydice commentaire

[PDF] sujet d'invention portrait d'un personnage

[PDF] économie politique définition

[PDF] economie politique pdf

[PDF] l'objet de l'économie politique

[PDF] citation argumentation bac francais